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06/10/2017 | FRANCE | N°17NT00952

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 06 octobre 2017, 17NT00952


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...B...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 18 octobre 2016 du préfet d'Ille-et-Vilaine refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office après l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 1605125 du 16 février 2017, le tribunal administratif de Rennes a fait droit à sa demande.

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...B...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 18 octobre 2016 du préfet d'Ille-et-Vilaine refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office après l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 1605125 du 16 février 2017, le tribunal administratif de Rennes a fait droit à sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 20 mars 2017 le préfet d'Ille-et-Vilaine demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 16 février 2017 en tant qu'il a annulé son arrêté du 18 octobre 2016, lui a enjoint de délivrer à l'intéressé une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " et a mis à sa charge la somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter la demande de M. D...B....

Il soutient que :

- le jugement n'est pas régulier dès lors que s'il est fait état, dans les motifs, de ce que M. D... B...était présent à l'audience et a présenté des observations, il n'en est pas fait mention dans les informations relatives à la tenue de l'audience ;

- il n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation car M. D...B...a interrompu ses études à l'issue de l'année universitaire 2014-2015, le service de l'emploi a donné deux avis défavorables à sa demande de titre de séjour en qualité de salarié au motif que ses revenus étaient inférieurs à la rémunération minimale mensuelle, l'intéressé ne l'avait pas informé de sa relation avec une ressortissante française et s'était déclaré célibataire dans sa demande de carte de séjour temporaire, en tout état de cause cette relation est récente, enfin son frère, étudiant en France, n'a pas vocation à s'y maintenir.

Par un mémoire enregistré le 30 mai 2017 M.B..., représenté par Me C..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'État au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve de la renonciation de son conseil à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Il fait valoir que les moyens invoqués par le préfet d'Ille-et-Vilaine ne sont pas fondés.

M. D...B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 mai 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Berthon a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M. D...B..., ressortissant de la République démocratique du Congo, né le 17 novembre 1985, est entré en France le 23 août 2011 muni de son passeport et d'un visa étudiant ; qu'il s'est vu délivrer un titre de séjour en qualité d'étudiant qui été régulièrement renouvelé jusqu'au 30 juin 2015 ; que M. D...B..., qui avait souhaité obtenir un titre de séjour " compétence et talent ", a sollicité, en dernier lieu le 24 mars 2016, la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " salarié " qui lui a été refusé par un arrêté du 18 octobre 2016 du préfet d'Ille-et-Vilaine ; que, saisi par M.B..., le tribunal administratif de Rennes, par le jugement attaqué du 16 février 2017, a annulé cet arrêté, enjoint au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois et mis à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ; que le préfet d'Ille-et-Vilaine relève appel de ce jugement ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 741-2 du code de justice administrative : " La décision mentionne que l'audience a été publique (...) / Elle contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application. / Mention y est faite que le rapporteur et le rapporteur public et, s'il y a lieu, les parties, leurs mandataires ou défenseurs ainsi que toute personne entendue sur décision du président en vertu du deuxième alinéa de l'article R. 731-3 ont été entendus. / Mention est également faite de la production d'une note en délibéré. / La décision fait apparaître la date de l'audience et la date à laquelle elle a été prononcée. " ; qu'aux termes de l'article R. 732-1 du même code : " (...) Les parties peuvent ensuite présenter, soit en personne, soit par un avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, soit par un avocat, des observations orales à l'appui de leurs conclusions écrites (...) " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que si M.B..., interrogé par le tribunal au cours de l'audience publique, a pris la parole, il était au premier chef représenté par son conseil, Me C...; qu'il suit de là qu'en ne mentionnant dans le jugement attaqué que les observations présentées par le conseil de l'intéressé, les juges de première instance n'ont, contrairement à ce que soutient le préfet d'Ille-et-Vilaine, pas entaché ce jugement d'irrégularité ;

Sur la légalité de l'arrêté contesté :

4. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, si M. B...a quitté son pays d'origine en 2004, alors qu'il était âgé de 19 ans, c'était en qualité d'étudiant pour effectuer des études supérieures, d'abord en Algérie, puis en France jusqu'en 2015, date à laquelle l'intéressé a demandé un changement de statut ; que ne résident en France qu'un de ses cousins et son frère, lui-même en qualité d'étudiant ; que ses autres attaches familiales se situent soit en RDC soit au Canada ; que si l'intéressé a développé des liens dans des associations ayant pour objet la vulgarisation scientifique avec lesquelles il collabore pour des missions de courtes durées, une telle circonstance n'est pas de nature à révéler une intégration sociale et professionnelle d'une particulière intensité ; qu'enfin, la relation de M. B...avec une ressortissante française, très récente, n'avait pas été portée à la connaissance du préfet avant l'édiction de la décision contestée ; que, dans ces conditions, c'est à tort que les juges de première instance ont estimé que l'arrêté contesté, qui faisait suite à une demande de titre de séjour présentée sur le fondement de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, avait méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

6. Considérant qu'il y a lieu pour la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur les autres moyens soulevés par M. B...tant devant le tribunal administratif que devant elle ;

7. Considérant, en premier lieu, que la décision contestée du préfet d'Ille-et-Vilaine énonce de manière particulièrement détaillée les considérations de droit et de fait qui la fonde ; que, par suite, alors même que le préfet n'a pas mentionné que le requérant entretenait avec une ressortissante française une relation affective dont, au demeurant, il n'avait pas connaissance à la date de sa décision, les moyens tirés de l'insuffisance de motivation et du défaut d'examen particulier de la situation de l'intéressé doivent être écartés ;

8. Considérant, en second lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire ainsi que la décision fixant le pays à destination seraient privées de base légale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet d'Ille-et-Vilaine est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a annulé son arrêté du 18 octobre 2016 ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 :

10. Considérant que le préfet d'Ille-et-Vilaine, qui était perdant en première instance, n'est pas fondé à contester la somme de 1 500 euros que les juges de première instance ont mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative, dont ils n'ont pas fait une inexacte application ;

11. Considérant, par ailleurs, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. B...demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1605125 du 16 février 2017 du tribunal administratif de Rennes est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. B...devant le tribunal administratif de Rennes et les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 présentées par lui en appel sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et à M. D...B....

Copie en sera adressée au préfet d'Ille-et-Vilaine.

Délibéré après l'audience du 19 septembre 2017 à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, président de chambre,

- M. Berthon, premier conseiller,

- Mme Le Bris, premier conseiller.

Lu en audience publique le 6 octobre 2017.

Le rapporteur,

E Berthon Le président,

I. Perrot

Le greffier,

M. A...

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N°17NT00952


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 17NT00952
Date de la décision : 06/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: M. Eric BERTHON
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : BERTHET-LE FLOCH

Origine de la décision
Date de l'import : 17/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-10-06;17nt00952 ?
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