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18/10/2013 | FRANCE | N°12NT02358

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 18 octobre 2013, 12NT02358


Vu la requête, enregistrée le 14 août 2012, présentée pour Mme A... B..., demeurant..., par Me le Tallec, avocat au barreau de Paris ; Mme B... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 11-4064 du 14 février 2012 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Loiret du 15 juillet 2011 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler cette décision ;

3°) d'enjoindre au préfet du Loiret

de lui délivrer une carte de séjour temporaire à compter de la notification de l'arrêt ...

Vu la requête, enregistrée le 14 août 2012, présentée pour Mme A... B..., demeurant..., par Me le Tallec, avocat au barreau de Paris ; Mme B... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 11-4064 du 14 février 2012 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Loiret du 15 juillet 2011 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler cette décision ;

3°) d'enjoindre au préfet du Loiret de lui délivrer une carte de séjour temporaire à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros à son conseil en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve qu'elle renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat ;

Mme B... soutient que :

- le refus de séjour est insuffisamment motivé, notamment en ce qui concerne la situation sécuritaire dans le Caucase du Nord ;

- le refus de séjour est entaché d'erreur de droit dès lors que sa situation ne relève pas des dispositions du 4° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; sa nouvelle demande d'asile ne peut être considérée comme abusive, dilatoire ou destinée à faire échec à une mesure d'éloignement dès lors qu'elle était en possession d'éléments nouveaux ; en tout état de cause l'application de l'article L. 741-4 du code précité ne peut être conditionné par le contenu de la demande d'asile ;

- le refus de titre de séjour est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- le refus de titre de séjour viole ses droits économiques et sociaux ;

- l'illégalité du refus de titre de séjour prive de base légale l'obligation de quitter le territoire ;

- le préfet n'est pas tenu d'assortir le refus de titre d'une obligation de quitter le territoire, dès lors il a entaché la décision d'éloignement d'une erreur de droit ;

- l'obligation de quitter le territoire est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- l'obligation de quitter le territoire viole ses droits économiques et sociaux ;

- la décision fixant le pays de renvoi viole les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 17 septembre 2012, présenté pour le préfet du Loiret, par Me de Villèle, avocat au barreau de Paris ; le préfet du Loiret conclut au rejet de la requête de Mme B... et au versement à l'Etat de la somme de 800 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

il soutient que :

- son arrêté est suffisamment motivé en fait et en droit ;

- il n'a pas commis d'erreur de droit en instruisant le dossier selon la procédure prioritaire dès lors que Mme B... ne produit aucun élément probant de nature à démontrer qu'un retour dans son pays d'origine l'exposerait à des risques pour sa liberté ou son intégrité physique ; en outre, le recours devant la cour nationale du droit d'asile diligenté après le rejet par l'office français de protection des réfugiés et apatrides d'une demande de réexamen n'a pas d'effet suspensif ; en outre, l'argument tiré de la violation de la circulaire du 22 avril 2005 est inopposable ;

- il n'a commis aucune erreur manifeste d'appréciation ;

- la requérante n'est pas fondée à invoquer, par la voie de l'exception, l'illégalité de la décision portant refus de séjour pour demander l'annulation de celle portant obligation de quitter le territoire français ;

- il ne s'est pas estimé lié par le refus de titre de séjour en assortissant celui-ci d'une obligation de quitter le territoire français ;

- l'arrêté ne contrevient pas aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentale dès lors que le requérant n'établit pas les dangers qu'il encourrait personnellement en cas de retour dans son pays d'origine ;

Vu la décision du 11 juillet 2012 du président de la section administrative du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes accordant à Mme B... le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu l'ordonnance du 2 juillet 2013 fixant la clôture d'instruction au 29 juillet 2013, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 septembre 2013 :

- le rapport de Mme Tiger-Winterhalter, premier conseiller ;

1. Considérant que Mme B..., de nationalité russe et d'origine tchétchène, relève appel du jugement du 14 février 2012 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 juillet 2011 par lequel le préfet du Loiret a rejeté sa demande de délivrance d'une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale ", lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé le pays de destination ;

Sur la légalité des décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III (...) ;

3. Considérant, en premier lieu, que la décision portant refus de séjour comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que Mme B... se trouvant dans le cas prévu au 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'obligation de quitter le territoire national qui lui a été faite n'avait pas à faire l'objet d'une motivation spécifique ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que les décisions contestées ont été prises à la suite du rejet de la demande de la requérante tendant au bénéfice du statut de réfugié sur le fondement des dispositions du I de l'article L. 511-1 et du 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, la circonstance que la dernière demande d'asile de Mme B... ait été examinée suivant la procédure prioritaire et la violation alléguée des dispositions du 4° de l'article L. 741-4 dudit code, ne peuvent être utilement invoquées ;

5. Considérant, en troisième lieu, que la circonstance que l'arrêté contesté prive la requérante des droits économiques et sociaux auxquels elle pourrait prétendre et la place dans une situation d'extrême précarité est sans incidence sur la légalité des décisions contestées ;

6. Considérant, en quatrième lieu, que la décision portant refus de titre de séjour n'étant pas, eu égard à ce qui vient d'être dit, illégale, le moyen tiré, par la voie de l'exception, de cette illégalité, que Mme B... invoque à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français, ne peut qu'être écarté ;

7. Considérant, en cinquième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Loiret se serait cru tenu d'assortir d'une mesure portant obligation de quitter le territoire français le refus de délivrer un titre de séjour ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :

8. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ", et qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui est obligé de quitter le territoire français (...) est éloigné : 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; (...). / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ;

9. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la demande d'asile présentée par l'intéressée a été rejetée par le directeur de l'office français des réfugiés et des apatrides le 1er avril 2008 puis par la cour nationale du droit d'asile le 23 juin 2010 ; que la demande de réexamen de sa demande d'asile a également été rejetée par le directeur de l'office le 26 mai 2011 ; que, par ailleurs, les pièces produites par Mme B... ne permettent pas d'établir la réalité des risques allégués ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

11. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de la requête de Mme B..., n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions de l'intéressée tendant à ce qu'il soit enjoint, sous astreinte, au préfet du Loiret de lui délivrer une carte de séjour temporaire ou, à défaut, de réexaminer sa situation administrative, et, dans cette attente, de la munir d'une autorisation provisoire de séjour, doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement, par application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, à l'avocat de Mme B... de la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de Mme B... le versement à l'Etat de la somme que le préfet du Loiret demande au titre des mêmes frais ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du préfet du Loiret tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera adressée, pour information, au préfet du Loiret.

Délibéré après l'audience du 27 septembre 2013, où siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- Mme Aubert, président-assesseur,

- Mme Tiger-Winterhalter, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 18 octobre 2013.

Le rapporteur,

N. TIGER-WINTERHALTER Le président,

L. LAINÉ

Le greffier,

N. CORRAZE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 12NT02358


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 12NT02358
Date de la décision : 18/10/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: Mme Nathalie TIGER-WINTERHALTER
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : DE VILLELE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2013-10-18;12nt02358 ?
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