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01/03/2016 | FRANCE | N°15NT02459

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 01 mars 2016, 15NT02459


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 19 novembre 2012 du préfet d'Ille-et-Vilaine portant refus de délivrance d'une carte de résident d'une validité de 10 ans.

Par un jugement n° 1303055 du 12 décembre 2014, le tribunal administratif de Rennes a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 30 juillet 2015, MmeD..., représentée par MeE..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribuna

l administratif de Rennes du 12 décembre 2014 ;

2°) d'annuler la décision du préfet d'Ille-et-Vilaine...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 19 novembre 2012 du préfet d'Ille-et-Vilaine portant refus de délivrance d'une carte de résident d'une validité de 10 ans.

Par un jugement n° 1303055 du 12 décembre 2014, le tribunal administratif de Rennes a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 30 juillet 2015, MmeD..., représentée par MeE..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rennes du 12 décembre 2014 ;

2°) d'annuler la décision du préfet d'Ille-et-Vilaine du 19 novembre 2012 ;

3°) d'enjoindre au préfet d'Ille-et-Vilaine de lui délivrer une carte de résident dans le délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à défaut, de procéder à un nouvel examen de sa situation administrative ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que le tribunal a écarté le moyen tiré de la méconnaissance des articles 8 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'elle est victime d'une discrimination en tant que personne handicapée ;

- son handicap ne lui permet pas de répondre aux conditions de ressources exigées par les dispositions de l'article L. 314-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par lettre du 12 octobre 2015, le préfet d'Ille-et-Vilaine a été mis en demeure de produire ses observations dans le délai d'un mois, en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative.

Mme D...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du président de la section administrative du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes du 18 mai 2015.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Auger, premier conseiller ;

- les observations de Me C...pour MmeD....

1. Considérant que MmeD..., ressortissante géorgienne, est entrée irrégulièrement en France le 27 décembre 2002 et s'est vue refuser la qualité de demandeur d'asile ; qu'elle a bénéficié, à compter du 24 novembre 2006, de la délivrance de cartes de séjour temporaires régulièrement renouvelées ; qu'elle a sollicité le 17 octobre 2011 auprès des services du préfet d'Ille-et-Vilaine l'octroi d'une carte de résident ; qu'elle relève appel du jugement du 12 décembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet du 19 novembre 2012 portant refus de délivrance d'une carte de résident d'une validité de dix ans ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 314-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Tout étranger qui justifie d'une résidence ininterrompue d'au moins cinq années en France, conforme aux lois et règlements en vigueur, sous couvert de l'une des cartes de séjour mentionnées aux articles L. 313-6, L. 313-8 et L. 313-9, aux 1°, 2° et 3° de l'article L. 313-10, aux articles L. 313-11, L. 313-11-1, L. 313-14 et L. 314-9, aux 2°, 3°, 4°, 5°, 6°, 7° et 9° de l'article L. 314-11 et aux articles L. 314-12 et L. 315-1 peut obtenir une carte de résident portant la mention " résident de longue durée-CE " s'il dispose d'une assurance maladie (...) La décision d'accorder ou de refuser cette carte est prise en tenant compte des faits qu'il peut invoquer à l'appui de son intention de s'établir durablement en France, notamment au regard des conditions de son activité professionnelle s'il en a une, et de ses moyens d'existence. / Les moyens d'existence du demandeur sont appréciés au regard de ses ressources qui doivent être stables et suffisantes pour subvenir à ses besoins. Sont prises en compte toutes les ressources propres du demandeur indépendamment des prestations familiales et des allocations prévues aux articles L. 262-1 du code de l'action sociale et des familles et L. 351-9, L. 351-10 et L. 351-10-1 du code du travail. Ces ressources doivent atteindre un montant au moins égal au salaire minimum de croissance et sont appréciées au regard des conditions de logement (...) " ; que l'article R. 314-1-1 du même code dispose que : " L'étranger qui sollicite la délivrance de la carte de résident portant la mention " résident de longue durée-CE " doit justifier qu'il remplit les conditions prévues à l'article L. 314-8 en présentant : / (...) 3° La justification qu'il dispose de ressources propres, stables et régulières, suffisant à son entretien, indépendamment des prestations et des allocations mentionnées au deuxième alinéa de l'article L. 314-8, appréciées sur la période des cinq années précédant sa demande, par référence au montant du salaire minimum de croissance (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions, qui doivent être interprétées conformément aux objectifs de la directive 2003/109/CE du 25 novembre 2003, dont elles assurent la transposition et qui visent à permettre la délivrance d'un titre de séjour de longue durée valable dans l'ensemble du territoire de l'Union, qu'est exclue dans le calcul des ressources la prise en compte non seulement des prestations énumérées, mais également des autres prestations d'aide sociale, notamment l'allocation aux adultes handicapés mentionnée aux articles L. 821-1 et suivants du code de la sécurité sociale ; que Mme D...ne conteste pas que ses ressources propres, au sens des dispositions de l'article L. 314-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, n'atteignent pas un montant au moins égal au salaire minimum de croissance ; que le préfet ne pouvait donc lui délivrer la carte de résident qu'elle sollicitait ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article 14 de la même convention : " La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation " ;

4. Considérant que Mme D...fait valoir que, compte tenu de son handicap, elle ne peut occuper un emploi lui permettant de bénéficier de revenus propres correspondant au montant du salaire minimum de croissance et soutient que les dispositions de l'article L. 314-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile présentent un caractère discriminatoire prohibé par les stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales combinées avec celles de l'article 8 de la même convention ; qu'il ressort des pièces du dossier que la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées d'Ille-et-Vilaine lui avait reconnu un taux d'incapacité compris entre 50 et 75 % ainsi qu'une restriction substantielle et durable à l'emploi ouvrant droit au bénéfice de l'allocation aux adultes handicapés pour la période comprise entre le 1er novembre 2010 et le 31 octobre 2013 ; que, toutefois, les seules circonstances qu'elle bénéficie de cette allocation et qu'elle n'ait qu'un accès restreint à l'emploi ne lui permettent pas de se soustraire à la condition de ressources posée par l'article L. 314-8 ou à contraindre l'administration à apprécier sa situation dans des conditions différentes de celles qui s'appliquent aux étrangers qui, pour d'autres motifs indépendants de leur volonté, disposent de ressources inférieures au salaire minimum de croissance ; que la discrimination alléguée, fondée sur l'état de santé, n'est donc pas établie ; qu'il suit de là que la décision contestée ne saurait être regardée comme présentant à l'égard d'un demandeur handicapé un caractère discriminatoire prohibé par les stipulations sus-évoquées ; que la requérante ne peut se prévaloir utilement de la délibération n° 2011-82 du 28 mars 2011 de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité (HALDE) ou de la décision MLD-2014-100 du défenseur des droits, qui sont dépourvues de force contraignante et n'ouvrent par elles-mêmes aucun droit au bénéfice des justiciables ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande ;

Sur le surplus des conclusions :

6. Considérant que doivent être rejetées par voie de conséquence les conclusions à fin d'injonction présentées par Mme D...ainsi que celles tendant au bénéfice des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...D...et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera transmise au préfet d'Ille-et-Vilaine.

Délibéré après l'audience du 9 février 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- Mme Loirat, président-assesseur,

- M. Auger, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 1er mars 2016.

Le rapporteur,

P. AUGERLe président,

L. LAINÉ

Le greffier,

M. B...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15NT02459


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 15NT02459
Date de la décision : 01/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: M. Paul AUGER
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : LE STRAT

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2016-03-01;15nt02459 ?
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