Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes l'annulation de l'arrêté du 18 décembre 2013 du préfet de la Sarthe portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.
Par un jugement n° 1400354 du 4 juin 2014, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 24 juillet 2014, Mme D... B..., représentée par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 4 juin 2014 ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Sarthe, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, de lui délivrer le titre de séjour demandé dans le délai de quinze jours suivant l'arrêt à intervenir, à défaut, de réexaminer dans le même délai sa situation aux fins de délivrance d'un titre l'autorisant à travailler et de lui délivrer durant ce réexamen une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros, qui devra être versée à son conseil, Me C..., qui renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- en tant qu'il porte refus de titre de séjour, l'arrêté contesté :
* est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
* méconnaît les stipulations des articles 3 §1 et 9 §1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
* méconnait les recommandations de la circulaire du 28 novembre 2012 ;
- en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français, l'arrêté contesté :
* doit être annulé en conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
* méconnaît les stipulations de l'article 3 §1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 25 novembre 2014, le préfet de la Sarthe conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par Mme B... n'est fondé.
Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale au titre de cette instance et Me C... a été désigné pour la représenter par une décision de la section administrative du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes en date du 4 août 2014.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Allio-Rousseau, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que Mme B..., ressortissante turque née le 1er avril 1974, déclare être entrée en France le 6 juin 2010 ; que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté sa demande tendant à obtenir le statut de réfugié par décision du 11 août 2010 ; que s'étant maintenue sur le territoire français, Mme B...a demandé la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du 18 décembre 2013, le préfet de la Sarthe a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire et a fixé la destination de son éloignement ; que Mme B...relève appel du jugement en date du 4 juin 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne le refus de titre de séjour :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l' exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;
3. Considérant que MadameB..., entrée en France le 6 juin 2010, fait valoir qu'elle y vit avec ses trois enfants et leur père, M. A... B... son ex-époux, lesquels sont tous en situation régulière sur le territoire français ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que MonsieurA... B... a épousé le 28 avril 2004 au Mans, une ressortissante française dont il a eu deux enfants ; que, depuis 2006, il réside sous couvert d'une carte de résident en qualité de conjoint d'une Française et a pu faire entrer en France les enfants nés de son union avec Mme B...en 2007 dans le cadre de la procédure de regroupement familial ; que la communauté de vie avec son ex-époux n'est pas établie ; que si Mme B...se prévaut de l'intensité des liens en France avec ses enfants, il ressort des pièces du dossier, d'une part, que M. B... dispose, depuis le jugement de divorce du 22 octobre 2001, de la garde et l'exercice exclusif de l'autorité parentale sur les enfants, Mme B...ne bénéficiant que d'un droit de visite à raison d'un mois du 1er au 20 juillet et, d'autre part, que la requérante n'est arrivée en France qu'en 2010 pour y demander en premier lieu l'asile tandis que ses enfants y résident depuis 2007 ; que Mme B...n'établit pas ni même n'allègue que ses enfants seraient dans l'impossibilité de lui rendre visite dans son pays à l'occasion de l'exercice de son droit de visite estival annuel ; que, dans ces conditions, Mme B...n'est pas fondée à soutenir que la décision contestée aurait méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 3 § 1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; qu'il ressort de ce qui a été énoncé au point précédent que Mme B... n'est pas fondée à soutenir qu'en refusant le titre de séjour sollicité, le préfet de la Sarthe aurait méconnu les stipulations précitées ;
5. Considérant, en troisième lieu, que la requérante ne saurait utilement se prévaloir des stipulations de l'article 9 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 qui créent seulement des obligations entre Etats sans ouvrir de droits à leurs ressortissants ;
6. Considérant, en quatrième lieu, que la requérante ne saurait utilement se prévaloir des énonciations, dépourvues de caractère réglementaire, de la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière dans le cadre des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
7. Considérant, en premier lieu, que l'illégalité du refus de séjour opposé à Mme B...n'étant pas établie, l'exception d'illégalité de ce refus, soulevée à l'appui des conclusions d'annulation dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français, ne peut qu'être écartée ;
8. Considérant, en second lieu, que les moyens relatifs à la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3 § 1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 3 et 4 du présent arrêt ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
10. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par MmeB..., n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, dès lors, les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme dont MmeB..., bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, demande le versement au profit de son avocat au titre des frais non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... B... et au ministre de l'intérieur. Une copie en sera transmise pour information au préfet de la Sarthe.
Délibéré après l'audience du 18 juin 2015, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- Mme Aubert, président-assesseur,
- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 9 juillet 2015.
Le rapporteur,
M-P. ALLIO-ROUSSEAULe président,
F. BATAILLE
Le greffier,
C. CROIGER
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 14NT01987