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19/07/2013 | FRANCE | N°11NT01463

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 19 juillet 2013, 11NT01463


Vu la requête, enregistrée le 25 mai 2011, et le mémoire complémentaire, enregistré le 8 juin 2011, présentés pour Mme B... A..., demeurant..., par Me Tall, avocat au barreau de la Seine-Saint-Denis ; Mme A... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 10-4665 du 29 mars 2011 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 14 mai 2010 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours dirigé contre la décision du 21 janvier 2009 des autorit

és consulaires françaises à Annaba (Algérie) rejetant sa demande de vis...

Vu la requête, enregistrée le 25 mai 2011, et le mémoire complémentaire, enregistré le 8 juin 2011, présentés pour Mme B... A..., demeurant..., par Me Tall, avocat au barreau de la Seine-Saint-Denis ; Mme A... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 10-4665 du 29 mars 2011 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 14 mai 2010 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours dirigé contre la décision du 21 janvier 2009 des autorités consulaires françaises à Annaba (Algérie) rejetant sa demande de visa d'entrée et de court séjour en France ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de lui délivrer un visa de court séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le refus de visa attaqué, qui doit être motivé en raison de sa qualité d'ascendant de ressortissant français, méconnaît les exigences de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- l'administration a commis une erreur manifeste d'appréciation en lui refusant la délivrance d'un visa de court séjour car, d'une part, elle devait être hébergée et prise en charge en France par son fils qui dispose de ressources suffisantes et, d'autre part, ayant toujours vécu en Algérie et étant respectueuse des lois, elle offrait toutes les garanties d'un retour dans son pays natal ;

- en lui refusant la possibilité de rendre visite à son fils, la décision querellée porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et, dès lors, viole les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- aucun motif d'ordre public ne lui est opposable ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 18 juillet 2011, présenté par le ministre de l'intérieur, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

- la décision de refus de visa énonce les considérations de droit et de fait qui la justifient et est par suite suffisamment motivée ;

- aucune erreur manifeste d'appréciation n'a été commise car, d'une part, Mme A..., qui a indiqué se prendre totalement en charge lors du dépôt de sa demande de visa, ne justifie pas de ressources suffisantes pour assurer son voyage, d'autre part, le fils de la requérante n'est pas financièrement en mesure de l'accueillir, et, enfin, ses demandes de visa répétées démontrent sa volonté de se rendre en France par tout moyen, faisant naître un risque de détournement de l'objet du visa ;

- la décision attaquée ne viole pas l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales car un des deux fils de la requérante vit en Algérie et il n'est pas établi que son fils résidant en France soit dans l'impossibilité de lui rendre visite ;

- l'existence d'un trouble à l'ordre public ne constitue pas le motif de la décision de refus ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 27 septembre 2011, présenté pour Mme A..., qui conclut aux mêmes fins que sa requête initiale par les mêmes moyens ;

Elle soutient, en outre, que :

- le refus de visa n'énonce aucune considération de droit ;

- chacune des demandes de visa devant être traitées singulièrement, l'administration ne saurait se fonder sur leur succession pour établir le risque de détournement de l'objet du titre de séjour ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention d'application de l'accord de Schengen, signée le 19 juin 1990 ;

Vu le règlement (CE) n° 562/2006 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 juin 2013 :

- le rapport de M. Madelaine, faisant fonction de premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Martin, rapporteur public ;

1. Considérant que Mme A..., ressortissante algérienne, interjette appel du jugement du 29 mars 2011 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 14 mai 2010 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours dirigé contre la décision du 21 janvier 2009 de l'autorité consulaire française à Annaba (Algérie) rejetant sa demande de visa d'entrée et de court séjour en France ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 : " La motivation exigée par la présente loi doit (...) comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ; que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a suffisamment motivé sa décision en indiquant qu'elle s'est fondée, d'une part, sur la circonstance que le financement du voyage et du séjour de Mme A... n'était pas assuré compte-tenu de l'insuffisance de ses ressources propres et de l'impossibilité d'évaluer la capacité de son fils à l'accueillir et, d'autre part, sur le risque de détournement de l'objet du visa à des fins médicales ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 5 du règlement (CE) n° 562/2006 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 : " 1. Pour un séjour n'excédant pas trois mois sur une période de six mois, les conditions d'entrée pour les ressortissants de pays tiers sont les suivantes : (...) c) justifier l'objet et les conditions du séjour envisagé, et disposer des moyens de subsistance suffisants, tant pour la durée du séjour envisagé que pour le retour dans le pays d'origine ou le transit vers un pays tiers dans lequel leur admission est garantie, ou être en mesure d'acquérir légalement ces moyens (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 211-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Tout étranger qui déclare vouloir séjourner en France pour une durée n'excédant pas trois mois dans le cadre d'une visite familiale ou privée doit présenter un justificatif d'hébergement. Ce justificatif prend la forme d'une attestation d'accueil signée par la personne qui se propose d'assurer le logement de l'étranger, ou son représentant légal, et validée par l'autorité administrative. Cette attestation d'accueil constitue le document prévu par la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 pour justifier les conditions de séjour dans le cas d'une visite familiale ou privée " ; que selon l'article L. 211-4 du même code, l'attestation d'accueil " est accompagnée de l'engagement de l'hébergeant de prendre en charge, pendant toute la durée de validité du visa ou pendant une durée de trois mois à compter de l'entrée de l'étranger sur le territoire des Etats parties à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990, et au cas où l'étranger accueilli n'y pourvoirait pas, les frais de séjour en France de celui-ci, limités au montant des ressources exigées de la part de l'étranger pour son entrée sur le territoire en l'absence d'une attestation d'accueil " ; qu'aux termes de l'article R. 211-14 du même code : " Le signataire de l'attestation d'accueil doit, pour en obtenir la validation par le maire, se présenter personnellement en mairie, muni d'un des documents mentionnés aux articles R. 211-12 et R. 211-13, d'un document attestant de sa qualité de propriétaire, de locataire ou d'occupant du logement dans lequel il se propose d'héberger le visiteur ainsi que de tout document permettant d'apprécier ses ressources et sa capacité d'héberger l'étranger accueilli dans un logement décent au sens des dispositions réglementaires en vigueur et dans des conditions normales d'occupation " ; qu'il résulte de ces dispositions que l'obtention d'un visa de court séjour est subordonnée à la condition que le demandeur justifie à la fois de sa capacité à retourner dans son pays d'origine et de moyens de subsistance suffisants pendant son séjour ; qu'il appartient au demandeur de visa dont les ressources personnelles ne lui assurent pas ces moyens d'apporter la preuve de ce que les ressources de la personne qui l'héberge et qui s'est engagée à prendre en charge ses frais de séjour au cas où il n'y pourvoirait pas sont suffisantes pour ce faire ; que cette preuve peut résulter de la production d'une attestation d'accueil validée par l'autorité compétente et comportant l'engagement de l'hébergeant de prendre en charge les frais de séjour du demandeur, sauf pour l'administration à produire des éléments de nature à démontrer que l'hébergeant se trouverait dans l'incapacité d'assumer effectivement l'engagement qu'il a ainsi souscrit ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme A..., qui a indiqué sur son formulaire de demande de visa qu'elle financerait son voyage et subviendrait elle-même à ses besoins durant son séjour, ne dispose d'aucune autre source de revenu que la perception d'une pension de retraite d'un montant mensuel de 2 700 dinars algériens, soit environ 28 euros ; que si la requérante soutient que son fils, de nationalité française et résidant sur le territoire, pourrait prendre en charge les frais liés à son séjour, il ne ressort pas des pièces du dossier que ce dernier ait pris un tel engagement à la date de la décision attaquée ; qu'elle n'a produit aucune attestation d'accueil établie dans les formes prévues par les dispositions précitées des article L. 211-3 et L. 211-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, assortie d'un engagement de l'hébergeant de prendre en charge ses frais de voyage et de séjour ; qu'il suit de là qu'en se fondant, pour confirmer le refus opposé par le consul général de France à Annaba, sur l'insuffisance des moyens d'existence de Mme A... pour faire face aux dépenses de son voyage et de son séjour en France, la commission n'a pas inexactement apprécié la situation de l'intéressée ;

5. Considérant, par ailleurs, que Mme A..., qui est âgée de 55 ans, est retraitée et ne perçoit que de faibles ressources dans son pays d'origine ; qu'il ressort des pièces du dossier et qu'il n'est pas contesté que l'intéressée a, entre 2004 et 2008, déposé cinq demandes de visa d'entrée et de séjour en France, dont deux pour motif médical, qui ont toutes été rejetées ; que, dès lors, le motif de la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France tiré du risque de détournement de l'objet du visa à des fins médicales ou migratoires n'est pas entaché de l'erreur manifeste d'appréciation alléguée ;

6. Considérant, enfin, qu'il ressort des pièces du dossier que Mme A... a toujours vécu en Algérie où réside également un de ses deux fils ; qu'il n'est pas établi, ni même allégué, que le fils de la requérante résidant en France ne serait pas en mesure de lui rendre visite en Algérie ; que, par suite, dans les circonstances de l'espèce, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision contestée porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnaîtrait ainsi les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

7. Considérant que si Mme A... soutient qu'aucun motif d'ordre public ne saurait lui être opposé, cette circonstance est sans incidence sur la légalité de la décision contestée, compte-tenu des motifs retenus par la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, tirés de l'insuffisance des ressources de l'intéressée et du risque de détournement de l'objet du visa sollicité ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

9. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de la requête de Mme A..., n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions de l'intéressée tendant à ce qu'il soit enjoint au ministre de l'intérieur de lui délivrer un visa de court séjour ne peuvent être accueillies ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à Mme A... de la somme demandée au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A...et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 28 juin 2013, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- M. Madelaine, faisant fonction de premier conseiller,

- M. Gauthier, premier conseiller.

Lu en audience publique le 19 juillet 2013.

Le rapporteur,

B. MADELAINELe président,

L. LAINÉ

Le greffier,

M. C...

La république mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 11NT01463


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 11NT01463
Date de la décision : 19/07/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: M. Bernard MADELAINE
Rapporteur public ?: M. MARTIN
Avocat(s) : TALL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2013-07-19;11nt01463 ?
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