Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler la décision du 26 mai 2014 par laquelle le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Blois lui a retiré son agrément d'agent de police municipale ;
Par un jugement n° 1402889 du 20 octobre 2015, le tribunal administratif d'Orléans a fait droit à sa demande.
Procédure devant la cour :
Par un recours enregistré le 23 décembre 2015, le garde des sceaux, ministre de la justice, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 20 octobre 2015 ;
2°) de rejeter la requête de M. A...;
Il soutient que :
- c'est à tort que les premiers juges ont écarté l'application du principe d'indivisibilité du ministère public pour retenir le vice d'incompétence ;
- les autres moyens soulevés par M. A...en première instance ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense enregistré le 22 juin 2016, M. D...A..., représenté par MeE..., conclut au rejet de la requête et à ce que l'Etat soit condamné à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que comme l'a jugé à bon droit le tribunal administratif d'Orléans, la décision contestée est entachée d'un vice d'incompétence et que les autres moyens présentés devant le tribunal sont fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'organisation judiciaire ;
- le code de procédure pénale ;
- le code de la sécurité intérieure ;
- la loi n°2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Berthon,
- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public.
1. Considérant que M.A..., brigadier-chef principal, adjoint du chef de la police municipale de la commune de Vineuil a, le 8 août 2012, commis des faits de violence en réunion pour lesquels il a été condamné par un jugement du 20 février 2012 du tribunal correctionnel de Blois à une peine de quatre mois de prison avec sursis ; que l'agrément dont il bénéficiait depuis le 17 mars 1997 pour l'exercice de ses fonctions lui a été retiré le 26 mai 2014 par une décision signée du vice-procureur de la République près le tribunal de grande instance de Blois ; que le garde des sceaux, ministre de la justice, relève appel du jugement du 20 octobre 2015 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a annulé la décision du 26 mai 2014 pour incompétence de son signataire ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant que selon l'article L. 122-4 du code de l'organisation judiciaire : " Tout magistrat d'un parquet ou d'un parquet général peut exercer les fonctions du ministère public au sein de ce parquet. " ; qu'aux termes de l'article L. 511-2 du code de la sécurité intérieure : " Les fonctions d'agent de police municipale ne peuvent être exercées que par des fonctionnaires territoriaux recrutés à cet effet dans les conditions fixées par les statuts particuliers prévus à l'article 6 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale. Ils sont nommés par le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale, agréés par le représentant de l'Etat dans le département et le procureur de la République, puis assermentés. Cet agrément et cette assermentation restent valables tant qu'ils continuent d'exercer des fonctions d'agents de police municipale. En cas de recrutement par une commune ou un établissement de coopération intercommunale situé sur le ressort d'un autre tribunal de grande instance, les procureurs de la République compétents au titre de l'ancien et du nouveau lieu d'exercice des fonctions sont avisés sans délai. L'agrément peut être retiré ou suspendu par le représentant de l'Etat ou le procureur de la République après consultation du maire ou du président de l'établissement public de coopération intercommunale. Toutefois, en cas d'urgence, l'agrément peut être suspendu par le procureur de la République sans qu'il soit procédé à cette consultation. " ; que les décisions susceptibles d'être prononcées par le procureur de la République qui agit, sur le fondement de ces dernières dispositions, comme autorité administrative, ne relèvent pas de ses attributions juridictionnelles et, dès lors, du principe d'indivisibilité du ministère public invoqué par le ministre de la justice pour justifier de la compétence du signataire de la décision contestée et qui résulte de l'article L. 122-4 précité du code de l'organisation judiciaire ; qu'il s'ensuit que les substituts du procureur de la République ne peuvent légalement prononcer les retraits d'agrément des agents de police municipale que sur le fondement d'une délégation de signature préalablement consentie à cet effet par le procureur de la République et régulièrement publiée ; qu'il ressort des pièces versées au dossier que la décision du 26 mai 2014 portant retrait de l'agrément dont bénéficiait M. A... depuis le 17 mars 1997 a été signée par MmeC..., substitut du procureur de la République près le tribunal de grande instance de Blois, qui ne justifiait pas d'une délégation de signature pour ce faire ; que, par suite, c'est à bon droit que le tribunal administratif d'Orléans a estimé que la décision contestée avait été signée par une autorité incompétente et a prononcé pour ce motif son annulation ;
3. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le garde des sceaux, ministre de la justice, n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a annulé la décision de retrait d'agrément du 26 mai 2014 ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
4. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A...et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le recours du garde des sceaux, ministre de la justice, est rejeté.
Article 2 : L'Etat versera à M. A...une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au garde des sceaux, ministre de la justice et à M. D... A....
Délibéré après l'audience du 19 octobre 2017, à laquelle siégeaient :
- M. Coiffet, président,
- M. Berthon, premier conseiller,
- Mme Le Bris, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 10 novembre 2017.
Le rapporteur,
E. BerthonLe président,
O. Coiffet
Le greffier,
M. B...
La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15NT03853