Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme D...ont demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler les arrêtés du 10 octobre 2016 du préfet du Cher portant refus de certificat de résidence algérien, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant leur pays de renvoi.
Par deux jugements, n° 1700075 et 1700076, du 13 avril 2017, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leurs demandes.
Procédure devant la cour :
I, Par une requête enregistrée le 6 octobre 2017, sous le n° 17NT03098, M. D..., représenté par MeF..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1700075 du tribunal administratif d'Orléans du 13 avril 2017 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 10 octobre 2016 le concernant ;
3°) d'enjoindre, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, au préfet du Cher de lui délivrer un certificat de résidence algérien portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, qui renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'arrêté contesté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation et d'une erreur de droit car si l'accord franco-algérien ne prévoit pas la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour au parent accompagnant un enfant mineur malade le préfet peut faire usage de son pouvoir discrétionnaire ;
- l'arrêté méconnaît les stipulations du 7ème alinéa de l'article 6 de l'accord franco-algérien et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'arrêté est contraire aux stipulations de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant dès lors qu'il ne pourrait bénéficier en Algérie d'un traitement et d'un suivi de même nature que ceux qu'il suit en France ;
- le préfet aurait dû saisir la commission du titre de séjour ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité du refus de certificat de résidence algérien.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 décembre 2017, le préfet du Cher conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. D... ne sont pas fondés.
M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 1er septembre 2017.
II, Par une requête enregistrée le 9 octobre 2017, sous le n° 17NT03101, Mme A... E...épouseD..., représentée par MeF..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1700076 du tribunal administratif d'Orléans du 13 avril 2017;
2°) d'annuler l'arrêté du 10 octobre 2016 la concernant ;
3°) d'enjoindre, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, au préfet du Cher de lui délivrer un certificat de résidence algérien portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, qui renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Elle soutient les mêmes moyens que son mari.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 décembre 2017, le préfet du Cher conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme D... ne sont pas fondés.
Mme D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 1er septembre 2017.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;
- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 modifié ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Giraud a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. et MmeD..., ressortissants algériens, relèvent appel des jugements du 13 avril 2017 par lesquels le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés du 10 octobre 2016 du préfet du Cher portant refus de certificat de résidence algérien, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant leur pays de renvoi. Ces deux requêtes présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt ;
2. En premier lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale " est délivré de plein droit : ( ...) 7° au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) ". Ces stipulations de l'accord franco-algérien ne prévoient pas la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour au parent accompagnant un enfant mineur malade. M. et MmeD..., dont le fils, Amdjed, âgé de 10 ans à la date des arrêtés, est atteint de cécité totale à la suite d'un glaucome congénital, ne sont dès lors pas fondés à soutenir que les arrêtés contestés seraient contraires au 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien. Ne remplissant pas les conditions, pour l'obtention de plein droit d'un titre de séjour, les requérants ne sont pas davantage fondés à soutenir que le préfet aurait dû réunir la commission du titre de séjour sur le fondement des articles L. 312-1 et L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
3. En deuxième lieu, les arrêtés contestés précisent que, dans le cadre de son pouvoir discrétionnaire, le préfet peut, au regard des éléments de la situation personnelle des intéressés, accorder un certificat de résidence à un algérien qui ne remplit pas les conditions prévues par l'accord franco-algérien pour se voir attribuer un titre de séjour de plein droit. Les requérants ne sont dès lors pas fondés à soutenir que le préfet aurait entaché son arrêté d'une erreur de droit.
4. En troisième lieu, M. D...est entré en France, selon ses allégations, le 7 août 2015 accompagné de son épouse et de leurs deux enfants nés respectivement les 15 janvier 2006 et 25 mai 2000. Pour justifier de leur insertion dans la société française, ils se prévalent uniquement de certificats de scolarité de leurs enfants et d'une attestation de bénévolat du président de la banque alimentaire du Cher. Par ailleurs, ni l'attestation du docteur Dutailly, pédiatre à Clermont-Ferrand, indiquant que l'enfant Amdjed nécessite une prise en charge dans un centre de rééducation pour déficients visuels, ni le courrier de l'Union du 9 novembre 2017, association d'établissements dans lesquels il est suivi, ni les autres documents se rapportant à la situation d'autres malvoyants en Algérie, ne permettent de considérer que cet enfant ne pourrait être suivi correctement dans ce pays, et y apprendre notamment le braille, alors que dans son avis du 15 juin 2016 le médecin de l'agence régionale de santé a estimé que ces soins étaient disponibles en Algérie. Il n'est pas établi enfin que la cellule familiale serait dans l'impossibilité de se reconstituer dans ce pays. Dans ces conditions, en refusant de délivrer un certificat de résidence algérien à M. et MmeD..., le préfet du Cher n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il n'a pas non plus commis d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de ses décisions sur la situation personnelle des intéressés.
5. En quatrième lieu, pour les raisons invoquées ci-dessus, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant ne peut qu'être écarté.
6. En dernier lieu, l'illégalité des décisions portant refus de certificat de résidence n'étant pas établie, le moyen tiré de ce que les décisions portant obligation de quitter le territoire français seraient dépourvues de base légale ne peut qu'être écarté.
7. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme D...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté leurs demandes.
Sur les conclusions à fin d'injonction, sous astreinte :
8. Le présent arrêt, qui rejette la requête de M. et MmeD..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions des intéressés tendant à ce qu'il soit enjoint, sous astreinte, au préfet du Cher de leur délivrer un certificat de résidence algérien ou, à titre subsidiaire, de réexaminer leurs demandes, doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
9. Les dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que le conseil de M. et Mme D...demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : Les requêtes de M. et Mme D...sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D..., à Mme D...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Une copie sera transmise au préfet du Cher.
Délibéré après l'audience du 11 septembre 2018 à laquelle siégeaient :
- M. Pérez, président de chambre,
- Mme Brisson, président-assesseur,
- M. Giraud, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 1er octobre 2018
Le rapporteur,
T. GIRAUDLe président,
A. PEREZ
Le greffier,
K. BOURON
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17NT03098,17NT3101