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15/02/2017 | FRANCE | N°15NT00583

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 15 février 2017, 15NT00583


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Caen de condamner la commune de Moult à lui verser la somme totale de 553 660 euros en réparation des divers préjudices qu'il estime avoir subis du fait des agissements fautifs de ladite commune.

Par un jugement n° 1301819 du 17 décembre 2014, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 17 février 2015 et le 6 octobre 2015, M. C...B..., représenté

par MeD..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Caen de condamner la commune de Moult à lui verser la somme totale de 553 660 euros en réparation des divers préjudices qu'il estime avoir subis du fait des agissements fautifs de ladite commune.

Par un jugement n° 1301819 du 17 décembre 2014, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 17 février 2015 et le 6 octobre 2015, M. C...B..., représenté par MeD..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 17 décembre 2014 ;

2°) de condamner la commune de Moult à lui verser la somme totale de 553 660 euros en réparation des préjudices qu'il a subis du fait des agissements fautifs de la commune à son égard ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Moult la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

sur la régularité du jugement contesté :

­ le jugement est irrégulier dès lors que les premiers juges ont statué acte par acte ; qu'ils ont ainsi omis de statuer sur la faute commise globalement par la commune pour l'empêcher de s'installer ; que, subsidiairement, en procédant ainsi, le tribunal a dénaturé ses moyens ;

sur la responsabilité de la commune de Moult :

­ la commune de Moult a commis une faute en faisant usage de ses prérogatives à des fins autres que celles pour lesquelles elles lui ont été confiées ; qu'elle a ainsi tenté depuis plus de dix ans par divers manoeuvres dilatoires contraires à l'intérêt général de le dissuader d'installer son activité professionnelle sur la parcelle qu'il a acquise située sur le territoire de la commune ;

sur les préjudices :

­ il a été contraint, eu égard à l'ensemble des procédures diligentées à son encontre par la commune, de différer le commencement de son projet professionnel et à poursuivre son activité dans des locaux inadaptés ; qu'il a subi ainsi une perte de chance de développer son entreprise à la mesure de ses capacités et compétences, lui occasionnant un préjudice financier estimé à 431 660 euros ;

­ ces différentes procédures judiciaires engagées par la commune à son encontre l'ont contraint d'assumer la prise en charge des honoraires de son conseil à hauteur de 12 000 euros ;

­ il a subi un préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence estimés respectivement à 60 000 et 50 000 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 mai 2015, la commune de Moult, représentée par MeE..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. B...la somme de 3 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient qu'aucune des moyens de la requête de M. B...n'est fondé ; qu'ainsi :

­ le jugement attaqué est régulier, le tribunal n'ayant ni omis de statuer, ni dénaturer un moyen de la requête ;

­ la créance relative à l'illégalité fautive du certificat d'urbanisme négatif est prescrite depuis le 1er janvier 2011, de sorte qu'elle a pu à bon droit opposer la prescription quadriennale ;

­ elle n'a commis aucune faute en l'espèce que ce soit lors de la vente de la parcelle cadastrée ZB n°144, ou à l'occasion des poursuites pénales qu'elle avait engagées à l'encontre du requérant ou encore lorsqu'elle a saisi le juge judiciaire pour la remise en état du terrain; que si le certificat d'urbanisme négatif initialement délivré à M. B...a été annulé par un jugement du tribunal administratif de Caen, il a été délivré à l'intéressé un certificat d'urbanisme positif le 28 avril 2006 et qui a été ensuite prorogé à deux reprises ;

­ ni le préjudice subi par M.B..., ni le lien de causalité ne sont établis ;

­ M. B...a commis une faute en ne réalisant pas son projet de construction dès lors qu'il s'est vu délivrer un certificat d'urbanisme positif le 28 avril 2006, renouvelé à deux reprises ainsi qu'un permis de construire suite à sa demande déposée le 21 mars 2011.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...'hirondel,

- les conclusions de Mme Piltant, rapporteur public,

- et les observations de MeD..., représentant M.B....

1. Considérant que M.B..., qui est artisan en ferronnerie d'art, relève appel du jugement du 17 décembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa requête tendant à la condamnation de la commune de Moult à lui verser la somme totale de 553 660 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait d'agissements fautifs de cette commune qui l'auraient empêché de mener à bien le projet professionnel qu'il souhaitait entreprendre sur la parcelle cadastrée section ZB n°144 dont il est propriétaire ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que le tribunal administratif a rejeté la requête de M. B...après avoir retenu, d'une part, que la commune était fondée à opposer, sur le fondement des dispositions de l'article 1er de la loi n°68-1250 du 31 décembre 1968, la prescription quadriennale à la demande du requérant tendant à obtenir réparation du préjudice subi du fait de l'illégalité du certificat d'urbanisme négatif délivré le 16 août 2005, et d'autre part, que les autres griefs tirés des fautes commises par la commune, dont il a procédé pour chacun d'eux à un examen particulier, devaient être écartés comme non fondés ; qu'en relevant ainsi qu'aucun des griefs formulés par M. B... ne pouvait être relevé à l'encontre de la commune de Moult, le tribunal a implicitement mais nécessairement reconnu que l'agissement fautif de la commune à l'égard de M. B... dans sa globalité n'était pas constitué ; que, par suite, le jugement attaqué, qui a examiné et exactement répondu aux moyens de la requête, n'est pas entaché des irrégularités alléguées ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. Considérant que M. B...soutient que la commune de Moult a intentionnellement et frauduleusement tenté de faire obstacle à la réalisation de son projet de construction d'un atelier de fabrication de ferronnerie artisanale sur la parcelle désormais cadastrée section ZB n° 144, d'une contenance de 6 500 m², située le long de la RN 13, et anciennement dépendante de la parcelle ZB n°120, en usant de ses pouvoirs à d'autres fins que celles pour lesquelles ils lui ont été confiés ; qu'au soutien de son allégation, le requérant fait valoir que la commune a tenté de l'empêcher d'acquérir ladite parcelle en se portant notamment acquéreur, suivant une délibération du 22 janvier 2005, de la parcelle cadastrée section ZB n°120, qu'elle lui a ensuite délivré le 16 août 2005 un certificat d'urbanisme négatif, lequel a été annulé par un jugement du tribunal administratif de Caen du 21 septembre 2006 au motif que la décision était fondée sur des faits matériellement inexacts ; qu'il fait également valoir que la commune de Moult aurait engagé à son encontre des procédures judiciaires abusives devant le juge pénal en 2010 puis devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Caen en 2011 ; que, selon lui, ces agissements démontreraient, dans leur " globalité ", l'acharnement de la commune à son encontre, et impliqueraient en conséquence qu'il soit indemnisé de la perte de chance de pouvoir développer son activité artisanale, du préjudice moral et des troubles qu'il subirait depuis 1997 dans ses conditions d'existence du fait de cette attitude fautive ;

4. Considérant, en premier lieu, que si M. B...fait valoir que, par un acte sous-seing privé du 17 avril 1997, la SCI Lojual lui aurait vendu la parcelle de terrain dont il s'agit, d'une contenance de 6 500 m², il résulte néanmoins de l'instruction que cet acte était assorti de conditions suspensives ; que M. B... reconnait qu'il a été par la suite contraint d'assigner la SCI en justice et qu'il n'est devenu ainsi définitivement propriétaire du terrain que le 28 février 2008 ; que, dans sa délibération du 22 janvier 2005, la commune indique expressément ne vouloir acquérir le lot de 6 500 m² que dans l'hypothèse où la SCI Lojual se verrait confirmer dans ses droits suite au litige qui l'oppose à M. B...ou si ce dernier accepte d'être indemnisé ; que, par ailleurs, par un courrier du 17 janvier 2008, le maire de Moult a fait connaître à M. B...son intention de ne pas user de son droit de préemption pour le terrain ZB n°144, cette décision ayant été, en outre, formalisée au sein de la déclaration d'intention d'aliéner établie par le notaire chargé de la vente du terrain par la SCI Lojual à M. B..., le 5 février 2008 ; que, de plus, M. B...a obtenu pour le terrain qu'il souhaitait acquérir un certificat d'urbanisme positif qui lui a été notifié le 28 avril 2006 puis prorogé à deux reprises pour une année supplémentaire par arrêtés du maire de Moult des 6 mars 2007 et 25 janvier 2008 ; qu'enfin, ce n'est que le 21 mars 2011 que M. B...a déposé une demande de permis de construire pour un atelier de fabrication de ferronnerie artisanale, lequel lui a été délivré par le maire de Moult le 22 septembre 2011, et auquel il n'a pas donné suite en procédant à la construction envisagée ; qu'il suit de là que M. B...n'établit pas que les agissements de la commune seraient à l'origine de son impossibilité à avoir pu construire l'atelier de ferronnerie artisanale qu'il envisageait sur la parcelle cadastrée section ZB n°144 ; que, dans ces conditions, les préjudices tirés de la perte de chance, du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence qu'il invoque sont sans lien de causalité direct avec les agissements imputés à la commune ; que M. B...ne saurait alors demander à être indemnisé pour ces chefs de préjudice ;

5. Considérant, en second lieu, que si M. B...demande à la cour de condamner la commune de Moult à lui verser la somme de 12 000 euros au titre de remboursement des frais engagés pour les besoins de sa défense " face aux différentes procédures engagées (...) à son encontre ", il n'assortit pas sa demande des précisions suffisantes pour permettre à la cour d'en apprécier le bien fondé ; que, par suite, ce chef de préjudice doit également être écarté ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Moult, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. B...demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de ce dernier une somme de 1 500 euros au titre des frais de même nature que la commune a exposés ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : M. B...versera à la commune de Moult la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B...et à la commune de Moult.

Délibéré après l'audience du 31 janvier 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Millet, président,

- Mme Buffet, premier conseiller,

- M. A...'hirondel, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 février 2017.

Le rapporteur,

M. F...Le président,

J-F. MILLET

Le greffier,

S. BOYERE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 15NT00583


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 15NT00583
Date de la décision : 15/02/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. MILLET
Rapporteur ?: M. Michel LHIRONDEL
Rapporteur public ?: Mme PILTANT
Avocat(s) : SELARL JURIADIS

Origine de la décision
Date de l'import : 25/02/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-02-15;15nt00583 ?
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