Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...D...a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision du 26 octobre 2012 par laquelle le ministre de la défense a prononcé sa nomination et sa titularisation dans le corps des secrétaires administratifs du ministère de la défense en ce qu'il le reclasse en qualité de secrétaire administratif de classe normale et non de classe supérieure.
Par un jugement n° 1300405 du 30 janvier 2014, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 4 avril 2014, M.D..., représenté par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 30 janvier 2014 ;
2°) d'annuler la décision du ministre de la défense du 26 octobre 2012 en tant qu'elle procède à son reclassement ;
3°) d'enjoindre au ministre de le reclasser dans le grade de secrétaire administratif de classe supérieure ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le placement en classe normale ne correspond ni à la réalité des fonctions exercées ni à son niveau d'études, qui lui permettait de prétendre au deuxième grade ;
- la décision procède d'une discrimination en raison de son handicap ;
- les responsabilités qui lui sont confiées correspondent à celles qui sont exercées par un secrétaire administratif de classe supérieure ;
- la décision est entachée d'erreur de droit et d'inexacte qualification des faits ;
- le tribunal a entaché sa décision d'irrégularité en ne se plaçant pas sur le terrain de l'égalité d'accès aux fonctions.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 janvier 2015, le ministre de la défense conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- la requête est tardive ;
- le principe d'égalité d'accès aux fonctions publiques ne s'oppose pas à ce que les modalités de nomination dans un corps varient selon les modalités d'accès ;
- il n'est pas établi que le poste occupé relevait nécessairement d'un secrétaire administratif de classe supérieure ;
- le reclassement effectué est régulier.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;
- le décret n° 95-979 du 25 août 1995 modifié relatif au recrutement des travailleurs handicapés dans la fonction publique pris pour l'application de l' article 27 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;
- le décret n° 2010-302 du 19 mars 2010 fixant les dispositions statutaires communes applicables aux corps des secrétaires administratifs des administrations de l'Etat et à certains corps analogues relevant du décret n° 2009-1388 du 11 novembre 2009 portant dispositions statutaires communes à divers corps de fonctionnaires de la catégorie B de la fonction publique de l'Etat ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Lainé, président de chambre,
- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public.
1. Considérant que M. D...a été recruté en qualité d'agent contractuel sur le fondement du décret du 25 août 1995 pris pour l'application de l'article 27 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée relatif à certaines modalités de recrutement des handicapés dans la fonction publique, pour occuper un emploi de responsable de formation au groupement de soutien de la base de défense de Cherbourg à compter du 15 octobre 2011 et jusqu'au 14 octobre 2012 ; que, par arrêté du 26 octobre 2012, le ministre de la défense l'a nommé et titularisé dans le corps des secrétaires administratifs du ministère de la défense en qualité de secrétaire administratif de classe normale ; que M. D...relève appel du jugement du 30 janvier 2014 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté en tant qu'il procède à son reclassement au grade de secrétaire administratif de classe normale et non au grade de secrétaire administratif de classe supérieure ;
Sur la régularité du jugement :
2. Considérant que, contrairement à ce que soutient le requérant, les premiers juges ont répondu, dans les points 5, 6 et 7 du jugement attaqué, au moyen qu'il avait soulevé tiré de la méconnaissance du principe d'égalité pris dans toutes ses branches ; que, par suite, M. D...n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'irrégularité ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
3. Considérant, en premier lieu, que M. D...soutient que la décision par laquelle le ministre de la défense l'a titularisé est entachée d'erreur de droit et d'erreur de qualification des faits en ce qu'elle le titularise en qualité de secrétaire administratif de classe normale ;
4. Considérant, d'une part, qu'aux termes du II de l'article 27 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée : " Les personnes mentionnées aux 1°,2°,3°,4°,9°,10° et 11° de l'article L. 323-3 du code du travail peuvent être recrutées en qualité d'agent contractuel dans les emplois de catégories A, B et C pendant une période correspondant à la durée de stage prévue par le statut particulier du corps dans lequel elles ont vocation à être titularisées. Le contrat est renouvelable, pour une durée qui ne peut excéder la durée initiale du contrat. A l'issue de cette période, les intéressés sont titularisés sous réserve qu'ils remplissent les conditions d'aptitude pour l'exercice de la fonction. ( ...) " ; qu'aux termes de l'article 2 du décret du 25 août 1995 pris pour l'application de ces dispositions : " Les candidats aux emplois à pourvoir du niveau des corps de catégories A et B doivent justifier des diplômes ou du niveau d'études exigés des candidats aux concours externes et fixés par le statut particulier du corps auquel ils sont susceptibles d'accéder. (...) " ; que selon l'article 8 de ce même décret : " A l'issue du contrat, l'appréciation de l'aptitude professionnelle de l'agent par l'autorité disposant du pouvoir de nomination est effectuée au vu du dossier de l'intéressé et après un entretien de celui-ci avec un jury organisé par l'administration chargée du recrutement ; I. - Si l'agent est déclaré apte à exercer les fonctions, l'autorité administrative ayant pouvoir de nomination procède à sa titularisation après avis de la commission administrative paritaire du corps concerné. (...) Lors de la titularisation, l'agent est affecté dans l'emploi pour lequel il a été recruté comme agent non titulaire(...) " ;
5. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 2 du décret du 19 mars 2010 fixant les dispositions statutaires communes applicables aux corps des secrétaires administratifs des administrations de l'Etat : " Les corps de secrétaires administratifs et corps analogues mentionnés à l'article 1er comprennent trois grades ainsi dénommés :1° Secrétaire administratif de classe normale ou grade analogue ; 2° Secrétaire administratif de classe supérieure ou grade analogue ; 3° Secrétaire administratif de classe exceptionnelle ou grade analogue, grade le plus élevé " ; qu'aux termes de l'article 3 du même décret : " I. Les secrétaires administratifs sont chargés de tâches administratives d'application. A ce titre, ils participent à la mise en oeuvre, dans les cas particuliers qui leur sont soumis, des textes de portée générale. / Ils exercent notamment des tâches administratives de gestion dans les domaines des ressources humaines, logistiques, financiers ou comptables. Ils peuvent se voir confier des tâches de rédaction et être chargés de l'animation d'une équipe. Ils peuvent également assurer des fonctions d'assistant de direction. " ;
6. Considérant que M.D..., titulaire d'un diplôme de master professionnel, a été recruté par le ministère de la défense pour occuper un emploi de catégorie B ; que, reconnu apte à l'exercice des fonctions, il a été titularisé dans le corps des secrétaires administratifs ; que, contrairement à ce qu'il soutient, les dispositions précitées de l'article 8 du décret du 25 août 1995 ne lui ouvraient, par elles-mêmes, aucun droit à être nommé et titularisé en qualité de secrétaire administratif de classe supérieure, quand bien même il était titulaire d'un diplôme sanctionnant au moins deux années de formation classée au moins au niveau III, l'autorisant à se présenter au concours externe d'accès à cette classe, ou il aurait occupé des fonctions confiées à des agents ayant atteint ce grade ; qu'en effet, l'accès direct à la classe supérieure du corps des secrétaire administratif n'est prévu que pour les agents recrutés par concours ; que la garantie de maintien dans l'emploi de recrutement n'a d'autre objet que d'interdire que soit attribuée à l'agent intéressé sans son accord une autre affectation qui pourrait être incompatible avec son handicap ; qu'ainsi, en procédant à sa titularisation en qualité de secrétaire administratif de classe normale, le ministre de la défense n'a pas entaché sa décision d'erreur de droit ou d'inexacte qualification juridique des faits ;
7. Considérant, en deuxième lieu, que le principe d'égal accès aux emplois publics ne fait pas obstacle à ce que des règles de recrutement soient différenciées pour tenir compte de la variété de situations ; que la méconnaissance dudit principe ne peut être utilement invoquée dès lors que les agents concernés ne sont pas dans la même situation ; que, si les agents appartenant à un même corps ont droit une fois nommés dans ce corps à bénéficier d'un traitement égal, lequel fait notamment obstacle à l'établissement de règles d'avancement discriminatoires au détriment de certaines catégories d'entre eux, à moins que des circonstances exceptionnelles ne légitiment l'établissement de telles règles dans l'intérêt du service, rien ne s'oppose à ce que l'administration fasse varier les modalités de nomination dans un corps selon les conditions imposées pour l'accès à ce corps ; qu'ainsi, la décision contestée ne méconnaît pas ce principe alors même qu'elle titularise M. D...en classe normale, à l'issue de son année effectuée en qualité d'agent contractuel, en dépit de la circonstance qu'il est détenteur de diplômes qui permettent aux agent recrutés par concours externe titulaires de diplômes équivalents d'être titularisés en classe supérieure à l'issue de leur stage ;
8. Considérant, en troisième lieu, que le principe d'égalité, qui s'applique aux agents appartenant à un même corps, ne s'oppose pas à ce que des dispositions différentes soient appliquées, lors de leur intégration dans ce corps, à des personnes qui se trouvent, comme en l'espèce, dans des situations juridiques différentes ; que la décision n'est pas davantage contraire au principe de discrimination positive mis en oeuvre par le décret du 25 août 1995 relatif à certaines modalités de recrutement des handicapés dans la fonction publique, dès lors que la différence de classement de l'intéressé, à la suite de sa titularisation, par rapport au classement des agents recrutés par concours directement au grade de secrétaire administratif de classe supérieure est justifiée par des modalités et conditions différentes d'accès au corps des secrétaires administratifs des administrations de l'Etat, et non fondée directement sur le handicap de l'intéressé ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir soulevée par le ministre de la défense, que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande ; que ses conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées par voie de conséquence ainsi que celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D...et au ministre de la défense.
Délibéré après l'audience du 26 janvier 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- Mme Loirat, président-assesseur,
- Mme Rimeu, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 16 février 2016.
Le président-rapporteur,
L. LAINÉL'assesseur le plus ancien,
C. LOIRAT
Le greffier,
M. B...
La République mande et ordonne au ministre de la défenses en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 14NT00906