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19/03/2015 | FRANCE | N°13NT02784

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 19 mars 2015, 13NT02784


Vu la requête, enregistrée le 30 septembre 2013, présentée pour Mme B...A..., demeurant..., par Me Vaernewyck, avocat ; Mme A...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201404 du 22 juillet 2013 par lequel le tribunal administratif de Caen a annulé, sur demande de l'association Centre de Soins Miséricorde Sées-Le Merlerault, la décision du 14 mai 2012 par laquelle l'inspecteur du travail de la 3ème section de l'inspection du travail de l'Orne a refusé d'autoriser cette association à la licencier ;

2°) de rejeter la demande présentée par l'association Cen

tre de Soins Miséricorde Sées-Le Merlerault devant le tribunal administratif...

Vu la requête, enregistrée le 30 septembre 2013, présentée pour Mme B...A..., demeurant..., par Me Vaernewyck, avocat ; Mme A...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201404 du 22 juillet 2013 par lequel le tribunal administratif de Caen a annulé, sur demande de l'association Centre de Soins Miséricorde Sées-Le Merlerault, la décision du 14 mai 2012 par laquelle l'inspecteur du travail de la 3ème section de l'inspection du travail de l'Orne a refusé d'autoriser cette association à la licencier ;

2°) de rejeter la demande présentée par l'association Centre de Soins Miséricorde Sées-Le Merlerault devant le tribunal administratif de Caen ;

3°) de mettre à la charge de l'association Centre de Soins Miséricorde Sées-Le Merlerault le versement de la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que :

- la décision de l'inspecteur du travail n'a pas été prise au terme d'une procédure irrégulière dès lors que l'enquête a été menée de manière contradictoire ;

- aucun des griefs invoqués n'est insuffisamment caractérisé ;

- leur gravité n'est pas démontrée ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 10 décembre 2013, présenté pour l'association Centre de Soins Miséricorde Sées-Le Merlerault, par Me Gallot, avocat ; elle conclut au rejet de la requête ;

elle soutient que :

- la procédure est irrégulière dès lors que les attestations transmises par Mme A...à l'inspecteur du travail au cours de l'enquête ne lui ont pas été communiquées ;

- la réalité des fautes reprochées à Mme A...est établie ;

- ces fautes sont d'une gravité suffisante pour justifier le licenciement de Mme A...;

- la demande d'autorisation de licenciement n'a pas de lien avec le mandat ;

Vu la lettre du 29 janvier 2015 par laquelle la cour a informé les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, qu'elle était susceptible de soulever d'office un moyen d'ordre public tiré de ce que, compte tenu de l'existence d'un lien entre le licenciement envisagé de Mme A...et son mandat, l'inspecteur du travail était tenu de rejeter la demande d'autorisation, cette situation de compétence liée rendant inopérants les moyens soulevés à l'appui des conclusions tendant à l'annulation de la décision de l'inspecteur du travail ;

Vu la décision de la section administrative du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes en date du 28 octobre 2013 admettant Mme A...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale au titre de cette instance et désignant Me Vaernewyck pour la représenter ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 février 2015 :

- le rapport de M. Etienvre, premier conseiller,

- et les conclusions de Mlle Wunderlich, rapporteur public ;

1. Considérant que le 15 mars 2012, l'association Centre de Soins Miséricorde Sées-Le Merlerault a demandé à l'inspection du travail l'autorisation de licencier MmeA..., représentante du personnel depuis le 31 mai 2011, en raison tant de son insuffisance professionnelle que de fautes professionnelles ; que, le 14 mai 2012, l'inspecteur du travail de la 3ème section de l'Orne a rejeté cette demande en écartant chacun des griefs invoqués et en relevant qu'il n'était pas possible d'écarter tout lien entre le mandat exercé par Mme A...et la demande de licenciement la concernant ; que, par jugement du 22 juillet 2013, le tribunal administratif de Caen a, sur demande de cette association, annulé cette décision en raison d'un vice de procédure et de l'erreur commise par l'inspecteur du travail dans l'appréciation du caractère fautif de certains des griefs invoqués par l'employeur ; que Mme A...relève appel de ce jugement ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 2421-7 du code du travail : "L'inspecteur du travail et, en cas de recours hiérarchique, le ministre examinent notamment si la mesure de licenciement envisagée est en rapport avec le mandat détenu, sollicité ou antérieurement exercé par l'intéressé" ;

3. Considérant que si l'association Centre de Soins Miséricorde Sées-Le Merlerault a reproché à Mme A...des faits qualifiés d'insuffisance professionnelle, il ressort toutefois des pièces du dossier que les qualités professionnelles de cette aide-soignante, employée par l'association depuis le 19 juin 2003, étaient reconnues ; que lui a d'ailleurs été confiée, à compter du congé maternité de l'infirmière adjointe de la coordinatrice jusqu'en mai 2010, la responsabilité de planifier les tournées des aides-soignantes ; qu'à supposer même que Mme A...ait eu, à l'occasion de soins prodigués à des patients, des gestes brusques ou vifs, ces derniers ne sont cependant pas suffisants pour caractériser chez Mme A...une insuffisance professionnelle ; qu'en ce qui concerne les fautes reprochées à MmeA..., aucune de celles-ci n'est, en tout état de cause, d'une gravité suffisante pour justifier un licenciement ; que certains de ces griefs sont au demeurant soit prescrits soit, comme les manquements allégués à l'obligation de discrétion professionnelle, manifestement non établis ou ont déjà fait l'objet d'un avertissement ; que, dans ces conditions, et dans la mesure où la majeure partie des griefs invoqués l'a été à partir du moment où Mme A...a été élue comme représentante du personnel et a exercé son mandat de manière active, la demande d'autorisation de licenciement doit être regardée, alors même que l'employeur n'a pas entravé l'exercice de ce mandat, comme ayant un lien avec ce dernier ; que l'inspecteur du travail était dès lors tenu de refuser d'accorder à l'association Centre de soins Miséricorde Sées-Le Merlerault l'autorisation de licenciement qu'elle a sollicitée alors même qu'il se serait à tort abstenu d'informer l'association de la teneur des attestations transmises par Mme A...au cours de l'enquête contradictoire ; que les irrégularités dont la décision de l'inspecteur du travail en date du 14 mai 2012 a pu être affectée étaient dès lors inopérantes ; qu'il s'ensuit que c'est à tort que les premiers juges ont annulé la décision du 14 mai 2012 par laquelle l'inspecteur du travail de la 3ème section de l'inspection du travail de l'Orne a refusé d'autoriser l'association Centre de soins Miséricorde Sées-Le Merlerault à licencier Mme A...aux motifs que cette décision était intervenue à l'issue d'une procédure irrégulière et que l'inspecteur du travail avait commis une erreur d'appréciation sur le caractère fautif de certains des griefs invoqués par l'employeur ;

4. Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par l'association Centre de Soins Miséricorde Sées-Le Merlerault ;

5. Considérant que, comme il a été dit au point 3, la demande d'autorisation de licencier Mme A...doit être regardée comme ayant un lien avec le mandat de cette salariée ; que l'inspecteur du travail était dès lors tenu de refuser de délivrer à l'association Centre de Soins Miséricorde Sées-Le Merlerault l'autorisation qu'elle avait sollicitée ; que cette situation de compétence liée rend inopérants l'ensemble des autres moyens soulevés par l'association Centre de Soins Miséricorde Sées-Le Merlerault ; que la demande présentée par celle-ci devant le tribunal administratif de Caen doit être, par suite, rejetée ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a annulé la décision du 14 mai 2012 par laquelle l'inspecteur du travail de la 3ème section de l'inspection du travail de l'Orne a refusé d'autoriser l'association Centre de soins Miséricorde Sées-Le Merlerault à la licencier ;

Sur les conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'association Centre de Soins Miséricorde Sées-Le Merlerault le versement à Mme A...d'une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Caen en date du 22 juillet 2013 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par l'association Centre de Soins Miséricorde Sées-Le Merlerault devant le tribunal administratif de Caen est rejetée.

Article 3 : L'association Centre de Soins Miséricorde Sées-Le Merlerault versera à Mme A...une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...A..., à l'association Centre de Soins Miséricorde Sées-Le Merlerault et au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

Délibéré après l'audience du 26 février 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Bataille, président de chambre,

- Mme Loirat, président-assesseur,

- M. Etienvre, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 19 mars 2015.

Le rapporteur,

F. ETIENVRELe président,

F. BATAILLE

Le greffier,

E. HAUBOIS

La République mande et ordonne au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 13NT02784


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 13NT02784
Date de la décision : 19/03/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BATAILLE
Rapporteur ?: M. Franck ETIENVRE
Rapporteur public ?: Mme WUNDERLICH
Avocat(s) : VAERNEWYCK

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-03-19;13nt02784 ?
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