Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société en nom collectif (SNC) Le Clos Saint-Jean a demandé au tribunal administratif de Rennes de lui accorder la restitution de la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge acquittée au titre des opérations réalisées en qualité de marchand de biens en 2008.
Par un jugement n° 1102116 du 13 février 2014, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 14 avril 2014, la SNC Le Clos Saint-Jean, représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 13 février 2014 ;
2°) de lui accorder la restitution de la taxe sur la valeur ajoutée acquittée en 2008 à hauteur de 339 583 euros ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- étant fondée sur la non-conformité de la règle de droit appliquée au droit européen, sa demande de restitution de taxe sur la valeur ajoutée relève de la procédure de réclamation prévue par l'alinéa 3 de l'article L. 190 du livre des procédures fiscales ;
- la distinction faite, pour l'application de cette disposition, entre les contribuables en situation créditrice ou non créditrice de taxe sur la valeur ajoutée entraîne une rupture d'égalité devant l'impôt et prive le contribuable en situation créditrice de la possibilité de présenter une réclamation ;
- le régime fiscal français applicable aux opérations antérieures au 11 mars 2010, qui ne prévoyait pas la taxation sur option des immeubles non neufs et des terrains ne répondant pas à la définition des terrains à bâtir mais une taxation de plein droit sur la marge, n'était pas conforme au droit communautaire ;
- elle aurait dû bénéficier d'une telle option pour les livraisons portant sur des terrains non constitutifs de terrains à bâtir qu'elle a réalisées ; contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, ces livraisons ne portaient pas sur des terrains à bâtir au sens du 7° de l'article 257 du code général des impôts dans sa rédaction issue de l'article 40 de la loi de finances pour 1999 ; cette nouvelle définition des terrains à bâtir résulte également de la doctrine administrative 8 A-1131 n° 42 du 15 novembre 2001 qu'elle n'invoque qu'à titre d'illustration.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 20 octobre 2014 et le 20 mars 2015, le ministre des finances et des comptes publics prononce le dégrèvement de la somme de 109 746 euros et conclut pour le surplus au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Aubert,
- et les conclusions de Mlle Wunderlich, rapporteur public.
1. Considérant que la société en nom collectif (SNC) Le Clos Saint-Jean, qui exerce l'activité de marchand de biens, relève appel du jugement du 13 février 2014 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à la restitution de la taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 339 583 euros qu'elle estime avoir acquittée à tort au titre de ventes de terrains réalisées au cours de la période du 1er janvier au 31 décembre 2008 ;
Sur l'étendue du litige :
2. Considérant que, par une décision du 20 avril 2015, postérieure à l'introduction de la requête, l'administration a prononcé le dégrèvement, à hauteur de 109 746 euros, de la taxe sur la valeur ajoutée dont la restitution est demandée ; que les conclusions de la requérante sont devenues, dans cette mesure, sans objet ; que, dès lors, il n'y a plus lieu d'y statuer ;
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 190 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors applicable : " Les réclamations relatives aux impôts, contributions, droits, taxes (...) établis ou recouvrés par les agents de l'administration, relèvent de la juridiction contentieuse lorsqu'elles tendent à obtenir soit la réparation d'erreurs commises dans l'assiette ou le calcul des impositions, soit le bénéfice d'un droit résultant d'une disposition législative ou réglementaire. Sont instruites et jugées selon les règles du présent chapitre toutes actions tendant à la décharge ou à la réduction d'une imposition ou à l'exercice de droits à déduction, fondées sur la non-conformité de la règle de droit dont il a été fait application à une règle de droit supérieure " ; qu'aux termes du b) de l'article R. 196-1 du même livre : " Pour être recevables, les réclamations relatives aux impôts autres que les impôts directs locaux et les taxes annexes à ces impôts doivent être présentées à l'administration au plus tard le 31 décembre de la deuxième année suivant celle, selon le cas : / (...) / b) Du versement de l'impôt contesté lorsque cet impôt n'a pas donné lieu à l'établissement d'un rôle ou à la notification d'un avis de mise en recouvrement ; (...) " ; qu'un contribuable n'ayant pas acquitté de taxe sur la valeur ajoutée au titre d'une période déterminée n'est pas recevable à présenter, sur le fondement de ces dispositions, une réclamation tendant à la restitution de la taxe qu'il estime avoir versée à tort au titre de cette période ;
4. Considérant qu'aux termes du IV de l'article 271 du code général des impôts : " La taxe déductible dont l'imputation n'a pu être opérée peut faire l'objet d'un remboursement dans les conditions, selon les modalités et dans les limites fixées par décret en Conseil d'Etat. " ; qu'aux termes de l'article 242-0 A de l'annexe II au même code : " Le remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée déductible dont l'imputation n'a pu être opérée doit faire l'objet d'une demande des assujettis. Le remboursement porte sur le crédit de taxe déductible constaté au terme de chaque année civile. " ; qu'aux termes de l'article 242-0 C de la même annexe, dans sa rédaction alors applicable : " I. 1. Les demandes de remboursement doivent être déposées au cours du mois de janvier (...) / (...) / II. 1. Par dérogation aux dispositions du I, les assujettis soumis de plein droit ou sur option au régime normal d'imposition peuvent demander un remboursement au titre d'un trimestre civil lorsque chacune des déclarations de ce trimestre fait apparaître un crédit de taxe déductible. La demande de remboursement est déposée au cours du mois suivant le trimestre considéré (...) " ; que s'il résulte des dispositions précitées des articles 242-0 A et 242-0 C de l'annexe II au code général des impôts que si le redevable ne peut demander le remboursement du crédit de taxe sur la valeur ajoutée dont il dispose que dans des délais déterminés, ces dispositions n'ont ni pour objet, ni pour effet de faire obstacle à ce qu'il puisse ultérieurement, si ce crédit demeure, non seulement procéder à son imputation sur une taxe due, mais encore, le cas échéant, en demander le remboursement au cours du mois de janvier de l'année suivante ou au cours du mois suivant un trimestre civil où chacune des déclarations de ce trimestre fait apparaître un crédit de taxe déductible ;
5. Considérant que lorsqu'un contribuable en situation de crédit de taxe sur la valeur ajoutée constate, à la suite de la surestimation de son chiffre d'affaires déclaré, un crédit de taxe sur la valeur ajoutée déductible supplémentaire, il lui appartient de reporter sur les déclarations suivantes l'excédent de crédit de taxe déductible pour en permettre l'imputation ultérieure sur la taxe sur la valeur ajoutée à collecter, puis, le cas échéant, de formuler une demande de remboursement de l'excédent de taxe sur la valeur ajoutée déductible dans les conditions fixées par les articles 242-0 A et suivants de l'annexe II au code général des impôts ;
6. Considérant que la circonstance que la réclamation est fondée sur la non-conformité de la règle de droit dont il a été fait application à une règle de droit supérieure ne permet pas au redevable, en l'absence de versement de taxe sur la valeur ajoutée, de présenter alternativement une réclamation sur le fondement de l'article L. 190-1 du livre des procédures fiscales ; que la différence de traitement entre contribuables que la société requérante invoque ne constitue pas une rupture d'égalité devant l'impôt mais est justifiée par la différence de situation dans laquelle ils se trouvent placés, selon qu'ils sont en situation de crédit ou de débit de taxe sur la valeur ajoutée ;
7. Considérant qu'il est constant que la SNC Le Clos Saint-Jean déposait des déclarations de taxe sur la valeur ajoutée modèle CA3 mensuellement ; qu'il résulte de l'instruction que pour l'ensemble des mois de l'année 2008 restant en litige au cours desquels elle a réalisé des opérations imposées sur la marge, en application du 6° de l'article 257 et de l'article 268 du code général des impôts, elle se trouvait en situation créditrice et n'a pas versé de taxe sur la valeur ajoutée ; que, dans ces conditions, il lui appartenait, en vue d'obtenir le remboursement du crédit supplémentaire de taxe résultant de l'imposition des cessions de terrains à bâtir, de présenter une demande dans les formes prescrites par les articles 242-0 A et suivants de l'annexe II au code général des impôts ; qu'à défaut d'avoir préalablement accompli cette démarche, sa demande de première instance n'était pas recevable ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SNC Le Clos Saint-Jean n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à la restitution de la taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 229 837 euros acquittée au cours de la période du 1er janvier au 31 décembre 2008 ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que la SNC Le Clos Saint-Jean demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de la SNC Le Clos Saint-Jean à concurrence de la somme de 109 746 euros.
Article 2 : Le surplus de la requête de la SNC Le Clos Saint-Jean est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SNC Le Clos Saint-Jean et au ministre des finances et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 3 décembre 2015, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- Mme Aubert, président-assesseur,
- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 17 décembre 2015.
Le rapporteur,
S. AubertLe président,
F. Bataille
Le greffier,
E. Haubois
La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
''
''
''
''
1
N° 14NT00993 2
1