Vu la requête, enregistrée le 10 février 2011, présentée pour la SNC Pharmacie Vauquelin, dont le siège est au 122, rue de Falaise à Caen (14000), par Me Agostini, avocat au barreau de Caen ; la SNC Pharmacie Vauquelin demande à la Cour :
1°) à titre principal, d'annuler le jugement n° 0901125 du 10 décembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite du 19 avril 2009 et de la décision explicite confirmative du 27 avril 2009 par lesquelles le préfet du Calvados a refusé de procéder au retrait de l'arrêté du 10 novembre 2008 autorisant le transfert de la SELARL Pharmacie du Parc du 34, rue de la Seine au 107, avenue Guynemer à Caen ;
2°) à titre subsidiaire, d'annuler ledit jugement en tant que l'arrêté préfectoral du 10 novembre 2008 portant autorisation de transfert n'a pas été retiré avant le 10 mars 2009 ;
3°) d'annuler lesdites décisions ;
4°) d'enjoindre au préfet du Calvados, sous astreinte de 300 euros par jour de retard, de retirer l'arrêté du 10 novembre 2008 ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- le jugement est irrégulier dès lors que, pour rejeter sa requête, le tribunal a fait
application d'un moyen soulevé d'office sans que soient respectées les dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative ;
- le jugement est irrégulier puisqu'il a appliqué le délai, dans lequel il est possible de procéder à un retrait, aux décisions contestées de refus de retrait, qui ne sont pas des décisions créatrices de droits ;
- le jugement est irrégulier car dans la mesure où il est démontré que l'arrêté du 10 novembre 2008 est illégal, le tribunal aurait dû considérer que le préfet devait procéder à son retrait ;
- les décisions de refus de retrait sont irrégulières car dans la mesure où il est démontré que l'arrêté du 10 novembre 2008 est illégal, le préfet aurait dû procéder à son retrait ;
- l'arrêté du 10 novembre 2008 est entaché d'irrégularité dès lors qu'il méconnaît l'article 4 de la loi du 12 avril 2000, puisqu'il ne permet pas d'identifier avec précision la qualité et les compétences de son auteur ;
- l'arrêté du 10 novembre 2008 est entaché d'un vice de procédure, puisque la consultation obligatoire des syndicats représentatifs n'a pas été effectuée ;
- l'arrêté du 10 novembre 2008 apparaît comme ayant été irrégulièrement délivré, puisqu'il a été pris au terme d'une procédure irrégulière dans la mesure où le dossier de transfert ne respecte pas les dispositions de l'article R. 5125-1 du code de santé publique et l'arrêté du 21 mars 2000 fixant la liste des pièces justificatives ;
- le préfet a commis une erreur de droit en considérant que la nouvelle implantation répondait de manière optimale aux besoins en médicaments de la population résidant dans le quartier d'accueil sans rechercher, en vertu de l'article L. 5125-3 du code de la santé publique, si ce transfert pouvait compromettre l'approvisionnement en médicaments du quartier d'origine ;
- le préfet a commis une erreur de fait en considérant que le transfert d'officine sollicité se situait dans le même quartier et qu'ainsi ce transfert répondrait, par définition, de manière optimale aux besoins en médicaments de la population résidant dans le quartier d'accueil ;
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation en considérant que le transfert ne compromettait pas l'approvisionnement en médicaments de la population du quartier d'origine, et répondait de manière optimale aux besoins en médicaments de la population résidant dans le quartier d'accueil ;
- l'arrêté du 10 novembre 2008 ne répondrait pas aux exigences de santé publique, dans la mesure où le transfert autorisé aurait pour effet d'appauvrir considérablement la desserte en médicaments du quartier d'origine ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 18 avril 2011, présenté par le ministre du travail, de l'emploi et de la santé, qui conclut au rejet de la requête ;
Il soutient que le recours était irrecevable car présenté après expiration du délai de recours contentieux ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 6 mai 2011, présenté pour la SELARL Pharmacie du Parc, par Me Schlosser, avocat au barreau de Caen, qui conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la SNC Pharmacie Vauquelin la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- le jugement est régulier dans la mesure où le moyen retenu par le tribunal pour rejeter la requête de la requérante n'est pas un moyen soulevé d'office puisqu'évoqué par elle-même et par le préfet ;
- le jugement est régulier en ce qu'il a considéré que l'arrêté du 10 novembre 2008 était un acte individuel explicite et créateur de droits qui ne pouvait plus être retiré à l'expiration d'un délai de quatre mois ;
- l'arrêté du 10 novembre 2008 n'est pas entaché d'un vice de forme dès lors qu'il a été signé par le préfet du Calvados en personne en sa qualité d'autorité de tutelle de la Direction départementale des affaires sanitaires et sociales du Calvados ;
- l'arrêté du 10 novembre 2008 n'est pas entaché d'un vice de procédure dès lors que l'avis du syndicat des pharmaciens du Calvados et de l'union des syndicats de pharmaciens de France ont été sollicités ;
- la composition du dossier de demande de transfert est régulière au regard des dispositions de l'article R. 5125-1 du code de santé publique et de l'arrêté du 21 mars 2000 fixant la liste des pièces justificatives ;
- le préfet n'a pas commis d'erreur de droit en considérant que les besoins en médicaments de la population du quartier d'origine étaient satisfaits ;
- le préfet n'a pas commis d'erreur de fait en considérant que le transfert d'officine s'opérait dans le même quartier et que de plus la pharmacie requérante ne se trouvant pas dans le quartier d'accueil du transfert ne pouvait invoquer un déséquilibre de l'offre dans celui-ci ;
- la nouvelle localisation de l'officine répond aux exigences de santé publique notamment en raison des facilités d'accès et de sa proximité avec des établissements médicaux ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 25 janvier 2012, présenté pour la SNC Pharmacie Vauquelin, par Me Agostini, avocat au barreau de Caen, qui confirme ses précédentes conclusions, en précisant que
- l'appel formé a bien pour objet de demander l'annulation du jugement du tribunal ainsi que des décisions de refus de retrait ; il en découlerait donc que l'annulation de ces décisions obligerait le préfet à statuer de nouveau sur la demande de retrait et que l'arrêté étant irrégulier il devrait dans ce cas procéder à son retrait ;
- le tribunal aurait dû statuer en annulant les décisions de refus de retrait en tant qu'elles n'ont pas retiré l'arrêté, puisque le préfet aurait dû, dans la mesure où l'arrêté était illégal, procéder à son retrait ;
- l'arrêté du 10 novembre 2008 méconnaît l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 en ne précisant pas la qualité de son signataire ;
- la composition du dossier de demande de transfert est irrégulière dès lors que le dossier est incomplet au regard des dispositions de l'article R. 5125-1 du code de la santé publique, puisqu'il y manquait, une pièce justifiant de droits régulièrement acquis sur le local, un permis de construire et un plan des officines présentes par quartier ;
- ce transfert ne s'opère pas dans un même quartier et, de plus, son officine est située dans le même quartier que la nouvelle localisation de l'officine transférée ;
- quand bien même il s'agirait d'un transfert ayant lieu dans le même quartier, celui-ci aurait pour effet de compromettre l'approvisionnement nécessaire en médicaments de la population d'une partie de ce quartier, et ainsi ce désert de l'offre médicamenteuse méconnaitrait les exigences de santé publique ;
Vu le mémoire en réplique n° 2, enregistré le 24 février 2012, pour la SNC Pharmacie Vauquelin, par Me Agostini, avocat au barreau de Caen, qui persiste dans ses précédentes conclusions en précisant que l'arrêté du 10 novembre 2008 étant illégal, le préfet aurait dû procéder à son retrait ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 juin 2013 :
- le rapport de M. Madelaine, faisant fonction de premier conseiller ;
- les conclusions de M. Martin, rapporteur public ;
- et les observations de Me A..., substituant Me Agostini, avocat de la SNC Pharmacie Vauquelin ;
1. Considérant que la SNC Pharmacie Vauquelin interjette appel du jugement n° 0901125 du 10 décembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite née le 19 avril 2009 et de la décision explicite prise le 27 avril 2009, par lesquelles le préfet du Calvados a refusé de procéder au retrait de l'arrêté du 10 novembre 2008 autorisant le transfert de la SELARL Pharmacie du Parc du 34, rue de la Seine au 107, avenue Guynemer à Caen ; que les conclusions de la requête tendant à l'annulation de ces deux décisions doivent être regardées comme dirigées contre la seule décision du 27 avril 2009 par laquelle le préfet du Calvados a expressément rejeté la demande de retrait présentée par la requérante, cette dernière décision s'étant substituée à la première ;
Sur la régularité du jugement :
2. Considérant qu'en faisant application des règles de retrait des décisions administratives explicites créatrices de droits issues de la décision du Conseil d'Etat, statuant au contentieux, n° 197018 du 26 octobre 2001, le tribunal administratif s'est borné à exercer son office en situant le litige sur le terrain juridiquement approprié et n'a pas soulevé un moyen d'ordre public qu'il aurait dû communiquer aux parties en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative ; que le tribunal n'a, par suite, pas méconnu ces dispositions ;
Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision du préfet du Calvados du 27 avril 2009 :
3. Considérant que, par une lettre du 18 février 2009 dont il a été accusé réception le 19 février 2009 et par une lettre du 24 février 2009 dont il a été accusé réception le 25 février 2009, la SNC Pharmacie Vauquelin a demandé au préfet du Calvados de procéder au retrait de son arrêté du 10 novembre 2008 par lequel il a autorisé le transfert de l'officine exploitée par la SELARL Pharmacie du Parc du 34, rue de la Seine vers le 107, avenue Guynemer à Caen (14000) ;
4. Considérant que, sous réserve de dispositions législatives ou réglementaires contraires, et hors le cas où il est satisfait à une demande du bénéficiaire, l'administration ne peut retirer une décision individuelle explicite créatrice de droits, si elle est illégale, que dans le délai de quatre mois suivant la prise de cette décision ;
5. Considérant qu'à la date à laquelle le préfet a statué sur la demande de la requérante tendant au retrait de l'arrêté autorisant le transfert de la SELARL Pharmacie du Parc, qui n'a pas été obtenu par fraude, le délai susmentionné de quatre mois, qui n'avait pas été prorogé par la demande exercée par la SNC Pharmacie Vauquelin, était expiré ; qu'il s'ensuit que le préfet du Calvados était tenu de rejeter cette demande ; que, par suite, tous les moyens invoqués par la requérante à l'encontre de la décision litigieuse sont inopérants et ses conclusions tendant à l'annulation de celle-ci ne peuvent qu'être rejetées ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SNC Pharmacie Vauquelin n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :
7. Considérant que le présent arrêt, qui rejette la requête, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions de la SNC Pharmacie Vauquelin tendant à ce qu'il soit enjoint, sous astreinte de 300 euros par jour de retard, au préfet du Calvados de retirer l'arrêté du 10 novembre 2008 doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme de 3 000 euros demandée au titre des frais exposés par la SNC Pharmacie Vauquelin et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la SNC Pharmacie Vauquelin une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la SELARL Pharmacie du Parc et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SNC Pharmacie Vauquelin est rejetée.
Article 2 : La SNC Pharmacie Vauquelin versera à la SELARL Pharmacie du Parc une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SNC Pharmacie Vauquelin, au ministre des affaires sociales et de la santé, et à la SELARL Pharmacie du parc.
Une copie en sera transmise au préfet de la région Basse-Normandie, préfet du Calvados.
Délibéré après l'audience du 28 juin 2013, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- M. Madelaine, faisant fonction de premier conseiller,
- M. Gauthier, premier conseiller.
Lu en audience publique le 19 juillet 2013.
Le rapporteur,
B. MADELAINELe président,
L. LAINÉ
Le greffier,
M. B...
La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 11NT004062