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17/02/2015 | FRANCE | N°13NT00104

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 17 février 2015, 13NT00104


Vu la requête, enregistrée le 14 janvier 2013, présentée pour la commune de Sartilly, dont le siège est situé BP 18 à Sartilly (50530), représentée par son maire en exercice à ce dûment autorisé par délibération du 3 décembre 2012, par Me Chanut, avocat au barreau de Caen ; la commune de Sartilly demande à la cour :

A) à titre principal :

1°) d'annuler le jugement n° 1200524 du 15 novembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Caen :

- d'une part, l'a condamnée à verser à Mme B... la somme de 1 350 euros en réparation des préjudices subis du

fait de l'accident dont elle avait été victime, et la somme de 1 000 euros en application...

Vu la requête, enregistrée le 14 janvier 2013, présentée pour la commune de Sartilly, dont le siège est situé BP 18 à Sartilly (50530), représentée par son maire en exercice à ce dûment autorisé par délibération du 3 décembre 2012, par Me Chanut, avocat au barreau de Caen ; la commune de Sartilly demande à la cour :

A) à titre principal :

1°) d'annuler le jugement n° 1200524 du 15 novembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Caen :

- d'une part, l'a condamnée à verser à Mme B... la somme de 1 350 euros en réparation des préjudices subis du fait de l'accident dont elle avait été victime, et la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

- d'autre part, l'a condamnée à verser à la Mutualité sociale agricole Côtes Normandes les sommes de 300,38 euros au titre de ses débours et de 200,26 euros au titre de l'indemnité forfaitaire prévue à l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ;

- enfin, a rejeté l'appel en garantie qu'elle avait présenté à l'encontre de la société Lainé TP ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme B... devant le tribunal ;

B) à titre subsidiaire :

1°) de réduire à de plus justes proportions l'indemnisation du préjudice de Mme B... ;

2°) de condamner la société Lainé TP à la garantir de toute condamnation prononcée contre elle ;

C) en tout état de cause, de mettre à la charge de Mme B... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que :

- sa responsabilité ne saurait être engagée, toutes les précautions ayant été prises pour sécuriser le chantier et informer les riverains ;

- l'origine de l'accident est à rechercher dans une imprudence ou une inattention de la victime ;

- le lien de causalité entre le chantier et les préjudices dont Mme B... demande réparation n'est pas établi, puisque l'accident n'a pas eu de témoin ;

- la responsabilité de la société qui réalisait les travaux est engagée ;

- l'évaluation faite des préjudices est excessive ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 11 mars 2013, présenté pour Mme B..., demeurant..., par Me Agostini, avocat au barreau de Caen ; Mme B... demande à la cour :

1°) de rejeter la requête de la commune de Sartilly ;

2°) par la voie de l'appel incident :

- d'infirmer le jugement en ce qu'il procède à un partage de responsabilité ;

- de condamner la commune à lui verser la somme de 10 200 euros en réparation de l'ensemble des préjudices subis ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Sartilly la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que :

- en sa qualité de maître d'ouvrage la responsabilité de la commune est engagée : en raison de l'insuffisante signalisation du chantier et de l'absence d'information des usagers ;

- aucune faute ne peut lui être reprochée ;

- le lien de causalité entre les préjudices dont il est demandé réparation et les travaux est établi ;

- les préjudices sont réels et les sommes demandées justifiées ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 8 août 2013, présenté pour la commune de Sartilly qui maintient ses conclusions et moyens et conclut au rejet de l'appel incident de Mme B... ;

elle soutient en outre que :

- la mission de coordination sécurité était en cours au moment de la réalisation des trottoirs ;

- la commune a bien procédé à la signalisation du chantier et à l'information des riverains ;

- la responsabilité incombe à la seule entreprise Lainé TP ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 26 septembre 2013, présenté pour la société Lainé TP, dont le siège est situé ZA de la Porionnais, BP 309, à Avranches (50303), par Me Martin, avocat au barreau de Rennes ;

la société Lainé TP conclut :

- à titre principal, à la confirmation du jugement en ce qu'il a rejeté l'appel en garantie présenté à son encontre ;

- à titre subsidiaire, à l'infirmation du jugement en ce qu'il admet la responsabilité de la commune de Sartilly et la condamne à réparer les préjudices subis par Mme B..., et au rejet de la demande présentée par cette dernière devant le tribunal ;

- en toute hypothèse, à ce que soit mise à la charge de la commune de Sartilly ou de Mme B... la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que :

- la commune n'établit l'existence d'aucune faute contractuelle ; au surplus, les travaux ont été réceptionnés sans réserves ; l'appel en garantie sera donc rejeté ;

- la responsabilité de la commune de Sartilly ne saurait être retenue ;

- c'est l'imprudence de la victime qui est à l'origine de l'accident ;

- les préjudices invoqués sont sans lien direct et certain avec la chute ;

- les sommes réclamées sont excessives ;

Vu le mémoire, enregistré le 26 décembre 2014, présenté par la Mutualité sociale agricole Côtes Normandes qui déclare ne pas intervenir à l'instance ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 janvier 2015 :

- le rapport de M. Madelaine, faisant fonction de premier conseiller,

- et les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public ;

1. Considérant que Mme B... a demandé réparation à la commune de Sartilly des préjudices consécutifs à l'accident dont elle a été victime le 20 mai 2009, à proximité de son domicile, qu'elle impute aux risques que faisait courir aux usagers l'état de la voirie, et notamment la présence d'un fil tendu à dix centimètres du sol, installé par la société Lainé TP dans le cadre de travaux de pose de bordures de trottoir, qu'elle réalisait pour le compte de la commune ; que, par jugement du 15 novembre 2012, le tribunal administratif de Caen a reconnu la responsabilité de la commune de Sartilly, maître d'ouvrage des travaux, pour cet accident, l'a limitée à 50 % compte tenu de l'imprudence de la victime, a condamné la commune à verser la somme de 1 350 euros à Mme B... et les sommes de 300,38 euros et de 200,26 euros à la Mutualité sociale agricole Côtes Normandes, et a rejeté l'appel en garantie présenté par la commune à l'encontre de la société Lainé TP ; que la commune de Sartilly relève appel de ce jugement en ce qu'il lui fait grief ; que Mme B..., par la voie de l'appel incident, demande la réformation du jugement en tant que le tribunal a retenu une part de responsabilité à sa charge et insuffisamment évalué son préjudice ;

Sur la responsabilité de la commune de Sartilly :

2. Considérant qu'il appartient à l'usager, victime d'un dommage survenu à l'occasion de l'utilisation d'un ouvrage public d'apporter la preuve, d'une part, de la réalité de ses préjudices, et, d'autre part, de l'existence d'un lien de causalité direct entre cet ouvrage et le dommage ; que la collectivité en charge de l'ouvrage public peut s'exonérer de sa responsabilité en rapportant la preuve soit de l'entretien normal de l'ouvrage, soit de ce que le dommage est imputable à la faute de la victime ou à un cas de force majeure ;

3. Considérant que Mme B..., propriétaire d'un lot situé rue des mésanges à Sartilly au sein du lotissement communal " de Fonteny ", a été victime d'une chute le 20 mai 2009, à proximité de son domicile ; qu'elle soutient que cet accident trouverait son origine dans les défectuosités de la voirie qui faisait l'objet de travaux d'aménagement réalisés sous maîtrise d'ouvrage de la commune, et notamment dans la présence d'un fil tendu à dix centimètres du sol, installé par la société Lainé TP dans le cadre de travaux de pose de bordures de trottoir ; que, s'il n'est pas contesté que les travaux en cours avaient modifié l'état des lieux, spécialement par la réalisation d'une tranchée dans laquelle devait être posée la bordure de trottoir et par la mise en place d'un fil qui devait servir de guide, il résulte de l'instruction que la requérante, en sa qualité de riveraine, à supposer même qu'elle n'aurait pas été destinataire d'une information individuelle, ne pouvait ignorer l'existence du chantier en cours et de ses modalités de réalisation, ainsi que les risques encourus ; que l'accident dont elle se prévaut est survenu de jour, dans une zone où l'entreprise intervenait ; que le risque que représentait la tranchée surmontée d'un fil tendu à dix centimètres du sol n'excédait pas celui auquel doit s'attendre un riverain qui s'aventure dans une telle zone et qui doit dans ce cas redoubler de vigilance ; qu'ainsi la commune est fondée à soutenir que cet accident est entièrement dû au manque d'attention de Mme B..., qui s'est engagée sans suffisamment de prudence et de précautions dans une zone de chantier dont, en sa qualité de riveraine, elle ne pouvait pas ignorer la présence et le caractère dangereux ; qu'au demeurant il résulte d'un témoignage produit par la requérante elle-même qu'à l'instant de la chute l'attention de la victime était concentrée sur les manoeuvres effectuées par un artisan qui devait intervenir à son domicile ; que, dans ces conditions, l'accident doit être regardé comme imputable à la seule imprudence de Mme B..., qui n'est donc pas fondée à demander réparation des préjudices en résultant ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune de Sartilly est fondée à soutenir que c'est à tort que, par les articles 1, 2, 4 et 5 de son jugement, le tribunal administratif de Caen, après l'avoir déclarée responsable de la moitié des conséquences dommageables de l'accident survenu à Mme B..., l'a condamnée à verser la somme de 1 350 euros à la victime et les sommes de 300,38 euros et de 200,26 euros à la Mutualité sociale agricole Côtes Normandes, a mis à sa charge une somme de 1 000 euros à verser à Mme B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté sa demande présentée au même titre ; qu'elle est par suite fondée à demander, dans cette mesure, l'annulation du jugement attaqué ; que, par voie de conséquence, les conclusions présentées par Mme B... devant la cour, par la voie de l'appel incident, doivent être rejetées ;

Sur l'appel en garantie formé contre la société Lainé TP :

5. Considérant que la commune de Sartilly conteste également l'article 3 du jugement attaqué par lequel le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à ce que la société Lainé TP la garantisse des condamnations prononcées à son encontre ; que, compte tenu de l'exonération de toute responsabilité de la commune résultant du présent arrêt, ces conclusions doivent être regardées comme ayant perdu leur objet ; qu'il n'y a, dès lors, plus lieu d'y statuer ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Sartilly, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que demande Mme B... ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la commune de Sartilly et la société Lainé TP au titre de ces mêmes dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les articles 1, 2, 4 et 5 du jugement du 15 novembre 2012, par lesquels le tribunal administratif de Caen a condamné la commune de Sartilly à verser à Mme B... la somme de 1 350 euros et à la Mutualité sociale agricole Côtes Normandes les sommes de 300,38 euros et de 200,26 euros, a mis à sa charge une somme de 1 000 euros à verser à Mme B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté sa demande présentée au même titre, sont annulés.

Article 2 : La demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif de Caen, ainsi que ses conclusions présentées devant la cour, par la voie de l'appel incident, et la demande présentée par la Mutualité sociale agricole Côtes Normandes sont rejetées.

Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la commune de Sartilly dirigées contre l'article 3 du jugement du 15 novembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à ce que la société Lainé TP la garantisse des condamnations prononcées à son encontre.

Article 4 : Les conclusions de la commune de Sartilly, de Mme B... et de la société Lainé TP présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Sartilly, à Mme C..., à la société Laine TP et à la Mutualité sociale agricole Côtes Normandes.

Délibéré après l'audience du 26 janvier 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Bachelier, président de la cour,

- Mme Aubert, président-assesseur,

- M. Madelaine, faisant fonction de premier conseiller.

Lu en audience publique le 17 février 2015.

Le rapporteur,

B. MADELAINE Le président,

G. BACHELIER

Le greffier,

M. A...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 13NT001042

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 13NT00104
Date de la décision : 17/02/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BACHELIER
Rapporteur ?: M. Bernard MADELAINE
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : CHANUT

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-02-17;13nt00104 ?
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