La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/10/2017 | FRANCE | N°15NT02841

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 06 octobre 2017, 15NT02841


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le Gaec des Trois Forêts a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision du 21 janvier 2014 de la commission régionale des recours de Basse-Normandie confirmant l'arrêté du 23 juillet 2013 par lequel le préfet de l'Orne lui a infligé une sanction pécuniaire de 914,70 euros par hectare de terres exploitées irrégulièrement, ainsi que d'annuler cet arrêté.

Par un jugement n° 1400746 du 16 juillet 2015, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure dev

ant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 16 septembre 2015 et 23 janvie...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le Gaec des Trois Forêts a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision du 21 janvier 2014 de la commission régionale des recours de Basse-Normandie confirmant l'arrêté du 23 juillet 2013 par lequel le préfet de l'Orne lui a infligé une sanction pécuniaire de 914,70 euros par hectare de terres exploitées irrégulièrement, ainsi que d'annuler cet arrêté.

Par un jugement n° 1400746 du 16 juillet 2015, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 16 septembre 2015 et 23 janvier 2017 le Gaec des Trois Forêts, représenté par Me Vielpeau, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 16 juillet 2015 du tribunal administratif de Caen ;

2°) d'annuler les décision et arrêté mentionnés ci-dessus ;

3°) à titre subsidiaire, de réduire le montant de la sanction litigieuse à 304,90 euros par hectare de terres exploitées irrégulièrement ou, pour le moins, de réduire cette sanction de manière significative ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le préfet, puis la commission de recours, ne pouvaient fonder la sanction pécuniaire contestée sur la décision du 12 juin 2012 du préfet de l'Orne portant à son encontre refus d'autorisation d'exploiter les terres en litige, car cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; en effet le candidat concurrent n'était pas prioritaire et la propriétaire des terres refuse de lui donner ses terres à bail ;

- cette sanction excessive est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation compte tenu de la situation humaine et financière dans laquelle il se trouve.

Par un mémoire en défense enregistré le 14 septembre 2016 le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- les conclusions de la requête dirigées contre l'arrêté du 4 octobre 2012 sont irrecevables dans la mesure où la décision de la commission des recours de la région Basse-Normandie s'est substituée à la décision préfectorale ;

- le Gaec requérant ne peut exciper de l'illégalité de l'arrêté du 12 juin 2012 dès lors que la décision contestée n'est pas prise en application de cet arrêté, qui de surcroît est devenu définitif ;

- les moyens soulevés par le Gaec des Trois Forêts ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Berthon,

- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public,

- et les observations de MeC..., substituant Me Vielpeau, avocat du Gaec des Trois Forêts.

1. Considérant que, par une décision du 12 juin 2012, le préfet de l'Orne a refusé d'accorder au Gaec des Trois Forêts l'autorisation qu'il sollicitait en vue d'exploiter la parcelle cadastrée BW n° 229 d'une superficie de 8 hectares 89 ares et 23 centiares située sur le territoire de la commune de Domfront et appartenant à Mme D...; que cette dernière, ainsi qu'il lui était loisible de le faire, a refusé de donner cette parcelle à bail à M.A..., qui avait quant à lui obtenu l'autorisation préfectorale requise ; qu'en dépit du refus qui lui avait été ainsi opposé le 12 juin 2012, le Gaec des Trois Forêts a cultivé la parcelle litigieuse ; que le préfet de l'Orne a adressé le 18 juillet 2012 à ce groupement une mise en demeure de cesser l'exploitation irrégulière de ces terres puis, par un arrêté du 4 octobre 2012, a prononcé à l'encontre du Gaec des Trois Forêts une sanction pécuniaire de 914,70 euros par hectare de terres exploité irrégulièrement, représentant un montant total de 8 131,68 euros ; que la commission régionale des recours du contrôle des structures agricoles de Basse-Normandie, saisie par le Gaec, a, le 10 avril 2013, confirmé la sanction pécuniaire prononcée par le préfet ; que le Gaec des Trois Forêts a alors sollicité l'annulation de ces deux décisions devant le tribunal administratif de Caen qui, par un jugement du 17 avril 2014, confirmé en appel par un arrêt de la cour du 18 février 2016, a rejeté sa demande ; que, toutefois, le Gaec des Trois Forêts, sans avoir même sollicité une nouvelle autorisation d'exploiter, a poursuivi l'exploitation irrégulière de la parcelle en litige, de sorte que le préfet de l'Orne a, par un nouvel arrêté du 23 juillet 2013, prononcé à son encontre une nouvelle sanction de 914,70 euros par hectare de terres irrégulièrement exploité ; que cette dernière sanction a été confirmée par la commission régionale des recours du contrôle des structures agricoles de Basse-Normandie le 21 janvier 2014 ; que le Gaec des Trois Forêts relève appel du jugement du 16 juillet 2015 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décision et arrêté précités ;

Sur les conclusions dirigées contre l'arrêté du 23 juillet 2013 :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 331-8 du code rural et de la pêche maritime : " La décision prononçant la sanction pécuniaire mentionnée à l'article L. 331-7 est notifiée à l'exploitant concerné, qui peut la contester, avant tout recours contentieux, dans le mois de sa réception, devant une commission des recours dont la composition et les règles de fonctionnement sont fixées par décret en Conseil d'Etat. / Les recours devant cette commission sont suspensifs. Leur instruction est contradictoire. / La commission, qui statue par décision motivée, peut soit confirmer la sanction, soit décider qu'en raison d'éléments tirés de la situation de la personne concernée il y a lieu de ramener la pénalité prononcée à un montant qu'elle détermine dans les limites fixées à l'article L. 331-7, soit décider qu'en l'absence de violation établie des dispositions du présent chapitre il n'y a pas lieu à sanction. Dans les deux premiers cas, la pénalité devient recouvrable dès notification de sa décision. / La décision de la commission peut faire l'objet, de la part de l'autorité administrative ou de l'intéressé, d'un recours de pleine juridiction devant le tribunal administratif. " ; qu'en vertu de ces dispositions la décision du 21 janvier 2014 de la commission régionale des recours de Basse-Normandie, qui a été saisie par le Gaec des Trois Forêts dans le cadre d'un recours préalable obligatoire, s'est substituée à l'arrêté préfectoral du 23 juillet 2013 ; que, par suite, à supposer que le Gaec des Trois Forêts ait entendu les maintenir en appel, les conclusions dirigées par lui contre l'arrêté du préfet de l'Orne du 23 juillet 2013 sont, comme elles l'étaient en première instance, irrecevables et doivent être rejetées ;

Sur la légalité de la décision du 21 janvier 2014 de la commission régionale des recours de contrôle des structures agricoles de Basse-Normandie :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 331-7 du code rural et de la pêche maritime : " Lorsqu'elle constate qu'un fonds est exploité contrairement aux dispositions du présent chapitre, l'autorité administrative met l'intéressé en demeure de régulariser sa situation dans un délai qu'elle détermine et qui ne saurait être inférieur à un mois. / La mise en demeure mentionnée à l'alinéa précédent prescrit à l'intéressé soit de présenter une demande d'autorisation, soit, si une décision de refus d'autorisation est intervenue, de cesser l'exploitation des terres concernées. / Lorsque l'intéressé, tenu de présenter une demande d'autorisation, ne l'a pas formée dans le délai mentionné ci-dessus, l'autorité administrative lui notifie une mise en demeure de cesser d'exploiter dans un délai de même durée. / Lorsque la cessation de l'exploitation est ordonnée, l'intéressé est mis à même, pendant le délai qui lui est imparti, de présenter ses observations écrites ou orales devant toute instance ayant à connaître de l'affaire. / Si, à l'expiration du délai imparti pour cesser l'exploitation des terres concernées, l'autorité administrative constate que l'exploitation se poursuit dans des conditions irrégulières, elle peut prononcer à l'encontre de l'intéressé une sanction pécuniaire d'un montant compris entre 304,90 et 914,70 euros par hectare. La surface prise en compte correspond à la surface de polyculture-élevage faisant l'objet de l'exploitation illégale, ou son équivalent, après, le cas échéant, application des coefficients d'équivalence résultant, pour chaque nature de culture, de l'application de l'article L. 312-6. / Cette mesure pourra être reconduite chaque année s'il est constaté que l'intéressé poursuit l'exploitation en cause. " ;

4. Considérant, d'une part, qu'ainsi que l'a déjà jugé la cour dans un arrêt n°14NT01592 du 18 février 2016, l'arrêté du préfet de l'Orne du 12 juin 2012 portant refus d'autorisation d'exploiter les terres litigieuses, est devenu définitif ; que le Gaec des Trois Forêts ne peut, en tout état de cause, exciper de son illégalité dans le cadre de la présente instance ;

5. Considérant, d'autre part, qu'il est constant que le Gaec des Trois Forêts a poursuivi l'exploitation de la parcelle litigieuse en dépit des refus qui lui ont été opposés par le préfet de l'Orne les 11 avril 2008, 27 juillet 2009 et 12 juin 2012 et des mises en demeure qui lui ont été adressées par cette même autorité les 2 décembre 2010 et 18 juillet 2012 ; qu'une première sanction pécuniaire a été prononcée le 2 février 2011 par le préfet de l'Orne à l'encontre du groupement sur la base de 304,90 euros par hectare irrégulièrement exploité, et que cette sanction a été, en ce qui concerne son montant par hectare, confirmée par la commission régionale des recours de Basse-Normandie le 22 décembre 2011 ; qu'une deuxième sanction de 914,70 euros par hectares, confirmée le 10 avril 2013 par la commission régionale des recours de Basse-Normandie, relative à la même parcelle dont est propriétaire MmeD..., a été prononcée pour le même motif ; que la cour, dans un arrêt du 18 février 2016, a estimé que cette sanction avait été légalement prise et n'était pas excessive ; que si le Gaec fait de nouveau valoir, sans faire état de circonstances nouvelles justifiant qu'une appréciation différente soit portée sur sa requête, que la propriétaire des terres ne souhaite pas donner ces terres à bail à l'exploitant titulaire d'une autorisation d'exploiter, que la parcelle en cause resterait en friche s'il ne l'exploitait pas, qu'il paye régulièrement son loyer en vertu d'un bail rural, qu'il acquitte ses cotisations sociales à la mutualité sociale agricole, que sa situation financière est déficitaire, enfin que son exploitation a été placée sous sauvegarde de justice, ces éléments ne sont pas, eu égard au caractère répété et délibéré des manquements constatés et au fait que les difficultés financières de l'exploitation résultent de sa seule obstination, de nature à établir le caractère disproportionné de la sanction pécuniaire contestée du 21 janvier 2014, qui a été légalement prise ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le Gaec des Trois Forêts n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement au Gaec des Trois Forêts de la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du Gaec des Trois Forêts est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au Gaec des Trois Forêts et au ministre de l'agriculture et de l'alimentation.

Délibéré après l'audience du 19 septembre 2017 à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, président de chambre,

- M. Berthon, premier conseiller,

- Mme Le Bris, premier conseiller.

Lu en audience publique le 6 octobre 2017.

Le rapporteur,

E. Berthon

Le président,

I. Perrot

Le greffier,

M. B...

La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture et de l'alimentation en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 15NT02841


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 15NT02841
Date de la décision : 06/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: M. Eric BERTHON
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : SELARL AUGER VIELPEAU LE COUSTUMER

Origine de la décision
Date de l'import : 17/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-10-06;15nt02841 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award