Vu la requête, enregistrée le 30 novembre 2010, présentée pour M. Samuel X, demeurant chez Mme Frieda Y, ..., par Me Ngeleka, avocat au barreau de Paris ; M. X demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0903148 du 30 septembre 2010 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le préfet du Loiret a refusé de lui délivrer un titre de séjour ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision implicite par laquelle le préfet du Loiret a refusé de lui délivrer un titre de séjour ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 janvier 2012 :
- le rapport de Mme Grenier, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Villain, rapporteur public ;
Considérant que M. X, ressortissant camerounais, né le 16 juin 1990, est entré en France régulièrement, le 27 décembre 2004, au vu d'un visa Schengen de court séjour ; qu'un document de circulation pour enfant étranger lui a été délivré le 23 mars 2006, dont la validité expirait le 15 juin 2008 ; qu'il a sollicité une carte de séjour portant la mention vie privée et familiale en application du 1° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, par un courrier du 22 mai 2009, reçu le 25 mai suivant par le préfet du Loiret ; qu'en application de l'article R. 311-12 du même code, une décision implicite de rejet est née du silence gardé par le préfet du Loiret pendant plus de quatre mois sur cette demande ; que M. X relève appel du jugement du 30 septembre 2010 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tenant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le préfet a refusé de lui délivrer un titre de séjour ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant d'une part, que le jugement attaqué, après avoir rappelé les textes applicables, décrit la situation familiale de M. X et les motifs pour lesquels la décision implicite rejetant sa demande de titre de séjour ne peut être regardée comme portant une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale en application des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'ainsi, il est suffisamment motivé ;
Considérant d'autre part, que les moyens tirés de la méconnaissance des articles 3 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été soulevés pour la première fois dans un mémoire enregistré le 13 septembre 2010 par le tribunal administratif d'Orléans soit postérieurement à la clôture de l'instruction intervenue en application de l'article R. 613-2 du code de justice administrative ; qu'en conséquence, le tribunal n'était pas tenu de répondre à ces moyens; qu'il suit de là, que M. X n'est pas fondé à soutenir que le tribunal aurait entaché son jugement d'omission à statuer ou d'insuffisance de motivation ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par le préfet du Loiret :
Considérant, en premier lieu, que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ; qu'aux termes du 1° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : / 1° A l'étranger dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou entrant dans les prévisions de l'article L. 311-3, dont l'un des parents au moins est titulaire de la carte de séjour temporaire ou de la carte de résident, ainsi qu'à l'étranger entré en France régulièrement dont le conjoint est titulaire de l'une ou de l'autre de ces cartes, s'ils ont été autorisés à séjourner en France au titre du regroupement familial dans les conditions prévues au livre IV ;
Considérant d'une part, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. X, entré en France sous couvert d'un visa Schengen de court séjour, aurait été autorisé à y séjourner au titre du regroupement familial ; qu'il ne saurait, par suite, utilement invoquer la méconnaissance des dispositions du 1° de l'article L. 313-11 précité ;
Considérant, d'autre part, qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, entré en France à l'âge de quatorze ans, y réside avec sa mère, titulaire d'une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale, son frère et sa soeur en situation régulière et sa demi-soeur, qui a la nationalité française ; que s'il soutient qu'à la suite du divorce de ses parents, au demeurant postérieur à la décision litigieuse, sa mère a obtenu sa garde et qu'il n'a plus de contacts avec son père, qui a cessé de subvenir à ses besoins et à ceux de ses frères et soeurs depuis 2006, il n'établit ni ne plus être en relation avec son père qui réside au Cameroun ni que ce dernier ne serait pas en mesure de l'aider ; que M. X, majeur célibataire et sans charge de famille, n'est pas dépourvu d'attaches familiales au Cameroun ; que s'il soutient qu'il réside de manière habituelle et continue en France depuis qu'il y est entré en 2004 et qu'il y est parfaitement intégré, il ressort des pièces du dossier qu'après avoir suivi une scolarité au collège et en lycée professionnel en France de 2005 à 2007, il n'a pas obtenu de diplôme et ne justifie pas d'une insertion professionnelle depuis la fin de sa scolarisation en 2007, autre qu'un suivi régulier par la mission locale du Montargis ; que s'il produit une attestation de l'école de la 2ème chance de l'Essonne à Courtaboeuf, selon laquelle sa candidature est retenue pour une formation, celle-ci est postérieure à la décision litigieuse ; que, dans ces conditions, la décision contestée n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, par suite, en refusant de délivrer un titre de séjour à M. X, le préfet du Loiret, qui ne s'est pas fondé uniquement sur les justificatifs relatifs à la scolarisation de l'intéressé, sans procéder à un examen de sa situation personnelle et familiale, n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;
Considérant, en deuxième lieu, que le requérant n'est pas placé dans la même situation juridique que sa soeur, qui était mineure à la date d'édiction de la décision contestée et que sa demi-soeur qui a la nationalité française ; qu'ainsi, le moyen tiré de la rupture d'égalité avec ces dernières doit être écarté ;
Considérant en troisième lieu, que l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ; que M. X ne saurait sérieusement soutenir que l'obligation de produire des justificatifs de scolarité en vue de l'obtention d'un titre de séjour en France, qui serait impossible pour les étrangers de plus de dix-huit ans qui n'ont pas un titre de séjour valide, serait constitutive de peines ou de traitements inhumains ou dégradants au sens des stipulations précitées de l'article 3 ;
Considérant enfin, que l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente Convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation. ; que cet article proscrit toute discrimination dans la jouissance des droits et libertés reconnus par la convention ; que M. X, qui se borne à se prévaloir de la durée de son séjour en France, de son insertion professionnelle et d'une rupture d'égalité au sein de sa fratrie, faute d'avoir obtenu un titre de séjour, alors que sa soeur est en situation régulière en France et que sa demi-soeur a la nationalité française, ne précise pas le droit ou la liberté, reconnus par la convention, qui seraient méconnus par la discrimination ainsi invoquée ; que par suite, il ne saurait, en tout état de cause, utilement se prévaloir de ce que la décision litigieuse méconnaîtrait l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le préfet du Loiret a refusé de lui délivrer un carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale.
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées sur le fondement de ces dispositions par Me Ngeleka, avocat de M. X ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par le préfet du Loiret au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. X est rejetée.
Article 2 : Les conclusions du préfet du Loiret tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Samuel X et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.
Copie en sera adressée pour information au préfet du Loiret.
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N° 10NT02473 4
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