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05/04/2016 | FRANCE | N°15NT03609

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 05 avril 2016, 15NT03609


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 2 février 2015 par lequel le préfet du Loiret a refusé de lui délivrer une carte de séjour temporaire et l'a obligée à quitter le territoire français en fixant le pays de destination.

Par un jugement n° 1501378 du 7 juillet 2015, le tribunal administratif a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 27 novembre 2015, MmeA..., représentée par Me Greffard-Poisson,

demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 7 juillet 201...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 2 février 2015 par lequel le préfet du Loiret a refusé de lui délivrer une carte de séjour temporaire et l'a obligée à quitter le territoire français en fixant le pays de destination.

Par un jugement n° 1501378 du 7 juillet 2015, le tribunal administratif a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 27 novembre 2015, MmeA..., représentée par Me Greffard-Poisson, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 7 juillet 2015 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 2 février 2015 du préfet du Loiret ;

3°) d'enjoindre au préfet du Loiret de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Greffard-Poisson de la somme de 1 500 euros au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- l'arrêté en litige édicté dès le 2 février 2015 est entaché d'irrégularité dès lors qu'elle a été dans l'impossibilité de communiquer à l'administration des éléments relatifs à sa situation ne permettant pas ainsi au préfet d'apprécier l'ensemble de son dossier alors qu'elle avait demandé le 26 janvier 2015 un rendez-vous confirmé ce jour même comme devant intervenir le 10 février 2015 ; l'autorité administrative a adopté une attitude déloyale en la privant de la possibilité de communiquer des éléments relatifs à sa situation ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation ; sa situation relève des dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 dès lors qu'elle a suivi une formation qualifiante et témoigne de ses efforts d'intégration ;

- son état de santé justifie d'une admission au séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 311-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans la mesure où elle souffre d'une pathologie virale nécessitant un suivi spécialisé de longue durée ;

- l'obligation de quitter le territoire a été prise en méconnaissance des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 janvier 2016, le préfet du Loiret demande à la cour de rejeter la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens invoqués par Mme A...n'est fondé.

Mme A...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du président de la section administrative du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes du 21 octobre 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Auger, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public.

1. Considérant que Mme C...A..., ressortissante sierra-léonaise née le 31 décembre 1994, est entrée en France selon ses déclarations le 3 août 2012 ; qu'elle a sollicité le statut de réfugié auprès de la préfecture du Loiret ; que cette demande a fait l'objet d'une décision de rejet du 23 mai 2013 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), confirmée le 23 décembre 2014 par la Cour nationale du droit d'asile ; qu'elle relève appel du jugement du 7 juillet 2015 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 2 février 2015 du préfet du Loiret refusant de lui délivrer un titre de séjour et prononçant à son encontre l'obligation de quitter le territoire français ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si la présence de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public, la carte de résident est délivrée de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour : (...) 8° A l'étranger qui a obtenu le statut de réfugié en application du livre VII du présent code (...) " ; qu'aux termes de l'article L.742-6 de ce code : " L'étranger présent sur le territoire français dont la demande d'asile entre dans l'un des cas visés aux 2° à 4° de l'article L. 741-4 bénéficie du droit de se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, lorsqu'il s'agit d'une décision de rejet. En conséquence, aucune mesure d'éloignement mentionnée au livre V du présent code ne peut être mise à exécution avant la décision de l'office " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...) " ; que l'article L. 311-4 du même code dispose que " La détention d'une attestation de demande de délivrance ou de renouvellement d'un titre de séjour, d'une attestation de demande d'asile ou d'une autorisation provisoire de séjour autorise la présence de l'étranger en France sans préjuger de la décision définitive qui sera prise au regard de son droit au séjour. " ; qu'enfin, aux termes des articles R. 311-4 et R. 311-5 de ce code, " Il est remis à tout étranger admis à souscrire une demande de première délivrance ou de renouvellement de titre de séjour un récépissé qui autorise la présence de l'intéressé sur le territoire pour la durée qu'il précise. Ce récépissé est revêtu de la signature de l'agent compétent ainsi que du timbre du service chargé, en vertu de l'article R. 311-10, de l'instruction de la demande. " et " La durée de validité du récépissé mentionné à l'article R. 311-4 ne peut être inférieure à un mois. Le récépissé peut être renouvelé. " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme C...A...a sollicité expressément un rendez-vous en vue de déposer une demande de titre de séjour, fondée sur des éléments nouveaux relevant pour l'essentiel du 11° de l'article L. 313-11 et subsidiairement de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, antérieurement à l'intervention de l'arrêté litigieux ; qu'un message électronique de confirmation lui a été adressé le 26 janvier 2015 par le service compétent pour qu'elle se présente en préfecture le 10 février 2015 ; qu'il est constant qu'elle a d'ailleurs répondu à cette invitation et qu'il ressort des pièces du dossier que lors du rendez-vous en cause, l'agent qui l'a reçue a refusé d'enregistrer sa nouvelle demande de titre de séjour en raison de l'intervention de l'arrêté du 2 février 2015, alors qu'il n'est ni établi ni même allégué que cette demande aurait présenté un caractère abusif ou dilatoire ; que, dans ces conditions, le préfet devait être nécessairement regardé comme également saisi d'une demande sur le fondement d'une disposition autre que le 8° de l'article L. 314-11 précité et, s'il pouvait refuser l'admission au séjour au titre de l'asile, ne se trouvait pas en situation de compétence liée pour refuser la délivrance de tout titre de séjour à l'intéressée ; qu'en admettant même que la nouvelle demande de titre de séjour de Mme A...n'aurait pu aboutir, comme le soutient le préfet, cette circonstance n'était pas de nature, dès lors que cette demande n'était ni abusive ni dilatoire, à dispenser l'autorité préfectorale, qui n'était pas en situation de compétence liée, d'enregistrer cette demande et de procéder à l'examen de celle-ci après avoir mis l'intéressée en possession d'un récépissé valant autorisation provisoire de séjour ; que dans ces conditions, le préfet, a privé l'intéressée, sans motif légalement fondé, des garanties attachées à la procédure d'examen des demandes de titre de séjour et de contestation des refus de séjour assortis d'une obligation de quitter le territoire français, et ainsi entaché l'ensemble de l'arrêté en litige de détournement de procédure ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens invoqués, que Mme A...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. Considérant que le présent arrêt, qui annule l'arrêté litigieux pour le motif exposé au point 3, implique que le préfet du Loiret délivre à Mme A...un récépissé valant autorisation provisoire de séjour et qu'il procède au réexamen de sa situation à la lumière des nouveaux éléments invoqués par l'intéressée ; qu'il y a lieu de lui adresser une injonction en ce sens ;

Sur les conclusions tendant à l'application des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Considérant que Mme A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Greffard-Poisson, avocat de MmeA..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de ce dernier le versement à cet avocat d'une somme de 1 500 euros ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif d'Orléans du 7 juillet 2015 et l'arrêté du 2 février 2015 du préfet du Loiret sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Loiret de réexaminer la situation de Mme A...dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Me Greffard-Poisson, avocat de MmeA..., une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cet avocat renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à C...A...et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera transmise pour information au préfet du Loiret.

Délibéré après l'audience du 15 mars 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- Mme Loirat, président-assesseur,

- M. Auger, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 5 avril 2016.

Le rapporteur,

P. AUGERLe président,

L. LAINÉ

Le greffier,

M. B...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15NT03609


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 15NT03609
Date de la décision : 05/04/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: M. Paul AUGER
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : SELARL OMNIS AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 21/04/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2016-04-05;15nt03609 ?
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