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22/03/2013 | FRANCE | N°11NT00721

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 22 mars 2013, 11NT00721


Vu la requête, enregistrée le 28 février 2011, présentée pour Mme B... A..., demeurant au..., par Me Dubourg, avocate au barreau de Rennes ; Mme A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0802522 du 30 décembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le préfet du Morbihan a rejeté sa demande tendant à l'abrogation de l'arrêté préfectoral du 14 août 1992 portant approbation des modifications et suspensions de la servitude de passage pour les piétons le long du litto

ral de la commune de Saint-Philibert sur la digue de Kerlioret ainsi qu'à...

Vu la requête, enregistrée le 28 février 2011, présentée pour Mme B... A..., demeurant au..., par Me Dubourg, avocate au barreau de Rennes ; Mme A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0802522 du 30 décembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le préfet du Morbihan a rejeté sa demande tendant à l'abrogation de l'arrêté préfectoral du 14 août 1992 portant approbation des modifications et suspensions de la servitude de passage pour les piétons le long du littoral de la commune de Saint-Philibert sur la digue de Kerlioret ainsi qu'à la suspension de cette servitude ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;

3°) d'enjoindre à l'Etat de suspendre ou de modifier la servitude de passage sur la digue de Kerlioret sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 février 2013 :

- le rapport de M. Sudron, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Pouget, rapporteur public ;

- et les observations de Me Dubourg, avocat de Mme A... ;

1. Considérant que par jugement du 30 décembre 2010 le tribunal administratif de Rennes a rejeté la demande de M. et Mme A... tendant à l'annulation de la décision implicite de refus que le préfet du Morbihan a opposée à leur demande tendant à l'abrogation de l'arrêté préfectoral du 14 août 1992 portant approbation des modifications et suspensions de la servitude de passage des piétons le long du littoral de la commune de Saint-Philibert sur la digue de Kerlioret et à la suspension de cette servitude ; que Mme B... A...interjette appel de ce jugement ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 160-6 du code de l'urbanisme : " Les propriétés privées riveraines du domaine public maritime sont grevées sur une bande de trois mètres de largeur d'une servitude destinée à assurer exclusivement le passage des piétons. / L'autorité administrative peut, par décision motivée prise après avis du ou des conseils municipaux intéressées et au vu du résultat d'une enquête publique effectuée comme en matière d'expropriation : a) Modifier le tracé ou les caractéristiques de la servitude, afin, d'une part, d'assurer, compte tenu notamment de la présence d'obstacles de toute nature, la continuité du cheminement des piétons ou leur libre accès au rivage de la mer, d'autre part, de tenir compte des chemins ou règles locales préexistants ; le tracé modifié peut grever exceptionnellement des propriétés non riveraines du domaine public maritime ; b) A titre exceptionnel, la suspendre (...) " ;

3. Considérant qu'il appartient à tout intéressé de demander à l'autorité compétente de procéder à l'abrogation d'une décision illégale non règlementaire qui n'a pas créé de droits, si cette décision est devenue illégale à la suite de changements dans les circonstances de droit ou de fait postérieures à son édiction ;

4. Considérant d'une part que l'arrêté par lequel le préfet, en application des dispositions précitées du code de l'urbanisme, modifie le tracé ou les caractéristiques de la servitude de passage des piétons sur le littoral n'a pas le caractère d'un acte réglementaire dont la requérante pourrait demander l'abrogation après l'expiration du délai de recours contentieux en raison de l'illégalité qui l'aurait entaché dès son origine ; qu'il ressort des pièces du dossier que, par une ordonnance du 6 novembre 2006 devenue définitive, le président du tribunal administratif de Rennes a rejeté la demande de M. et Mme A... tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral contesté du 14 août 1992 au motif qu'elle avait été enregistrée postérieurement à l'expiration du délai de recours contentieux ; que, par suite, les moyens tirés de ce que cet arrêté serait entaché d'illégalité depuis son origine sont inopérants ;

5. Considérant d'autre part que la dégradation de l'état de la digue depuis l'instauration de la servitude du fait de la fréquentation accrue des promeneurs et des cyclistes à partir de 1998 n'est pas de nature rendre illégal l'arrêté contesté ; que le moyen tiré de ce que cet arrêté serait devenu illégal en raison d'une modification des circonstances de fait doit par suite être écarté ;

6. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article R. 160-14 du code de l'urbanisme alors en vigueur :" A titre exceptionnel, la servitude instituée par l'article L. 160-6 peut être suspendue, notamment dans les cas suivants (...) e) Si le maintien de la servitude de passage est de nature à compromettre soit la conservation d'un site à protéger pour des raisons d'ordre écologique ou archéologique, soit la stabilité des sols " ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment d'un constat d'huissier du 5 mars 2003 produit par Mme A..., dont les énonciations ne sont pas contredites, que le sol de la digue s'est effondré en plusieurs endroits et comporte un trou d'environ cinquante centimètres de diamètre dont l'ampleur s'est accrue du fait du passage important des piétons et des cyclistes, que les poutres qui soutiennent le chemin de la digue sont en parties pourries, que les pierres de soutènement sont désolidarisées, que le mur de soutènement présente des déformations importantes et que de chaque côté du passage sur la digue des fils conducteurs ont dû être installés pour garantir la sécurité des usagers; que la détérioration de la digue est dès lors de nature à compromettre sa stabilité et à justifier la suspension de la servitude de passage au droit de celle-ci ; que, par suite, en refusant de suspendre le tracé de cette servitude, le préfet du Morbihan a méconnu les dispositions précitées de l'article R. 160-14 du code de l'urbanisme ;

8. Considérant que, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen n'est de nature à justifier l'annulation de la décision contestée ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A... est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite du préfet du Morbihan, en tant qu'elle porte refus de la suspension de la servitude de passage sur la digue de Kerlioret ;

Sur les conclusions à fins d'injonction sous astreinte :

10. Considérant que le présent arrêt implique nécessairement la suspension de la servitude de passage sur la digue de Kerlioret ; qu'il y a lieu d'enjoindre au préfet du Morbihan de procéder à cette suspension dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant qu'en application de ces dispositions il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement à Mme A... d'une somme de 1 500 euros au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 30 décembre 2010 du tribunal administratif de Rennes est annulé en tant qu'il a rejeté la demande de M. et Mme A... tendant à l'annulation de la décision implicite du préfet du Morbihan en ce qu'elle refuse de suspendre la servitude de passage pour les piétons le long du littoral de la commune de Saint-Philibert sur la digue de Kerlioret.

Article 2 : La décision implicite du préfet du Morbihan est annulée en tant qu'elle refuse de suspendre la servitude de passage pour les piétons le long du littoral de la commune de Saint-Philibert sur la digue de Kerlioret.

Article 3 : Il est enjoint au préfet du Morbihan de suspendre la servitude de passage des piétons le long du littoral de la commune de Saint-Philibert sur la digue de Kerlioret dans le délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à Mme A... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A... est rejeté .

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A...et au ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement.

Une copie sera adressée au préfet du Morbihan.

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N° 11NT00721


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 11NT00721
Date de la décision : 22/03/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. Alain SUDRON
Rapporteur public ?: M. POUGET
Avocat(s) : DUBOURG

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2013-03-22;11nt00721 ?
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