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01/03/2016 | FRANCE | N°15NT02457

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 01 mars 2016, 15NT02457


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler, d'une part, la décision du préfet de la Loire-Atlantique du 23 mars 2015 prononçant sa remise aux autorités hongroises en vue du traitement de sa demande d'asile et, d'autre part, l'arrêté du 12 mai 2015 par lequel le préfet l'a assigné à résidence dans le département pour quarante cinq jours.

Par un jugement n° 1504010 du 13 mai 2015, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté cette dema

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Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 3 ao...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler, d'une part, la décision du préfet de la Loire-Atlantique du 23 mars 2015 prononçant sa remise aux autorités hongroises en vue du traitement de sa demande d'asile et, d'autre part, l'arrêté du 12 mai 2015 par lequel le préfet l'a assigné à résidence dans le département pour quarante cinq jours.

Par un jugement n° 1504010 du 13 mai 2015, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 3 août 2015 et le 3 février 2016, M.B..., représenté par MeD..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 13 mai 2015 ;

2°) d'annuler la décision du préfet de la Loire-Atlantique du 23 mars 2015 prononçant sa remise aux autorités hongroises en vue du traitement de sa demande d'asile ;

3°) d'annuler l'arrêté du 12 mai 2015 l'assignant à résidence dans le département pour quarante cinq jours ;

4°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour en vue de ses démarches auprès de l'office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision de réadmission en Hongrie méconnaît les dispositions de l'article L. 531-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; le document portant notification de cette décision n'est pas revêtu de sa signature ; il n'est pas établi qu'il a pu présenter ses observations ou avertir son conseil ;

- les dispositions de l'article 26 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ont également été méconnues ;

- la décision portant réadmission en Hongrie est entachée d'une erreur de droit au regard de l'article 53-I de la Constitution du 4 octobre 1958, de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 et du dernier alinéa de l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que le préfet s'est estimé en situation de compétence liée ;

- l'autorité administrative a insuffisamment examiné sa situation en ne faisant pas application de la clause humanitaire prévue à l'article 16 du règlement UE n°604/2013 ;

- la décision portant réadmission est entachée d'erreur manifeste d'appréciation, dès lors que les autorités hongroises ne remplissent pas les obligations internationales de protection des réfugiés ; le préfet aurait du procéder à une étude des risques encourus ; le Haut-commissariat aux réfugiés a relevé les manquements graves de l'Etat Hongrois ; l'autorité administrative ne peut estimer qu'il existe une présomption de sécurité du seul fait que la Hongrie est membre de l'Union européenne ;

- il est fondé à exciper de l'illégalité de la décision portant réadmission à l'encontre de l'arrêté l'assignant à résidence.

Par lettre du 12 octobre 2015, le préfet de la Loire-Atlantique a été mis en demeure de produire ses observations dans le délai d'un mois, en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative.

M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du président de la section administrative du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes du 6 juillet 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la directive n° 2005/85/CE du 1er décembre 2005 ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Auger, premier conseiller.

1. Considérant que M.B..., ressortissant ivoirien, a sollicité le 3 février 2015 la reconnaissance de la qualité de réfugié auprès du préfet de la Loire-Atlantique ; que, constatant par la consultation du fichier Eurodac que les empreintes de l'intéressé avaient déjà été relevées par les autorités hongroises le 16 décembre 2014, le préfet de la Loire-Atlantique a refusé le 9 février 2015 de l'admettre provisoirement au séjour et a sollicité sa reprise en charge par ces mêmes autorités qui ont accepté le 23 février 2015 de reprendre en charge sa demande d'asile ; que, le 23 mars 2015, le préfet a pris à son encontre une décision portant remise aux autorités hongroises et, le 12 mai 2015, un arrêté portant assignation à résidence ; que M. B...relève appel du jugement du 13 mai 2015 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés précités ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne l'arrêté portant remise aux autorités hongroises :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 26 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 : " 1. Lorsque l'État membre requis accepte la prise en charge ou la reprise en charge d'un demandeur ou d'une autre personne visée à l'article 18, paragraphe 1, point c) ou d), l'État membre requérant notifie à la personne concernée la décision de le transférer vers l'État membre responsable et, le cas échéant, la décision de ne pas examiner sa demande de protection internationale. (...) / 2. La décision visée au paragraphe 1 contient des informations sur les voies de recours disponibles, y compris sur le droit de demander un effet suspensif, le cas échéant, et sur les délais applicables à l'exercice de ces voies de recours et à la mise en oeuvre du transfert et comporte, si nécessaire, des informations relatives au lieu et à la date auxquels la personne concernée doit se présenter si cette personne se rend par ses propres moyens dans l'État membre responsable. (...) / 3. Lorsque la personne concernée n'est pas assistée ou représentée par un conseil juridique ou un autre conseiller, les États membres l'informent des principaux éléments de la décision, ce qui comprend toujours des informations sur les voies de recours disponibles et sur les délais applicables à l'exercice de ces voies de recours, dans une langue que la personne concernée comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'elle la comprend. " ; qu'aux termes de l'article L. 531-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation aux articles (...) L. 511-1 à L. 511-3, (...) l'étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne qui a pénétré ou séjourné en France sans se conformer aux dispositions des articles L. 211-1, L. 211-2, L. 311-1 et L. 311-2 peut être remis aux autorités compétentes de l'Etat membre qui l'a admis à entrer ou à séjourner sur son territoire, ou dont il provient directement en application des dispositions des conventions internationales conclues à cet effet avec les Etats membres de l'Union européenne. / L'étranger visé au premier alinéa est informé de cette remise par décision écrite et motivée prise par une autorité administrative définie par décret en Conseil d'Etat. / Cette décision peut être exécutée d'office par l'administration après que l'étranger a été mis en mesure de présenter des observations et d'avertir ou de faire avertir son consulat, un conseil ou toute personne de son choix. " ; que M. B...soutient que le document portant notification de la décision prononçant sa remise aux autorités hongroises n'est pas revêtu de sa signature et qu'il n'est donc pas établi qu'il a été mis en mesure de bénéficier des garanties prévues par les dispositions précitées ; qu'il ressort, en tout état de cause, des pièces du dossier que, suite au refus d'admission au séjour édicté le 9 février 2015 et au vu de l'acceptation de prise en charge par les autorités hongroises, l'intéressé a été convoqué en préfecture le 23 mars 2015 mais n'a pas honoré ce rendez-vous ; qu'il a signé le 12 avril 2015 l'avis de réception lui adressant par voie postale la décision de remise aux autorités hongroises dont il n'est pas contesté qu'elle était accompagnée de ce courrier de notification ; que ce document dont il a été nécessairement destinataire comporte, de manière très explicite, les voies et délais de recours pour la contestation de la décision et mentionne, en outre, que, préalablement à son exécution, l'intéressé dispose de la faculté de présenter ses observations ou faire avertir son conseil ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions sus évoquées ne peut qu'être écarté ;

3. Considérant que M. B...soutient que sa réadmission porterait une atteinte grave au droit d'asile en faisant valoir que la Hongrie ne traiterait pas les demandeurs d'asile dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties constitutionnelles et conventionnelles applicables ; que, si la Hongrie est un Etat membre de l'Union européenne et partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il appartient néanmoins à l'administration d'apprécier dans chaque cas, au vu des pièces qui lui sont soumises et sous le contrôle du juge, si les conditions dans lesquelles un dossier particulier est traité par les autorités de ce pays répondent à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile ; que les seuls articles de presse et documents d'ordre général versés au dossier ne peuvent suffire à établir que la réadmission d'un demandeur d'asile vers la Hongrie serait, par elle-même, constitutive d'une atteinte grave et manifestement illégale au droit d'asile ; que les attestations qu'il produit faisant état de conditions d'hébergement indignes pour les demandeurs d'asile sont insuffisamment probantes pour permettre d'apprécier qu'il existerait un risque sérieux que sa demande d'asile ne soit pas traitée par les autorités hongroises dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile ; que, par suite, le préfet n'a pas commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de M. B... ;

4. Considérant que les moyens tirés de l'erreur de droit et de l'examen insuffisant de sa situation personnelle, repris sans aucune précision supplémentaire, doivent être écartés par adoption des motifs du jugement attaqué ;

En ce qui concerne l'arrêté portant assignation à résidence :

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision portant réadmission doit être écarté ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;

Sur le surplus des conclusions :

7. Considérant que doivent être rejetées par voie de conséquence les conclusions à fin d'injonction présentées par M. B... ainsi que celles tendant au bénéfice des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera transmise au préfet de la Loire-Atlantique.

Délibéré après l'audience du 9 février 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- Mme Loirat, président-assesseur,

- M. Auger, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 1er mars 2016.

Le rapporteur,

P. AUGERLe président,

L. LAINÉ

Le greffier,

M. C...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15NT02457


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 15NT02457
Date de la décision : 01/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: M. Paul AUGER
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : LAUNAY

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2016-03-01;15nt02457 ?
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