La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/11/2013 | FRANCE | N°13NT01197

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 15 novembre 2013, 13NT01197


Vu la requête, enregistrée le 24 avril 2013, présentée pour Mme B... C... demeurant..., par Me Dos Reis avocat au barreau d'Orléans ; Mme C... demande à la cour ;

1°) d'annuler le jugement n° 1202524 du 6 novembre 2012 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 avril 2012 du préfet du Loiret lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant la République Démocratique du Congo comme pays de renvoi ;

2°) d'annuler

cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Loiret de lui délivrer une carte de s...

Vu la requête, enregistrée le 24 avril 2013, présentée pour Mme B... C... demeurant..., par Me Dos Reis avocat au barreau d'Orléans ; Mme C... demande à la cour ;

1°) d'annuler le jugement n° 1202524 du 6 novembre 2012 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 avril 2012 du préfet du Loiret lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant la République Démocratique du Congo comme pays de renvoi ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Loiret de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " sous astreinte de 100 euros par jour de retard, dans un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Dos Reis d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve que celle-ci renonce à percevoir la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle ;

elle fait valoir que :

- le préfet du Loiret a méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers dans la mesure où il ne justifie pas que sa pathologie pourrait faire l'objet d'un traitement approprié dans son pays d'origine alors que les médicaments dont elle doit bénéficier ne sont pas distribués en République Démocratique du Congo et ne sont pas substituables par des médicaments génériques ;

- la situation sanitaire de la République Démocratique du Congo ne lui permettra pas de bénéficier d'un suivi et d'une surveillance médicale ;

- compte tenu de l'impossibilité de bénéficier d'un traitement adapté à sa pathologie, l'arrêté en litige met en jeu sa propre vie et méconnaît, par conséquent, les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet a, également, méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dés lors qu'elle réside chez sa fille qui possède la nationalité française et que son état de santé nécessite l'assistance d'un tiers pour l'assister dans la vie quotidienne ;

- l'ensemble de ses attaches familiales est désormais en France et, si elle a longtemps vécu en République Démocratique du Congo, c'est grâce à l'aide financière envoyée par ses enfants ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est dépourvue de base légale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;

- cette même décision méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision fixant le pays de renvoi méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 12 juin 2013, présenté pour le préfet du Loiret, par Me De Villèle, avocat au barreau de Paris, qui conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de Mme C... le versement de la somme de 800 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

il soutient que :

- la requête de Mme C... est irrecevable car elle ne justifie pas avoir déposé une demande d'aide juridictionnelle dans les délais de recours ;

- la requérante reprend en appel les mêmes moyens qu'en première instance et il y a lieu de procéder à une adoption des motifs des premiers juges ;

- les troubles dont est atteinte Mme C... n'ont pas d'incidence vitale et elle ne produit pas l'attestation du médecin de l'hôpital de Kinshasa dont elle se prévaut ;

- les certificats médicaux produits sont laconiques et l'un d'eux ne préconise qu'une simple surveillance médicale, en outre, les attestations provenant de laboratoires de l'industrie pharmaceutique ne permettent pas d'établir que Mme C... ne pourrait être soignée dans son pays d'origine, ainsi il n'a donc pas méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le médecin de l'agence régionale de santé a, par ailleurs, confirmé son avis initial après transmission d'un certificat médical produit par la requérante et le médecin inspecteur de santé publique a notamment considéré qu'un des médicaments présenté comme indisponible en République Démocratique du Congo n'est qu'un médicament de confort et l'autre molécule non commercialisée dans ce pays a été jugée par ce dernier comme inefficace ;

- il n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales au regard de l'état de santé de la requérante ;

- il n'a pas, non plus, méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans la mesure où la requérante n'a séjourné que trois ans et demi en France, que son âge ne fait pas obstacle à son retour dans son pays d'origine et qu'elle n'établit pas être dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine

- la décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant pas dépourvue de base légale, la décision portant refus de titre de séjour est, par conséquent, régulière et ne méconnaît pas, de surcroît, les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision fixant le pays de renvoi n'enfreint pas les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le mémoire en défense complémentaire enregistré le 12 juillet 2013 présenté pour le préfet du Loiret qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ;

il soutient en outre que :

- le médecin de l'agence régionale de santé dans un courrier reçu le 10 juillet 2013 a confirmé son précédent avis du 17 août 2012 en précisant que la mention " non substituable " apposée par le prescripteur sur l'une des ordonnances produites par la requérante n'était étayée par aucune précision utile ;

Vu la décision du président de la section administrative du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes en date du 25 mars 2013, admettant Mme C... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale au titre de cette instance et désignant Me Dos Reis pour la représenter ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 octobre 2013 :

- le rapport de M. Auger, premier conseiller ;

1. Considérant que Mme C..., ressortissante de la République Démocratique du Congo, relève appel du jugement du 6 novembre 2012 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Loiret du 12 avril 2012 lui refusant le titre de séjour sollicité, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin de l'agence régionale de santé ou, à Paris, le chef du service médical de la préfecture de police peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat. " ; qu'il résulte de ces dispositions qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui en fait la demande au titre des dispositions du 11° de l'article L. 313-11, de vérifier, au vu de l'avis émis par le médecin mentionné à l'article R. 313-22, que cette décision ne peut pas avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire ; que lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine ;

3. Considérant que, pour rejeter la demande de titre de séjour introduite le 18 avril 2011 par Mme C... sur le fondement des dispositions précitées, le préfet du Loiret s'est fondé sur l'avis émis le 2 février 2012 par le médecin de l'agence régionale de santé du Centre indiquant que l'état de santé de l'intéressée nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut peut entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'il existe un traitement approprié disponible dans le pays dont elle est originaire ; que Mme C... conteste cette décision en faisant valoir qu'elle souffre de diabète associé à des troubles oculaires et que la polypathologie dont elle est atteinte ne peut être traitée efficacement dans la mesure où le traitement médicamenteux prescrit n'est pas disponible dans son pays d'origine ; qu'elle produit deux certificats des 29 juillet 2009 et 20 juillet 2011 d'un médecin ophtalmologue attestant qu'elle a fait l'objet d'une intervention chirurgicale nécessitant une surveillance post-opératoire régulière, un compte-rendu d'exploration angiographique du 31 juillet 2009 d'un médecin assistant au centre hospitalier régional d'Orléans faisant état de la présence d'une traction vitréo-rétinienne pouvant, éventuellement, entrainer une baisse d'acuité visuelle immédiate, des attestations de deux laboratoires de l'industrie pharmaceutique des 22 mai 2012 et 19 juin 2012 mentionnant que deux médicaments prescrits n'étaient pas commercialisés en République Démocratique du Congo ainsi que des résultats d'analyses biologiques et diverses ordonnances prescrites par son médecin généraliste traitant ; que ces différentes pièces médicales, dont certaines sont postérieures à la décision contestée, si elles établissent la réalité de la polypathologie dont elle est atteinte ainsi que la consolidation de son état clinique à la date de la décision contestée, ne sont pas de nature à établir l'absence d'un traitement approprié à son état de santé dès lors notamment que les certificats médicaux précités se bornent à mentionner la seule nécessité d'une surveillance régulière ; qu'ainsi les documents médicaux qu'elle verse aux débats ne contredisent pas utilement l'avis précité du médecin de l'agence régionale de santé du Centre confirmé et développé le 17 août 2012 où il indique que les affections dont souffre Mme C... peuvent être traitées dans le pays de destination et en particulier que le produit " Xelevia " peut être substitué par un autre produit disponible au Congo ; que, par suite, le préfet du Loiret n'a pas fait une inexacte application des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant de délivrer à Mme C... le titre de séjour sollicité sur le fondement de ces dispositions ; que le préfet n'a pas davantage entaché l'arrêté contesté d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée ;

4. Considérant que, pour le surplus, Mme C... se borne en appel à reprendre certains des moyens invoqués devant le tribunal administratif d'Orléans sans apporter aucune précision ou justification complémentaire ; qu'il y a lieu d'écarter ces moyens, par adoption des motifs retenus par les premiers juges et tirés de ce que l'arrêté contesté n'a méconnu ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qu'il n'a pas davantage méconnu les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni celles de l'article L. 513-2 du code précité, et de ce que le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision portant refus de séjour ne peut être accueilli ;

5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée par le préfet du Loiret, que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de la requête de Mme C..., n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions de l'intéressée tendant à ce qu'il soit enjoint, sous astreinte, au préfet du Loiret de lui délivrer une carte de séjour temporaire ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement, par application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, à l'avocat de Mme C... de la somme demandée au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de Mme C... le versement de la somme demandée par le préfet du Loiret à ce même titre ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du préfet du Loiret tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera adressée au préfet du Loiret.

Délibéré après l'audience du 25 octobre 2013, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- Mme Aubert, président-assesseur,

- M. Auger, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 novembre 2013.

Le rapporteur,

P. AUGERLe président,

L. LAINÉ

Le greffier,

M. A...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

1

N° 13NT01197 2

1


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 13NT01197
Date de la décision : 15/11/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: M. Paul AUGER
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : DOS REIS

Origine de la décision
Date de l'import : 29/11/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2013-11-15;13nt01197 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award