Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D...B...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du préfet de la Sarthe du 21 mai 2012 portant refus de regroupement familial au bénéfice de son enfant.
Par un jugement n°1207016 du 5 mars 2013, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 28 avril 2014, MmeB..., représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 5 mars 2013 ;
2°) d'annuler la décision du préfet de la Sarthe du 21 mai 2012 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Sarthe, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter d'un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, d'autoriser le regroupement familial ou, à défaut, de procéder à un nouvel examen de sa demande ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 200 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- la décision contestée n'est pas suffisamment motivée ;
- en lui refusant le bénéfice du regroupement familial, le préfet a commis une erreur d'appréciation dès lors que ses ressources ainsi que celles de son conjoint, d'un montant mensuel de 2 000 euros net, étaient supérieures au salaire minimum interprofessionnel de croissance ;
- le préfet a méconnu les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
Par un mémoire en défense, enregistré le 21 novembre 2014, le préfet de la Sarthe conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 25 août 2014.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- loi n°79-587 du 11 juillet 1979 ;
- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Rimeu, premier conseiller.
1. Considérant que MmeB..., ressortissante ivoirienne, a demandé en janvier 2012 le bénéfice du regroupement familial au profit de son fils Paul-Elie Israël Toualy Agoua, né le 15 avril 1996 ; que, par une décision du 21 mai 2012, le préfet de la Sarthe a rejeté sa demande en raison de l'insuffisance des ressources de l'intéressée ; que Mme B...relève appel du jugement du 5 mars 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant, en premier lieu, que la décision contestée du 21 mai 2012 refusant à Mme B...le regroupement familial au bénéfice de son fils fait référence aux dispositions applicables du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et mentionne que la requérante ne remplit pas les conditions exigées, ses revenus étant inférieurs au salaire minimum interprofessionnel de croissance ; qu'ainsi, elle comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et est donc suffisamment motivée, en dépit de la circonstance qu'elle n'indique ni le montant des ressources de la requérante, qu'elle ne pouvait pas ignorer, ni le seuil retenu ni la période de référence pour apprécier leur caractère suffisant, qui sont fixés par les dispositions de l'article R. 411-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 411-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le ressortissant étranger qui séjourne régulièrement en France depuis au moins dix-huit mois, sous couvert d'un des titres d'une durée de validité d'au moins un an prévus par le présent code ou par des conventions internationales, peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre du regroupement familial, par son conjoint, si ce dernier est âgé d'au moins dix-huit ans, et les enfants du couple mineurs de dix-huit ans " ; qu'aux termes de l'article L. 411-5 du même code : " Le regroupement familial ne peut être refusé que pour l'un des motifs suivants : / 1° Le demandeur ne justifie pas de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille. Sont prises en compte toutes les ressources du demandeur et de son conjoint indépendamment des prestations familiales et des allocations prévues à l'article L. 262-1 du code de l'action sociale et des familles, à l'article L. 815-1 du code de la sécurité sociale et aux articles L. 351-9, L. 351-10 et L. 351-10-1 du code du travail. Les ressources doivent atteindre un montant qui tient compte de la taille de la famille du demandeur. Le décret en Conseil d'Etat prévu à l'article L. 441-1 fixe ce montant qui doit être au moins égal au salaire minimum de croissance mensuel et au plus égal à ce salaire majoré d'un cinquième (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 411-4 du même code : " Pour l'application du 1° de l'article L. 411-5, les ressources du demandeur et de son conjoint qui alimenteront de façon stable le budget de la famille sont appréciées sur une période de douze mois par référence à la moyenne mensuelle du salaire minimum de croissance au cours de cette période. Ces ressources sont considérées comme suffisantes lorsqu'elles atteignent un montant équivalent à : - cette moyenne pour une famille de deux ou trois personnes ; - cette moyenne majorée d'un dixième pour une famille de quatre ou cinq personnes ; - cette moyenne majorée d'un cinquième pour une famille de six personnes ou plus " ; qu'aux termes de l'article R. 421-4 du même code : " A l'appui de sa demande de regroupement, le ressortissant étranger présente (...) les copies (...) des pièces suivantes : (...) 3° Les justificatifs des ressources du demandeur et, le cas échéant, de son conjoint, tel que le contrat de travail dont il est titulaire ou, à défaut, une attestation d'activité de son employeur, les bulletins de paie afférents à la période des douze mois précédant le dépôt de sa demande, ainsi que le dernier avis d'imposition sur le revenu en sa possession, dès lors que sa durée de présence en France lui permet de produire un tel document, et sa dernière déclaration de revenus. La preuve des revenus non salariaux est établie par tous moyens ; (...) " ; qu'il résulte de la combinaison des dispositions des articles R. 411-4 et R. 421-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le caractère suffisant du niveau de ressources du demandeur est apprécié sur la période de douze mois précédant le dépôt de la demande de regroupement familial, par référence à la moyenne mensuelle du salaire minimum interprofessionnel de croissance au cours de cette même période, même si, lorsque ce seuil n'est pas atteint au cours de la période considérée, il est toujours possible, pour le préfet, de prendre une décision favorable en tenant compte de l'évolution des ressources du demandeur, y compris après le dépôt de la demande ;
4. Considérant qu'il n'est pas contesté par Mme B...qu'au cours de la période de référence de douze mois précédant le dépôt de sa demande de regroupement familial, soit de janvier à décembre 2011, son revenu mensuel moyen n'était que de 1 270,33 euros brut ; qu'ainsi, son revenu mensuel moyen était largement inférieur au montant des ressources exigées pour une famille de quatre à cinq personnes, qui s'élevait à 1 501,72 euros brut pour cette période ; que la légalité d'une décision s'appréciant à la date à laquelle elle a été prise, la circonstance que le compagnon de Mme B...justifie d'un emploi depuis le 22 mai 2012 est sans influence sur la légalité de la décision préfectorale du 21 mai 2012 ; qu'ainsi le préfet de la Sarthe n'a pas commis d'erreur d'appréciation en estimant les ressources de Mme B...insuffisantes au sens des dispositions précitées de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;
6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B...est entrée en France en 2001 et a ainsi vécu éloignée de son fils, Paul-Elie Israël, né le 15 avril 1996, pendant de nombreuses années avant de solliciter le 16 janvier 2012 le regroupement familial ; qu'elle ne justifie pas, par la production d'attestations très peu circonstanciées, que son fils, qui a toujours vécu en Côte d'Ivoire, ne pourrait pas être pris en charge par son père à la suite du décès de sa grand-mère maternelle ; que si Mme B...soutient qu'elle s'est vu déléguer la puissance paternelle sur son fils par une ordonnance du 25 juillet 2011 du juge des tutelles du tribunal de première instance d'Abidjan, elle n'établit pas avoir participé à l'entretien et à l'éducation de son fils, ni même entretenu des relations effectives avec lui depuis qu'elle vit en France ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ne peut qu'être écarté ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
8. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par MmeB..., n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, dès lors, les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens :
9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme dont MmeB..., bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, demande le versement au profit de son avocat au titre des frais non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...B...et au ministre de l'intérieur.
Une copie en sera adressée au préfet de la Sarthe.
Délibéré après l'audience du 22 septembre 2015, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- Mme Loirat, président-assesseur,
- Mme Rimeu, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 13 octobre 2015.
Le rapporteur,
S. RIMEULe président,
L. LAINE
Le greffier,
M. C...
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°14NT011282