Vu la requête et les pièces complémentaires, enregistrées le 17 février 2012 et 21 mars 2012, présentées pour Mme Véronique X, demeurant ..., par Me Bourgeois, avocat au barreau de Nantes ; Mme X demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 11-8070 en date du 3 novembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 juin 2011 du préfet de la Loire-Atlantique portant rejet de sa demande de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ;
2°) d'annuler ledit arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 75 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, Me Bourgeois, qui renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la directive n° 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres aux ressortissants des pays tiers en séjour irrégulier ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, modifiée, relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 juillet 2012 le rapport de M. Christien, président-assesseur ;
Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du préfet de la Loire-Atlantique en date du 16 juin 2011 :
Considérant que Mme X, ressortissante congolaise, invoque pour la première fois en appel le moyen tiré de ce que le préfet de la Loire-Atlantique a uniquement examiné la demande de titre de séjour qu'elle avait présentée le 4 février 2011 au regard des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors que sa demande était également fondée sur les dispositions de l'article L. 313-14 dudit code ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X a sollicité du préfet de la Loire-Atlantique par courrier en date du 4 février 2011 la délivrance d'une carte de séjour " à titre humanitaire sur le fondement de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales " en faisant valoir que sa situation était exceptionnelle compte tenu du fait que son époux, de nationalité française, était décédé en France le 13 novembre 2010 et qu'elle était désormais sans ressource et isolée au Congo où elle ne disposait d'aucune attache familiale ; que la demande présentée par Mme X, eu égard à son contenu, devait être regardée comme tendant à la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il résulte des termes mêmes de l'arrêté contesté que le préfet de la Loire-Atlantique n'a pas examiné s'il pouvait être satisfait à la demande de l'intéressée au regard de ces dispositions et s'est uniquement fondé sur les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que Mme X est dans ces conditions fondée à soutenir que la décision en date du 16 juin 2011 par laquelle le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de lui délivrer un titre de séjour est illégale ; qu'il y a lieu, par suite, de l'annuler ainsi que, par voie de conséquence, les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme X est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. " ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. " ; qu'aux termes de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Si l'obligation de quitter le territoire français est annulée, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues au titre V du présent livre et l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas. " ;
Considérant que si la requérante demande, sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, qu'il soit enjoint au préfet de la Loire-Atlantique de lui délivrer un titre de séjour, l'exécution du présent arrêt implique seulement, par application des dispositions de l'article L. 911-2 dudit code et de l'article L. 512-1du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qu'il soit enjoint au préfet de délivrer une autorisation provisoire de séjour à Mme X et de procéder à un nouvel examen de sa situation afin de prendre une nouvelle décision dans le délai de deux mois à compter de la notification dudit arrêt, sans qu'il y ait lieu d'assortir cette injonction de l'astreinte demandée ;
Sur les conclusions tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens :
Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme X, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que le préfet de la Loire-Atlantique demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, d'autre part, Mme X a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Bourgeois, avocat de Mme X, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de celui-ci le versement à cet avocat de la somme de 1 000 euros en application desdites dispositions ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement susvisé du tribunal administratif de Nantes en date du 3 novembre 2011 et l'arrêté du 16 juin 2011 du préfet de la Loire-Atlantique sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Loire-Atlantique de délivrer une autorisation provisoire de séjour à Mme X et de prendre, après avoir procédé à un nouvel examen de la situation de celle-ci, une nouvelle décision relative à sa demande de titre de séjour dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à Me Bourgeois, avocat de Mme X, la somme de 1 000 euros (mille euros) en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, sous réserve pour cet avocat de renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme X est rejeté.
Article 5 : Les conclusions présentées par le préfet de la Loire-Atlantique tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Véronique X et au ministre de l'intérieur. Une copie sera transmise, pour information, au préfet de la Loire-Atlantique.
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N° 12NT004682