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27/06/2014 | FRANCE | N°13NT03247

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 27 juin 2014, 13NT03247


Vu la requête, enregistrée le 29 novembre 2013, présentée par le préfet de Loir-et-Cher ; il demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 13-1765 du 31 octobre 2013 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a annulé son arrêté du 28 mai 2013 rejetant la demande de titre de séjour de M.A..., l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêté et fixant le pays de destination ;

2°) de rejeter la demande de M. A...présentée devant le tribunal administratif d'Orléans ;

il soutient q

ue :

- c'est à tort que le tribunal administratif a annulé son arrêté au motif qu'il ne...

Vu la requête, enregistrée le 29 novembre 2013, présentée par le préfet de Loir-et-Cher ; il demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 13-1765 du 31 octobre 2013 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a annulé son arrêté du 28 mai 2013 rejetant la demande de titre de séjour de M.A..., l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêté et fixant le pays de destination ;

2°) de rejeter la demande de M. A...présentée devant le tribunal administratif d'Orléans ;

il soutient que :

- c'est à tort que le tribunal administratif a annulé son arrêté au motif qu'il ne s'était pas prononcé sur la demande de carte de résident présentée également par M A...dès lors que celui-ci avait coché la case correspondante sur le document remis à la préfecture alors qu'il ressort des pièces du dossier et notamment de celles jointes à cette demande que celle-ci tendait à l'octroi d'un titre de séjour temporaire au titre de l'admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qu'à aucun moment l'intéressé n'a véritablement explicité une éventuelle demande de carte de résident et que lors de l'instance devant le tribunal et alors au surplus qu'il ne pouvait se prévaloir de l'obtention d'une carte de séjour temporaire ou d'une carte de résident sur le fondement de l'article L 314-8 du même code;

- statuant par l'effet dévolutif de l'appel sur les moyens de M. A...présentés en première instance, la cour écartera le moyen tiré du défaut de motivation de l'arrêté contesté qui manque en fait dès lors qu'il est suffisamment motivé en fait et en droit au sens des dispositions de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 ;

- M. A...n'est pas véritablement intégré en France dans la mesure où, alors même qu'il demeure en France depuis 2002, il vit dans un milieu essentiellement sinophone et ne maîtrise pas la langue française, il ne justifie d'aucun engagement associatif ou sportif et où il n'est pas davantage intégré professionnellement, la promesse d'embauche en qualité de cuisinier qu'il produit n'ayant pas été portée à la connaissance de ses services et de la commission du titre de séjour et s'apparentant à une attestation de complaisance rédigée afin d'étayer son recours contentieux de sorte que l'autorité administrative n'a commis aucune erreur manifeste d'appréciation ;

- le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est pas fondé dès lors que M. A...n'a pas mis à profit la durée de sa présence en France pour s'intégrer, qu'aucun élément ne permet de déterminer l'intensité de la relation sentimentale qu'il a nouée en France et que de retour dans son pays il pourra reprendre contact avec ses parents et reconstituer avec eux une vie familiale ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la mise en demeure adressée le 26 février 2014 à M. C...A..., en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, et l'avis de réception de cette mise en demeure ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 3 juin 2014 :

- le rapport de M. Bachelier, président-rapporteur ;

1. Considérant que, par arrêté du 28 mai 2013, le préfet de Loir-et-Cher a rejeté la demande de délivrance d'un titre de séjour présentée par M.A..., de nationalité chinoise, au motif que celui-ci ne remplissait pas les conditions prévues par les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours à compter de la notification de cet arrêté et a fixé le pays de destination ; que le préfet relève appel du jugement du 31 octobre 2013 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a annulé cet arrêté ;

2. Considérant que le préfet soutient sans être contredit que, compte tenu des pièces jointes à la demande présentée par M.A..., celle-ci tendait à son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qu'à aucun moment l'intéressé n'a véritablement explicité une éventuelle demande de carte de résident ; que, si dans son mémoire en réplique devant le tribunal, M.A..., qui, dans sa demande introductive d'instance, avait indiqué qu'il avait sollicité son admission exceptionnelle au séjour et contestait les motifs retenus pour lui opposer un refus, s'est prévalu du fait qu'il avait coché sur le formulaire de demande de titre de séjour, joint par l'administration à son mémoire en défense, une case correspondant à une demande de carte de résident et a soutenu que sa demande n'avait pas ainsi été examinée au regard de l'ensemble des fondements sollicités, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet se serait mépris sur l'objet de la demande dont il était effectivement saisi en se prononçant exclusivement, au terme de l'instruction du dossier, au regard des dispositions de l'article L. 313-14 de ce code ; que, par suite, le préfet de Loir-et-Cher est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a annulé son arrêté au motif qu'il ne s'était pas prononcé sur le droit au séjour de M. A...au regard de sa demande de carte de résident ;

3. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par M. A...devant le tribunal administratif ;

4. Considérant, en premier lieu et d'une part, que l'arrêté contesté rappelle que M. A...était entré irrégulièrement en France en juin 2002, que sa demande tendant à l'octroi du statut de réfugié politique lui avait été refusée et qu'il n'avait pas mis à exécution l'invitation à quitter le territoire faisant suite au refus de séjour prononcé le 7 novembre 2006 ; qu'il indique que l'intéressé, sans charge de famille connue ou avérée sur le territoire français et sans intégration, au vu de l'avis de la commission du titre de séjour, ne justifie d'aucune considération humanitaire ni aucun motif exceptionnel justifiant son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au titre de la vie privée et familiale en raison de la présence de ses parents en Chine et de la possibilité de repartir dans son pays d'origine ; qu'ainsi, le préfet de Loir-et-Cher a, par l'arrêté contesté, lequel mentionne les textes applicables, suffisamment motivé son refus d'admission au séjour de M. A...sur ce fondement ;

5. Considérant, d'autre part, que si M. A...soutient qu'il a sollicité son admission exceptionnelle au séjour non seulement au regard de sa vie privée et familiale, mais également au regard de sa situation professionnelle et a produit à cette fin une promesse d'embauche, le préfet a fait valoir devant le tribunal sans être ultérieurement contredit et soutient à nouveau devant la cour que ces éléments n'ont jamais été portés à la connaissance de l'administration ou de la commission du titre de séjour ; que, par suite, le moyen tiré ce que l'arrêté contesté serait également insuffisamment motivé en ce qu'il ne se prononce pas sur ce point ne peut qu'être écarté ;

6. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. (...) " ;

7. Considérant qu'en présence d'une demande de régularisation présentée, sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " ;

8. Considérant que M. A...soutient qu'il réside habituellement en France depuis plus de dix ans, que son frère y vit également, qu'il est parfaitement intégré, qu'il maîtrise la langue française et n'a jamais troublé l'ordre public ; que cependant, le préfet de Loir-et-Cher fait valoir sans être contredit que l'intéressé vit dans un milieu essentiellement sinophone, qu'il doit encore suivre des cours de français et qu'il ne justifie pas d'engagements associatifs ou sportifs ; que, dans ces conditions, les circonstances dont se prévaut M. A...ne suffisent pas à caractériser des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels au sens des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour et du droit d'asile ; que, si M. A...allègue qu'il a sollicité son admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié et se prévaut d'une promesse d'embauche en qualité de cuisinier en date du 1er mars 2013, il ne justifie pas, ainsi qu'il a été dit au point 5, avoir fait état de cet élément devant l'administration,; que, par suite, c'est sans commettre d'erreur de droit ou d'erreur manifeste d'appréciation que le préfet de Loir-et-Cher a estimé que l'intéressé ne satisfaisait pas aux conditions prévues à cet article ;

9. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

10. Considérant que M. A...soutient qu'il justifie de liens familiaux et personnels stables en France et se prévaut de ce qu'il vit auprès de son frère en situation irrégulière sur le territoire français et à proximité de sa soeur titulaire d'une carte de séjour en Italie ; qu'il fait aussi valoir qu'il a accompli onze années d'effort pour s'intégrer, sur les plans personnel et professionnel, à un nouveau pays et une nouvelle culture ; que, toutefois, l'intéressé, célibataire sans enfant, n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, où résident ses parents et il ne démontre pas une intégration particulière à la société française, ainsi que la commission du titre de séjour l'a relevé dans son avis défavorable ; que, dans ces conditions, l'arrêté contesté n'a pas porté au droit de M. A...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs pour lesquels il a été pris ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de Loir-et-Cher aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

11. Considérant, en dernier lieu, que si M. A...B...qu'il satisfait aux conditions requises pour obtenir un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier que l'intéressé ait sollicité son admission au séjour sur le fondement de ces dispositions ; que, par suite, le moyen tiré de leur méconnaissance doit être écarté ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de Loir-et-Cher est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a annulé son arrêté du 28 mai 2013;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 31 octobre 2013 du tribunal administratif d'Orléans est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif d'Orléans est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. C...A....

Une copie sera adressée au préfet de Loir-et-Cher.

Délibéré après l'audience du 3 juin 2014, à laquelle siégeaient :

- M. Bachelier, président de la cour,

- M. Sudron, président-assesseur,

- Mme Buffet, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 27 juin 2014.

Le président-assesseur,

A. SUDRON

Le président-rapporteur,

G. BACHELIER

Le greffier,

S. BOYÈRE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 13NT032472

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 13NT03247
Date de la décision : 27/06/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BACHELIER
Rapporteur ?: M. le Pdt. Gilles BACHELIER
Rapporteur public ?: M. POUGET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-06-27;13nt03247 ?
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