Vu, I, sous le n° 13NT01905, la requête, enregistrée le 28 juin 2013, présentée pour M. C... A..., demeurant ...Saint-Germain (28240), par Me Crosnier, avocat au barreau de la Seine Saint-Denis ; M. A... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 13-474 du 21 mai 2013 du tribunal administratif d'Orléans en tant qu'il a enjoint au préfet de le munir d'une autorisation provisoire de séjour couvrant la durée nécessaire à l'obtention du diplôme qu'il prépare au lieu de la carte de séjour temporaire qu'il sollicitait ;
2°) d'enjoindre au préfet d'Eure-et-Loir de lui délivrer une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale " ou à défaut " salarié " et subsidiairement d'enjoindre au préfet d'Eure-et-Loir de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
il soutient que :
- la décision de refus de séjour est insuffisamment motivée ;
- la décision de refus de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il a été confié à l'ASE à compter du 6 janvier 2010 à l'âge de 16 ans et six mois ; depuis la rentrée 2012, il est scolarisé en 2ème année de CAP installateur thermique et plomberie ; il fait preuve d'une motivation et d'un investissement considérables pour mener à bien son projet professionnel ; il est bien intégré socialement ; ses camarades l'ont élu délégué d'unité de vie ; depuis son arrivée au château des Vaux il n'a plus aucun contact avec son pays d'origine ;
- la décision de refus de séjour méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle est également entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour prive de base légale l'obligation de quitter le territoire française et la décision fixant le pays de destination ;
- l'obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;
- l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'erreur de droit, le préfet s'étant cru lié par la décision de refus de séjour et ayant méconnu son pouvoir d'apprécier s'il y avait lieu ou non de l'obliger à quitter le territoire français ;
- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle est également entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le délai de départ volontaire ne mentionne aucune circonstance permettant de s'assurer que le préfet a évalué la possibilité de bénéficier d'un délai supérieur à 30 jours, ce d'autant qu'il ne mentionne dans sa décision aucun risque de fuite ; la décision contestée a pour conséquence d'interrompre la formation dont il bénéficie ;
- en ce qui concerne l'application des dispositions des articles L. 911-1 et L. 911-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le tribunal en se bornant à enjoindre au préfet de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour jusqu'à l'obtention des résultats du diplôme qu'il prépare n'a pas tiré toutes les conséquences de sa situation ; à l'issue de la période de validité de l'autorisation provisoire de séjour, le préfet pourra l'obliger à quitter le territoire français alors qu'il n'a aucune vocation à partir dès lors qu'il est intégré en France sur le plan scolaire et social et n'a plus aucun contact avec sa famille restée dans le pays d'origine ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 14 janvier 2014, présenté par le préfet d'Eure-et-Loir, tendant au rejet de la requête ;
il soutient que :
- le tribunal ne mentionne pas l'article du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni quelque disposition réglementaire qui auraient été méconnus ;
- l'arrêté contesté a été pris par une autorité compétente, M. Gourtay, secrétaire général de la préfecture d'Eure-et-Loir qui disposait d'une délégation de signature du 6 février 2012, régulièrement publiée le jour même ;
- l'arrêté contesté est suffisamment motivé ;
- l'arrêté contesté ne méconnaît pas les dispositions de l'article L. 313-15 du code de
l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté contesté ne méconnaît pas les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'arrêté contesté ne méconnaît pas les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il a examiné la situation de M. A... avant de prendre la décision l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai d'un mois ;
Vu les pièces nouvelles enregistrées le 31 mars 2014 présentées pour M. A... lesquelles n'ont pas été communiquées ;
Vu, II, sous le n° 13NT01918, la requête, enregistrée le 28 juin 2013, présentée par le préfet d'Eure-et-Loir ; le préfet d'Eure-et-Loir demande à la cour d'annuler le jugement n° 1300474 du 21 mai 2013 par lequel le tribunal administratif d'Orléans, d'une part, a annulé son arrêté du 14 janvier 2013 refusant de délivrer un titre de séjour à M. A..., l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination, et d'autre part lui a enjoint de délivrer à l'intéressé une autorisation provisoire de séjour pour la durée nécessaire à la présentation et à l'obtention des résultats du diplôme qu'il prépare ;
il soutient que :
- le tribunal ne mentionne pas l'article du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni quelque disposition réglementaire qui auraient été méconnus ;
- l'arrêté contesté a été pris par une autorité compétente, M. Gourtay, secrétaire général de la préfecture d'Eure-et-Loir qui disposait d'une délégation de signature du 6 février 2012, régulièrement publiée le jour même ;
- l'arrêté contesté est suffisamment motivé ;
- l'arrêté contesté ne méconnaît pas les dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté contesté ne méconnaît pas les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'arrêté contesté ne méconnaît pas les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il a examiné la situation de M. A... avant de prendre la décision l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai d'un mois ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 16 janvier 2014, présenté pour M. C...
A..., par Me Crosnier, avocat au barreau de Seine Saint-Denis ; M. A... demande à la cour :
1°) de rejeter la requête ;
2°) d'annuler le jugement n° 13-474 du 21 mai 2013 du tribunal administratif d'Orléans en tant qu'il a enjoint au préfet de le munir d'une autorisation provisoire de séjour couvrant la durée nécessaire à l'obtention du diplôme qu'il prépare ;
3°) d'enjoindre au préfet d'Eure-et-Loir de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " et à défaut " salarié " et subsidiairement d'enjoindre au préfet d'Eure-et-Loir de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
il soutient que :
- la décision de refus de séjour est insuffisamment motivée ;
- la décision de refus de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il a été confié à l'ASE à compter du 6 janvier 2010 à l'âge de 16 ans et six mois ; depuis la rentrée 2012, il est scolarisé en 2ème année de CAP installateur thermique et plomberie ; il fait preuve d'une motivation et d'un investissement considérables pour mener à bien son projet professionnel ; il est bien intégré socialement ; ses camarades l'ont élu délégué d'unité de vie ; depuis son arrivée au château des Vaux il n'a plus aucun contact avec son pays d'origine ;
- la décision de refus de séjour méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle est également entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour prive de base légale l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de destination ;
- l'obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;
- l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'erreur de droit, le préfet s'étant cru lié par la décision de refus de séjour et ayant méconnu son pouvoir d'apprécier s'il y avait lieu ou non de l'obliger à quitter le territoire français ;
- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle est également entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le délai de départ volontaire ne mentionne aucune circonstance permettant de s'assurer que le préfet a évalué la possibilité de bénéficier d'un délai supérieur à 30 jours, ce d'autant qu'il ne mentionne dans sa décision aucun risque de fuite ; la décision contestée a pour conséquence d'interrompre la formation dont il bénéficie ;
- en ce qui concerne l'application des dispositions des articles L. 911-1 et L. 911-3 du
code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le tribunal en se bornant à enjoindre au préfet de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour jusqu'à l'obtention des résultats du diplôme qu'il prépare n'a pas tiré toutes les conséquences de sa situation ; à l'issue de la période de validité de l'autorisation provisoire de séjour, le préfet pourra l'obliger à quitter le territoire français alors qu'il n'a aucune vocation à partir dès lors qu'il est intégré en France sur le plan scolaire et social et n'a plus aucun contact avec sa famille restée dans le pays d'origine ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 avril 2014 :
- le rapport de Mme Tiger-Winterhalter, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public ;
- et les observations de Me Peiffer Devonec, avocat de M. A... ;
1. Considérant que M. A..., de nationalité malienne, est entré en France en décembre 2009, à l'âge de 16 ans et six mois ; qu'à sa majorité, M. A... a sollicité la délivrance d'un titre de séjour auprès du préfet d'Eure-et-Loir ; que par arrêté du 14 janvier 2013, le préfet lui a refusé la délivrance du titre sollicité et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours vers le pays dont il a la nationalité ; que, par la requête enregistrée sous le n° 13NT01905, M. A... relève appel du jugement du tribunal administratif d'Orléans du 21 mai 2013 en tant que celui-ci, après avoir annulé l'arrêté du 14 janvier 2013, s'est borné à enjoindre au préfet de le munir d'une autorisation provisoire de séjour couvrant la durée nécessaire à l'obtention du diplôme qu'il prépare au lieu de la carte de séjour temporaire sollicitée ; que par requête n° 13NT01918, le préfet d'Eure-et-Loir interjette appel de ce même jugement en tant qu'il a annulé son arrêté du 14 janvier 2013 ;
Sur les conclusions de la requête n° 13NT01918 :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A titre exceptionnel et sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire prévue au 1° de l'article L. 313-10 portant la mention "salarié " ou la mention "travailleur temporaire" peut être délivrée, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, à l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Le respect de la condition prévue à l'article L. 311-7 n'est pas exigé. " ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A... a été confié à compter de janvier 2010 aux services de l'aide sociale à l'enfance de Seine-Saint-Denis en qualité de mineur isolé ; que, durant l'année 2010-2011, il a été inscrit dans une classe de troisième aide et soutien option français langue étrangère ; qu'en raison de son investissement et des efforts d'intégration fournis, il a été en mesure d'intégrer, l'année suivante, la 2ème année du CAP " installateur thermique et plomberie" au lycée professionnel Notre-Dame ; qu'à sa majorité il a bénéficié d'un contrat " jeune majeur " ; que ses éducateurs et ses professeurs témoignent du sérieux, de l'assiduité et de la motivation de M. A... dans sa scolarité comme de ses qualités humaines ; qu'il démontre également sa capacité d'intégration dans la société française, notamment en participant à des chantiers en tant que bénévole durant ses vacances scolaires et en préparant le brevet d'aptitude aux fonctions d'animateur (BAFA) ; que, par ailleurs, il ressort des pièces du dossier, notamment des attestations d'éducateurs, que M. A... n'a pas de contacts avec les membres de sa famille restés dans son pays d'origine ; qu'ainsi, au regard des circonstances particulières de l'espèce, l'arrêté du 14 janvier 2013 du préfet d'Eure-et-Loir, obligeant le requérant à interrompre ses études en cours d'année et lui faisant perdre une chance sérieuse d'obtenir un diplôme à finalité professionnelle en cours de préparation, est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet d'Eure-et-Loir n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a annulé l'arrêté du 14 janvier 2013 par lequel il a refusé à M. A... la délivrance du titre de séjour sollicité et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours vers le pays dont il a la nationalité ;
Sur les conclusions de la requête n° 13NT01905 :
5. Considérant que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a enjoint au préfet d'Eure-et-Loir de délivrer au requérant une autorisation provisoire de séjour pour la durée nécessaire à la présentation et à l'obtention des résultats du diplôme présenté ; que, toutefois, le motif d'annulation retenu par les premiers juges, qui se sont fondés sur les dispositions précitées de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, impliquait nécessairement qu'il fût enjoint au préfet de délivrer à M. A... une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", sous réserve d'un changement dans sa situation de droit ou de fait ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans s'est borné à enjoindre au préfet d'Eure-et-Loir de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour pour la durée nécessaire à la présentation et à l'obtention des résultats de son diplôme ; qu'il y a lieu d'annuler le jugement attaqué dans cette mesure et d'enjoindre au préfet de délivrer au requérant une carte de séjour temporaire " salarié " dans le délai de deux mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous réserve d'un changement dans la situation de droit ou de fait de l'intéressé ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. A... d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête n° 13NT01918 du préfet d'Eure-et-Loir est rejetée.
Article 2 : L'article 2 du jugement n° 13-474 du 21 mai 2013 du tribunal administratif d'Orléans est annulé.
Article 3 : Il est enjoint au préfet d'Eure-et-Loir de délivrer à M. A... une carte de séjour temporaire mention " salarié " dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera à M. A... la somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet d'Eure-et-Loir.
Délibéré après l'audience du 4 avril 2014, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- Mme Aubert, président-assesseur,
- Mme Tiger-Winterhalter, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 25 avril 2014.
Le rapporteur,
N. TIGER-WINTERHALTERLe président,
L. LAINÉ
Le greffier,
M. GUÉRIN
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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Nos 13NT01905, 13NT01918