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29/03/2017 | FRANCE | N°16NT01092

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 29 mars 2017, 16NT01092


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler, d'une part, l'arrêté du préfet d'Ille-et-Vilaine du 21 novembre 2014 rejetant sa demande d'admission provisoire au séjour au titre de l'asile et, d'autre part, l'arrêté du 19 décembre 2014 ordonnant sa remise aux autorités bulgares.

Par un jugement n°s 1502235 et 1504624 du 18 décembre 2015, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 29 mar

s 2016, M. D... A..., représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler, d'une part, l'arrêté du préfet d'Ille-et-Vilaine du 21 novembre 2014 rejetant sa demande d'admission provisoire au séjour au titre de l'asile et, d'autre part, l'arrêté du 19 décembre 2014 ordonnant sa remise aux autorités bulgares.

Par un jugement n°s 1502235 et 1504624 du 18 décembre 2015, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 29 mars 2016, M. D... A..., représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rennes du 18 décembre 2015 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 21 novembre 2014 par lequel le préfet d'Ille-et-Vilaine lui a refusé son admission provisoire au séjour au titre de l'asile et l'arrêté du 19 décembre 2014 par lequel le même préfet a ordonné sa réadmission en Bulgarie ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour en qualité de demandeur d'asile, dans un délai de trois jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

s'agissant de l'arrêté portant refus d'admission provisoire au séjour :

- il méconnaît l'article 18-1 du règlement (CE) n° 2725/2000 du Conseil du 11 décembre 2000 ;

- il a été pris suivant une procédure irrégulière en méconnaissance de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;

s'agissant de l'arrêté portant réadmission :

- il doit être annulé par voie de conséquence de l'annulation de l'arrêté portant refus d'admission provisoire au séjour ;

- il méconnaît l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013.

La requête a été communiquée au préfet d'Ille-et-Vilaine, lequel n'a pas produit de mémoire en dépit d'une mise en demeure adressée le 25 mai 2016.

M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 février 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention de Genève relative au statut des réfugiés ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le règlement (CE) n° 2725/2000 du Conseil du 11 décembre 2000 ;

- le règlement (UE) n°604/2013 du Parlement européen et du Conseil en date du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Bouchardon a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.A..., ressortissant afghan né le 7 février 1970, entré irrégulièrement en France le 30 août 2014, a sollicité son admission provisoire au séjour au titre de l'asile qui lui a été refusée par le préfet d'Ille-et-Vilaine au motif que ses empreintes avaient déjà été relevées en Bulgarie où il avait formé une demande d'asile ; que le préfet a demandé sa reprise en charge aux autorités de ce pays qui l'on acceptée le 3 décembre 2014 ; que le requérant relève appel du jugement du 18 décembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du 21 novembre 2014 par lequel le préfet d'Ille-et-Vilaine lui a refusé son admission provisoire au séjour au titre de l'asile et du 19 décembre 2014 par lequel le même préfet a ordonné sa réadmission en Bulgarie ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne l'arrêté du 21 novembre 2014 de refus d'admission provisoire au séjour au titre de l'asile :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 susvisé : " Droit à l'information /1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un Etat membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement, et notamment : / a) des objectifs du présent règlement et des conséquences de la présentation d'une autre demande dans un Etat membre différent ainsi que des conséquences du passage d'un Etat membre à un autre pendant les phases au cours desquelles l'Etat membre responsable en vertu du présent règlement est déterminé et la demande de protection internationale est examinée ; / b) des critères de détermination de l'Etat membre responsable, de la hiérarchie de ces critères au cours des différentes étapes de la procédure et de leur durée, y compris du fait qu'une demande de protection internationale introduite dans un Etat membre peut mener à la désignation de cet Etat membre comme responsable en vertu du présent règlement même si cette responsabilité n'est pas fondée sur ces critères ; / c) de l'entretien individuel en vertu de l'article 5 et de la possibilité de fournir des informations sur la présence de membres de la famille, de proches ou de tout autre parent dans les Etats membres, y compris des moyens par lesquels le demandeur peut fournir ces informations ; / d) de la possibilité de contester une décision de transfert et, le cas échéant, de demander une suspension du transfert ; / e) du fait que les autorités compétentes des Etats membres peuvent échanger des données le concernant aux seules fins d'exécuter leurs obligations découlant du présent règlement ; / f) de l'existence du droit d'accès aux données le concernant et du droit de demander que ces données soient rectifiées si elles sont inexactes ou supprimées si elles ont fait l'objet d'un traitement illicite, ainsi que des procédures à suivre pour exercer ces droits, y compris des coordonnées des autorités visées à l'article 35 et des autorités nationales chargées de la protection des données qui sont compétentes pour examiner les réclamations relatives à la protection des données à caractère personnel. / 2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les Etats membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3. / Si c'est nécessaire à la bonne compréhension du demandeur, les informations lui sont également communiquées oralement, par exemple lors de l'entretien individuel visé à l'article 5. / 4. La Commission rédige, au moyen d'actes d'exécution, une brochure commune (...), contenant au minimum les informations visées au paragraphe 1 du présent article. Cette brochure commune comprend également des informations relatives à l'application du règlement (UE) n° 603/2013 et, en particulier, à la finalité pour laquelle les données relatives à un demandeur peuvent être traitées dans Eurodac. La brochure commune est réalisée de telle manière que les Etats membres puissent y ajouter des informations spécifiques aux Etats membres. Ces actes d'exécution sont adoptés en conformité avec la procédure d'examen visée à l'article 44, paragraphe 2, du présent règlement. " ; qu'en outre, aux termes de l'article 29 du règlement (UE) n°603/2013 du 26 juin 2013, substitué au règlement (CE) n° 2725/2000 du 11 décembre 2000 qui a été abrogé avec effet au 20 juillet 2015 : " 1. Toute personne relevant de l'article 9, paragraphe 1, de l'article 14, paragraphe 1, ou de l'article 17, paragraphe 1, est informée par l'État membre d'origine par écrit et, si nécessaire, oralement, dans une langue qu'elle comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'elle la comprend : a) de l'identité du responsable du traitement au sens de l'article 2, point d), de la directive 95/46/CE, et de son représentant, le cas échéant ; b) de la raison pour laquelle ses données vont être traitées par Eurodac, y compris une description des objectifs du règlement (UE) n°604/2013, conformément à l'article 4 dudit règlement, et des explications, sous une forme intelligible, dans un langage clair et simple, quant au fait que les États membres et Europol peuvent avoir accès à Eurodac à des fins répressives ; c) des destinataires des données... " ;

3. Considérant que le préfet d'Ille-et-Vilaine a établi devant les premiers juges que M. A...a été rendu destinataire, dès le dépôt de sa demande d'autorisation provisoire de séjour en qualité de demandeur d'asile, et en langue pachtou, qu'il a déclaré comprendre, de l'ensemble des informations prévues par les dispositions précitées de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 et des dispositions précitées du 1 de l'article 29 du règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013, par la remise du guide du demandeur d'asile ainsi que de la brochure A intitulée " J'ai demandé l'asile dans l'Union européenne - Quel pays sera responsable de ma demande ' " et de la brochure B intitulée " Je suis sous procédure Dublin - Qu'est-ce que cela signifie ' ", qui constituent la brochure commune prévue par les dispositions de l'article 4 du règlement du 26 juin 2013 et permettent aux demandeurs d'asile de bénéficier d'une information complète sur l'application du règlement ; que, dans ces conditions, M. A...n'est pas fondé à soutenir que l'information qu'il a reçue aurait été lacunaire ou insuffisamment traduite et qu'il aurait été privé des garanties prévues par les dispositions précitées ;

En ce qui concerne l'arrêté 19 décembre 2014 portant réadmission en Bulgarie :

4. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que l'exception d'illégalité de l'arrêté du 21 novembre 2014 portant refus d'admission provisoire au séjour de M. A...au titre de l'asile n'est pas fondée ;

5. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 17 du règlement susvisé du 26 juin 2013 : " Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement " ; qu'aux termes du 2ème alinéa du 2 de l'article 3 du même règlement : " Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'État membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre État membre peut être désigné comme responsable " ; qu'il résulte des dispositions du paragraphe 1 de l'article 3 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 qu'une demande d'asile est en principe examinée par un seul Etat membre ; que cet Etat est déterminé par application des critères fixés par le chapitre III de ce règlement, dans l'ordre énoncé par ce chapitre ; que, selon le même règlement, l'application des critères d'examen des demandes d'asile est écartée en cas de mise en oeuvre, soit de la clause dérogatoire énoncée au paragraphe 1 de l'article 17 du règlement, qui procède d'une décision prise unilatéralement par un Etat membre, soit de la clause humanitaire définie par le paragraphe 2 de ce même article 17 du règlement ; que le paragraphe 1 de cet article prévoit en effet qu'un Etat membre peut, même s'il n'est pas responsable en application des critères fixés par le règlement, " décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée " ;

6. Considérant que si la Bulgarie est un Etat membre de l'Union européenne, partie à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New-York, et à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il appartient néanmoins à l'administration d'apprécier dans chaque cas, au vu des pièces qui lui sont soumises et sous le contrôle du juge, si les conditions dans lesquelles un dossier particulier est traité par les autorités de ce pays répondent à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile ; qu'à la suite des recommandations issues du rapport du Haut commissariat aux réfugiés édictées au mois de janvier 2014 et demandant la suspension temporaire des réadmissions vers la Bulgarie, ce pays a reçu des crédits supplémentaires de l'Union européenne pour le traitement des demandes d'asile et a bénéficié d'un soutien du Bureau européen en matière d'asile ; que le Haut commissariat aux réfugiés a suspendu sa recommandation en avril 2014, tout en maintenant des réserves " pour le transfert de certains groupes vulnérables ", dont M. A...n'établit pas faire partie ; que, dans ces conditions, le requérant n'établit pas que sa réadmission vers la Bulgarie serait, par elle-même, constitutive d'une atteinte au droit d'asile ; que si l'intéressé soutient qu'un retour en Bulgarie l'exposerait à un risque de détention dans des conditions contraires à la dignité humaine, il n'établit pas, par les documents qu'il produit, que les autorités bulgares ne traiteraient pas sa demande d'asile dans le respect du droit d'asile et qu'au jour de la décision contestée, soit le 19 décembre 2014, il existerait en Bulgarie des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraîneraient, pour lui-même, un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par suite, le préfet d'Ille-et-Vilaine n'a pas méconnu les dispositions de la clause dérogatoire énoncée au paragraphe 2 de l'article 3 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A...et au ministre de l'intérieur.

Copie sera adressée au préfet d'Ille-et-Vilaine.

Délibéré après l'audience du 14 mars 2017, à laquelle siégeaient :

- Mme Loirat, président,

- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller,

- M. Bouchardon, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 29 mars 2017.

Le rapporteur,

L. BOUCHARDONLe président,

C. LOIRAT

Le greffier,

M. B...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16NT01092


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 16NT01092
Date de la décision : 29/03/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme LOIRAT
Rapporteur ?: M. Laurent BOUCHARDON
Rapporteur public ?: M. BRECHOT
Avocat(s) : LE STRAT

Origine de la décision
Date de l'import : 11/04/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-03-29;16nt01092 ?
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