Vu la requête et le mémoire de production de pièces, enregistrés les 27 juin et 5 août 2013, présentés pour M. B... C... demeurant ... par Me Ifrah, avocat ; M. C... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1303278 du 19 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Sarthe en date du 21 mars 2013 portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et fixation du pays de destination ;
2°) d'annuler ces décisions ;
3°) d'enjoindre, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter d'un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire ou à défaut de procéder au réexamen de sa situation et lui délivrer durant cet examen une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
il soutient que :
- les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français sont entachées d'incompétence de leur auteur et sont insuffisamment motivées ;
- la décision portant refus de titre de séjour est entachée du défaut de saisine préalable de la commission du titre de séjour, méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en portant une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, les stipulations des articles 3-1 et 9 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, notamment au regard de la circulaire du 28 novembre 2012, est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'illégalité par voie d'exception et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en portant une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et les stipulations des articles 3-1 et 9 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et est entachée d'une erreur manifeste en ne lui accordant pas un délai de départ volontaire supérieur à trente jours ;
- la décision fixant le pays de destination porte atteinte à sa dignité ;
Vu le jugement et la décision attaqués ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 3 octobre 2013, présenté par le préfet de la Sarthe ; il conclut au rejet de la requête ;
il soutient que :
- Mme A... avait reçu délégation du préfet à l'effet de signer les décisions contestées ;
- la décision portant refus de séjour et celle fixant le pays de destination sont suffisamment motivées ; l'obligation de quitter le territoire français n'avait pas à faire l'objet d'une motivation spécifique ;
- le requérant ne remplissant pas les conditions pour obtenir une carte de séjour temporaire sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour ;
- il n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale ;
- le requérant ne peut utilement invoquer la méconnaissance des stipulations de l'article 9 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- l'article 3-1 de cette convention n'a pas été méconnu ;
- il n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences du refus de séjour sur la situation personnelle de l'intéressé et en octroyant un délai de départ volontaire de trente jours ;
- le requérant ne justifie pas encourir de risques en cas de retour au Cameroun ;
Vu les mémoires de production de pièces, enregistrés le 31 octobre 2013 et 23 janvier 2014, présentés pour M. C... ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu la loi 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 septembre 2014 le rapport de M. Etienvre, premier conseiller ;
1. Considérant que M. C..., ressortissant camerounais, relève appel du jugement du 19 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Sarthe en date du 21 mars 2013 portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixation du pays de destination ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
2. Considérant, en premier lieu, que M. C... se borne devant la Cour à reprendre, sans apporter plus de précisions ou de justifications, les moyens invoqués en première instance et tirés de l'incompétence du signataire et du caractère insuffisamment motivé des décisions contestées relatives au refus de délivrance d'un titre de séjour et portant obligation de quitter le territoire français ; qu'il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : "Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...)" ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui (...)" ; que si enfin l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : "Dans chaque département est instituée une commission du titre de séjour (...)" et que si l'article L. 312-2 du même code dispose que : "La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3 (...)", il résulte cependant de ces dispositions que le préfet n'est tenu de saisir la commission que du seul cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues à l'article L. 313-11 auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ;
4. Considérant que M. C... se prévaut de ce qu'il vit régulièrement en France depuis 2009 où réside son épouse, titulaire à la date des décisions contestées, d'une carte de séjour temporaire, avec leurs deux enfants nés en 2001 et 2006 et un enfant né d'une autre union le 8 septembre 2010 dont l'état de santé justifie un suivi et des soins médicaux ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier et en particulier des propres déclarations du requérant que celui-ci n'a séjourné en France depuis 2007 que durant de très courtes périodes notamment sous couvert d'un visa C de circulation valable du 3 juillet 2008 au 2 juillet 2012, qu'il n'est entré en France pour la dernière fois que le 26 novembre 2011, qu'il a divorcé de son épouse en 2010 pour se marier avec celle-ci une seconde fois le 28 avril 2012 et qu'à la date de ce mariage, contrairement à ce qu'il soutient, M. C... ne vivait pas au domicile de son épouse au Mans mais à Paris comme l'établit la copie de l'acte de mariage produite ; que les pièces versées au dossier ne justifient pas davantage que M. C... a vécu chez son épouse et ses enfants à compter du 28 avril 2012 ; que, dans ces conditions, M. C... n'est pas fondé à soutenir qu'il remplissait les conditions pour obtenir la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 précité lequel n'est, en tout état de cause, pas applicable aux étrangers qui, comme M. C..., entrent dans la catégorie des étrangers relevant du regroupement familial ; qu'il n'est pas, pour les mêmes motifs, fondé à soutenir que le préfet devait saisir la commission du titre de séjour et a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
5. Considérant, en troisième lieu, que M. C... ne peut se prévaloir utilement ni de la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 qui est dépourvue de caractère réglementaire et qui fait seulement application des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni des stipulations de l'article 9 de la convention internationale des droits de l'enfant précitée qui créent seulement des obligations entre Etats sans ouvrir de droits à leurs ressortissants ;
6. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 : "Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorité administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale" ;
7. Considérant que compte-tenu des très courts séjours effectués en France par M. C... entre 2007 et 2012, où résident ses trois enfants, celui-ci n'est pas fondé à soutenir que le préfet de la Sarthe a méconnu les stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant ;
8. Considérant, en cinquième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Sarthe a commis une erreur manifeste en n'accordant pas à M. C... un délai de départ volontaire supérieur à trente jours ;
9. Considérant, en dernier lieu, que le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination porterait atteinte à la dignité de M. C... n'est pas assorti des précisions permettant d'en établir le bien-fondé ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
11. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de la requête, n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions de l'intéressé tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Sarthe de lui délivrer un titre de séjour ou d'examiner à nouveau sa situation doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que M. C... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Sarthe.
Délibéré après l'audience du 3 septembre 2014, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- Mme Loirat, président-assesseur,
- M. Etienvre, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 25 septembre 2014.
Le rapporteur,
F. ETIENVRE Le président,
F. BATAILLE
Le greffier,
E. HAUBOIS
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 13NT01864