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28/09/2016 | FRANCE | N°15NT03031

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 28 septembre 2016, 15NT03031


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... E...a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 17 octobre 2014 du préfet du Loiret portant refus de lui délivrer un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, et fixant comme pays de destination la République démocratique du Congo.

Par un jugement n° 1404856 du 24 mars 2015, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des pièces complé

mentaires, enregistrées le 30 septembre 2015 et les 27 novembre 2015 et 24 février 2016, M. B...E....

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... E...a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 17 octobre 2014 du préfet du Loiret portant refus de lui délivrer un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, et fixant comme pays de destination la République démocratique du Congo.

Par un jugement n° 1404856 du 24 mars 2015, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des pièces complémentaires, enregistrées le 30 septembre 2015 et les 27 novembre 2015 et 24 février 2016, M. B...E..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 24 mars 2015 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 17 octobre 2014 du préfet du Loiret ;

3°) d'enjoindre au préfet du Loiret, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, de reprendre l'instruction de son dossier en lui délivrant, durant cet examen, une autorisation provisoire de séjour, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat de la somme de 1 000 euros sur le fondement des articles L.761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'une erreur de fait ;

- la décision portant refus de titre de séjour méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur de fait, d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision portant refus de titre de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- le préfet ne pouvait, sans entacher son arrêté d'un vice de procédure, s'abstenir de saisir la commission du titre de séjour ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 décembre 2015, le préfet du Loiret conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. E...ne sont pas fondés.

M. E... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 août 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M.A...'hirondel a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.E..., ressortissant de la République Démocratique du Congo, est entré irrégulièrement en France, selon ses déclarations, le 22 août 2012 ; qu'ayant indiqué être né le 26 décembre 1995, conformément aux mentions portées sur le duplicata d'acte de naissance qu'il avait présenté, il a été confié provisoirement au service départemental de l'aide sociale à l'enfance du Loiret ; que le juge des tutelles du tribunal de grande instance d'Orléans a, par une ordonnance du 14 mars 2013, confirmée par la Cour d'appel d'Orléans le 23 septembre 2013, refusé d'ouvrir une tutelle au profit de l'intéressé au motif que l'expertise osseuse réalisée avait révélé un âge supérieur à 18 ans et que le duplicata d'acte de naissance produit comportait des omissions et des incohérences de nature à remettre en cause son authenticité ; que M. E...s'est maintenu sur le territoire et a sollicité, le 19 février 2014, la délivrance d'un titre de séjour en faisant valoir son entrée en France en qualité de mineur isolé et son inscription en filière professionnelle électrotechnique ; que, par un arrêté du 17 octobre 2014, le préfet du Loiret a refusé la délivrance du titre demandé, a assorti sa décision d'une obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé la République Démocratique du Congo comme pays de destination ; que M. E...relève appel du jugement du 24 mars 2015 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

En ce qui concerne la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, que si M. E...produit en appel un passeport mentionnant la même date de naissance que celle indiquée sur son acte de naissance et soutient que le préfet ne pouvait se fonder sur le caractère apocryphe de ce document, il ressort des termes de l'arrêté contesté que le refus de titre de séjour opposé à M. E...n'est pas fondé sur l'existence d'une fraude à l'identité de nature à remettre en cause son âge ; que, par suite, le moyen tiré de l'erreur de fait est inopérant et doit être écarté ;

3. Considérant, en second lieu, que, lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé ; que, lorsque le préfet recherche d'office si l'étranger peut bénéficier d'un titre de séjour sur un ou plusieurs autres fondements possibles, l'intéressé peut alors se prévaloir à l'encontre de la décision de rejet de sa demande de titre de séjour de la méconnaissance des dispositions au regard desquelles le préfet a également fait porter son examen ; que, dans le cas où, comme en l'espèce, le préfet énonce, parmi les motifs de la décision portant refus de séjour, que l'intéressé " n'entre dans aucun autre cas d'attribution d'un titre de séjour en application du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ", il doit être réputé avoir examiné si le demandeur était susceptible de recevoir l'un des titres de séjour dont la loi dispose qu'ils sont attribués de plein droit ;

4. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ";

5. Considérant que si M. E...se prévaut de sa bonne intégration scolaire et de ses liens amicaux en France, il ressort toutefois des pièces du dossier que l'intéressé, qui ne séjourne sur le territoire national que depuis l'année 2012, y est célibataire et sans charge de famille et qu'il n'établit pas être dépourvu d'attaches dans son pays d'origine ; que, dans ces conditions, compte tenu de la durée et des conditions de son séjour en France, la décision de refus de séjour n'a pas porté au droit de M. E...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs qui lui ont été opposés et ne méconnaît ainsi ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que le préfet n'a pas davantage commis d'erreur de fait, d'erreur de droit ou d'erreur manifeste d'appréciation ;

6. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 313-15 du même code : " A titre exceptionnel et sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire prévue au 1° de l'article L. 313-10 portant la mention " salarié " ou la mention " travailleur temporaire " peut être délivrée, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, à l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Le respect de la condition prévue à l'article L. 311-7 n'est pas exigé" ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que pour rejeter la demande de titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-15, le préfet du Loiret s'est fondé, eu égard à la demande de substitution de motifs sollicitée devant les premiers juges et à laquelle ces derniers ont fait droit, sur la circonstance que M. E...ne satisfaisait pas à la condition requise d'avoir été confié au service de l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de 16 et 18 ans ; qu'il est constant que suite au refus du juge des tutelles, confirmé en appel, d'ouvrir une tutelle au profit de M.E..., le service de l'aide sociale à l'enfance du département du Loiret a refusé de prendre en charge l'intéressé ; que, par suite, et sans que le requérant ne puisse reprocher à l'autorité préfectorale une telle décision, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut qu'être écarté ; que le préfet n'a pas davantage commis d'erreur manifeste d'appréciation ;

8. Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ( ...) " ; que le préfet n'est tenu de saisir la commission du titre de séjour que du seul cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues à l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et non du cas de tous les étrangers qui se prévalent du bénéfice de ces dispositions ; que compte tenu de ce qui vient d'être dit, dès lors que M. E...n'est pas au nombre des étrangers remplissant les conditions pour se voir délivrer de plein droit une carte de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'était pas tenu, en application des dispositions précitées de l'article L. 312-2 de ce code, de saisir la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire :

9. Considérant que, compte tenu de ce qui a été dit ci-avant, M. E...n'est pas fondé à invoquer, par voie d'exception, l'illégalité de la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour pour contester la légalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. E...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées par voie de conséquence les conclusions à fin d'injonction présentées par M. E...ainsi que celles tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... E...et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera transmise pour information au préfet du Loiret.

Délibéré après l'audience du 13 septembre 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Millet, président,

- Mme Buffet, premier conseiller,

- M. A...'hirondel, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 28 septembre 2016.

Le rapporteur,

M. D...Le président,

J-F. MILLET

Le greffier,

S. BOYERE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15NT03031


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 15NT03031
Date de la décision : 28/09/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. MILLET
Rapporteur ?: M. Michel LHIRONDEL
Rapporteur public ?: Mme PILTANT
Avocat(s) : SELARL DUPLANTIER MALLET GIRY ROUICHI

Origine de la décision
Date de l'import : 11/10/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2016-09-28;15nt03031 ?
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