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20/10/2017 | FRANCE | N°15NT03719

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 20 octobre 2017, 15NT03719


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...B...a demandé au tribunal administratif de Caen de condamner la commune de Bréville-les-Monts à lui verser la somme de 21 564,60 euros au titre des préjudices subis du fait de l'inondation de sa propriété survenue le 14 février 2007.

Par un jugement n° 1300181 du 8 octobre 2015, le tribunal administratif de Caen a fait droit à sa demande à hauteur de 18 564,60 euros.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 11 décembre 2015, 10 janvier 2

017 et 21 juillet 2017 la commune de Bréville-les-Monts, représentée par MeA..., demande à la c...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...B...a demandé au tribunal administratif de Caen de condamner la commune de Bréville-les-Monts à lui verser la somme de 21 564,60 euros au titre des préjudices subis du fait de l'inondation de sa propriété survenue le 14 février 2007.

Par un jugement n° 1300181 du 8 octobre 2015, le tribunal administratif de Caen a fait droit à sa demande à hauteur de 18 564,60 euros.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 11 décembre 2015, 10 janvier 2017 et 21 juillet 2017 la commune de Bréville-les-Monts, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 8 octobre 2015 ;

2°) d'ordonner, à titre principal, une nouvelle expertise en vue d'établir les causes et l'identité des responsables des dommages que M. B...dit avoir subis du fait de l'inondation de sa propriété le 14 février 2007 et, subsidiairement, de rejeter la demande indemnitaire présentée par ce dernier devant le tribunal administratif de Caen ;

3°) de mettre à la charge de M. B...la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'omission à statuer pour ne pas avoir répondu à ses conclusions présentées en première instance tendant à ce qu'une nouvelle expertise soit ordonnée ;

- c'est par erreur que les premiers juges ont estimé qu'elle avait sollicité à titre principal que sa responsabilité soit limitée et non totalement écartée ;

- sa responsabilité ne peut être engagée en l'espèce, l'inondation du court de tennis de M. B...ayant uniquement résulté du ruissellement des eaux provenant d'un champ, du fait de la configuration naturelle des lieux, et étant sans lien avec les fossés attenant au chemin rural n° 8 ;

- la parcelle d'où proviennent les eaux de ruissellement et la moitié du chemin rural n° 8 sont situés sur le territoire d'une autre commune ;

- subsidiairement, sa responsabilité devra être à tout le moins limitée car l'inondation en litige a des causes multiples et M. B...a lui-même commis une faute du fait d'une erreur dans la conception et l'implantation de cet équipement ;

- M. B...ne peut prétendre à l'indemnisation des dommages dont il se prévaut, dès lors qu'il n'en démontre pas le caractère anormal et spécial ni n'établit à quelle fréquence il faisait usage de son court de tennis ;

- il apparait nécessaire d'ordonner une nouvelle expertise, car celle réalisée à la demande du tribunal de grande instance de Caen n'a pas permis de déterminer exactement les causes du dommage et est incomplète voire erronée sur certains points.

Par des mémoires en défense enregistrés les 13 septembre 2016 et 12 juillet 2017 M. D... B..., représenté par MeE..., conclut :

1°) au rejet de la requête de la commune de Bréville-les-Monts ;

2°) par la voie de l'appel incident, à la réformation du jugement attaqué en ce la somme qui lui a été allouée doit être revalorisée par application de l'indice BT 01 et en ce que ses conclusions tendant à ce que les dépens de l'instance engagée devant le juge judiciaire lui soient remboursés ont été rejetées ;

3°) à ce que la somme de 6 000 euros soit mise à la charge de la commune de Bréville-les-Monts en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative, tant au titre des frais exposés en première instance que de ceux exposés en appel.

Il fait valoir que :

- les moyens soulevés par la commune de Bréville-les-Monts ne sont pas fondés ;

- l'indemnité principale qui lui a été allouée en première instance au titre du remboursement des travaux de réfection de son court de tennis doit être revalorisée par application de l'indice BT 01 ;

- il est fondé à obtenir le remboursement des frais d'expertise exposés au cours de l'instance qui s'est déroulée devant le tribunal de grande instance de Caen.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Massiou,

- et les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public.

Une note en délibéré présentée pour la commune de Bréville-les-Monts a été enregistrée le 9 octobre 2017.

1. Considérant qu'à la suite de fortes intempéries survenues le 14 février 2007, le court de tennis situé sur la propriété de M. B... à Bréville-les-Monts (Calvados) a été inondé ; qu'après avoir sollicité du tribunal de grande instance de Caen qu'il ordonne une expertise aux fins de déterminer les causes de cette inondation, le rapport correspondant ayant été rendu le

6 janvier 2011, M. B...a saisi le tribunal administratif de Caen d'une demande indemnitaire dirigée contre la commune de Bréville-les-Monts ; que, par un jugement du 8 octobre 2015, ce tribunal a partiellement fait droit à cette demande en allouant à M. B...la somme de 18 564,60 euros ; que la commune de Bréville-les-Monts relève appel de ce jugement ; que

M. B...demande, à titre incident, la réformation de ce jugement par actualisation de la somme qui lui a été allouée, en application de l'indice BT 01, et en ce qu'il n'a pas fait droit à sa demande tendant au remboursement des frais de l'expertise ordonnée par le tribunal de grande instance de Caen ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant, d'une part, qu'en se prononçant au fond sur la demande indemnitaire présentée par M. B...sans ordonner de mesure d'expertise complémentaire, le tribunal administratif de Caen a nécessairement écarté la demande d'une nouvelle expertise formulée par la commune de Bréville-les-Monts, laquelle, en tout état de cause, ne correspondait pas à des conclusions sur lesquelles il aurait été tenu de statuer ; que, d'autre part, en examinant d'abord si la responsabilité de la commune de Bréville-les-Monts pouvait être engagée, avant de déterminer si elle pouvait, le cas échéant, être atténuée, les premiers juges n'ont pas méconnu les écritures de la commune ; que, par suite, le tribunal n'a pas entaché son jugement d'irrégularité ;

Sur la responsabilité de la commune de Bréville-les-Monts :

3. Considérant que le maître d'ouvrage est responsable, même en l'absence de faute, des dommages que les ouvrages publics dont il a la garde peuvent causer aux tiers tant en raison de leur existence que de leur fonctionnement ; que pour obtenir réparation par le maître de l'ouvrage des dommages qu'il a subis, la victime doit démontrer, d'une part, la réalité de son préjudice et, d'autre part, l'existence d'un lien de causalité direct entre l'ouvrage et les dommages, lesquels doivent présenter un caractère anormal et spécial ; que pour s'exonérer de la responsabilité qui pèse sur elle, il incombe à la collectivité maître d'ouvrage d'établir que ces dommages résultent de la faute de la victime ou l'existence d'un événement de force majeure ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction, en particulier du rapport d'expertise du

6 janvier 2011 et du constat d'huissier établi à la demande de M. B...le jour du sinistre, que l'inondation du court de tennis à la suite de fortes précipitations le 14 février 2007 résulte d'un important ruissellement d'eaux chargées de terre en provenance de l'est de son terrain, où se trouvent notamment, à une cote altimétrique plus importante, le siège de deux entreprises ayant partiellement imperméabilisé leur sol, ainsi qu'une parcelle cultivée cadastrée n° 175 ; que la propriété de M. B...est séparée de ces autres parcelles par le chemin rural n° 8, ouvrage public situé sur le territoire de la commune de Bréville-les-Monts ; que cette voie comporte sur son côté Est un fossé destiné à l'évacuation des eaux de pluie et partiellement aménagé avec des buses pour permettre l'accès aux propriétés riveraines ; qu'il résulte des constatations effectuées par l'expert et qui ne sont pas, sur ce point, sérieusement contestées par la commune, que, lors du sinistre et dans la portion du chemin rural longeant le terrain de tennis, le fossé ainsi que les buses étaient pour l'essentiel obstrués ; qu'alors même que l'ouvrage public en cause ne pouvait avoir pour fonction d'absorber ou d'évacuer la totalité des eaux provenant des fonds supérieurs privés, son état d'entretien a eu pour effet d'aggraver les dommages résultant des pluies abondantes tombées le 14 février 2007 ; que cette aggravation est de nature à engager la responsabilité sans faute de la commune, maître de l'ouvrage, à l'égard des tiers et, en particulier, de M.B... ; que, dans les circontances de l'espèce, la part des conséquences dommageables du sinistre imputable à cette aggravation doit, eu égard à l'importance des eaux de ruissellement provenant notamment du siège des entreprises et de la parcelle cultivée cadastrée n° 175 situés en amont du terrain de tennis de M.B..., être évaluée à 50 % ; qu'est sans incidence à cet égard la circonstance que les fonds supérieurs dont provenaient une partie au moins des eaux de ruissellement seraient situés sur le territoire d'une commune voisine ;

5. Considérant, par ailleurs, que la commune requérante n'apporte aucun élément probant de nature à établir que, ainsi qu'elle le soutient, le terrain d'assiette du court de tennis, qui n'avait jamais été endommagé auparavant malgré une première inondation du secteur en 2006, aurait fait l'objet d'un décaissement sur environ un mètre ayant pu aggraver son exposition au risque d'inondation, ni que la conception ou l'implantation de ce court de tennis révèlerait une faute de la victime de nature à exonérer pour tout ou partie la commune de sa responsabilité dans l'intervention du dommage ; qu'à supposer qu'elle ait entendu invoquer également le fait du tiers, la commune, dont la responsabilité est engagée sur le fondement de la responsabilité sans faute, n'est, en tout état de cause, pas fondée à le faire ;

Sur l'étendue des préjudices de M.B... :

6. Considérant, d'une part, que M. B...démontre, par la production de deux factures, avoir fait réaliser en 2012 des travaux de nettoyage et de resablage de son court de tennis à la suite de la coulée de boue l'ayant endommagé, pour un montant dont il a demandé le remboursement à hauteur de 16 564,60 euros, somme que lui a allouée le tribunal administratif de Caen en réparation de ce préjudice ;

7. Considérant que si M. B...soutient que cette somme doit être indexée sur l'indice BT 01 du coût de la construction, il n'établit pas avoir été dans l'impossibilité d'entreprendre les travaux avant 2012 ; qu'il n'est, ainsi, pas fondé à demander cette actualisation ;

8. Considérant, d'autre part, qu'il résulte de l'instruction que M. B...et les membres de sa famille faisaient un usage régulier du court de tennis endommagé, lequel est resté hors service durant une assez longue période ; que, dans ces conditions, les premiers juges ont fait une équitable appréciation du trouble de jouissance subi par M. B...en l'estimant à 2 000 euros ;

9. Considérant que, compte tenu de la part de responsabilité retenue au point 4 du présent arrêt, l'indemnité mise à la charge de la commune de Bréville-les-Monts doit être ramenée à 50 % de la somme de 18 564,60 euros, soit 9 282,30 euros ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit nécessaire d'ordonner une nouvelle expertise, que la commune de Bréville-les-Monts est fondée à demander que l'indemnité que le tribunal administratif de Caen l'a condamnée à verser à M. B...soit ramenée à 9 282,30 euros ; que les conclusions d'appel incident présentées par M. B...doivent, par ailleurs, être rejetées ;

Sur les dépens :

11. Considérant que M.B..., qui a supporté la charge des frais de l'expertise ordonnée par le tribunal de grande instance de Caen, demande que ces dépens soient mis à la charge finale de la commune de Bréville-les-Monts ; qu'il n'appartient cependant pas au juge administratif de se prononcer, au titre des dépens, sur la charge des frais se rapportant à une expertise ordonnée par le juge judiciaire ; qu'au surplus ces frais ne peuvent être mis à la charge de l'une des parties à l'instance sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, qui ne concernent que les frais exposés non compris dans les dépens ; que M. B...n'est, dès lors, pas fondé à solliciter la réformation du jugement attaqué en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à ce que soit mis à la charge de la commune de Bréville-les-Monts le remboursement des frais de l'expertise ordonnée par le tribunal de grande instance de Caen ;

Sur les frais exposés par M. B...devant le tribunal administratif :

12. Considérant que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a condamné la commune de Bréville-les-Monts à verser la somme de 1 500 euros à M. B...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que ce tribunal aurait méconnu les dispositions de cet article ni fait une inexacte appréciation du montant des frais exposés en première instance par l'intéressé ; que, par suite, les conclusions de M. B...tendant à ce qu'une somme plus importante lui soit allouée à ce titre doivent être rejetées ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions des parties tendant à l'application de cet article ;

DÉCIDE :

Article 1er : La somme que la commune de Bréville-les-Monts a été condamnée à verser à

M. B...par le tribunal administratif de Caen est ramenée à 9 282,30 euros.

Article 2 : Le jugement n° 1300181 du tribunal administratif de Caen du 8 octobre 2015 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la commune de Bréville-les-Monts et les conclusions présentées par M. B...devant la cour sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Bréville-les-Monts et à M. D... B....

Délibéré après l'audience du 5 octobre 2017, où siégeaient :

- Mme Perrot, président de chambre,

- Mme Le Bris, premier conseiller,

- Mme Massiou, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 20 octobre 2017.

Le rapporteur,

B. MassiouLe président,

I. Perrot

Le greffier,

M. C...

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 15NT03719


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 15NT03719
Date de la décision : 20/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: Mme Barbara MASSIOU
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : SELARL MEZERAC CHEVRET ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 31/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-10-20;15nt03719 ?
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