Vu la requête, enregistrée le 7 juin 2012, présentée pour M. A... B..., demeurant au..., par Me Boulassel, avocat au barreau de Lyon ; M. B... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1004559 du 5 octobre 2011 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 18 décembre 2009 du ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire rejetant sa demande de naturalisation ainsi que de la décision implicite de rejet née du silence gardé sur son recours gracieux ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, lesdites décisions ;
3°) d'enjoindre au ministre chargé des naturalisations de procéder à un nouvel examen de sa demande dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat d'une somme de 2 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Il soutient que :
- la décision contestée du 18 décembre 2009 est insuffisamment motivée, dès lors qu'elle ne contient pas la base légale lui servant de fondement ;
- les décisions contestées sont entachées d'erreur de droit, dès lors que les faits qui lui sont reprochés, ayant donné lieu aux procédures pénales dont fait état le ministre, n'entrent pas dans les prévisions des articles 21-23 et 21-27 du code civil permettant le rejet de sa demande de naturalisation ;
- il ne s'est rendu coupable d'aucune infraction pénale et n'a pas été condamné ;
- les procédures pénales dont fait état le ministre sont très anciennes et ne présentent aucun caractère de gravité ;
- les décisions du ministre sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation ; son comportement présent est exempt de tout reproche ; il vit en France depuis l'âge de 7 ans et y a établi le centre de ses intérêts matériels et familiaux ; l'essentiel de sa famille, qui réside en France, est titulaire d'une carte de résident ou possède la nationalité française ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense enregistré le 7 septembre 2012, présenté par le ministre de l'intérieur qui conclut au rejet de la requête ;
Il soutient que :
- le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision initiale contestée manque en fait ;
- les décisions contestées ne sont pas entachées d'erreur de droit, dès lors que le ministre chargé des naturalisations, sans commettre une erreur de cette nature, a pu se fonder sur les dispositions de l'article 49 du décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;
- M. B... ne peut utilement se fonder sur la circonstance que les articles 21-23 et 21-27 auraient été méconnus, dès lors que les décisions contestées n'ont pas été prises sur leur fondement ;
- M. B... ne démontre pas l'inexactitude matérielle des faits qui lui sont reprochés ;
- le comportement blâmable de l'intéressé s'inscrit sur une période assez récente allant de 2001 à 2006 et les décisions contestées ne sont pas entachées d'erreur manifeste d'appréciation ;
Vu le mémoire, enregistré le 3 octobre 2012, présenté pour M. B... qui conclut aux mêmes fins et par les mêmes moyens que sa requête ;
Il soutient, en outre, qu'il n'a invoqué aucun moyen tiré de l'illégalité externe et que la dernière procédure pénale dont il est fait état est ancienne puisque remontant au 22 juin 2006 ;
Vu la décision du 27 mars 2012 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes a accordé à M. B... le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, relative à l'aide juridique ;
Vu le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
Vu le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 modifié ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 janvier 2013 :
- le rapport de M. Sudron, président-assesseur ;
1. Considérant que M. B..., résident algérien, interjette appel du jugement du 5 octobre 2011 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 18 décembre 2009 du ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire rejetant sa demande de naturalisation ainsi que de la décision implicite de rejet née du silence gardé sur son recours gracieux ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant, en premier lieu, que la décision du 18 décembre 2009 contestée, qui mentionne qu'elle est prise en application des dispositions de l'article 49 du décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993, indique les considérations de droit qui en constituent le fondement ; qu'elle est ainsi suffisamment motivée sur ce point ;
3. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 21-15 du code civil : "Hors le cas prévu à l'article 21-14-1, l'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger" ; qu'aux termes de l'article 49 du décret du 30 décembre 1993 : "Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration dans la nationalité sollicitée, il prononce le rejet de la demande ...." ; qu'en vertu de ces dispositions, il appartient au ministre chargé des naturalisations de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la naturalisation à l'étranger qui la sollicite ; que, dans le cadre de cet examen d'opportunité, il peut légalement prendre en compte les renseignements défavorables recueillis sur le comportement du postulant ;
3. Considérant que le ministre chargé des naturalisations a rejeté la demande de naturalisation présentée par M. B... au motif que celui-ci avait fait l'objet de plusieurs procédures, pour recel le 27 juillet 2001 à Lyon, pour outrage à agent de la force publique le 5 novembre 2003 à Lyon ayant donné lieu à un rappel à la loi, pour défaut de permis de conduire le 14 janvier 2006 à Villeurbanne, et, enfin, pour falsification et usage frauduleux de faux documents administratifs le 22 juin 2006 à Villeurbanne ;
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et n'est pas contesté que M. B... a fait l'objet d'un rappel à la loi pour les faits d'outrage à agent dépositaire de l'autorité publique le 5 novembre 2003 et a été verbalisé le 14 janvier 2006 pour défaut de permis de conduire ; que, dans ces conditions, et alors même que M. B... indique n'avoir jamais été condamné, le ministre chargé des naturalisations a pu, dans le cadre du large pouvoir d'appréciation dont il dispose, eu égard à la nature des faits reprochés, qui ne peuvent être regardés comme anciens à la date des décisions contestées, et qui ne sont pas dénués de gravité, rejeter pour ces motifs la demande de naturalisation présentée par l'intéressé, sans entacher sa décision ni d'erreur de droit ni d'erreur manifeste d'appréciation ; que la circonstance que les faits reprochés à M. B... ne permettaient pas de déclarer sa demande irrecevable sur le fondement des dispositions des articles 21-23 et 21-27 du code civil est sans incidence sur la légalité des décisions contestées, qui ont été prises en application de l'article 49 du décret susvisé du 30 décembre 1993 ; que la circonstance que M. B... vit depuis l'âge de 7 ans en France, que la plus grande partie des membres de sa famille y réside et sont titulaires d'une carte de résident ou de nationalité française et qu'il y aurait le centre de ses intérêts est sans incidence sur la légalité des décisions contestées ;
5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction, sous astreinte :
6. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de la requête de M. B..., n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions de l'intéressé tendant à ce que la cour enjoigne, sous astreinte, au ministre chargé des naturalisations de procéder à un nouvel examen de sa demande ne peuvent être accueillies ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 :
7. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à l'avocat de M. B... de la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 8 janvier 2013, à laquelle siégeaient :
- M. Pérez, président de chambre,
- M. Sudron, président-assesseur,
- Mme Buffet, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 1er février 2013.
Le rapporteur,
A. SUDRONLe président,
A. PÉREZ
Le greffier,
Y. LEWANDOWSKI
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N° 12NT015232
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