Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société à responsabilité limitée (SARL) Ecurie de Bechereau a demandé au tribunal administratif d'Orléans de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2013 ainsi que la décharge des amendes qui lui ont été infligées.
Par un jugement n° 1503459 du 8 novembre 2016, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 2 janvier 2017, la SARL Ecurie de Bechereau, représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de faire droit à sa demande.
Elle soutient que :
- la procédure d'imposition méconnaît l'article L. 52 du livre des procédures fiscales dès lors qu'elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité qui a duré plus de trois mois ;
- l'instruction BOI-CF-PGR-20-30-20150204 précise que la méconnaissance de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales entraîne la nullité absolue et inconditionnelle des impositions, nullité qui ne peut être réparée dans le délai légal de prescription ;
- elle n'avait pas connaissance du fait qu'elle était redevable de la somme de 6 043,09 euros relative à la taxe sur la valeur ajoutée collectée au titre de l'année 2012 ;
- la condition relative au transport du bien hors de France à destination d'un Etat membre, nécessaire en matière de taxe sur la valeur ajoutée collectée sur les exportations, est remplie dès lors que l'adresse de l'acquéreur est justifiée ;
- elle justifie du bien-fondé de la taxe sur la valeur ajoutée déductible par la production d'une confirmation de commande ainsi que d'une facture d'Equip'horse d'un montant de 517,47 euros ;
- les dépenses correspondant aux factures des 13 avril 2011 et 21 avril 2011 de l'entreprise Hamel ont été engagées dans l'intérêt de la société en vue de la réhabilitation d'un logement pour les stagiaires au sein de l'écurie ;
- dès lors que seule la société est habilitée à organiser des compétitions officielles, elle est en droit de déduire la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux dépenses liées à l'organisation des épreuves équestres pour un montant de 27 125 euros ;
- elle demande la requalification des amendes qui lui ont été infligées sur le fondement de l'article 1840 J du code général des impôts en avertissement dès lors qu'elle ignorait la limite de paiement en espèces applicable.
Par un mémoire, enregistré le 9 mai 2017, le ministre chargé des finances conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens invoqués ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Malingue,
- les conclusions de M. Jouno, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La société à responsabilité limitée (SARL) Ecurie de Bechereau a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle, par proposition de rectification du 10 juillet 2014, des rectifications en matière de taxe sur la valeur ajoutée, de bénéfices agricoles et des amendes lui ont été notifiées. Après procédure contradictoire et avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires qui a examiné le litige en sa séance du 19 janvier 2015, les impositions supplémentaires et amendes résultant de ce contrôle ont été mises en recouvrement le 30 janvier 2015. Après le rejet, par décision du 4 septembre 2015, de sa réclamation préalable, la société a sollicité auprès du tribunal administratif d'Orléans la décharge de ces impositions et amendes. Elle relève appel du jugement du 8 novembre 2016 par lequel ce tribunal a rejeté sa demande.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. L'article L. 52 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable prévoit que : " I.- Sous peine de nullité de l'imposition, la vérification sur place des livres ou documents comptables ne peut s'étendre sur une durée supérieure à trois mois en ce qui concerne : /1° Les entreprises industrielles et commerciales ou les contribuables se livrant à une activité non commerciale dont le chiffre d'affaires ou le montant annuel des recettes brutes n'excède pas les limites prévues au I de l'article 302 septies A du code général des impôts ; / 2° Les contribuables se livrant à une activité agricole, lorsque le montant annuel des recettes brutes n'excède pas la limite prévue au b du II de l'article 69 du code général des impôts. (...) III. En cas de mise en oeuvre du I de l'article L. 47 A, le délai de trois mois prévu au I du présent article est suspendu jusqu'à la remise de la copie des fichiers des écritures comptables à l'administration. (...) ". L'article L. 47 A de ce même livre prévoit que " I.-Lorsque la comptabilité est tenue au moyen de systèmes informatisés, le contribuable satisfait à l'obligation de représentation des documents comptables mentionnés au premier alinéa de l'article 54 du code général des impôts en remettant au début des opérations de contrôle, sous forme dématérialisée répondant à des normes fixées par arrêté du ministre chargé du budget, une copie des fichiers des écritures comptables définies aux articles 420-1 et suivants du plan comptable général. (...). ".
3. Il ressort des mentions de la proposition de rectification du 10 juillet 2014 que la vérification de comptabilité de la SARL Ecurie de Bechereau s'est déroulée du 6 mars 2014 au 10 juin 2014 et des mentions, non contestées, du courrier du 1er avril 2014 que les copies des fichiers des écritures comptables de la société, telles que prévues au I de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales, ont été remises au vérificateur ce jour-là. En application des dispositions du III de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales, le délai de vérification sur place était suspendu jusqu'au 1er avril 2014. Compte tenu de cette suspension, en s'achevant le 10 juin 2014, la vérification sur place n'a pas excédé la durée de trois mois prévue par les dispositions citées au point 2 du présent arrêt. Par conséquent, la société n'est pas fondée à soutenir que la procédure d'imposition est irrégulière.
Sur le bien-fondé de l'imposition :
En ce qui concerne le rappel de 6 043,99 euros de taxe sur la valeur ajoutée collectée :
4. La SARL Ecurie de Bechereau ne conteste pas que les soldes des comptes 445710 et 445711 faisaient apparaître, au titre de l'année 2012, des soldes créditeurs respectivement de 600,93 euros et 5 442,16 euros et qu'elle n'avait pas régularisé cette taxe sur la valeur ajoutée collectée. Si elle soutient qu'elle n'avait pas connaissance de la nécessité de cette régularisation, cette circonstance est sans influence sur le bien-fondé de la rectification.
En ce qui concerne les rappels de 1 680 euros et 5 736 euros de taxe sur la valeur ajoutée collectée :
5. L'article 262 ter du code général des impôts prévoit que : " I. Sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée : / 1° Les livraisons de biens expédiés ou transportés sur le territoire d'un autre Etat membre de la Communauté européenne à destination d'un autre assujetti ou d'une personne morale non assujettie (...) ". Il résulte de ces dispositions que l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée des livraisons intracommunautaires de biens est notamment subordonnée à la condition, d'une part, que l'acquéreur de ces biens soit assujetti à cette taxe ou ait la qualité de personne morale non assujettie et ne bénéficiant pas dans l'Etat membre dans lequel elle est établie d'un régime dérogatoire l'autorisant à ne pas soumettre à la taxe sur la valeur ajoutée ses acquisitions intracommunautaires et, d'autre part, que le bien ait été expédié ou transporté hors de France par le vendeur, par l'acquéreur ou par un tiers pour leur compte, à destination d'un autre Etat membre.
6. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve au contribuable, il appartient au juge de l'impôt, au vu de l'instruction et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle, d'apprécier si la situation du contribuable entre dans le champ de l'assujettissement à l'impôt ou, le cas échéant, s'il remplit les conditions légales d'une exonération. S'agissant de la réalité de la livraison d'une marchandise sur le territoire d'un autre Etat membre de la Communauté européenne, pour l'application des dispositions précitées de l'article 262 ter du code général des impôts, seul le redevable de la taxe sur la valeur ajoutée est en mesure de produire les documents relatifs au transport de la marchandise, lorsqu'il l'a lui-même assuré, ou tout document de nature à justifier la livraison effective de la marchandise, lorsque le transport a été assuré par l'acquéreur.
7. L'administration fiscale a soumis à la taxe sur la valeur ajoutée au taux de 19,6 % les ventes de chevaux des 8 mars 2012 et 12 avril 2013 au motif qu'il n'était pas justifié de la sortie du territoire de ces chevaux. En se bornant à soutenir que l'acquéreur résidait bien à l'adresse néerlandaise figurant sur les factures de ces ventes, la SARL Ecurie de Bechereau, qui a prétendu lors de la vérification de comptabilité que le transport avait été assuré par l'acquéreur, n'apporte aucun élément de nature à justifier de la livraison effective des chevaux. Elle n'est, dès lors, pas fondée à soutenir que les conditions prévues par l'article 262 ter du code général des impôts pour bénéficier de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée sont remplies.
En ce qui concerne le rappel de taxe sur la valeur ajoutée déductible de 1 608,28 euros :
8. Si la SARL Ecurie de Bechereau produit une confirmation de commande du 2 septembre 2012 auprès de la société Equip'horse ainsi qu'une facture émanant de cette même société du 6 septembre 2012, ces éléments ne permettent pas de remettre en cause le bien-fondé du rappel de taxe sur la valeur ajoutée déductible de 75,89 euros dès lors qu'il n'est pas contesté que cette facture a fait l'objet d'une double comptabilisation aux comptes 6066000 et 4456600. La société requérante n'apporte, par ailleurs, aucun élément à l'appui de sa demande relative au rappel de 1 532,39 euros correspondant au devis Bricoman. Il suit de là qu'elle n'est pas fondée à contester le rappel de 1 608,28 euros qui lui a été notifié au motif qu'elle ne pouvait, en vertu du 2 du II de l'article 271 du code général des impôts, en l'absence de facture, exercer de droit à déduction de taxe sur la valeur ajoutée.
En ce qui concerne le rappel de taxe sur la valeur ajoutée déductible au titre des dépenses engagées dans un intérêt privé :
9. L'administration fiscale a remis en cause la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée figurant sur des factures dont elle a estimé que les dépenses n'avaient pas été engagées dans l'intérêt de la société, notamment deux factures des 13 et 21 avril 2011 émanant de l'entreprise Hamel de 573,76 euros et 631,23 euros. Si la société requérante soutient que ces dépenses ont été engagées en vue de la réhabilitation d'un logement pour les stagiaires au sein de l'écurie, elle ne produit, alors que ces factures portent le libellé " réhabilitation maison d'habitation ", aucun élément au soutien de ses affirmations. Dans ces conditions, elle ne remet pas en cause le bien-fondé de ce rappel établi au motif qu'en vertu de l'article 271 du code général des impôts, les biens grevés de la taxe sur la valeur ajoutée que la société entend déduire doivent être utilisés pour les besoins de ses opérations imposables.
En ce qui concerne les rappels de taxe sur la valeur ajoutée déductibles au titre des dépenses engagées à hauteur de 27 124,92 euros pour l'organisation de concours hippiques dénommés CSO, CSI et jumping de Bechereau :
10. L'administration fiscale a remis en cause la déduction de dépenses engagées pour l'organisation des concours hippiques CSO, CSI et jumping de Bechereau au motif que ces frais ne concernent pas l'activité de la société mais celle de l'association Ecurie de Bechereau. Si la société soutient que l'organisation de compétitions officielles, pour laquelle elle est seule habilitée, fait partie de son activité et que le rôle de l'association se limite à lui apporter un soutien, elle ne justifie pas, d'une part, de cette habilitation exclusive et, d'autre part, n'apporte aucune explication quant au fait qu'elle n'apparaît pas sur les documents publicitaires relatifs à ces événements et que seule l'association perçoit des subventions pour organiser des compétitions. Dans ces conditions, l'administration fiscale a pu, à bon droit, estimer que la taxe sur la valeur ajoutée au titre de ces dépenses n'était pas déductible.
En ce qui concerne les rectifications en matière de bénéfice agricole :
11. La SARL Ecurie de Becherau conteste ces rectifications sans toutefois assortir d'aucun moyen ses conclusions, qui, dans ces conditions, ne peuvent qu'être rejetées.
En ce qui concerne les amendes de 4 000 euros et 1 750 euros infligées sur le fondement de l'article 1840 J du code général des impôts :
12. En vertu de l'article 1840 J du code général des impôts, les infractions aux dispositions des articles L. 112-6 et L. 112-6-1 du code monétaire et financier sont passibles d'une amende. Dès lors que l'avertissement ne figure pas au nombre des sanctions prévues par ces dispositions, il n'entre donc pas dans l'office du juge de plein contentieux de faire droit à la demande de la SARL Ecurie de Bechereau de substituer à ces amendes un avertissement.
13. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Ecurie de Bechereau n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la SARL Ecurie de Bechereau est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée Ecurie de Bechereau et au ministre de l'action et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 13 septembre 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- M. Geffray, président-assesseur,
- Mme Malingue, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 4 octobre 2018.
Le rapporteur,
F. Malingue
Le président,
F. Bataille
Le greffier,
A. Rivoal
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°17NT00006
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