La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/09/2017 | FRANCE | N°16NT01660

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 29 septembre 2017, 16NT01660


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...B...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 4 septembre 2013 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté le recours administratif préalable formé contre la décision du 29 avril 2013 du préfet de la Gironde, ajournant à deux ans sa demande de naturalisation, ainsi que la décision du préfet.

Par un jugement n° 1308517 du 16 mars 2016, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du ministre de l'intérieur du 4 septembre 2013 et a enjoint au

ministre de réexaminer la demande de M. B... dans un délai de deux mois à compter ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...B...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 4 septembre 2013 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté le recours administratif préalable formé contre la décision du 29 avril 2013 du préfet de la Gironde, ajournant à deux ans sa demande de naturalisation, ainsi que la décision du préfet.

Par un jugement n° 1308517 du 16 mars 2016, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du ministre de l'intérieur du 4 septembre 2013 et a enjoint au ministre de réexaminer la demande de M. B... dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement.

Procédure devant la cour :

Par un recours, enregistré le 23 mai 2016, le ministre de l'intérieur demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 16 mars 2016 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Nantes.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier pour ne pas avoir visé et analysé le dernier mémoire produit par M. B... et pour avoir omis de statuer sur les conclusions de ce dernier présentées sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

- ce jugement est entaché d'une erreur de fait dès lors qu'il qualifie la décision contestée comme ayant rejeté la demande de naturalisation de M. B... alors qu'elle n'a été qu'ajournée à deux ans ;

- les premiers juges ont retenu, à tort, que sa décision était entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que, même si les faits retenus sont anciens, ils sont d'une particulière gravité et ne sont pas isolés, de sorte qu'ils pouvaient être pris en compte pour ajourner à deux ans la demande de naturalisation formée par M. B... ;

- les autres moyens invoqués par M. B... en première instance ne sont pas fondés.

La requête a été communiquée à M.B..., qui n'a pas produit de mémoire.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code civil ;

- le code pénal ;

- le décret n° 93-1362 du 30 décembre modifié ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...'hirondel,

- les conclusions de M. Derlange, rapporteur public.

Considérant que le ministre de l'intérieur relève appel du jugement du 16 mars 2016 par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé sa décision du 4 septembre 2013 par laquelle il a ajourné à deux ans la demande d'acquisition de la nationalité française présentée par M. B... ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

1. Considérant, en premier lieu, que si le ministre fait valoir que le tribunal administratif a omis de mentionner dans les visas, en méconnaissance des prescriptions de l'article R. 741-2 du code de justice administrative, le mémoire en réplique que M. B... avait présenté dans l'instance, lequel avait été produit avant la clôture de l'instruction, une telle circonstance n'est, par elle-même, de nature à vicier la régularité du jugement attaqué que s'il ressort des pièces du dossier que ces écritures apportaient un élément nouveau auquel il n'aurait pas été répondu dans les motifs ; qu'en l'espèce, il est constant que les premiers juges ont retenu, pour annuler la décision du ministre, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation qui avait été exposé dans la requête introductive d'instance visé dans le jugement et sur lequel le ministre a pu présenter ses observations ; que, dans ces conditions, la circonstance alléguée par le ministre n'a pas été, par elle-même, de nature à vicier la régularité du jugement attaqué ;

2. Considérant, en second lieu, que si le jugement attaqué a omis de statuer sur les conclusions de M. B... présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le ministre ne peut utilement soulever un tel moyen, dès lors qu'une telle circonstance ne peut être utilement invoquée que par la partie lésée qui en avait fait la demande ;

Sur la légalité de la décision contestée :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 21-15 du code civil : " (...) l'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger " ; qu'aux termes de l'article 48 du décret du 30 décembre 1993 : " Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration dans la nationalité sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions. Ce délai une fois expiré ou ces conditions réalisées, il appartient au postulant, s'il le juge opportun, de formuler une nouvelle demande. " ; qu'il résulte de ces dispositions que la circonstance qu'un postulant à la naturalisation remplisse toutes les conditions de recevabilité de sa demande prévues par les articles 21-16 et suivants du code civil ne lui ouvre aucun droit à obtenir ladite naturalisation et qu'il appartient au ministre chargé des naturalisations de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la naturalisation à l'étranger qui la sollicite ; que, dans le cadre de cet examen d'opportunité, le ministre peut légalement prendre en compte les renseignements défavorables recueillis sur le comportement du postulant ;

4. Considérant que pour rejeter la demande de naturalisation de M.B..., le ministre de l'intérieur s'est exclusivement fondé sur la circonstance que l'intéressé a été l'auteur de faits graves et multiples qualifiés d'escroqueries, usage, contrefaçons et falsifications de documents administratifs commis entre 1985 et 1992 ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les faits que le ministre oppose à M. B..., et qui ont donné lieu à quatre condamnations avec des peines d'emprisonnement d'une durée cumulée de cinq ans, ont été commis courant 1985, 1988, 1992 et 1993; que ces faits remontent ainsi entre vingt et vingt-huit ans à la date de la décision contestée et, s'ils ne sont pas isolés et sont d'une certaine gravité, M. B... ne s'est plus, depuis lors, fait connaître défavorablement des services de police et de gendarmerie ainsi qu'il ressort notamment de la note de la sous-direction de l'information générale (SDIG) de la Gironde du 14 janvier 2013; que, dans ces conditions, en ajournant à deux ans, pour ces faits anciens de plus de vingt ans, la demande de naturalisation formée par M. B..., la décision contestée est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, que le ministre de l'intérieur n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé sa décision du 4 septembre 2013 et lui a enjoint de réexaminer la demande de naturalisation formée par M. B... ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le recours du ministre de l'intérieur est rejeté.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et à M. D...B....

Délibéré après l'audience du 12 septembre 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Degommier, président,

- Mme Gélard, premier conseiller,

- M. A...'hirondel, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 29 septembre 2017.

Le rapporteur,

M. C...Le président,

S. DEGOMMIER

Le greffier,

K. BOURON

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16NT01660


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 16NT01660
Date de la décision : 29/09/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DEGOMMIER
Rapporteur ?: M. Michel LHIRONDEL
Rapporteur public ?: M. DERLANGE

Origine de la décision
Date de l'import : 10/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-09-29;16nt01660 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award