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26/10/2018 | FRANCE | N°18NT00317

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 26 octobre 2018, 18NT00317


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 21 décembre 2016 par lequel le préfet du Loiret lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé l'Angola, ou tout autre pays où il établirait être légalement admissible, comme pays de renvoi.

Par un jugement n° 1700864 du 13 mai 2017, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :



Par une requête, enregistrée le 24 janvier 2018, M. C...B..., représenté par Me D..., demande ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 21 décembre 2016 par lequel le préfet du Loiret lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé l'Angola, ou tout autre pays où il établirait être légalement admissible, comme pays de renvoi.

Par un jugement n° 1700864 du 13 mai 2017, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 24 janvier 2018, M. C...B..., représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 10 février 2017 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 21 décembre 2016 ;

3°) d'enjoindre, sous astreinte, au préfet du Loiret de lui délivrer un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", ou subsidiairement, de reprendre l'instruction de son dossier, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

­ En s'en remettant à l'avis du médecin de l'agence régionale de santé, le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation au regard des dispositions du 11° de l'article L.313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et a entaché sa décision d'incompétence ;

­ la décision contestée méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation dès lors que, compte tenu de son passé en Angola qui est à l'origine de ses problèmes de santé, il ne peut se faire soigner dans son pays d'origine alors que le défaut de soins risque d'entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité ;

­ la décision contestée méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il réside sur le territoire français depuis 2000 et que ses attaches sont désormais en France ;

- l'illégalité de la décision de refus de séjour entraîne celle de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 septembre 2018, le préfet du Loiret conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 13 décembre 2017.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. A...'hirondel a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.B..., ressortissant angolais né le 7 mars 1959, relève appel du jugement du 10 février 2017, par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 décembre 2016 par lequel le préfet du Loiret lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays dont il a la nationalité, ou tout autre pays où il établirait être légalement admissible, comme pays de renvoi.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

S'agissant de la légalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :

2. En premier lieu, il résulte des énonciations de la décision contestée que, pour prendre sa décision, le préfet du Loiret a rappelé l'ensemble des considérations de fait concernant le requérant depuis son arrivée en France. Il a notamment rappelé qu'il avait sollicité, par un courrier du 24 mai 2012, la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade sur le fondement des dispositions du 11 °de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile mais que le médecin de l'agence régionale de santé avait estimé, dans son avis du 10 janvier 2013, confirmant au demeurant un de ses précédents avis qui a abouti le 8 juin 2009 à la prise d'un arrêté de refus de séjour portant obligation de quitter le territoire français dont la légalité a été confirmée par un jugement du tribunal administratif d'Orléans du 17 novembre 2009, que si le défaut de prise en charge de sa maladie pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il existait en Angola un traitement approprié et qu'il pouvait voyager sans risque vers son pays d'origine. Dans ces conditions, et ainsi que l'ont retenu à bon droit les premiers juges, le préfet doit être regardé comme s'étant approprié cet avis pour refuser le titre de séjour sur le fondement légal invoqué et n'a pas entaché, par suite, sa décision d'incompétence. Dans ces conditions, M. B...n'est pas fondé à soutenir que sa demande de titre de séjour en qualité d'étranger malade n'a pas fait l'objet d'un examen particulier de sa situation.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...) ".

4. La partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dont il peut bénéficier dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.

5. Par l'avis précité du 10 janvier 2013, le médecin de l'agence régionale de santé a estimé que l'état de santé de M. B...nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'un traitement approprié était disponible en Angola et que l'intéressé pouvait voyager sans risque vers ce pays. Il ressort des pièces du dossier que M. B...souffre de troubles anxio-dépressifs accompagnés de céphalées et de troubles sévères du sommeil, de maladies hémorroïdaires et d'une hypertension artérielle essentielle pour lesquels il bénéficie en France d'un accompagnement régulier par du personnel soignant et un traitement médicamenteux composé de psychotropes (anti dépresseurs hypnotiques et tranquillisants) et un traitement anti hypertensif. Si M. B...se réfère à une " analyse-pays " du 27 mars 2013 consacrée par l'organisation suisse d'aide aux réfugiés (OSAR) aux soins, notamment psychiatriques, en Angola, ce document mentionne l'existence d'un programme de santé mentale et la possibilité pour les médecins et le personnel soignant de prescrire, au niveau des soins primaires, des psychotropes. M. B...n'établit pas qu'il serait dans l'impossibilité de bénéficier en Angola de consultations régulières auprès de personnels de santé qualifiés. Ce document ne contient pas, par ailleurs, d'information sur la disponibilité dans ce pays des autres médicaments qui lui sont prescrits. Par suite, le rapport de l'OSAR ne suffit pas à infirmer l'avis du médecin de l'agence régionale de santé. Si le requérant soutient également que l'état de stress post-traumatique dont il souffre exclut tout retour en Angola, il n'est pas établi par les pièces du dossier que cette pathologie serait, comme il le soutient, en lien direct avec des violences qu'il aurait subies dans son pays d'origine alors que les récits sur les persécutions dont il aurait été victime et sur le décès de son épouse ont été jugés peu crédibles par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et par la Cour nationale du droit d'asile. Le requérant n'apporte devant la cour aucun autre élément de nature à établir ses craintes et, par suite, l'impossibilité de poursuivre son traitement dans son pays d'origine. Si M. B...entend se prévaloir des nouveaux certificats médicaux de son médecin traitant du 10 janvier 2018 selon lequel il souffre depuis mars 2017 d'une névralgie cervico-brachiale entraînant des douleurs chroniques difficiles à contrôler et susceptible de nécessiter une intervention chirurgicale et du 3 octobre 2018 exposant, en particulier, ses problèmes de santé depuis juin 2018, ces circonstances sont postérieures à la décision contestée. Dans ces conditions, le préfet du Loiret n'a pas méconnu, en refusant de délivrer un titre de séjour à M. B..., les dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. (...) ".

7. M. B...soutient que la décision du préfet du Loiret lui refusant la délivrance d'un titre de séjour méconnaît les dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en se prévalant de la durée de sa présence sur le territoire français et des liens amicaux qu'il y a noués. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé est célibataire et sans enfant, qu'il ne dispose d'aucun emploi alors qu'il est constant que des membres de sa famille sont encore présents en Angola. Si M. B... se prévaut d'une présence en France de seize ans à la date de la décision contestée, il a séjourné irrégulièrement sur le territoire français après s'être soustrait à trois reprises aux mesures d'éloignement prises à son encontre par le préfet du Loiret en décembre 2004, juin 2006 et juin 2009. M. B...n'établit pas, ainsi qu'il a été dit au point 5, que son état de santé ne pourrait pas être pris en charge dans son pays d'origine. Dans ces conditions, les circonstances alléguées par M. B...ne constituent pas, à elles-seules, des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels au sens de l'article L. 313-14 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Ainsi, le préfet du Loiret, après avoir recueilli l'avis de la commission du titre de séjour, n'a pas méconnu les dispositions de cet article, ni entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation ou d'erreur de droit en refusant de délivrer à M. B...un titre de séjour sur ce fondement.

S'agissant de la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

8. Compte tenu de ce qui a été dit ci-avant, M. B...n'est pas fondé à invoquer, par voie d'exception, l'illégalité de la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour pour contester la légalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

10. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M.B..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions de l'intéressé tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet du Loiret, sous astreinte, de lui délivrer une carte de séjour, doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions des articles L.761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, dans la présente instance, la somme que le conseil de M. B..., bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B...et au ministre de l'intérieur.

Une copie sera transmise pour information au préfet du Loiret.

Délibéré après l'audience du 9 octobre 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Pérez, président,

- Mme Brisson, président-assesseur,

- M.A...'hirondel, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 26 octobre 2018.

Le rapporteur,

M. E...Le président,

A. PEREZ

Le greffier,

K. BOURON

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 18NT00317


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NT00317
Date de la décision : 26/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. Michel LHIRONDEL
Rapporteur public ?: M. DERLANGE
Avocat(s) : SELARL DUPLANTIER MALLET GIRY ROUICHI

Origine de la décision
Date de l'import : 13/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2018-10-26;18nt00317 ?
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