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05/03/2018 | FRANCE | N°17NT00391

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 05 mars 2018, 17NT00391


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...D...a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 24 mars 2016 par lequel le préfet du Loiret lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 1601964 du 20 septembre 2016, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 30 janvier 2017, MmeD..., représent

ée par Me F..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...D...a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 24 mars 2016 par lequel le préfet du Loiret lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 1601964 du 20 septembre 2016, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 30 janvier 2017, MmeD..., représentée par Me F..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 20 septembre 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 24 mars 2016 ;

3°) d'enjoindre, sous astreinte, au préfet du Loiret de lui délivrer un titre de séjour mention " " vie privée et familiale " ou, subsidiairement de réexaminer sa demande de titre de séjour, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

En ce qui concerne la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :

­ cette décision est entachée d'un vice de procédure en l'absence de consultation, d'une part, de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, et d'autre part, de la commission du titre de séjour ;

­ elle a été prise en méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L.313-11 et de l'article L.313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales compte tenu de l'état de santé de son père qui nécessite que sa mère lui prodigue des soins quotidiens, de sorte qu'elle a elle-même vocation à demeurer auprès d'eux en France où résident également son frère et sa jeune soeur, laquelle a la nationalité française et de son intégration à travers son parcours scolaire ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- du fait de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour, celle portant obligation de quitter le territoire français devra être annulée pour défaut de base légale.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 mars 2017, le préfet du Loiret conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par Mme D...n'est fondé.

Mme D...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 décembre 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

­ le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

­ le code du travail ;

­ la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;

­ le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. A...'hirondel a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que Mme B...D..., née le 14 mai 1994 et de nationalité congolaise, relève appel du jugement du 20 septembre 2016 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 mars 2016 du préfet du Loiret refusant de lui délivrer un titre de séjour, assortissant ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel elle pourra être éloignée d'office à l'expiration de ce délai ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision portant refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R.311-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatif aux demandes de titre de séjour dans sa rédaction alors applicable : " La demande est présentée par l'intéressé dans les deux mois de son entrée en France. S'il y séjournait déjà, il présente sa demande : / (...) 4° Soit dans le courant des deux derniers mois précédant l'expiration de la carte de séjour dont il est titulaire, sauf s'il est titulaire du statut de résident de longue durée-UE accordé par la France en application des articles L. 314-8 et L. 314-8-2. / A l'échéance de ce délai et en l'absence de présentation de demande de renouvellement de sa carte de séjour, il justifie à nouveau des conditions requises pour l'entrée sur le territoire national lorsque la possession d'un visa est requise pour la première délivrance de la carte de séjour. (...) " ; qu'aux termes de l'article L.5221-2 du code du travail : " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : / 1° Les documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ; (...) " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que MmeD..., dont la situation administrative avait été régularisée, a été admise à séjourner en France en qualité d'étudiante ; qu'elle a été ainsi mise en possession d'une carte de séjour temporaire mention " Etudiant " valable du 21 août 2014 au 20 août 2015 ; qu'elle n'a sollicité que le 11 janvier 2016, soit plus de quatre mois après l'expiration de son titre de séjour, une carte de séjour en qualité de salarié ; que, dans ces conditions, faute d'avoir sollicité la délivrance d'un nouveau titre de séjour dans le délai imparti au 4° de l'article R.311-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, elle devait justifier à nouveau des conditions requises pour l'entrée sur le territoire national dont la délivrance d'un visa de long séjour conformément aux dispositions du 1° de l'article L.5221-2 du code du travail ; que, par suite, le préfet pouvait, sans entacher sa décision d'un vice de procédure, lui refuser, pour ce motif, la délivrance du titre de séjour en qualité de salarié sans consulter préalablement la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L.313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors applicable à la date de l'arrêté en litige : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

5. Considérant que Mme D...fait valoir être entrée précipitamment en France en août 2010 avec sa mère, MmeE..., son frère, Gaby, et sa demi-soeur, Estrella Kalunda, née en 2009 et dont le père a la nationalité française, pour fuir les persécutions dont sa famille a été victime dans son pays d'origine ; qu'elle indique, ensuite, avoir poursuivi, ainsi que son frère et sa demi-soeur, des études en France, lesquelles ont été sanctionnées par la délivrance, en juillet 2014, d'un baccalauréat professionnel et avoir une promesse d'embauche ; qu'elle soutient, enfin, avoir retrouvé son père, M. H... D..., titulaire, depuis le 5 septembre 2016, d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade et dont l'état de santé nécessite la présence à ses côtés de sa mère, laquelle peut également prétendre de plein droit à une carte de séjour en qualité de parent d'enfant français ; qu'il ressort, toutefois, des pièces du dossier que la demande d'asile déposée par la mère de l'intéressée a été définitivement rejetée par la Cour nationale du droit d'asile ; que la requérante ne fait, par ailleurs, état d'aucune circonstance particulière rendant impossible son retour en République démocratique du Congo ; qu'elle a, ainsi, vécu dans ce pays, où résident trois de ses autres frères et soeurs, jusqu'à son arrivée en France à l'âge de 16 ans ; que si, suite à sa demande, déposée le 15 mars 2013, elle a obtenu la régularisation de sa situation administrative, c'est afin de pouvoir poursuivre ses études en France, lesquelles doivent être regardée comme achevées à la date du dépôt de sa demande de titre de séjour en qualité de salarié ; qu'elle ne démontre pas l'existence de liens effectifs et réguliers avec son père dont elle était séparée depuis au moins 2010 et dont la vie commune n'a repris que depuis avril 2015, ni que l'état de santé de ce dernier rende indispensable sa présence à ses côtés ; que si l'intéressée s'est mariée le 4 février 2017 avec M.C..., dont elle attend un enfant, cette circonstance, postérieure à l'édiction de l'arrêté contesté, est sans influence sur sa légalité ; que, dans ces conditions, eu égard à la durée et aux conditions de son séjour en France, la décision de refus de séjour contestée ne peut être regardée comme ayant porté au droit de Mme D...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise ; que, par suite, cette décision n'a pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors applicable : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7." ;

7. Considérant que les circonstances de l'espèce, rappelées au point 5, ne permettent pas de caractériser des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels, au sens de ces dispositions ; que, dès lors, le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en refusant de régulariser la situation de la requérante à titre exceptionnel sur ce fondement ;

8. Considérant, en dernier lieu, que Mme D...n'étant pas en droit, eu égard à ce qui précède, d'obtenir de plein droit la délivrance d'un titre de séjour " vie privée et familiale ", le préfet du Loiret n'était pas tenu, avant de lui refuser ce titre, de saisir la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

9. Considérant que le refus de titre de séjour n'étant pas entaché d'illégalité, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision, présenté à l'appui des conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte et tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent, par voie de conséquence, qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...D...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Une copie sera transmise au préfet du Loiret.

Délibéré après l'audience du 13 février 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Pérez, président de chambre,

- M. Degommier, président-assesseur,

- M.A...'hirondel, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 5 mars 2018.

Le rapporteur,

M. G...Le président,

A. PEREZLe greffier,

S. BOYERE La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17NT00391


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 17NT00391
Date de la décision : 05/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. Michel LHIRONDEL
Rapporteur public ?: M. DERLANGE
Avocat(s) : SELARL DUPLANTIER MALLET GIRY ROUICHI

Origine de la décision
Date de l'import : 13/03/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2018-03-05;17nt00391 ?
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