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25/06/2018 | FRANCE | N°17NT02837

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 25 juin 2018, 17NT02837


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... D...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 12 mars 2015 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a confirmé la décision du consul général de France à Annaba (Algérie) lui refusant la délivrance d'un visa de long séjour en qualité de visiteur.

Par un jugement n° 1503928 du 13 juillet 2017, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requ

te, enregistrée le 15 septembre 2017, et ses mémoires complémentaires enregistrés le 31 octobre ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... D...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 12 mars 2015 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a confirmé la décision du consul général de France à Annaba (Algérie) lui refusant la délivrance d'un visa de long séjour en qualité de visiteur.

Par un jugement n° 1503928 du 13 juillet 2017, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 15 septembre 2017, et ses mémoires complémentaires enregistrés le 31 octobre 2017, le 8 décembre 2017 et le 19 janvier 2018, Mme B...D..., représentée par MeE..., demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 13 juillet 2017 ;

2°) d'annuler la décision du 12 mars 2015 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a confirmé la décision du consul général de France à Annaba (Algérie) lui refusant la délivrance d'un visa de long séjour en qualité de visiteur.

3°) d'enjoindre à l'Etat de prendre une décision délivrant à Mme D...un visa d'entrée sous astreinte de 50 euros par jour de retard à défaut d'une exécution dans le délai de quinze jours à compter du jugement à intervenir.

4) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 3000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation concernant l'assurance maladie qu'elle a souscrite;

- la décision litigieuse est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; ses accueillants justifient de revenus stables et de conditions d'hébergement appropriés ; il n'y a pas de risque de détournement de visa ;

- elle est bien l'auteure de la requête introductive de première instance et sa demande est recevable à ce titre.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 octobre 2017, et son mémoire complémentaire enregistré le 15 janvier 2018, le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient que la demande présentée en première instance était irrecevable car introduit en fait par M. A...C...et qu'aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondée.

M. A...C...n'a pas été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle par une décision du 22 novembre 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Sacher.

1. Considérant que Mme D...relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 12 mars 2015 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a confirmé la décision du consul général de France à Annaba (Algérie) lui refusant la délivrance d'un visa de long séjour en qualité de visiteur.

Sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 431-4 du code de justice administrative : " Dans les affaires où ne s'appliquent pas les dispositions de l'article R. 431-2, les requêtes et les mémoires doivent être signés par leur auteur et, dans le cas d'une personne morale, par une personne justifiant de sa qualité pour agir " ;

3. Considérant que si le ministre soutient qu'un certain M. A...C...aurait introduit la requête en lieu et place de MmeD..., il ne le démontre pas ; que le simple fait qu'une demande de transmission de document émanerait d'une messagerie à ce nom ne prouve ni que le courriel, qui est bien signé du nom de la requérante, aurait été envoyé à l'insu de la requérante, ni que celle-ci ne serait pas l'auteure de la demande de première instance ; que, contrairement à ce que le ministre soutient, la demande de première instance est bien revêtue d'une signature ; que le ministre n'apporte pas la preuve que cette signature serait celle de M. A... C...et non celle de MmeD... ; qu'au surplus, certaines pièces produites en première instance concernent des documents personnels que seule MmeD... pouvait fournir ; que par suite, la fin de non-recevoir opposée par le ministre doit être écartée ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

4. Considérant qu'il ressort des écritures du ministre de l'intérieur que pour refuser le visa demandé par MmeD..., la décision litigieuse s'est fondée sur l'insuffisance des ressources de la requérante et des personnes accueillantes, l'incomplétude du dossier concernant l'assurance et le risque de détournement de l'objet du visa ;

5. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 7 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles : " ...a) les ressortissants algériens qui justifient de moyens d'existence suffisants et qui prennent l'engagement de n'exercer, en France, aucune activité professionnelle soumise à autorisation reçoivent (...) un certificat valable un an portant la mention "visiteur"(...) " ; qu'aux termes de l'article 9 du même accord : " (...) Pour être admis à entrer et séjourner plus de trois mois sur le territoire français au titre des articles (...) 7 (...), les ressortissants algériens doivent présenter un passeport en cours de validité et un visa de long séjour délivré par les autorités françaises. Ce visa de long séjour accompagné des pièces et documents justificatifs permet d'obtenir un certificat de résidence dont la durée de validité est fixée par les articles et titres mentionnés à l'alinéa précédent " ; que lorsqu'elle est saisie d'une demande tendant à la délivrance d'un visa de long séjour en qualité de visiteur, la commission peut légalement fonder sa décision de refus sur la circonstance que le demandeur ne justifie pas des moyens d'existence suffisants pour faire face aux dépenses de son séjour en France ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que si Mme D...ne justifie que d'un revenu mensuel de 215 euros, les parents installés en France de Mme D...disposent d'une pension annuelle d'environ 19 000 euros et d'une épargne financière de 7900 euros ; qu'ils s'engagent à l'héberger, à prendre en charge ses frais de séjour et de santé ; qu'il ressort également des pièces du dossier que son frère installé en France dispose d'un revenu d'environ 37 800 euros annuel et s'engage également à l'aider ; que ces liens familiaux sont, contrairement à ce qu'indique le ministre, établis par les pièces du dossier ; que le fait que la mère aurait eu sa fille à quinze ans selon les documents d'état-civil produits n'est pas, à lui seul, de nature à prouver leur caractère frauduleux ; que la requérante justifie par les documents émanant de son assurance, dont un document établi dés le 31 juillet 2014 préalablement au dépôt de son dossier ainsi qu'un tableau de remboursement et un courriel explicatif, que celle-ci permettait une couverture jusqu'à dix mille euros pour tout transport ou rapatriement en cas de maladie ou lésion et jusqu'à 30 000 euros concernant les frais médicaux ; qu'il suit de là qu'en se fondant sur l'insuffisance des ressources de Mme D...pour refuser le visa sollicité, la décision litigieuse est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et a méconnu les dispositions précitées ;

7. Considérant que Mme D...a vécu en France dix ans avant de s'installer en Algérie où elle vit depuis 1981, où se situe sa résidence principale et où résident ses enfants, dont les deux derniers étaient encore à sa charge à la date de la décision attaquée ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la demande de visa dissimulait un projet d'installation durable en France ; qu'il suit de là qu'en se fondant sur le risque de détournement de l'objet du visa, la décision attaquée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme D...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes, a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

9. Considérant que le présent arrêt implique, pour son exécution, qu'il soit enjoint, sous réserve d'un changement de circonstances de fait et de droit, au ministre de l'intérieur de délivrer de long séjour à Mme B...D...dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les frais d'instance :

10. Considérant qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de 1500 euros à Mme D...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n°1503928 du tribunal administratif de Nantes en date du 13 juillet 2017 et la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France du 12 mars 2015 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur de délivrer un visa de long séjour à Mme B...D...dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Mme B...D...la somme de 1500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... D... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 8 juin 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Lenoir, président de chambre,

- M. Mony, premier conseiller,

- M. Sacher, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 25 juin 2018.

Le rapporteur,

E. SACHERLe président,

H. LENOIR

Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17NT02837


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 17NT02837
Date de la décision : 25/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LENOIR
Rapporteur ?: M. Eric SACHER
Rapporteur public ?: M. DURUP de BALEINE
Avocat(s) : LE MERCIER

Origine de la décision
Date de l'import : 17/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2018-06-25;17nt02837 ?
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