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23/03/2017 | FRANCE | N°15NT01754

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 23 mars 2017, 15NT01754


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Children Worldwide Fashion a demandé au tribunal administratif de Nantes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2007 et 2008.

Par un jugement n° 1304631 du 3 avril 2015, le tribunal administratif de Nantes a prononcé un non-lieu à statuer à concurrence du dégrèvement d'une somme de 20 136 euros pour les intérêts de ret

ard dûs au titre de l'année 2007 et a rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Children Worldwide Fashion a demandé au tribunal administratif de Nantes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2007 et 2008.

Par un jugement n° 1304631 du 3 avril 2015, le tribunal administratif de Nantes a prononcé un non-lieu à statuer à concurrence du dégrèvement d'une somme de 20 136 euros pour les intérêts de retard dûs au titre de l'année 2007 et a rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et deux mémoires, enregistrés les 8 juin 2015, 25 mars et 4 avril 2016, la société Children Worldwide Fashion, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 3 avril 2015 ;

2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2007 et 2008 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'administration n'apporte pas la preuve du manque d'approximation suffisante du montant des provisions pour dépréciation de stocks de produits finis qu'elle a enregistrées au titre des exercices clos en 2007 et 2008 dès lors que sa méthode de calcul est erronée ; elle se prévaut des points 40 et 110 du BOI-BIC-PROV-20-10-20-20131217 ;

- à titre subsidiaire, elle justifie avec une précision suffisante de sa méthode de calcul pour le montant des provisions pour dépréciation de stocks de produits finis et des provisions pour risques et charges à partir des données propres de son exploitation ;

- sa méthode d'évaluation des provisions a été validée lors d'un précédent contrôle fiscal.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 26 novembre 2015 et 31 mai 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la SAS Children Worldwide Fashion ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Chollet,

- les conclusions de M. Jouno, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., représentant la SAS Children Worldwide Fashion.

1. Considérant que la société par actions simplifiée (SAS) Children Worldwide Fashion est la société mère d'un groupe fiscalement intégré composé notamment de la société Vecopri ; que la société Vecopri, qui exerce une activité de vente d'articles de confection haut de gamme pour enfants, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration a réintégré dans ses résultats imposables une partie des provisions pour dépréciation de stocks de produits finis et l'intégralité des provisions pour risques et charges comptabilisées au titre des exercices clos en 2007 et 2008 ; qu'au terme de la procédure, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, assorties des intérêts de retard, ont été mises à la charge de la SAS Children Worldwide Fashion, en sa qualité de société mère, au titre de ces exercices ; que la SAS Children Worldwide Fashion relève appel du jugement du 3 avril 2015 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, de ces suppléments d'imposition ;

Sur l'application de la loi fiscale :

En ce qui concerne les provisions pour dépréciation de stocks :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts, applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : / (...) / 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des évènements en cours rendent probables (...) " ; qu'aux termes de l'article 38 du même code : " (...) / (...) les stocks sont évalués au prix de revient ou au cours du jour de la clôture de l'exercice, si ce cours est inférieur au prix de revient. / (...) " ;

3. Considérant que, lorsqu'une entreprise constate que l'ensemble des matières ou produits qu'elle possède en stock ou une catégorie déterminée d'entre eux a, à la date de clôture de l'exercice, une valeur probable de réalisation inférieure au prix de revient, elle peut, à concurrence de l'écart constaté, soit opérer une décote, soit constituer une provision pour dépréciation ; qu'une telle provision ne peut cependant être admise que si l'entreprise est en mesure de justifier de la réalité de cet écart et d'en déterminer le montant avec une approximation suffisante ;

4. Considérant qu'il est constant que la société Vecopri achète auprès de la société requérante l'ensemble de son stock d'articles de la dernière saison et invendu au prix de revient industriel majoré de 13 % pour l'écouler auprès de ses filiales françaises et étrangères qui possèdent des magasins d'usine ; que la société Vecopri vend ses produits en stock à ses filiales avec une marge de 25 % par rapport au prix d'achat non remisé avec toutefois l'obligation de reprendre au même prix leurs invendus ; qu'au terme d'une période estimée à cinq ans, le stock dit résiduel est vendu par des soldeurs, donné ou mis au rebut, en fonction notamment des contraintes imposées par les fabricants de vêtements, différentes selon les marques ; que la société Vecopri a constitué, à la clôture des exercices 2007 et 2008, des provisions pour dépréciation de ce stock résiduel, pour des montants respectifs de 1 327 863 euros et 2 917 206 euros ;

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société Vecopri, qui ne vend que des articles haut de gamme pour enfants, a calculé le montant de ces provisions de manière forfaitaire en distinguant les produits de premier choix et ceux de second choix et en appliquant à la valeur des articles en stock des abattements aux taux de 60 % pour les deux saisons de l'année n-1 et la saison d'été de l'année, de 80 % pour les deux saisons de l'année n-2 et de 100 % pour les saisons antérieures à l'année n-2 ; que la société requérante soutient qu'elle justifie de ces taux à partir des données propres à l'exploitation de la société Vecopri et qu'elle tient compte de l'historique de la société au regard des ventes aux soldeurs et des possibilités d'écoulement du stock ; qu'à l'appui de ses dires, elle produit notamment le détail du stock des produits finis, premier choix et second choix ainsi qu'une évaluation du prix de vente aux soldeurs sur cinq exercices et un calcul du pourcentage de perte, en concluant que le stock résiduel est en moyenne cédé pour un prix représentant 40 % du prix de revient ; que, toutefois, ce mode d'évaluation ne permet pas de déterminer avec une précision suffisante l'écart entre la valeur probable de réalisation des produits en stock à la clôture des exercices 2007 et 2008 et leur prix de revient ; qu'en effet, il résulte de l'instruction qu'il ne tient compte ni du fait, non sérieusement contesté, que la SAS Children Worldwide Fashion accorde à la société Vecopri une remise égale à 60 % sur le stock le plus ancien qui excède sa capacité d'écoulement et celle de ses filiales, qui constitue le stock résiduel au titre duquel les provisions sont constituées, ni des modalités différentes selon lesquelles les fabricants acceptent l'écoulement des invendus ; qu'en outre, l'utilisation d'un taux forfaitaire qui n'a pas été actualisé depuis 2003 ne permet pas d'évaluer avec un degré de probabilité suffisant le montant des provisions ; qu'enfin, la société requérante ne justifie pas, par des éléments précis et tirés de données propres à l'exploitation de la société Vecopri, des taux de décote de 80 % et de 100 % appliqués à la partie la plus ancienne du stock résiduel ; qu'elle ne peut, dès lors, être regardée comme justifiant le montant des provisions pour dépréciation de stock passé en comptabilité au titre des exercices clos en 2007 et 2008 ;

6. Considérant qu'après avoir écarté ce mode de calcul des provisions, le service a calculé la dépréciation des stocks à partir de la comptabilité de la société en distinguant, d'une part, la dépréciation de stocks concernant les dons et mises au rebut, fixée à 167 380 euros en 2007 et à 54 197 euros en 2008 et, d'autre part, et en tenant compte de la remise de 60 % accordée par la SAS Children Worldwide Fashion, la valeur moyenne des pertes réellement subies sur cinq ans au titre des articles vendus à des soldeurs, fixée à 199 407 euros ; qu'en se bornant à soutenir qu'en se fondant sur cette moyenne annuelle, l'administration n'a pas tenu compte du montant et de l'évolution en valeur du stock provisionné et de sa conservation pendant cinq ans, la société requérante n'établit pas, en tout état de cause, que les provisions admises par le service sont sous-évaluées ;

En ce qui concerne les provisions pour risques et charges :

7. Considérant qu'il résulte du 5° de l'article 39 du code général des impôts qu'une entreprise peut valablement porter en provision et déduire des bénéfices imposables d'un exercice le montant des charges qui ne seront supportées qu'ultérieurement par elle, à la condition que ces charges soient nettement précisées quant à leur nature et susceptibles d'être évaluées avec une approximation suffisante, qu'elles apparaissent comme probables eu égard aux circonstances constatées à la date de la clôture et qu'elles se rattachent par un lien direct aux opérations de toute nature déjà effectuées à cette date par l'entreprise ; que la société Vecopri a constitué des provisions pour risques et charges pour des montants de 781 114 euros au titre de l'exercice clos en 2007 et de 1 360 025 euros au titre de l'exercice clos en 2008 correspondant à la perte qu'elle estime avoir subie lors des ventes à des soldeurs des articles invendus par ses filiales ; que, toutefois, cette perte n'est pas distincte de celle calculée au titre des provisions pour dépréciation des stocks ; qu'ainsi, c'est à bon droit que l'administration a réintégré ces provisions dans les bénéfices imposables ;

Sur l'interprétation administrative de la loi :

8. Considérant, en premier lieu, que la société requérante n'est pas fondée à se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des points 40 et 110 du BOI-BIC-PROV-20-10-20 du 17 décembre 2013 relatif au caractère précis de la perte ou de la charge, qui ne comportent pas une interprétation différente de celle de la loi fiscale dont il est fait application par le présent arrêt et qui sont, en tout état de cause, postérieurs à l'expiration du délai de déclaration de l'impôt sur les sociétés dû au titre des exercices clos en 2007 et en 2008 ;

9. Considérant, en second lieu, que la société requérante se prévaut de ce que sa méthode d'évaluation des provisions a été validée lors d'un précédent contrôle fiscal ; que, toutefois, elle n'apporte en appel aucun élément de fait ou de droit de nature à remettre en cause l'appréciation portée à cet égard par le tribunal ; qu'il y a lieu, dès lors, d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SAS Children Worldwide Fashion n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la SAS Children Worldwide Fashion est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée (SAS) Children Worldwide Fashion et au ministre de l'économie et des finances.

Délibéré après l'audience du 9 mars 2017, à laquelle siégeaient :

- Mme Aubert, président de chambre,

- M. Delesalle, premier conseiller,

- Mme Chollet, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 23 mars 2017.

Le rapporteur,

L. CholletLe président,

S. Aubert

Le greffier,

C. Croiger

La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°15NT01754


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 15NT01754
Date de la décision : 23/03/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : Mme AUBERT
Rapporteur ?: Mme Laure CHOLLET
Rapporteur public ?: M. JOUNO
Avocat(s) : SELARL DADI, RENOUX, DE MANNEVILLE, SAVIN

Origine de la décision
Date de l'import : 01/04/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-03-23;15nt01754 ?
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