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26/11/2015 | FRANCE | N°14NT01211

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 26 novembre 2015, 14NT01211


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Transca Services a demandé au tribunal administratif d'Orléans de prononcer la décharge des rappels de taxe sur les salaires auxquels elle a été assujettie au titre des années 2009, 2010 et 2011.

Par un jugement n° 1302648 du 20 mars 2014, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 2 mai 2014, le 15 mai 2014, le 15 décembre 2014 et le 26 octobre 20

15, la SAS Transca Services, représentée par MeB..., demande à la cour dans le dernier état de se...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Transca Services a demandé au tribunal administratif d'Orléans de prononcer la décharge des rappels de taxe sur les salaires auxquels elle a été assujettie au titre des années 2009, 2010 et 2011.

Par un jugement n° 1302648 du 20 mars 2014, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 2 mai 2014, le 15 mai 2014, le 15 décembre 2014 et le 26 octobre 2015, la SAS Transca Services, représentée par MeB..., demande à la cour dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 20 mars 2014 ;

2°) de prononcer à titre principal la décharge de l'intégralité des rappels de taxe sur les salaires auxquels elle a été assujettie au titre des années 2009, 2010 et 2011 et à titre subsidiaire une décharge partielle ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la procédure d'imposition est irrégulière au regard des dispositions de l'article 48 du livre des procédures fiscales dès lors que ni la proposition de rectification datée du 14 septembre 2012 ni la réponse aux observations du contribuable datée du 15 octobre 2012 ne mentionnent les conséquences du contrôle en ce qui concerne l'intérêt de retard prévu à l'article 1727 du code général des impôts ;

- les règles de preuve dégagées par les décisions du Conseil d'Etat rendue le 8 juin 2011 ne sont pas applicables aux dirigeants des sociétés par actions simplifiées ;

- pour l'assujettir à la taxe sur les salaires, l'administration a estimé à tort qu'elle constituait une holding mixte, dès lors que son activité " financière " se limite à 1'enregistrement en comptabilité des dividendes perçus des filiales ;

- en estimant que la rémunération de son président devait être prise en compte pour l'assiette de la taxe sur les salaires alors qu'il n'exerce aucune attribution de son mandat, l'administration a méconnu les dispositions de l'article 231 du code général des impôts ;

- les attributions de son secrétaire général ne couvrent pas le secteur financier ;

- les rémunérations des dirigeants de société qui n'ont pas la qualité de salarié au sens du code du travail ne sont pas soumises à la taxe sur les salaires ;

- son assujettissement à la taxe sur les salaires au titre des années 2009, 2010 et 2011 méconnaît le principe de non rétroactivité, le principe de confiance légitime et le principe de sécurité juridique dès lors que, si par quatre décisions du 8 juin 2011, le Conseil d'Etat a mis fin à une incertitude juridique sur la prise en compte des rémunérations des dirigeants des sociétés holding pour le calcul de la taxe sur les salaires, leurs effets devaient être limités, ce changement jurisprudentiel devait être assorti de mesures transitoires ;

- l'assiette de la taxe sur les salaires étant déterminée par référence au rapport d'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée, il convient dès lors d'appliquer ce coefficient pour déterminer la fraction des salaires des dirigeants qui rémunère leur activité au titre du seul secteur qualifié de financier ;

Par des mémoires en défense, enregistrés le 18 septembre 2014 et 20 janvier 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la SAS Transca Services ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Allio-Rousseau,

- et les conclusions de Mlle Wunderlich, rapporteur public.

1. Considérant qu'à la suite d'une vérification de comptabilité de la société par actions simplifiée (SAS) Transca Services, société holding, portant sur la période allant du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011, l'administration a estimé que M. A...D...et M. C...E..., respectivement en qualité de président et de secrétaire général de la société, intervenaient concurremment dans tous les secteurs d'activité de l'entreprise, justifiant que les rémunérations que leur versait cette société soient soumises à la taxe sur les salaires selon le rapport d'assujettissement général applicable à l'entreprise ; que la SAS Transca Services relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à la décharge du rappel de taxe sur les salaires à laquelle elle a été assujettie au titre de la période allant du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011 et des pénalités correspondantes ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales : " A l'issue (...) d'une vérification de comptabilité, lorsque des rectifications sont envisagées, l'administration doit indiquer, avant que le contribuable présente ses observations ou accepte les rehaussements proposés, dans la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 (...), le montant des droits, taxes et pénalités résultant de ces rectifications. " ;

3. Considérant que l'administration a adressé à la société Transca Services une proposition de rectification datée du 14 septembre 2012 mentionnant les rappels de taxe sur les salaires pour la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011 auxquels elle envisageait de procéder à la suite de la vérification de sa comptabilité ; que ce document, reçu par la société le 15 septembre 2012, mentionne qu'il comporte 17 feuilles ; que l'administration produit un exemplaire complet de cette proposition de rectification dont il résulte que sa page 13 comporte une motivation spécifique de l'application de l'intérêt de retard et renvoie à une annexe, numérotée page 15 ; que cette annexe est constituée d'un tableau récapitulatif des conséquences financières du contrôle, dressé en application des dispositions de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales, qui indique, outre le montant de la taxe sur les salaires dû au titre de chaque année, celui des intérêts de retard ; que la société Transca Services, qui fait valoir qu'elle n'a pas été avertie de l'application de l'intérêt de retard prévu à l'article 1727 du code général des impôts avant la réception de l'avis de mise en recouvrement du 30 novembre 2012, n'établit toutefois pas avoir fait les diligences nécessaires pour obtenir communication des pages, selon elle manquantes, de la proposition de rectification du 14 septembre 2012 ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales doit être écarté ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du 1 de l'article 231 du code général des impôts dans sa version applicable à la période en litige : " 1. Les sommes payées à titre de rémunérations sont soumises à une taxe sur les salaires égale à 4,25 % de leur montant, évalué selon les règles prévues aux chapitres Ier et II du titre IV du livre II du code de la sécurité sociale (..) et à la charge des personnes ou organismes (...) qui paient ces rémunérations lorsqu'ils ne sont pas assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée ou ne l'ont pas été sur 90 % au moins de leur chiffre d'affaires au titre de l'année civile précédant celle du paiement desdites rémunérations. L'assiette de la taxe due par ces personnes ou organismes est constituée par une partie des rémunérations versées, déterminée en appliquant à l'ensemble de ces rémunérations le rapport existant, au titre de cette même année, entre le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée et le chiffre d'affaires total. " ;

5. Considérant que lorsque les activités d'une entreprise sont, pour l'exercice de ses droits à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée, réparties en plusieurs secteurs distincts au sens de l'article 209 de l'annexe II au code général des impôts, la taxe sur les salaires doit être déterminée par secteur, en appliquant aux rémunérations des salariés affectés spécifiquement à chaque secteur le rapport d'assujettissement propre à ce secteur ; que, toutefois, la taxe sur les salaires des personnels concurremment affectés à plusieurs secteurs doit être établie en appliquant à leurs rémunérations le rapport existant pour l'entreprise dans son ensemble entre le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée et le chiffre d'affaires total ;

6. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que la SAS Transca Services a exercé, au cours des années 2009 à 2011, une activité d'assistance à ses filiales, soumise à la taxe sur la valeur ajoutée, et une activité financière de perception de dividendes de ses filiales, placés hors du champ d'application de cette taxe ; qu'il est constant que l'activité de la SAS Transca Services de prestation de services au profit de ses filiales, soumise à la taxe sur la valeur ajoutée, représentait moins de 90 % de son chiffre d'affaires total au titre des années 2009 à 2011 ; que de ce fait, et indépendamment de la faible importance de son secteur financier, cette société était passible de la taxe sur les salaires ;

7. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 227-1 du code de commerce : " Dans la mesure où elles sont compatibles avec les dispositions particulières prévues par le présent chapitre, les règles concernant les sociétés anonymes, à l'exception des articles L. 225-17 à L. 225-126 et L. 225-243, sont applicables à la société par actions simplifiée. Pour l'application de ces règles, les attributions du conseil d'administration ou de son président sont exercées par le président de la société par actions simplifiée ou celui ou ceux de ses dirigeants que les statuts désignent à cet effet " ; qu'aux termes de l'article L. 227-6 de ce code : " La société est représentée à l'égard des tiers par un président désigné dans les conditions prévues par les statuts. Le président est investi des pouvoirs les plus étendus pour agir en toute circonstance au nom de la société dans la limite de l'objet social. (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions, d'une part, que le président d'une société par actions simplifiée exerce les pouvoirs les plus étendus dans la direction de l'entreprise et qu'en vertu de la règle posée par l'article L. 225-51 du code de commerce, règle à laquelle renvoie le dernier alinéa de l'article L. 227-1 de ce code, il est investi d'une responsabilité générale ; que, s'agissant d'une société holding, les pouvoirs du président s'étendent en principe au secteur financier, même si le suivi des activités est sous-traité à des tiers ou confié à des salariés spécialement affectés à ce secteur et si le nombre des opérations relevant de ce secteur est très faible ; que, toutefois, s'il résulte des éléments produits par l'entreprise que certains de ses dirigeants n'ont pas d'attribution dans le secteur financier, notamment lorsque, compte tenu de l'organisation adoptée, l'un d'entre eux est dépourvu de tout contrôle et responsabilité en la matière, la rémunération de ce dirigeant doit être regardée comme relevant entièrement des secteurs passibles de la taxe sur la valeur ajoutée et, par suite, comme placée hors du champ de la taxe sur les salaires ;

8. Considérant que les fonctions de président de la SAS Transca Services exercées par M. D...lui conféraient les pouvoirs les plus étendus dans la gestion de cette société ; que, s'agissant d'une société holding, ces pouvoirs s'étendent aux relations, y compris financières, entre cette société et celles dans lesquelles elle détient des participations ; que la société Transca Services n'apporte, ainsi qu'il lui appartient de le faire, aucun élément de nature à établir que son président n'avait pas d'attribution dans le secteur financier alors qu'il ne résulte ni de l'article 15 des statuts de la société ni d'aucun autre document que ses pouvoirs auraient été limités ; que l'appréciation de cette situation n'implique pas de connaître les conditions de fait dans lesquelles M. D...exerçait ses fonctions chaque année dans l'entreprise ;

9. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale : " Pour le calcul des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, sont considérées comme rémunérations toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 311-2 du même code : " Sont affiliées obligatoirement aux assurances sociales du régime général (...) toutes les personnes quelle que soit leur nationalité, de l'un ou l'autre sexe, salariées ou travaillant à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs et quels que soient le montant et la nature de leur rémunération, la forme, la nature ou la validité de leur contrat. " ; qu'aux termes de l'article L. 311-3 de ce code : " Sont notamment compris parmi les personnes auxquelles s'impose l'obligation prévue à l'article L. 311-2 (...) 23° Les présidents et dirigeants des sociétés par actions simplifiées (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions du code de la sécurité sociale que les rémunérations versées au président d'une société par actions simplifiée sont soumises aux cotisations des assurances sociales ; que, dès lors, en dépit du fait que l'article L. 311-3 du code de la sécurité sociale n'est pas inclus dans le titre IV du livre II de ce code, auquel renvoie l'article 231 du code général des impôts pour la seule détermination du montant des rémunérations, ces rémunérations sont soumises à la taxe sur les salaires en application de cet article, sans que puisse y faire obstacle la circonstance, invoquée par la SAS Transca Services, que les mandataires sociaux ne sont pas placés dans un lien de subordination avec la société ;

10. Considérant, en quatrième lieu, que si aucune disposition du code de commerce ou d'un autre texte législatif ou réglementaire ne définit les pouvoirs reconnus au secrétaire général d'une société commerciale, il résulte de l'instruction qu'au cours des années 2009, 2010 et 2011, M. E...était chargé des missions d'animation administrative et financière de la société ; que la SAS Transca Services fait valoir qu'il était le seul intervenant en matière financière ; que, ce faisant, elle admet que le secrétaire général était également affecté au secteur financier ;

11. Considérant, en cinquième lieu, que l'administration a assujetti les rémunérations du président et du secrétaire général de la société requérante sur le fondement des dispositions de l'article 231 du code général des impôts et non sur celui de la décision n° 331849 du Conseil d'Etat du 8 juin 2011, laquelle au demeurant ne procède pas à un revirement de jurisprudence ; que, dans ces conditions, la SAS Transca Services n'est pas fondée à soutenir que l'administration, en procédant en 2012 aux rappels de taxe sur les salaires dus au titre de la période allant du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011 conformément à cette jurisprudence, aurait méconnu les principes de non rétroactivité de la loi fiscale et de sécurité juridique ;

12. Considérant, en dernier lieu, que la SAS Transca Services invoque le principe général du droit communautaire de confiance légitime susceptible, selon elle, de s'appliquer lorsque l'administration fait naître des espérances fondées pour le contribuable ; que, toutefois, s'agissant de la taxe sur les salaires, les impositions en litige sont uniquement régies par la législation définie en droit interne et ne relèvent pas d'une réglementation communautaire ; que, par suite, le moyen ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SAS Transca Services n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme demandée par la SAS Transca Services au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Transca Services est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Transca Services et au ministre des finances et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 5 novembre 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Bataille, président de chambre,

- Mme Aubert, président-assesseur,

- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 26 novembre 2015.

Le rapporteur,

M-P. Allio-Rousseau Le président,

F. Bataille

Le greffier,

E. Haubois

La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14NT01211


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 14NT01211
Date de la décision : 26/11/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. BATAILLE
Rapporteur ?: Mme Marie-Paule ALLIO-ROUSSEAU
Rapporteur public ?: Mme WUNDERLICH
Avocat(s) : CABINET AEQUALYS CONSEIL

Origine de la décision
Date de l'import : 08/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-11-26;14nt01211 ?
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