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01/03/2016 | FRANCE | N°14NT02271

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 01 mars 2016, 14NT02271


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler, d'une part, l'arrêté pris à son encontre par le préfet de la Manche le 18 avril 2013 portant retrait définitif d'armes et interdiction d'acquisition et de détention d'armes et, d'autre part, la décision du 13 juin 2013 lui retirant la validation de son permis de chasser pour la saison 2012/2013.

Par un jugement n° 1301531 du 26 juin 2014, le tribunal administratif de Caen a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :
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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler, d'une part, l'arrêté pris à son encontre par le préfet de la Manche le 18 avril 2013 portant retrait définitif d'armes et interdiction d'acquisition et de détention d'armes et, d'autre part, la décision du 13 juin 2013 lui retirant la validation de son permis de chasser pour la saison 2012/2013.

Par un jugement n° 1301531 du 26 juin 2014, le tribunal administratif de Caen a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 26 août 2014 et le 30 avril 2015, M.A..., représenté par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Manche du 18 avril 2013 portant retrait définitif d'armes ;

2°) d'annuler la décision du préfet de la manche lui retirant la validation de son permis de chasser pour la saison 2012/2013 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Manche de lui restituer les armes et munitions retirées, dans un délai de huit jours et sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir ;

4°) d'enjoindre au préfet de la Manche de procéder ou de faire procéder à sa radiation du fichier national automatisé nominatif des personnes interdites d'acquisition et de détention d'armes visé à l'article L. 312-6 du code de la sécurité intérieure, dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier dès lors que le représentant du préfet a présenté des observations orales alors que le préfet n'avait produit aucun mémoire en défense ; les dispositions de l'article R. 732-1 du code de justice administrative ont été méconnues ;

- l'arrêté du 18 avril 2013 est insuffisamment motivé en fait en se bornant à mentionner, sans autres précisions, son comportement et son état de santé ; le préfet n'est pas fondé à soutenir qu'il était conscient des risques qu'il faisait encourir ;

- les dispositions de l'article L. 312-9 du code de la sécurité intérieure ont été méconnues par l'arrêté du 18 avril 2013 ; contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges le délai d'un an de conservation des armes était impératif ; le préfet ne justifie pas le dépassement de ce délai par la mise en oeuvre d'une enquête complémentaire ;

- le préfet a commis une erreur d'appréciation en estimant que son comportement et son état de santé étaient incompatibles avec une détention d'armes ;

- il est fondé à exciper de l'illégalité de l'arrêté du 18 avril 2013 en ce qui concerne la décision du 13 juin 2013 ;

- contrairement à ce qu'a estimé le tribunal la décision du 13 juin 2013 lui fait grief.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 octobre 2014, le préfet de la Manche demande à la cour de rejeter la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens invoqués par M. A...n'est fondé.

Un courrier a été adressé aux parties le 7 décembre 2015 en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative.

Une ordonnance du 7 janvier 2016 a porté clôture immédiate de l'instruction en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la sécurité intérieure ;

- la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

- le décret n° 95-589 du 6 mai 1995 relatif à l'application du décret du 18 avril 1939 fixant le régime des matériels de guerre, armes et munitions ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Auger, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public.

1. Considérant que, par un arrêté du 24 décembre 2009, notifié le 26 avril 2010, le préfet de la Manche a ordonné à M. D...A...de remettre à l'autorité administrative les armes et munitions qu'il détenait, à savoir une carabine de marque Baikal calibre 22 LR, un fusil de marque Franchi calibre 12 et un fusil de chasse de marque Manufrance calibre 12, en application des dispositions de l'article L. 2336-4 du code de la défense, aujourd'hui codifiées aux articles L. 312-7 à L. 312-13 du code de la sécurité intérieure ; qu'en application du deuxième alinéa de l'article L. 312-9 du code de la sécurité intérieure, le préfet a décidé, par un nouvel arrêté du 18 avril 2013, de saisir définitivement les armes de M.A..., de les vendre aux enchères publiques, le produit en étant remis à l'intéressé, et en conséquence lui a interdit d'acquérir ou détenir de nouvelles armes et munitions ; que le préfet a également, par décision du 13 juin 2013, retiré à l'intéressé la validation de son permis de chasser pour la saison 2012/2013 ; que M. A...relève appel du jugement du 26 juin 2014 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 avril 2013 du préfet de la Manche et de la décision du 13 juin 2013 ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article R. 732-1 du code de justice administrative : " Après le rapport qui est fait sur chaque affaire par un membre de la formation de jugement ou par le magistrat mentionné à l'article R. 222-13, le rapporteur public prononce ses conclusions lorsque le présent code l'impose. Les parties peuvent ensuite présenter, soit en personne, soit par un avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, soit par un avocat, des observations orales à l'appui de leurs conclusions écrites. (...) La formation de jugement peut également entendre les agents de l'administration compétente ou les appeler devant elle pour fournir des explications (...) " ; qu'il est constant que le représentant du préfet a présenté des observations orales au cours de l'audience tenue par le tribunal administratif de Caen le 26 juin 2014 alors que le préfet n'avait produit aucun mémoire écrit devant les premiers juges ; que, cependant, il résulte des motifs du jugement attaqué que le tribunal ne s'est fondé que sur les seules écritures de M. A...; que, par suite, l'intervention à la barre du représentant du préfet n'est pas de nature à entacher ce jugement d'irrégularité ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne l'arrêté du 18 avril 2013 :

3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui ... refusent une autorisation, sauf lorsque la communication des motifs pourrait être de nature à porter atteinte à l'un des secrets ou intérêts protégés par les dispositions des deuxième à cinquième alinéas de l'article 6 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public. " ; que l'arrêté contesté du préfet de la Manche du 18 avril 2013 cite les textes applicables, rappelle l'intervention de l'arrêté préfectoral du 24 décembre 2009 et les armes concernées, fait état de l'avis défavorable à la restitution des armes émis par les services de police, renvoie au comportement de l'intéressé et à l'extrait B2 de son casier judiciaire et précise que " le comportement ou l'état de santé de M. D...A...est incompatible avec la détention d'une arme et présente un danger grave et immédiat pour lui-même ou pour autrui " ; qu'il est ainsi suffisamment motivé ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 312-9 du code de la sécurité intérieure : " La conservation de l'arme et des munitions remises ou saisies est confiée pendant une durée maximale d'un an aux services de la police nationale ou de la gendarmerie nationale territorialement compétents. / Durant cette période, le représentant de l'Etat dans le département décide, après que la personne intéressée a été mise à même de présenter ses observations, soit la restitution de l'arme et des munitions, soit la saisie définitive de celles-ci. / Les armes et les munitions définitivement saisies en application du précédent alinéa sont vendues aux enchères publiques. Le produit net de la vente bénéficie aux intéressés " ; qu'aux termes de l'article L. 312-10 du même code, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision contestée : " Il est interdit aux personnes dont l'arme et les munitions ont été saisies en application de l'article L. 312-7 ou de l'article L. 312-9 d'acquérir ou de détenir des armes et des munitions, quelle que soit leur catégorie. / Le représentant de l'Etat dans le département peut cependant décider de limiter cette interdiction à certaines catégories ou à certains types d'armes. / Cette interdiction cesse de produire effet si le représentant de l'Etat dans le département décide la restitution de l'arme et des munitions dans le délai mentionné au premier alinéa de l'article L. 312-9. Après la saisie définitive, elle peut être levée par le représentant de l'Etat dans le département en considération du comportement du demandeur ou de son état de santé depuis la décision de saisie " ;

5. Considérant que si les dispositions précitées de l'article L. 312-9 du code de la sécurité intérieure fixent une durée maximale d'un an pour la conservation par les services de la police nationale ou de la gendarmerie nationale territorialement compétents de l'arme et des munitions remises ou saisies, l'expiration de ce délai sans qu'une décision de saisie définitive ait été prise n'entraîne pas le droit pour leur propriétaire d'en obtenir la restitution dès lors qu'il résulte des dispositions précitées de l'article L. 312-10 du même code que la décision de saisie emporte interdiction pour la personne dont l'arme et les munitions ont été saisies d'acquérir ou de détenir des armes et des munitions, cette interdiction ne cessant de produire effet que si le préfet décide expressément la restitution ; qu'il suit de là que le moyen tiré de l'illégalité de l'arrêté contesté en l'absence de décision du préfet dans le délai d'un an à compter de la saisie effective de ses armes doit être écarté ;

6. Considérant qu'il est suffisamment établi que le comportement ou l'état de santé du requérant était incompatible avec la détention d'une arme et présentait un danger grave et immédiat pour l'ordre public et pour la sécurité des personnes ; qu'en particulier un avis défavorable a été émis le 11 octobre 2011 par le commissaire central de Cherbourg et il n'est pas contesté que le requérant a fait l'objet d'une condamnation pénale au début de l'année 2012 inscrite au bulletin n° 2 de son casier judiciaire ; que ces éléments ne sont pas sérieusement remis en cause par le seul certificat non circonstancié d'un médecin généraliste daté du 7 avril 2015, se bornant à faire état de manière hypothétique de ce que l'état psychologique du requérant " semble stable " et de ce que " il ne semble pas agressif " ; qu'il n'est donc pas fondé à soutenir que l'arrêté en litige serait entaché d'erreur d'appréciation ;

En ce qui concerne la décision du préfet du 13 juin 2013 :

7. Considérant que l'arrêté du 18 avril 2013 n'étant pas entaché d'illégalité, le requérant n'est pas fondé à exciper de son illégalité au soutien de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 13 juin 2013 lui retirant la validation de son permis de chasser pour la saison 2012/2013 ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande ;

Sur le surplus des conclusions :

9. Considérant que doivent être rejetées par voie de conséquence les conclusions à fin d'injonction présentées par M. A... ainsi que celles tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M.A... est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...A...et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera transmise pour information au préfet de la Manche.

Délibéré après l'audience du 9 février 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- Mme Loirat, président-assesseur,

- M. Auger, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 1er mars 2016.

Le rapporteur,

P. AUGERLe président,

L. LAINÉ

Le greffier,

M. C...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14NT02301


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 14NT02271
Date de la décision : 01/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: M. Paul AUGER
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : SELARL JURIADIS

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2016-03-01;14nt02271 ?
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