La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/06/2017 | FRANCE | N°17NT00796

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 29 juin 2017, 17NT00796


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...C...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 18 juillet 2016 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination vers lequel elle pourra être reconduite d'office lorsque le délai sera expiré.

Par un jugement n° 1607628 du 25 janvier 2017, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procé

dure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 5 mars 2017, MmeC..., représentée pa...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...C...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 18 juillet 2016 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination vers lequel elle pourra être reconduite d'office lorsque le délai sera expiré.

Par un jugement n° 1607628 du 25 janvier 2017, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 5 mars 2017, MmeC..., représentée par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 18 juillet 2016 du préfet de la Loire-Atlantique ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique de procéder au réexamen de sa demande de titre de séjour, et dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros qui devra être versée à son conseil en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, moyennant la renonciation de cet avocat à percevoir la contribution versée par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Elle soutient que :

- le tribunal a omis de répondre au moyen tiré de la méconnaissance du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la décision portant refus de titre de séjour n'est pas suffisamment motivée ; elle n'a pas été précédée de l'examen de sa situation personnelle ; elle méconnaît le 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le 1 de l'article 3 et l'article 9 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas suffisamment motivée ; elle a été prise en méconnaissance du droit d'être entendu tel qu'il résulte de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ; elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision fixant le pays de destination n'est pas suffisamment motivée ; elle méconnaît le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 28 avril 2017, le préfet de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'il s'en remet à ses écritures de première instance.

Mme C...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 5 avril 2017.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Delesalle ;

- et les observations de MeB..., représentant Mme C.en France

1. Considérant que Mme C..., ressortissante algérienne, née en 1985, est entrée en France le 28 avril 2014, sous couvert d'un visa de court séjour ; que sa demande de reconnaissance du statut de réfugié a été rejetée par une décision du 14 janvier 2015 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ; que par un arrêté du 20 mai 2015, le préfet de la Loire-Atlantique a pris à son encontre un refus de titre de séjour et l'a assorti d'une obligation de quitter le territoire français ; que Mme C..., qui n'a pas contesté cet arrêté, a sollicité la délivrance d'un certificat de résidence portant la mention vie privée et familiale ; que le préfet de la Loire-Atlantique, par un arrêté du 18 juillet 2016, a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office à l'expiration de ce délai ; que Mme C...relève appel du jugement du 20 janvier 2017 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant que contrairement à ce que soutient MmeC..., les premiers juges ont répondu, au point 6 de leur jugement, au moyen tiré de ce que la décision portant refus de titre de séjour méconnaissait le 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Sur la décision portant refus de titre de séjour :

3. Considérant que la décision comporte les considérations de droit, par le visa des textes concernés, et les considérations de fait, concernant la situation de MmeC..., qui en constituent le fondement ; que l'erreur dont se prévaut la requérante quant à la mention de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration est sans incidence sur le caractère suffisant de la motivation de la décision ; que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit dès lors être écarté ;

4. Considérant que, contrairement à ce que soutient Mme C..., il ressort de la motivation de la décision que le préfet de la Loire-Atlantique a procédé à un examen particulier de sa situation personnelle et familiale avant de lui refuser la délivrance d'un titre de séjour ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " (...) / Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / (...) / 5 Au ressortissant algérien qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) " ;

6. Considérant qu'à la date de la décision contestée, Mme C... ne séjournait en France que depuis deux ans ; que si ses deux filles aînées y sont scolarisées, rien ne s'oppose à ce qu'elles reprennent leur scolarité dans leur pays d'origine ; que si elle fait valoir qu'elle maîtrise la langue française et que sa mère et ses deux soeurs vivent en France, elle n'établit pas qu'elle serait dépourvue d'attaches dans son pays d'origine, où elle a vécu jusqu'à l'âge de vingt-neuf ans, alors qu'il ressort de ses propres déclarations que ses relations sont difficiles avec sa famille demeurant en France; que, dans ces conditions, et en dépit de la circonstance qu'elle aurait été victime de violences de la part de son mari qui l'a par la suite quittée pour regagner l'Algérie et qu'elle souffre d'un problème de vision et bénéficie d'une prise en charge psychologique, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que la décision a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise en méconnaissance du 5 de l'article 6 de la convention franco-algérienne ou de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

7. Considérant que la requérante soutient que la décision n'a pas pris en compte l'intérêt supérieur de ses trois enfants nés en 2010, 2011 et 2014, en raison de leur situation de précarité sociale et de sa situation familiale en Algérie ; que toutefois, ces seuls éléments, alors que la décision n'a ni pour objet ni pour effet de séparer les enfants de leur mère, ne sont pas de nature à la faire regarder comme ayant été prise en méconnaissance du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; que l'article 9 de la même convention créant seulement des obligations entre Etats sans ouvrir de droits aux intéressés, le moyen tiré de sa méconnaissance est, en tout état de cause, inopérant ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

8. Considérant qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, d'écarter le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

9. Considérant que Mme C... soutient qu'elle n'a pas été informée par le préfet de ce qu'elle était susceptible de faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français et n'a de ce fait pas été mise en mesure, en violation de son droit à être entendu résultant d'un principe général du droit de l'Union européenne, de présenter ses observations préalablement à l'édiction de cette mesure ; que, toutefois, elle a été mise à même, dans le cadre de sa demande de titre de séjour, de porter à la connaissance de l'administration l'ensemble des informations relatives à sa situation personnelle dont elle souhaitait se prévaloir ; que si elle soutient qu'elle aurait pu faire valoir la banalisation des violences conjugales dans son pays d'origine et son intégration en France avec trois enfants mineurs à sa charge, il ne ressort pas des pièces du dossier, compte tenu notamment du fait que ces violences ne sont pas établies, qu'elle aurait ainsi disposé d'autres informations qu'elle aurait été empêchée de porter à la connaissance des services de la préfecture avant que soit prise à son encontre la décision l'obligeant à quitter le territoire français et qui, si elles avaient pu être communiquées à temps, auraient été de nature à faire obstacle à l'édiction de cette décision ; que le moyen tiré de la méconnaissance du droit d'être entendu doit, dès lors, être écarté ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 3 à 7 du présent arrêt que le moyen tiré, par voie de l'exception, de l'illégalité de la décision portant refus de séjour doit être écarté ;

11. Considérant que les moyens tirés la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux exposés, respectivement, aux points 6 et 7 du présent arrêt ;

12. Considérant qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, d'écarter le moyen tiré de la méconnaissance du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

13. Considérant qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, d'écarter le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision fixant le pays de renvoi ;

14. Considérant qu'en tout état de cause, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de la méconnaissance du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour les mêmes motifs que ceux retenus à bon droit par les premiers juges et justifiant l'adoption de motifs retenue au point 12 du présent arrêt ;

15. Considérant que Mme C... doit être regardée comme se prévalant de ce que, en Algérie, elle se retrouverait confrontée à une situation de polygamie du fait du nouveau mariage de son époux au mois d'août 2016, isolée ou exposée à de nouvelles violences et qu'elle ne pourrait bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé ; que toutefois, alors que sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, elle n'apporte aucun élément de nature à établir qu'elle y serait exposée à un risque réel et personnel de traitements inhumains ou dégradants au sens de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

16. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...C...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Une copie sera transmise, pour information, au préfet de la Loire-Atlantique.

Délibéré après l'audience du 1er juin 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Bataille, président de chambre,

- Mme Aubert, président-assesseur,

- M. Delesalle, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 29 juin 2017.

Le rapporteur,

H. DelesalleLe président,

F. Bataille

Le greffier,

E. Haubois

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17NT00796


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 17NT00796
Date de la décision : 29/06/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BATAILLE
Rapporteur ?: M. Hubert DELESALLE
Rapporteur public ?: M. JOUNO
Avocat(s) : NERAUDAU

Origine de la décision
Date de l'import : 11/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-06-29;17nt00796 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award