Vu la requête, enregistrée le 22 juin 2011, présentée pour M. Jean-Louis X, demeurant ..., par Me Desmonts, avocat au barreau de Bourges ; M. X demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1001077 en date du 22 avril 2011 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2004 à 2006 ainsi que des pénalités y afférentes ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 juin 2012 :
- le rapport de Mme Coiffet, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme Specht, rapporteur public ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant que l'administration, qui est tenue d'appliquer la loi fiscale, a la possibilité, à tout moment, d'opposer aux contribuables celles de ses dispositions qui lui paraissent propres à justifier l'établissement de l'impôt ; qu'il suit de là que l'administration est en droit de retenir un autre motif que celui dont elle avait assorti une première proposition de rectification à la condition d'avoir, par une nouvelle proposition de rectification, avisé le contribuable et de lui avoir ouvert, en vue d'en discuter, un nouveau délai de la durée prévue par la loi ;
Considérant que, contrairement à ce que soutient M. X, le vérificateur qui, pour refuser la déduction des dépenses de travaux réalisés dans le château de Fontenay dont M. et Mme X sont propriétaires, s'est fondé, tant dans la proposition de rectification du 6 décembre 2007 afférente aux revenus de l'année 2004 que dans sa réponse aux observations du contribuable du 14 octobre 2008, sur la circonstance que le requérant n'établissait pas que les dépenses en cause qu'il avait déduites de ses revenus fonciers de l'année 2004 se rapportaient à un immeuble donné en location, n'a pas entendu, en invitant le contribuable dans la lettre précitée du 14 octobre 2008 à produire " tout document, bail, engagement de location ayant date certaine exposant précisément le détail et la nature des locaux, ainsi que leur métré ", modifier le motif ou la base légale de la rectification apportée auxdits revenus ; que M. X n'est pas davantage fondé à soutenir que le vérificateur a également modifié le montant des rehaussements dès lors que la somme de 9 050,90 euros figurant dans la réponse aux observations du contribuable et visée par le requérant correspond au montant d'une facture mentionnée dans la proposition de rectification ; qu'il s'ensuit que le moyen tiré de ce que l'administration, en ce qu'elle n'aurait pas laissé à M. X la possibilité de répondre à la nouvelle motivation adoptée par le vérificateur dans la réponse aux observations du contribuable, a méconnu le principe du contradictoire ne peut qu'être écarté ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, que M. X, qui n'établit pas que le vérificateur aurait fait montre de partialité à son égard, n'est pas fondé à soutenir que les impositions en litige ont été établies au terme d'une procédure irrégulière ;
Sur le bien-fondé des impositions en litige :
En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :
Considérant qu'aux termes de l'article 15 du code général des impôts : " (...) II Les revenus des logements dont le propriétaire se réserve la jouissance ne sont pas soumis à l'impôt sur le revenu (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que les contribuables qui bénéficient de cette exonération ne sont pas autorisés à déduire de leurs revenus fonciers les charges afférentes aux logements dont ils sont propriétaires ;
Considérant que M. X qui est propriétaire du château de Fontenay situé à Tendron (Cher), lequel constitue sa résidence principale, soutient avoir donné une partie du château en location à son fils et reproche à l'administration de ne pas avoir admis en déduction de ses revenus fonciers de l'année 2004 les dépenses engagées pour ce logement ; qu'il fait valoir que son fils est assujetti à la taxe d'habitation à raison de son occupation d'une partie du château, qu'il lui verse tous les mois un loyer d'un montant de 274,41 euros et que dans le cadre du contrôle de sa déclaration de l'impôt de solidarité sur la fortune, l'administration a admis qu'une partie du château était louée ; que, toutefois, le ministre soutient sans être contredit que le fils de M. X a été déclaré auprès du service des impôts fonciers comme occupant à titre gratuit du château ; que le requérant n'établit pas par les pièces qu'il produit la cause du versement mensuel effectué par son fils à son profit ; qu'enfin, il résulte de l'instruction que le contrôle du vérificateur n'a pas porté, dans le cadre des rectifications apportées à la déclaration du contribuable à l'impôt de solidarité sur la fortune, sur la nature de l'occupation du château indiquée dans la déclaration ; que, par suite, l'administration, qui en invitant le contribuable à produire " tout document, bail, engagement de location ayant date certaine exposant précisément le détail et la nature des locaux, ainsi que leur métré " propre à établir, ainsi qu'il lui incombait, l'existence de la location alléguée, n'a pas méconnu les dispositions précitées de l'article 31 du code général des impôts, était fondée à considérer que les époux X s'étaient réservé la jouissance du château ; que c'est également à bon droit qu'elle n'a en conséquence pas admis la déduction d'une facture d'enrobés d'un montant de 3 044,73 euros émise par la société Colas afférente à la réfection du chemin d'accès au château de Fontenay qui dessert également les communs donnés à bail dès lors que ni les mentions de la facture, ni les plans produits ne permettent d'établir que les travaux entrepris n'ont pas porté sur la partie du chemin desservant exclusivement le château ;
Considérant qu'aux termes de l'article 28 du code général des impôts : " Le revenu net foncier est égal à la différence entre le montant du revenu brut et le total des charges de la propriété " ; qu'aux termes de l'article 29 de ce code : " Sous réserve des dispositions des articles 33 ter et 33 quater, le revenu brut des immeubles ou parties d'immeubles donnés en location, est constitué par le montant des recettes brutes perçues par le propriétaire, augmenté du montant des dépenses incombant normalement à ce dernier et mises par les conventions à la charge des locataires. Les subventions et indemnités destinées à financer des charges déductibles sont comprises dans le revenu brut. Il n'est pas tenu compte des sommes versées par les locataires au titre des charges leur incombant (...) " ; qu'aux termes de l'article 13 dudit code : " 1. Le bénéfice ou revenu imposable est constitué par l'excédent du produit brut, y compris la valeur des profits et avantages en nature, sur les dépenses effectuées en vue de l'acquisition et de la conservation du revenu (...) " ; que, selon le I de l'article 31 du même code, les charges déductibles du revenu foncier comprennent notamment : " 1° pour les propriétés urbaines : a) les dépenses de réparation et d'entretien (...) ; b) les dépenses d'amélioration afférentes aux locaux d'habitation, à l'exclusion des frais correspondant à des travaux de construction, de reconstruction ou d'agrandissement ; (...) 2° Pour les propriétés rurales : a) Les dépenses énumérées aux a à e du 1° (...) " ;
Considérant, d'une part, que les dépenses mentionnées au I de l'article 31 du code général des impôts précité ne peuvent être déduites du revenu foncier brut que dans la mesure où, notamment, les charges alléguées sont dûment justifiées, se rapportent à des immeubles dont les revenus sont imposables dans la catégorie des revenus fonciers, sont effectivement supportées par le propriétaire et sont engagées en vue de l'acquisition ou de la conservation du revenu ; que, d'autre part, les dépenses effectuées par un propriétaire et correspondant à des travaux entrepris dans son immeuble sont déductibles de son revenu, sauf si elles correspondent à des travaux de construction, de reconstruction ou d'agrandissement ; que doivent être regardés comme des travaux de construction ou de reconstruction, au sens des dispositions précitées, les travaux comportant la création de nouveaux locaux d'habitation, notamment dans des locaux auparavant affectés à un autre usage, ainsi que les travaux ayant pour effet d'apporter une modification importante au gros oeuvre de locaux d'habitation existants ou les travaux d'aménagement interne qui, par leur importance, équivalent à une reconstruction ; que doivent être regardés comme des travaux d'agrandissement au sens des mêmes dispositions, les travaux ayant pour effet d'accroître le volume ou la surface habitable de locaux existants ;
Considérant que M. et Mme X ont par convention du 18 septembre 1995 donné à bail à la SCEA de Cochet un domaine agricole dénommé " la ferme de Cochet " ; que les contribuables ont porté en charges dans la déclaration de revenus qu'ils ont souscrite au titre de l'année 2004 une facture d'un montant de 23 646 euros hors taxe de l'entreprise Colas correspondant à des travaux de réfection entrepris dans la cour de la ferme ; qu'il est, toutefois, constant que la SCEA de Cochet s'est directement acquittée du montant des travaux auprès de l'entreprise Colas ; que si M. X soutient que le preneur a ce faisant commis une erreur que l'entrepreneur a rectifiée en lui adressant une nouvelle facture, le ministre soutient sans être contredit que l'intéressé n'a produit aucune facture d'avoir de la société Colas neutralisant la facturation émise antérieurement au nom de la SCEA de Cochet ; que, par ailleurs, il n'est pas allégué que M. X aurait remboursé la SCEA de Cochet des frais engagés par celle-ci ; que, sur ce point, il résulte de l'instruction que le compte courant d'associé ouvert au nom de M. X dans les livres de la société a été débité de la somme en litige après avoir été crédité du même montant ; que, par suite, c'est à bon droit que le vérificateur a estimé que le requérant n'avait pas effectivement supporté le coût des travaux et a, pour ce motif, refusé l'imputation sur ses revenus fonciers de l'année 2004 de la dépense correspondante ;
Considérant que l'administration a remis en cause au titre de l'année 2004 le caractère déductible d'une facture d'un montant de 21 441 euros établie par l'entreprise Gourdy pour des travaux mentionnés dans la facture de réfection " de la couverture de la grange et de l'appentis " au motif que cette dépense n'était pas afférente à un bien productif de revenus fonciers ; que le requérant soutient que ces travaux ont été réalisés dans une dépendance du château dénommée " Le village " donnée en location aux époux Jolivard ; que, toutefois, les pièces versées aux débats font référence à " la grange et à l'appentis " sans autre précision ; que la fiche du rôle de la taxe d'habitation des époux Jolivard produite par M. X mentionne comme adresse de taxation " La Sauvagère " ; qu'enfin, ni la photographie supposée des lieux, ni l'attestation des locataires de M. X ne permettent de déterminer avec une certitude suffisante que les dépenses en litige se rapportent effectivement au bâtiment " Le Village " ;
Considérant que le requérant soutient également que l'administration a, à tort, refusé de prendre en compte pour la détermination de ses revenus fonciers de l'année 2004 les rémunérations d'un montant total de 2 491 euros versées à un salarié mis à sa disposition par l'association Solidarité Emplois Ruraux pour la réalisation de divers travaux dans un bâtiment dénommé " La Vignette " ; que, toutefois, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, les factures, attestations, tableaux, déclarations, photographies et autres pièces produites par le requérant ne comportent aucune précision sur la nature et l'importance des travaux entrepris ; que, par suite, c'est à bon droit que le vérificateur, qui a estimé que les justificatifs remis par le contribuable ne le mettaient pas à même d'apprécier la nature des travaux et, par conséquent, le caractère déductible des dépenses correspondantes, a, pour ce motif qui figurait dans la lettre du 14 octobre 2008, valant réponse aux observations du contribuable, écarté les dépenses dont s'agit ;
Considérant que M. X conteste la remise en cause par l'administration de la déduction de ses revenus fonciers de l'année 2005 d'une facture d'un montant de 7 807 euros établie par l'entreprise Gourdy pour la pose d'un insert et d'une installation d'air chaud pulsé ; qu'il soutient que ces travaux ont été réalisés dans une dépendance du château, " Les Communs ", donnée en location à M. Lion puis à Melle Ringeval ; que toutefois ni la facture produite, qui est libellée à l'adresse personnelle de M. X, ni la seule attestation versée aux débats rédigée par l'entreprise Gourdy ne suffisent à établir que les travaux en litige ont été effectués dans le logement ci-dessus désigné ;
Considérant que M. X a également produit, au titre de l'année 2005, des tickets de caisse ainsi que des factures, libellées pour ces dernières, à son adresse personnelle ; que si certaines de ces pièces comportent une mention manuscrite " Lion " ou " log Lion ", celle-ci ne peut être regardée comme probante et ne permet pas, ainsi que l'a relevé l'administration, de déterminer si les dépenses en cause ont été engagées pour des logements donnés en location ;
Considérant que M. X sollicite la prise en compte, au titre de ses revenus de l'année 2006, de dépenses de main-d'oeuvre d'un montant total de 29 473 euros et d'achat de matériaux d'un montant de 14 543 euros dont il soutient qu'elles se rapportent à des travaux d'entretien et de réparation au sens de l'article 31 du code général des impôts effectués sur un bâtiment dénommé " Le Mée " ; que toutefois les différentes pièces qu'il produit à l'appui de ses allégations ne permettent pas, même prises ensemble, de déterminer avec précision et certitude la nature et l'importance des travaux en cause, lesquelles ne peuvent être déduites, contrairement à ce que soutient le requérant, de la seule circonstance qu'aucune demande de permis de construire n'a été déposée ; que l'argumentation du contribuable sur la sincérité des attestations versées aux débats est, à cet égard, sans portée utile ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration a pour le motif ci-dessus évoqué, mentionné dans la lettre du vérificateur du 14 octobre 2008 valant réponse aux observations du contribuable, tiré de l'absence de justification de la nature des dépenses exposées, écarté lesdites dépenses pour la détermination du revenu de M. et Mme X au titre de l'année 2006 ;
En ce qui concerne l'application de la doctrine :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration (...) " ;
Considérant que M. X qui, ainsi qu'il a déjà été dit, n'établit pas la nature, l'importance et l'affectation des travaux dont il a déduit le coût de ses revenus des années 2004 à 2006, n'est pas fondé à invoquer à son profit les réponses faites le 23 août 1969 à M. Tomasini, député, le 17 septembre 1969 à M. Liot, député et le 28 décembre 1998 à M. Déprez, député qui prévoient que le contribuable peut justifier par tout moyen de la réalité des dépenses qu'il a exposées en vue de recruter un salarié pour réaliser des travaux d'entretien ou de réparation sur des immeubles loués ou d'acheter les matériaux nécessaires à la réalisation de ces travaux ; que le requérant n'est pas non plus fondé à se prévaloir de la documentation administrative de base référencée 5 D 2 07 du 23 mars 2007 qui est, en tout état de cause, postérieure aux impositions primitives ;
Sur les pénalités :
Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) " ;
Considérant qu'en relevant que le contribuable n'avait pas présenté les justifications des dépenses déduites sollicitées par le vérificateur, que les dépenses non justifiées représentaient 55 % des dépenses comptabilisées en 2004 et 98 % des mêmes dépenses en 2005 et 2006 et en invoquant le caractère grave et répété au cours des trois années en litige des manquements reprochés à M. X, l'administration établit l'intention de l'intéressé d'éluder l'impôt ; que, par suite, elle était en droit de lui infliger la pénalité de 40 % pour manquement délibéré ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. X demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. X est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Jean-Louis X et au ministre de l'économie et des finances.
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N° 11NT01726 2
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