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09/02/2018 | FRANCE | N°16NT00393

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 09 février 2018, 16NT00393


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'EARL A...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 12 mai 2014 de la commission des recours de la région Bretagne confirmant la sanction pécuniaire prononcée à son encontre le 26 novembre 2013 par le préfet des Côtes d'Armor.

Par un jugement n° 1403067 du 4 décembre 2015, le tribunal administratif de Rennes a fait droit à sa demande et annulé la décision contestée.

Procédure devant la cour :

Par un recours et un mémoire enregistrés les 5 février

et 14 septembre 2016 le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt demande à ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'EARL A...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 12 mai 2014 de la commission des recours de la région Bretagne confirmant la sanction pécuniaire prononcée à son encontre le 26 novembre 2013 par le préfet des Côtes d'Armor.

Par un jugement n° 1403067 du 4 décembre 2015, le tribunal administratif de Rennes a fait droit à sa demande et annulé la décision contestée.

Procédure devant la cour :

Par un recours et un mémoire enregistrés les 5 février et 14 septembre 2016 le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 4 décembre 2015 ;

2°) de rejeter la demande présentée par l'EARL A...devant le tribunal administratif de Rennes.

Il soutient que :

- en vertu des dispositions des articles L. 331-1-I et R. 331-1 du code rural et de la pêche maritime, relèvent du contrôle des structures agricoles les personnes qui participent aux travaux de façon effective et permanente ; que tel est le cas de l'EARLA..., détentrice d'une participation financière dans la SCEA du Merdy, qui participe effectivement à l'exploitation des unités de production de cette entreprise ;

- cette participation dépasse l'exécution d'une convention d'entraide dès lors que l'EARL A...est également gérante de la SCEA du Merdy ; c'est donc à tort que le tribunal a estimé que l'EARL A...n'était pas tenue de solliciter une autorisation d'exploiter et que la sanction financière prononcée à son encontre était dépourvue de fondement ;

- les autres moyens pourront être écartés par la voie de l'effet dévolutif : l'EARL A...a été régulièrement mise en demeure de régulariser sa situation, dès lors que la prise de participation financière qui lui était reprochée était accompagnée d'une exploitation effective ; il n'y a pas matière à substitution de motifs en l'espèce car la décision contestée de la commission de recours du 12 mai 2014 était fondée, notamment, sur le caractère effectif de la participation aux travaux de l'EARLA....

Par un mémoire enregistré le 27 avril 2016 l'EARLA..., représentée par Me D..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la substitution de motifs opérée par le ministre en appel, qui repose sur une cause juridique nouvelle, est irrecevable ;

- les moyens invoqués par le ministre chargé de l'agriculture ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Lemoine,

- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., représentant de l'EARLA....

Une note en délibéré, enregistrée le 25 janvier 2018, a été présentée pour M.A....

1. Considérant que M. A...et l'EARL A...sont associés, depuis le 20 décembre 2012, avec MmeE..., dans la SCEA du Merdy, laquelle met en valeur une exploitation d'une superficie de 57 ha 81 sur le territoire de la commune de Glomel (Côtes d'Armor) ; qu'ils possèdent respectivement 18 et 19 parts sociales au sein de la SCEA, Mme E... conservant la majorité du capital social, et que les associés ont désigné l'EARL A...en qualité de gérante à compter du 20 décembre 2012 ; que le préfet des Côtes d'Armor a demandé à M. A... et à l'EARLA..., par un courrier du 11 janvier 2013, de présenter une demande d'autorisation d'exploiter au titre du contrôle des structures, demande qui a été réitérée le 1er août 2013 ; que, ces deux courriers n'ayant pas été suivis d'effet, le préfet a, le 19 septembre 2013, mis les intéressés en demeure de cesser l'exploitation de 48,32 hectares de terres appartenant à la SCEA du Merdy au motif que cette exploitation relevait du contrôle des structures agricoles et ne pouvait être réalisée que dans le cadre d'une autorisation d'exploiter ; que, par une décision du 26 novembre 2013, il a infligé à M. A...et à l'EARL A...une sanction pécuniaire de 450 euros par hectare pour l'exploitation de ces terres sans autorisation administrative ; que la commission de recours de la région Bretagne, saisie par l'EARL A...et par M.A..., a, par une décision du 12 mai 2014, abandonné cette sanction en ce qu'elle concernait M. A...et l'a confirmée en ce qu'elle concernait l'EARLA... ; que le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt relève appel du jugement du 4 décembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Rennes a annulé cette décision du 12 mai 2014 ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 331-1 du code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " Le contrôle des structures des exploitations agricoles s'applique à la mise en valeur des terres agricoles ou des ateliers de production hors sol au sein d'une exploitation agricole, quels que soient la forme ou le mode d'organisation juridique de celle-ci et le titre en vertu duquel la mise en valeur est assuré. / Est qualifié d'exploitation agricole, au sens du présent chapitre, l'ensemble des unités de production mises en valeur directement ou indirectement par la même personne, quels qu'en soient le statut, la forme ou le mode d'organisation juridique, dont les activités sont mentionnées à l'article L. 311-1 (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 331-7 du même code : " Lorsqu'elle constate qu'un fond est exploité contrairement aux dispositions du présent chapitre, l'autorité administrative met l'intéressé en demeure de régulariser sa situation dans un délai qu'elle détermine et qui ne saurait être inférieur à un mois. / La mise en demeure mentionnée à l'alinéa précédent prescrit à l'intéressé soit de présenter une demande d'autorisation, soit, si une décision de refus d'autorisation est intervenue, de cesser l'exploitation des terres concernées. / Lorsque l'intéressé, tenu de présenter une demande d'autorisation, ne l'a pas formée dans le délai mentionné ci-dessus, l'autorité administrative lui notifie une mise en demeure de cesser d'exploiter dans un délai de même durée. / Lorsque la cessation de l'exploitation est ordonnée, l'intéressé est mis à même, pendant le délai qui lui est imparti, de présenter ses observations écrites ou orales devant toute instance ayant à connaître de l'affaire. / Si, à l'expiration du délai imparti pour cesser l'exploitation des terres concernées, l'autorité administrative constate que l'exploitation se poursuit dans des conditions irrégulières, elle peut prononcer à l'encontre de l'intéressé une sanction pécuniaire d'un montant compris entre 304,90 et 914,70 euros par hectare. (...)" ; qu'enfin, aux termes de l'article L.325-1 de ce code : " L'entraide est réalisée entre agriculteurs par des échanges de services en travail et en moyens d'exploitation, y compris ceux entrant dans le prolongement de l'acte de production./ Elle peut être occasionnelle, temporaire ou intervenir d'une manière régulière./ L'entraide est un contrat à titre gratuit, même lorsque le bénéficiaire rembourse au prestataire tout ou partie des frais engagés par ce dernier./ Lorsqu'elle est pratiquée dans une exploitation soumise au régime d'autorisation des exploitations de cultures marines, l'entraide doit donner lieu à l'établissement d'un contrat écrit. " ;

3. Considérant que si l'EARL A...a pris, en 2012, une participation financière dans la SCEA du Merdy, propriétaire et exploitante en titre des terres en litige, et en a été désignée la gérante à compter du mois de décembre 2012, cette double circonstance ne suffisait pas à justifier qu'elle fût, en vertu des dispositions rappelées au point 2, regardée comme assurant l'exploitation des 48,32 hectares de terres litigieux ; que si le ministre chargé de l'agriculture fait valoir que l'EARL requérante assurait en réalité l'exploitation effective des parcelles concernées dès lors qu'il a été constaté qu'elle y a effectué, au cours de l'année 2013, des travaux de préparation des terres pour les céréales, les féveroles et le maïs et des travaux d'épandage, il résulte de l'instruction que l'EARL A...s'est en réalité bornée à apporter, dans le cadre de l'entraide définie à l'article L. 325-1 précité du code rural et de la pêche maritime, une aide matérielle à l'un des associés de la SCEA, en l'occurrence MmeE..., qui avait des difficultés à poursuivre l'exploitation de ses terres en raison du départ en retraite de son mari, sous la forme de prestations d'entraide facturées par elle à la SCEA du Merdy, ainsi qu'elle le faisait d'ailleurs pour d'autres exploitants agricoles non associés de cette SCEA ; qu'ainsi, l'EARL A...ne peut être regardée, contrairement à ce qu'ont estimé le préfet et la commission de réforme, comme ayant participé à la mise en valeur directe ou indirecte des unités de production de la SCEA du Merdy au sens des dispositions citées plus haut de l'article L. 331-1 du code rural et de la pêche maritime, et comme ayant été, pour ce motif, dans l'obligation de se soumettre au contrôle des structures des exploitations agricoles ; que la sanction financière prononcée à son encontre est, par voie de conséquence, dépourvue de base légale ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre chargé de l'agriculture n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a annulé la décision du 12 mai 2014 de la commission de recours de la région Bretagne en tant qu'elle maintenait le principe d'une sanction financière à l'encontre de l'EARLA... ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

5. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État le versement à l'EARL A...d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le recours du ministre de l'agriculture et de l'alimentation est rejeté.

Article 2 : L'État versera à l'EARL A...la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'EARL A...et au ministre de l'agriculture et de l'alimentation.

Une copie sera transmise au préfet des Côtes d'Armor.

Délibéré après l'audience du 25 janvier 2018, à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, président de chambre,

- M. Lemoine, premier conseiller,

- Mme Le Bris, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 9 février 2018.

Le rapporteur,

F. LemoineLe Président,

I. Perrot

Le greffier,

M. C...

La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture et de l'alimentation en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°16NT00393


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 16NT00393
Date de la décision : 09/02/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

03-03-03-01 Agriculture et forêts. Exploitations agricoles. Cumuls et contrôle des structures. Cumuls d'exploitations.


Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: M. François LEMOINE
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : KOVALEX

Origine de la décision
Date de l'import : 20/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2018-02-09;16nt00393 ?
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