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18/10/2013 | FRANCE | N°12NT02223

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 18 octobre 2013, 12NT02223


Vu la requête, enregistrée le 2 août 2012, présentée pour Mme B... A..., demeurant..., par Me Greffard-Poisson, avocate au barreau d'Orléans ; Mme A... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1104402 du 13 mars 2012 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Loiret du 6 septembre 2011 portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°)

d'enjoindre au préfet du Loiret de lui délivrer une carte de séjour temporaire mention "...

Vu la requête, enregistrée le 2 août 2012, présentée pour Mme B... A..., demeurant..., par Me Greffard-Poisson, avocate au barreau d'Orléans ; Mme A... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1104402 du 13 mars 2012 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Loiret du 6 septembre 2011 portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Loiret de lui délivrer une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale ", sous astreinte de cent euros par jour de retard, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Greffard-Poisson de la somme de 1 300 euros au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, moyennant la renonciation de cet avocat à percevoir la contribution versée par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;

elle soutient que :

- l'avis du médecin de l'agence régionale de santé sur la base duquel le préfet du Loiret

a pris l'arrêté est entaché d'incompétence ;

- elle souffre de plusieurs pathologies, cardiaque, rénale et pulmonaire qui n'ont pu être prises en charge dans son pays d'origine et a subi une intervention chirurgicale en janvier 2012 ; le certificat médical qu'elle produit établit que le Congo dispose de moyens d'exploration médicale limités ; l'appréciation portée sur son état de santé est entachée d'erreur manifeste ; le préfet a méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 et du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée en droit ;

- la requérante vivant depuis quatre ans en France où se trouve l'ensemble de ses attaches, la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle n'a jamais troublé l'ordre public et s'est bien intégrée ; l'administration n'ayant pas exécuté la mesure d'éloignement précédemment prise à son encontre, l'interdiction de retour sur le territoire français est contraire à l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 13 septembre 2012, présenté pour le préfet, par Me Denizot, avocat au barreau d'Orléans, qui conclut au rejet de la requête et demande que soit mis à la charge de Mme A... le versement de la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

il soutient que :

- l'avis du médecin de l'agence régionale de santé du 8 août 2011 n'est pas entaché d'incompétence ;

- le certificat médical produit par Mme A... n'établissant pas qu'elle ne pourrait pas bénéficier dans son pays d'origine du traitement dont elle a besoin, la décision de refus de titre de séjour n'est pas contraire aux dispositions de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est suffisamment motivée en droit ;

- le traitement que nécessite l'état de santé de la requérante étant disponible dans son pays d'origine, cette décision n'est pas contraire aux dispositions de l'article L. 511-4 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la requérante est arrivée récemment en France où elle ne justifie pas de l'existence de liens personnels alors que ses deux enfants mineurs, son frère et sa soeur résident dans son pays d'origine ;

Vu la décision du président de la section administrative du bureau d'aide juridictionnelle

près le tribunal de grande instance de Nantes du 30 juillet 2012 admettant Mme A... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 septembre 2013 :

- le rapport de Mme Aubert, président-assesseur ;

1. Considérant que Mme A..., de nationalité congolaise, relève appel du jugement du 13 mars 2012 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Loiret du 6 septembre 2011 portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant que la requérante n'apporte aucun élément de nature à établir que la délégation de signature sur le fondement de laquelle le médecin de l'agence régionale de santé a émis son avis du 8 août 2011 n'aurait plus été en vigueur à cette date ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : "Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. (...)" ; qu'aux termes de l'article L. 511-4 du même code : "Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (...) : 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ; (...)" ;

4. Considérant que si la requérante, qui souffre de pathologies cardiaque, rénale et pulmonaire et a subi une intervention chirurgicale en janvier 2012, se fonde sur un certificat médical établi le 15 mai 2012 par un médecin exerçant son activité dans un établissement de santé congolais pour soutenir que les moyens d'investigation médicale dont son pays dispose sont limités, ce seul élément n'est pas de nature à remettre en cause la teneur de l'avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé le 8 août 2011, réitéré le 24 janvier 2012, selon lequel l'état de santé de Mme A... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais pour lequel elle peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions précitées des articles L. 313-11 11° et L. 511-4 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent, dès lors, être écartés ; que, pour les mêmes motifs, l'arrêté contesté n'est pas davantage entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : "I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...). / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° (...) du présent I (...)" ; qu'il résulte de ces dispositions que la motivation de la décision portant obligation de quitter le territoire français se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas, par conséquent, dès lors que ce refus est lui-même motivé et que les dispositions législatives qui permettent d'assortir le refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ont été rappelées, de mentions spécifiques pour respecter les exigences de motivation ;

6. Considérant que le refus de titre de séjour contenu dans l'arrêté du 6 septembre 2011 comporte l'énoncé des considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement ; que, dans ces conditions, la décision portant obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois dont il est assorti n'avait pas à faire l'objet d'une motivation distincte ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme A... n'est pas dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à l'âge de 51 ans et où résident ses deux enfants mineurs, sa soeur et son frère ; que, dans ces conditions et alors même que l'administration n'a pas exécuté une précédente mesure d'éloignement prise à son encontre le 20 janvier 2010, les décisions portant obligation de quitter le territoire français et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an ne sont pas contraires à l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

9. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de Mme A..., n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions de la requérante tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet du Loiret de lui délivrer un titre de séjour ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, le versement à la requérante de la somme qu'elle demande sur le fondement de ces dispositions ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de la requérante le versement à l'Etat la somme qu'il demande sur le même fondement ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... et les conclusions du préfet du Loiret tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administratives sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera transmise au préfet du Loiret.

Délibéré après l'audience du 27 septembre 2013, où siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- Mme Aubert, président-assesseur,

- Mme Tiger-Winterhalter, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 18 octobre 2013.

Le rapporteur,

S. AUBERTLe président,

L. LAINÉ

Le greffier,

N. CORRAZE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 12NT02223 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 12NT02223
Date de la décision : 18/10/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: Mme Sylvie AUBERT
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : GREFFARD-POISSON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2013-10-18;12nt02223 ?
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