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31/05/2012 | FRANCE | N°11NT01054

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 31 mai 2012, 11NT01054


Vu la requête, enregistrée le 8 avril 2011, présentée pour M. Dominique X, demeurant ..., par Me Bernery, avocat au barreau de Vannes ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement nos 07-4311 et 09-4653 du tribunal administratif de Rennes en date du 8 février 2011, en tant qu'il a, à la demande de la société Doux Frais SAS, annulé la décision de l'inspecteur du travail chargé de la 4ème section du Morbihan en date du 11 février 2009 portant refus de le licencier, ensemble la décision du ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité

et de la ville en date du 27 juillet 2009 rejetant le recours hiérarch...

Vu la requête, enregistrée le 8 avril 2011, présentée pour M. Dominique X, demeurant ..., par Me Bernery, avocat au barreau de Vannes ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement nos 07-4311 et 09-4653 du tribunal administratif de Rennes en date du 8 février 2011, en tant qu'il a, à la demande de la société Doux Frais SAS, annulé la décision de l'inspecteur du travail chargé de la 4ème section du Morbihan en date du 11 février 2009 portant refus de le licencier, ensemble la décision du ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville en date du 27 juillet 2009 rejetant le recours hiérarchique de la société et confirmant la décision de l'inspecteur du travail ;

2°) de rejeter la demande présentée sous le n° 0904653 par la société Doux Frais SAS devant le tribunal administratif de Rennes ;

3°) de mettre à la charge de la société Doux Frais SAS le versement d'une somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

............................................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 mai 2012 :

- le rapport de Mlle Wunderlich, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Specht, rapporteur public,

- et les observations de Me Frouin substituant Me Sauret, avocat de la société Doux Frais Locminé SAS ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 1233-3 du code du travail : " Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques. (...) " ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Dominique X, ouvrier d'entretien salarié de la société Doux Frais SAS dont le licenciement économique était envisagé, a été informé par courrier recommandé avec demande d'avis de réception en date du 20 novembre 2003 qu'il serait à compter du 1er janvier 2004 transféré de l'établissement de Vannes (Morbihan) " Usine ", qui serait fermé le 31 décembre 2003, à l'établissement de Locminé (Morbihan) dans " des conditions contractuelles inchangées ", ce changement de lieu de travail emportant seulement modification des conditions de travail ; que le salarié a expressément refusé ce reclassement par courrier en date du 6 février 2004 ; que l'employeur a sollicité le 31 août 2004 de l'inspecteur du travail l'autorisation de licencier M. X, titulaire de plusieurs mandats de représentant des salariés au titre de l'établissement de Vannes et conseiller prud'hommes, " pour cause réelle et sérieuse ", qui lui a été refusée par décision en date du 27 octobre 2004 contre laquelle il a formé un recours hiérarchique ; que, par décision en date du 20 avril 2005, le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale a, d'une part, annulé la décision de l'inspecteur du travail au motif que celui-ci avait " excédé ses pouvoirs " en " se substituant à l'employeur pour qualifier le motif de sa demande ", d'autre part, refusé l'autorisation sollicitée au motif que " la cause réelle et sérieuse n'[était] pas au nombre des motifs de licenciement entrant dans la compétence de l'administration " ; que la société Doux Frais SAS a présenté le 26 décembre 2006 une demande d'autorisation de licencier M. X pour motif économique à raison de la fermeture de l'établissement de Vannes qui a été rejetée par décision de l'inspecteur du travail de la 4ème section du Finistère en date du 12 février 2007 confirmée le 6 août 2007 sur recours hiérarchique ; qu'une nouvelle demande d'autorisation de licencier M. X pour motif économique, à raison cette fois de la fermeture de l'établissement de Locminé, présentée par la société Doux Frais SAS le 15 décembre 2008, a été rejetée le 11 février 2009 par l'inspecteur du travail chargé de la 4ème section du Morbihan ; que le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville a confirmé ce refus par décision en date du 27 juillet 2009 ; que le tribunal administratif de Rennes, saisi par la société Doux Frais SAS de deux demandes, enregistrées sous les n°s0704311 et 0904653, tendant respectivement à l'annulation des décisions portant refus d'autorisation de licencier M. X en date des 12 février 2007 et 6 août 2007 et 11 février 2009 et 27 juillet 2009, a fait droit à la seconde et annulé les dernières décisions par un jugement en date du 8 février 2011 dont M. X interjette appel dans cette mesure ;

Considérant qu'en cas de refus opposé par un salarié protégé à une proposition de reclassement emportant modification de ses conditions de travail ou de son contrat de travail, l'employeur ne peut directement imposer au salarié le changement envisagé, et doit, sauf à y renoncer, saisir l'inspecteur du travail d'une demande d'autorisation de licenciement pour motif économique ; que si cette autorisation est refusée, l'employeur ne peut légalement mettre en oeuvre ledit changement et est tenu de maintenir le salarié dans ses conditions de travail antérieures ; que la société Doux Frais SAS n'a, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, pas obtenu l'autorisation de licencier M. X postérieurement au refus opposé par l'intéressé à la poursuite de son contrat de travail dans l'établissement de Locminé, distant de moins de trente kilomètres de l'usine de Vannes, et ne pouvait dès lors y contraindre le salarié, nonobstant la fermeture de l'établissement de Vannes ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'elle a d'ailleurs continué à le rémunérer sans qu'il exerce aucune activité, se contentant de le rattacher " administrativement " à l'établissement de Locminé ; que ces circonstances faisaient obstacle à ce que la demande de licenciement pour motif économique présentée le 15 décembre 2008 par la société Doux Frais SAS à raison de la suppression de la totalité des emplois de l'établissement de Locminé, dont elle avait décidé la fermeture le 31 décembre 2008 au plus tard afin de sauvegarder la compétitivité du groupe, concernât M. X ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que c'est à tort que le tribunal administratif de Rennes s'est fondé sur ce que M. X " même s'il avait refusé de rejoindre son poste (...) se trouvait rattaché [à l']établissement [de Locminé] qui le rémunérait " et " pouvait, dès lors, faire l'objet du licenciement économique en cause qui concernait tous les emplois qui s'y trouvaient rattachés " pour annuler la décision de l'inspecteur du travail chargé de la 4ème section du Morbihan en date du 11 février 2009 portant refus de licencier M. X pour motif économique et la décision du ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville en date du 27 juillet 2009 confirmant ledit refus ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la société Doux Frais SAS devant le tribunal comme devant la cour ;

Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que l'inspecteur du travail, saisi d'une demande d'autorisation de licencier M. X, à la mutation duquel la société Doux Frais SAS était réputée avoir renoncé faute d'avoir obtenu l'autorisation de procéder à son licenciement après le refus opposé par l'intéressé à la proposition de reclassement emportant son affectation à l'établissement de Locminé à compter du 1er janvier 2004, pour motif économique à raison de la fermeture de cet établissement, par laquelle le salarié ne pouvait être concerné, était tenu de la rejeter ; que les moyens tirés par la société Doux Frais Locminé SAS de ce que les décisions contestées de l'inspecteur du travail et du ministre sont insuffisamment motivées, que le caractère réel et sérieux du motif économique allégué est établi et qu'elle a satisfait à ses obligations en matière de reclassement, sont, par suite, en tout état de cause, inopérants ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a annulé la décision de l'inspecteur du travail chargé de la 4ème section du Morbihan en date du 11 février 2009 portant refus d'autoriser son licenciement pour motif économique et la décision du ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville en date du 27 juillet 2009 confirmant ledit refus ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. X, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la société Doux Frais Locminé SAS demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la société Doux Frais Locminé SAS une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. X et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Rennes en date du 8 février 2011 est annulé en tant qu'il annulé la décision de l'inspecteur du travail chargé de la 4ème section du Morbihan en date du 11 février 2009 portant refus de licencier M. X, ensemble la décision du ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville en date du 27 juillet 2009 rejetant le recours hiérarchique de la société Doux Frais SAS et confirmant la décision de l'inspecteur du travail.

Article 2 : La demande présentée sous le n° 0904653 par la société Doux Frais SAS devant le tribunal administratif de Rennes est rejetée.

Article 3 : La société Doux Frais Locminé SAS versera à M. X une somme de 2 000 euros (deux mille euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de la société Doux Frais Locminé SAS tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Dominique X et à la société Doux Frais Locminé SAS. Une copie sera transmise au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social et à Mes Bernery et Sauret.

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N° 11NT010542

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 11NT01054
Date de la décision : 31/05/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-04-03 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés. Conditions de fond de l'autorisation ou du refus d'autorisation. Licenciement pour motif économique.


Composition du Tribunal
Président : M. CHRISTIEN
Rapporteur ?: Mme Anne-Catherine WUNDERLICH
Rapporteur public ?: Mme SPECHT
Avocat(s) : BERNERY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2012-05-31;11nt01054 ?
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