Vu la requête, enregistrée le 6 septembre 2012, pour la SAS Gautier France, dont le siège social est rue Georges Clémenceau à Le Boupère (85510), par Me Cianferani, avocat au barreau d'Angers ; la société Gautier France demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1003521 du 5 juillet 2012 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 18 décembre 2009 par laquelle le directeur départemental du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle de Vendée a limité à 39,72 le nombre d'heures indemnisables au titre de l'allocation spécifique de chômage partiel au titre de la période allant du 20 au 30 avril 2009 et de la décision du 26 mars 2010 rejetant implicitement son recours gracieux ;
2°) d'annuler ces décisions ;
3°) d'enjoindre, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, à l'Etat de lui régler les sommes lui revenant ou de procéder à un nouvel examen de sa demande ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et le remboursement de la contribution pour l'aide juridique ;
elle soutient que l'administration a commis une erreur de droit par une inexacte application des dispositions du code du travail et une erreur d'appréciation en décidant de n'indemniser que les heures chômées des salariés dont le nombre d'heures dites excédentaires travaillées au cours de la période de modulation n'excédait pas le nombre d'heures dites chômées ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 11 octobre 2013, présenté par le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social ; il conclut au rejet de la requête ;
il soutient que compte-tenu de l'accord de modulation du temps de travail conclu avec le syndicat C.F.D.T., le 20 mai 2008, permettant de lisser la durée du travail sur l'année, seules les heures perdues après le dépôt de la demande, le 20 mars 2009, étaient indemnisables ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 janvier 2014 :
- le rapport de M. Etienvre, premier conseiller,
- les conclusions de Mlle Wunderlich, rapporteur public,
- et les observations de Me Cianferani, avocat représentant la société Gautier France ;
1. Considérant que la société Gautier France, qui a conclu le 20 mai 2008 avec les délégués syndicaux un accord de modulation du temps de travail, a été autorisée, le 10 avril 2009, par le directeur départemental du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle de Vendée, à placer, pour la période allant du 20 avril 2009 au 30 juin 2009, ses salariés en chômage partiel ; que par courrier du 4 juin 2009, reçu le 10 juin 2009, la société a sollicité des services de l'Etat, au titre de l'allocation spécifique de chômage partiel prévue à l'article L. 5122-1 du code du travail, l'indemnisation de 13 756,40 heures chômées soit, sur la base du taux horaire de 3,33 euros prévu pour les entreprises de plus de 250 salariés, l'octroi d'une somme de 45 808,81 euros ; qu'au vu toutefois du bilan de modulation du temps de travail au cours de la période allant du 1er mai 2008 au 30 avril 2009 et des états nominatifs produits par la société, l'administration a constaté que l'ensemble des salariés concernés avaient, au cours de la période de modulation du temps de travail, travaillé un nombre d'heures plus élevé que ce qui était prévu dans le planning indicatif et a, en conséquence, décidé, le 18 décembre 2009, d'exclure de l'indemnisation tous les salariés dont le nombre d'heures excédentaires sur la période était supérieur au nombre d'heure chômées et pour les quelques salariés se trouvant dans la situation contraire de n'indemniser que la différence entre le nombre d'heures chômées et le nombre d'heures dite excédentaires ; que la SAS Gautier France relève appel du jugement du 5 juillet 2012 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 18 décembre 2009 et de la décision portant rejet implicite de son recours gracieux ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 5122-1 du code du travail : "L'allocation spécifique de chômage partiel prévue à l'article L. 5122-1 peut être attribuée aux salariés des entreprises qui sont contraintes de réduire ou suspendre temporairement leur activité pour l'une des raisons suivantes : 1° La conjoncture économique (...)" ; qu'aux termes de l'article R. 5122-2 du même code : "L'allocation spécifique de chômage partiel est attribuée par le préfet au vu d'une demande préalable de l'entreprise" ; qu'aux termes de l'article R. 5122-26 du même code : "Les entreprises appliquant un accord de modulation du temps de travail peuvent bénéficier des allocations de chômage partiel pour chaque heure perdue en deçà de la durée de travail prévue dans le programme indicatif des salariés intéressés sur la période considérée, dans la limite de la durée légale ou de la durée hebdomadaire moyenne sur l'année si elle est inférieure" ; qu'aux termes enfin de l'article R. 5122-28 de ce code : "Les indemnités sont versées aux salariés dans les conditions définies à l'article R. 5122-14 et l'employeur est remboursé sur production d'états nominatifs, à la fin de la période de modulation, et au vu des heures effectivement travaillées sur l'année figurant dans le bilan de la modulation du temps de travail, dressé par l'employeur et communiqué à l'autorité administrative compétente" ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que, si les entreprises peuvent bénéficier des allocations de chômage partiel pour chaque heure perdue en deçà de la durée du travail prévue dans le programme indicatif dans la limite de la durée légale, ce droit n'est ouvert qu'au vu des heures effectivement travaillées sur la période faisant l'objet du bilan de modulation que la société doit fournir ; que si ce bilan révèle que les salariés ont travaillé, au cours de la période de modulation, un nombre d'heures supérieur à la durée du travail prévue dans le programme indicatif, les heures ainsi effectuées au-delà de cette durée, heures dites excédentaires, même si elles restent inférieures à la durée légale, ne peuvent ouvrir droit à l'indemnisation au titre du chômage partiel laquelle ne porte que sur les heures dites chômées n'excédant pas la différence entre les heures effectivement travaillées et la durée du travail prévue dans le programme indicatif ; que la modification du programme indicatif et la réalisation d'heures de travail non programmées initialement ont ainsi une incidence directe sur le nombre d'heures indemnisables ;
3. Considérant que la société Gautier France soutient que l'administration a procédé à une inexacte application de ces dispositions en décidant de n'indemniser que les heures chômées des salariés dont le nombre d'heures dites excédentaires travaillées au cours de la période de modulation n'excédait pas le nombre d'heures dites chômées ;
4. Considérant, toutefois, qu'il résulte de ce qui est dit au point 2. qu'en ne prenant en compte, pour déterminer le nombre total d'heures pouvant être qualifiées de chômées et par suites remboursées à l'entreprise, que les seules heures excédentaires accomplies par les salariés concernés au cours de la période de modulation du 1er mai 2008 au 30 avril 2009, au regard de la durée légale de travail retenue par l'accord de modulation, tout en ne retenant pas les heures perdues par les salariés au cours de cette même période dans la mesure où elles étaient antérieures à la demande d'indemnisation présentée par la société requérante, l'administration n'a pas commis d'erreur de droit et n'a pas entaché sa décision d'erreur d'appréciation ;
5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SAS Gautier France n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : "Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution" ;
7. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions aux fins d'annulation, n'implique aucune mesure d'exécution ; qu'il s'ensuit que les conclusions de la requête tendant à ce qu'il soit enjoint à l'administration de régler à la requérante les sommes qu'elle a demandées au titre des indemnités spécifiques de chômage partiel ou de procéder à un nouvel examen de sa demande ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les conclusions tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative :
8. Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement des sommes que la SAS Gautier France demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a, d'autre part, lieu de laisser à la charge de cette société la contribution pour l'aide juridique prévue à l'article R. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SAS Gautier France est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Gautier France et au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.
Délibéré après l'audience du 9 janvier 2014, à laquelle siégeaient :
- M. Bachelier, président de la cour,
- M. Francfort, président-assesseur,
- M. Etienvre, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 30 janvier 2014.
Le rapporteur,
F. ETIENVRE Le président,
G. BACHELIER
Le greffier,
C. CROIGER
La République mande et ordonne au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 12NT02522