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15/11/2013 | FRANCE | N°12NT01856

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 15 novembre 2013, 12NT01856


Vu la requête, enregistrée le 10 juillet 2012, présentée par le préfet d'Indre-et-Loire ; le préfet d'Indre-et-Loire demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 7 juin 2012 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a annulé ses décisions du 18 janvier 2012 prononçant à l'encontre de M. D... une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination ;

2°) de rejeter la demande de M. D... ;

il soutient que :

- la décision de la Cour nationale du droit d'asile rejetant la demande de M. D.

.. tendant au bénéfice du statut de réfugié a été régulièrement notifiée ainsi que ses s...

Vu la requête, enregistrée le 10 juillet 2012, présentée par le préfet d'Indre-et-Loire ; le préfet d'Indre-et-Loire demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 7 juin 2012 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a annulé ses décisions du 18 janvier 2012 prononçant à l'encontre de M. D... une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination ;

2°) de rejeter la demande de M. D... ;

il soutient que :

- la décision de la Cour nationale du droit d'asile rejetant la demande de M. D... tendant au bénéfice du statut de réfugié a été régulièrement notifiée ainsi que ses services ont pu le vérifier en consultant le site internet de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ;

- les premiers juges ont dénaturé la pièce jointe n° 3 de son mémoire en défense qui ne correspond pas à des données provenant de l'AGDREF mais à une copie d'écran du fichier de gestion des dossiers de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ;

- l'avis de réception de la lettre recommandée envoyée à l'adresse connue de la CNDA atteste de la régularité de la notification ;

Vu la mise en demeure adressée le 17 septembre 2013 à M. D..., en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, et l'avis de réception de cette

mise en demeure ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 octobre 2013 :

- le rapport de Mme Aubert, président-assesseur ;

- et les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public ;

1. Considérant que le préfet d'Indre-et-Loire relève appel du jugement du 7 juin 2012 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a annulé ses décisions du 18 janvier 2012 prononçant à l'encontre de M. D..., ressortissant congolais, une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...) 5° Si le récépissé de la demande de carte de séjour ou l'autorisation provisoire de séjour qui avait été délivré à l'étranger lui a été retiré ou si le renouvellement de ces documents lui a été refusé " ; qu'aux termes de l'article L. 742-1 du même code : " Lorsqu'il est admis à séjourner en France en application des dispositions du chapitre Ier du présent titre, l'étranger qui demande à bénéficier de l'asile se voit remettre un document provisoire de séjour lui permettant de déposer une demande d'asile auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides. L'office ne peut être saisi qu'après la remise de ce document au demandeur. Après le dépôt de sa demande d'asile, le demandeur se voit délivrer un nouveau document provisoire de séjour. Ce document est renouvelé jusqu'à ce que l'office statue et, si un recours est formé devant la Cour nationale du droit d'asile, jusqu'à ce que la cour statue " ; qu'aux termes de l'article L. 742-3 du même code : " L'étranger admis à séjourner en France bénéficie du droit de s'y maintenir jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile. Le a du 3° du II de l'article L. 511-1 n'est pas applicable. " ;

3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'un demandeur d'asile doit obtenir le renouvellement de son document provisoire de séjour et ne peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français tant que le rejet définitif de sa demande d'asile ne lui a pas été notifié ; qu'en cas de recours devant la Cour nationale du droit d'asile, il ne peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français tant que la décision prise par cette instance ne lui a pas été régulièrement notifiée ; qu'en l'absence d'une telle notification, et alors même qu'il incombe aux services de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou de la Cour nationale du droit d'asile d'y pourvoir, l'autorité administrative ne peut regarder l'étranger comme ne bénéficiant plus de son droit provisoire au séjour, ni lui opposer un refus de délivrance d'un titre de séjour en qualité de réfugié, ni mettre en oeuvre les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers précitées ;

4. Considérant qu'en première instance le préfet avait seulement produit le relevé des informations mentionnées au fichier informatique de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, regardé à tort par le tribunal comme un document résultant de l'impression des données figurant au fichier de l'application de gestion des dossiers des ressortissants étrangers en France (ADEGREF), lequel n'établit pas, quelle que soit la qualification retenue, que la décision de rejet de la demande d'asile opposée par la Cour nationale du droit d'asile à M. D..., le 12 décembre 2011, lui avait été régulièrement notifiée lorsque les décisions en litige ont été prises ; que, toutefois, le préfet produit en appel la copie du pli envoyé en recommandé avec accusé de réception postal par la Cour nationale du droit d'asile ; qu'il ressort des mentions qui y sont portées que ce pli a été présenté le 21 décembre 2011 à l'adresse qui avait été indiquée par M. D..., que ce dernier a été avisé de sa présentation et que, n'ayant pas été retiré, le pli a été retourné à son expéditeur ; qu'ainsi la décision de la Cour nationale du droit d'asile avait été régulièrement notifiée lorsque le préfet d'Indre-et-Loire a pris, le 18 janvier 2012, les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ; que l'intéressé n'ayant plus, à cette date, le droit de se maintenir sur le territoire français, le préfet n'a pas méconnu les dispositions précitées de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il est dès lors fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif d'Orléans a annulé les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

5. Considérant toutefois qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. D... devant le tribunal administratif d'Orléans à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

6. Considérant que si M. D... fait valoir qu'il vit depuis plusieurs mois avec une compatriote et que cette dernière était enceinte à la date à laquelle la décision portant obligation de quitter le territoire français a été prise, il ressort des pièces du dossier qu'il n'est pas dépourvu d'attaches familiales au Congo où résident notamment son épouse et ses deux enfants mineurs et où il a lui-même vécu jusqu'en 2009 ; que, dans ces conditions, le préfet d'Indre-et-Loire n'a pas, en prenant une telle décision, porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette décision a été prise ; qu'il n'a, dès lors, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il n'a pas davantage commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé ;

7. Considérant que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de

l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'est pas utilement invoqué à l'encontre des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet d'Indre-et-Loire est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a annulé ses décisions du 18 janvier 2012 portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif d'Orléans en date du 7 juin 2012 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. D... devant le tribunal administratif d'Orléans est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... E... et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera transmise, pour information, au préfet d'Indre-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 25 octobre 2013, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- Mme Aubert, président-assesseur,

- M.C..., faisant fonction de premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 novembre 2013.

Le rapporteur,

S. AUBERT

Le président,

L. LAINÉ

Le greffier,

M. A...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 12NT01856


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 12NT01856
Date de la décision : 15/11/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: Mme Sylvie AUBERT
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : YAMBA

Origine de la décision
Date de l'import : 29/11/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2013-11-15;12nt01856 ?
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