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19/09/2014 | FRANCE | N°13NT03317

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 19 septembre 2014, 13NT03317


Vu la requête, enregistrée le 6 décembre 2013, présentée pour M. A... C..., demeurant à ...et Mme B...C..., demeurant à..., par Me D... ; M. et Mme C... demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 7 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés du 10 octobre 2012 du préfet d'Indre-et-Loire portant refus de délivrance de titres de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi ;

2°) d'annuler ces arrêtés ;

3°) à titre principal, d'enjoin

dre au préfet d'Indre-et-Loire de leur délivrer une carte de séjour temporaire dans un d...

Vu la requête, enregistrée le 6 décembre 2013, présentée pour M. A... C..., demeurant à ...et Mme B...C..., demeurant à..., par Me D... ; M. et Mme C... demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 7 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés du 10 octobre 2012 du préfet d'Indre-et-Loire portant refus de délivrance de titres de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi ;

2°) d'annuler ces arrêtés ;

3°) à titre principal, d'enjoindre au préfet d'Indre-et-Loire de leur délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et, à titre subsidiaire, de procéder à un réexamen de leur situation après les avoir admis provisoirement au séjour dans les mêmes conditions d'astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à leur avocat de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la contribution versée par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;

ils soutiennent que :

- les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont été méconnues dès lors qu'ils vivent en France depuis trois ans et demi avec leurs trois enfants ;

- les enfants ayant bénéficié d'une scolarité en France et n'étant pas familiarisés avec l'alphabet cyrillique et la langue serbe, leur retour en Serbie aurait des conséquences d'une exceptionnelle gravité ;

- ils bénéficient d'une bonne intégration sociale, le frère de M. C... vit en France et a obtenu le statut de réfugié ;

- les arrêtés en litige sont insuffisamment motivés dès lors que le préfet n'a pas précisé la raison pour laquelle leur demande ne répondait pas à des considérations humanitaires ou à un motif exceptionnel ; son refus est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- les décisions contestées méconnaissent les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; ils établissent avoir subi des mauvais traitements en Serbie où leurs vies seraient menacées en cas de retour ;

- les décisions en litige méconnaissent les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 6 février 2014, présenté par le préfet d'Indre-et-Loire qui conclut au rejet de la requête ;

il soutient que :

- M. et Mme C... sont entrés récemment sur le territoire national, âgés de 34 et 37 ans, et n'appartiennent à aucune catégorie d'étrangers pouvant bénéficier de l'admission au séjour ; la cellule familiale peut se reconstituer dans le pays de destination ; il n'a pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni commis d'erreur manifeste d'appréciation ;

- la situation de M. et Mme C... ne répondait à aucune circonstance humanitaire ;

- les arrêtés ont pris en compte la situation personnelle des requérants et sont suffisamment motivés ;

- les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'ont pas été méconnues dans la mesure où le statut de réfugié n'a pas été reconnu aux requérants qui ne justifient pas que leur vies seraient menacées en Serbie ;

- les arrêtés en litige ne sont pas contraires aux stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, les enfants du couple étant arrivés très récemment en France à l'âge de 11, 9 et 6 ans ; à la date des arrêtés en litige, ils n'étaient scolarisés en France que depuis un an et demi ;

Vu la décision du président de la section administrative du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal administratif de Nantes du 20 décembre 2013 admettant M. C... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 août 2014 :

- le rapport de M. Auger, premier conseiller ;

1. Considérant que M. et Mme C..., ressortissants serbes, seraient entrés irrégulièrement en France, selon leurs déclarations, le 28 septembre 2010 ; que chacun d'eux a introduit une demande d'asile rejetée le 30 novembre 2010 par décision du directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides confirmée le 6 juillet 2012 par la Cour nationale du droit d'asile et a fait l'objet, le 30 décembre 2010, d'un refus de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français ; qu'ils n'ont pas exécuté ces décisions et ont sollicité, le 27 juillet 2012, le bénéfice de l'admission au séjour au titre de la vie privée et familiale ; qu'ils relèvent appel du jugement du 7 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés du 10 octobre 2012 du préfet d'Indre-et-Loire portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'il résulte des motifs mêmes des arrêtés contestés que le préfet a indiqué que M. et Mme C... sont entrés récemment sur le territoire national à l'âge de 37 et 34 ans, qu'ils sont sans emploi et n'appartiennent à aucune des catégories d'étrangers pouvant prétendre à l'admission au séjour ; qu'ainsi, en relevant après les avoir rappelées, que leur situation ne relevait pas des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet a suffisamment motivé sa décision de refus d'admission au séjour des requérants sur ce fondement ;

3. Considérant que M. et Mme C..., entrés sur le territoire national, selon leurs déclarations, le 28 septembre 2010, accompagnés de leurs trois enfants mineurs, font valoir que le centre de leurs intérêts est désormais fixé en France où vit le frère de M. C... qui bénéficie de la qualité de réfugié et où ils sont bien intégrés ; que, toutefois, ils ne sont pas dépourvus d'attaches familiales en Serbie où ils ont respectivement vécu jusqu'à l'âge de trente-sept et trente-quatre ans et où, étant de même nationalité, la cellule familiale pourra se reconstituer ; qu'en outre, ils ont déjà fait l'objet d'une mesure d'éloignement à laquelle ils n'ont pas déféré et ne justifient pas d'une intégration sociale particulière par le seul exercice d'activités bénévoles dans une association caritative ; qu'ainsi, eu égard à la durée et aux conditions de leur séjour en France, les arrêtés du préfet d'Indre-et-Loire ne peuvent être regardés comme ayant porté au droit au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels ils ont été pris ; qu'ils n'ont dès lors méconnu ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'ils ne sont pas davantage entachés d'erreur manifeste dans l'appréciation de leur situation ;

4. Considérant que la situation des requérants telle que décrite au point 3 du présent arrêt ne caractérise pas l'existence de considérations humanitaires ou de circonstances exceptionnelles au sens des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; que les requérants font valoir, en produisant un certain nombre d'attestations, que leurs trois enfants obtiennent des résultats scolaires satisfaisants et ont déployé de réels efforts d'intégration ; que, toutefois, l'impossibilité pour leurs enfants, respectivement nés en 1999, 2001 et 2004 de poursuivre leur scolarité en Serbie, où ils ont vécu la majeure partie de leur vie, n'est pas démontrée ; que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées doit, dès lors, être écarté ;

6. Considérant enfin que M. et Mme C... soutiennent qu'ils seraient personnellement exposés à des risques de traitements inhumains et dégradants en cas de retour en Serbie en raison de leur appartenance à la communauté albanaise et des menaces qu'ils auraient subies après le départ du frère de M. C..., malmené par les policiers de ce pays ; que, toutefois leur demande de reconnaissance du statut de réfugié a été rejetée, leur récit ayant été estimé peu crédible, et ils ne produisent aucun élément suffisamment probant permettant d'établir la réalité des risques ainsi allégués ; que, par suite, en prenant les décisions fixant le pays de destination, le préfet d'Indre-et-Loire n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leurs demandes ;

Sur le surplus des conclusions :

8. Considérant que doivent être rejetées par voie de conséquence les conclusions à fin d'injonction des requérants ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., à Mme B... C...et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera adressée pour information au préfet d'Indre-Loire.

Délibéré après l'audience du 29 août 2014, à laquelle siégeaient :

- Mme Aubert, président de chambre,

- Mme Tiger-Winterhalter, premier conseiller,

- M. Auger, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 19 septembre 2014.

Le rapporteur,

P. AUGERLe président,

S. AUBERT

Le greffier,

N. CORRAZE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 13NT03317


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 13NT03317
Date de la décision : 19/09/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme AUBERT
Rapporteur ?: M. Paul AUGER
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : ROUILLE-MIRZA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-09-19;13nt03317 ?
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