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06/07/2017 | FRANCE | N°16NT03261

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 06 juillet 2017, 16NT03261


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

I/ Mme E... A...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 29 mars 2016 par lequel le préfet d'Ille-et-Vilaine a décidé sa remise aux autorités allemandes en vue de l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 1601643 du 18 avril 2016, le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

II/ Mlle C... A...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 29 mars 2016 par lequel le préfet d'Ille-et-Vilaine a décid

é sa remise aux autorités allemandes en vue de l'examen de sa demande d'asile.

Par un jug...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

I/ Mme E... A...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 29 mars 2016 par lequel le préfet d'Ille-et-Vilaine a décidé sa remise aux autorités allemandes en vue de l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 1601643 du 18 avril 2016, le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

II/ Mlle C... A...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 29 mars 2016 par lequel le préfet d'Ille-et-Vilaine a décidé sa remise aux autorités allemandes en vue de l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 1601644 du 18 avril 2016, le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

I/ Par une requête, enregistrée le 26 septembre 2016 sous le numéro 16NT03261, Mme E...A..., représentée par MeD..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 18 avril 2016 du tribunal administratif de Rennes ;

2°) d'annuler l'arrêté du 29 mars 2016 par lequel le préfet d'Ille-et-Vilaine a décidé sa remise aux autorités allemandes ;

3°) d'enjoindre au préfet d'Ille-et-Vilaine, à titre principal, de lui délivrer un récépissé en qualité de demandeur d'asile, dans un délai de trois jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ou, subsidiairement, de procéder à un nouvel examen de sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente ;

4°) de faire procéder au retrait des informations la concernant dans le système d'information Eurodac, dans un délai de trois jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros au titre l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté méconnaît les articles 4 et 5 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 ; il est entaché d'un vice de procédure ; le guide du demandeur d'asile qui lui a été remis n'est pas actualisé et est en version française ;

- il a été pris selon une procédure irrégulière en méconnaissance de l'article 29 du règlement CE n° 603/2013 ; elle conteste avoir reçu une traduction complète et effective, compte-tenu de la courte durée de son entretien individuel et de l'absence d'information quant à l'interprète ayant accepté de prêter son concours pour la traduction des documents.

Par lettre du 7 novembre 2016, le préfet d'Ille-et-Vilaine a été mis en demeure de produire ses observations dans le délai d'un mois, en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative.

II/ Par une requête, enregistrée le 26 septembre 2016 sous le numéro 16NT03265, Mlle C...A..., représentée par MeD..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 18 avril 2016 du tribunal administratif de Rennes ;

2°) d'annuler l'arrêté du 29 mars 2016 par lequel le préfet d'Ille-et-Vilaine a décidé sa remise aux autorités allemandes ;

3°) d'enjoindre au préfet d'Ille-et-Vilaine, à titre principal, de lui délivrer un récépissé en qualité de demandeur d'asile, dans un délai de trois jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ou, subsidiairement, de procéder à un nouvel examen de sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente ;

4°) de faire procéder au retrait des informations la concernant dans le système d'information Eurodac, dans un délai de trois jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros au titre l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soulève des moyens identiques à ceux exposés par Mme E...A...à l'appui de sa requête n°16NT03261.

Par lettre du 7 novembre 2016, le préfet d'Ille-et-Vilaine a été mis en demeure de produire ses observations dans le délai d'un mois, en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative.

Les requérantes ont été admises au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décisions du 4 août 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride ;

- le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relatif à la création d'Eurodac pour la comparaison des empreintes digitales aux fins de l'application efficace du règlement (UE) n°604/2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Bouchardon a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que les requêtes n°s 16NT03261 et 16NT03265 sont relatives à une même situation et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

2. Considérant que Mme E...A..., née le 1er janvier 1975, et Mlle C...A..., sa fille, née le 10 janvier 2001, ressortissantes afghanes entrées en France le 6 février 2016, ont présenté au préfet d'Ille-et-Vilaine une demande d'asile le 12 février suivant ; que leurs empreintes digitales ayant été relevées précédemment en Allemagne le 10 octobre 2015, le préfet a saisi les autorités allemandes d'une demande de prise en charge ; que celles-ci, en tant que responsables de l'examen des demandes d'asile des intéressées, ayant accepté leur prise en charge, le préfet d'Ille-et-Vilaine, par des arrêtés du 29 mars 2016, a décidé de les remettre à ces autorités ; que Mme E...A...et Mlle C...A...relèvent appel des jugements du 18 avril 2016 par lesquels le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces arrêtés ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 susvisé du 26 juin 2013 : " 1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un État membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement, et notamment : / a) des objectifs du présent règlement et des conséquences de la présentation d'une autre demande dans un État membre différent ainsi que des conséquences du passage d'un État membre à un autre pendant les phases au cours desquelles l'État membre responsable en vertu du présent règlement est déterminé et la demande de protection internationale est examinée ; / b) des critères de détermination de l'État membre responsable, de la hiérarchie de ces critères au cours des différentes étapes de la procédure et de leur durée, y compris du fait qu'une demande de protection internationale introduite dans un État membre peut mener à la désignation de cet État membre comme responsable en vertu du présent règlement même si cette responsabilité n'est pas fondée sur ces critères ; / c) de l'entretien individuel en vertu de l'article 5 et de la possibilité de fournir des informations sur la présence de membres de la famille, de proches ou de tout autre parent dans les États membres, y compris des moyens par lesquels le demandeur peut fournir ces informations ; / d) de la possibilité de contester une décision de transfert et, le cas échéant, de demander une suspension du transfert ; /e) du fait que les autorités compétentes des États membres peuvent échanger des données le concernant aux seules fins d'exécuter leurs obligations découlant du présent règlement ; / f) de l'existence du droit d'accès aux données le concernant et du droit de demander que ces données soient rectifiées si elles sont inexactes ou supprimées si elles ont fait l'objet d'un traitement illicite, ainsi que des procédures à suivre pour exercer ces droits, y compris des coordonnées des autorités visées à l'article 35 et des autorités nationales chargées de la protection des données qui sont compétentes pour examiner les réclamations relatives à la protection des données à caractère personnel. / 2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les États membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3 (...) / 3. La Commission rédige, au moyen d'actes d'exécution, une brochure commune (...) contenant au minimum les informations visées au paragraphe 1 du présent article. Cette brochure commune comprend également des informations relatives à l'application du règlement (UE) n° 603/2013 et, en particulier, à la finalité pour laquelle les données relatives à un demandeur peuvent être traitées dans Eurodac. La brochure commune est réalisée de telle manière que les États membres puissent y ajouter des informations spécifiques aux États membres(...) " ;

4. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que le demandeur d'asile auquel l'administration entend faire application du règlement du 26 juin 2013 doit se voir remettre, dès le moment où le préfet est informé de ce qu'il est susceptible d'entrer dans le champ d'application de ce règlement, et, en tous cas, avant la décision par laquelle l'autorité administrative décide de refuser l'admission provisoire au séjour de l'intéressé au motif que la France n'est pas responsable de l'instruction de sa demande d'asile, une information complète sur ses droits, par écrit et dans une langue qu'il comprend ; que cette information doit comprendre l'ensemble des éléments prévus au paragraphe 1 de l'article 4 du règlement ; qu'eu égard à la nature de ces informations, la remise par l'autorité administrative de la brochure prévue par les dispositions précitées constitue pour le demandeur d'asile une garantie ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme E...A...et Mlle C...A...ont reçu, le 12 février 2016, à l'issue de leurs entretiens individuels, dont aucun élément du dossier ne permet d'affirmer qu'ils auraient été incomplets, le guide d'information des demandeurs d'asile ; que si elles font valoir qu'elles ont été destinataires de cette brochure dans sa version de 2013 et non dans sa version actualisée au 1er novembre 2015, il ressort des pièces du dossier qu'elles ont également été destinataires du document A " J'ai demandé l'asile dans l'Union européenne - quel pays sera responsable de ma demande d'asile ' " et le document B " Je suis sous procédure Dublin - qu'est-ce que cela signifie ' " prévus par les dispositions de l'article 4 précité ; que si ces documents leur ont été remis en persan, il n'est pas contesté qu'un interprète, dont la compétence n'est pas sérieusement mise en cause, a assuré leur traduction en dari, langue que Mme E...A...et Mlle C...A...ont déclaré comprendre ; qu'ainsi, les requérantes ont bien bénéficié d'une information complète sur leurs droits ; que, dans ces conditions, Mme E...A...et Mlle C...A...ne sont fondées à soutenir ni qu'elles ont été privées de la garantie prévue par les dispositions précitées ni que les arrêtés contestés sont entachés d'un vice de procédure ;

6. Considérant, en second lieu, qu'à la différence de l'obligation d'information instituée par le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, qui prévoit un document d'information sur les droits et obligations des demandeurs d'asile, dont la remise doit intervenir au début de la procédure d'examen des demandes d'asile pour permettre aux intéressés de présenter utilement leur demande aux autorités compétentes, l'obligation d'information prévue par les dispositions de l'article 29, paragraphe 1, du règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013, a uniquement pour objet et pour effet de permettre d'assurer la protection effective des données personnelles des demandeurs d'asile concernés, laquelle est garantie par l'ensemble des Etats membres relevant du régime européen d'asile commun ; que ce droit d'information des demandeurs d'asile contribue, au même titre que le droit de communication, le droit de rectification et le droit d'effacement de ces données, à cette protection ; qu'il s'ensuit que la méconnaissance de cette obligation d'information ne peut être utilement invoquée à l'encontre des décisions par lesquelles l'Etat français remet un demandeur d'asile aux autorités compétentes pour examiner sa demande ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité de la requête de Mlle C...A..., que les requérantes ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes a rejeté leurs demandes ;

Sur le surplus des conclusions :

8. Considérant que doivent être rejetées par voie de conséquence les conclusions à fin d'injonction présentées par les requérantes ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : Les requêtes de Mme E...A...et de Mlle C...A...sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E...A..., à Mlle C...A...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Une copie en sera transmise pour information au préfet d'Ille-et-Vilaine.

Délibéré après l'audience du 20 juin 2017, à laquelle siégeaient :

- Mme Loirat, président,

- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller,

- M. Bouchardon, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 6 juillet 2017.

Le rapporteur,

L. BOUCHARDONLe président,

C. LOIRAT

Le greffier,

M. B... La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°s 16NT03261 et 16NT03265


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 16NT03261
Date de la décision : 06/07/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme LOIRAT
Rapporteur ?: M. Laurent BOUCHARDON
Rapporteur public ?: M. BRECHOT
Avocat(s) : LE STRAT

Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-07-06;16nt03261 ?
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