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15/12/2011 | FRANCE | N°10NT01659

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 15 décembre 2011, 10NT01659


Vu la requête, enregistrée le 27 juillet 2010, présentée pour M. et Mme Gazi X, demeurant ..., par Me Delgoulet, avocat au barreau de Paris ; M. et Mme X demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0603857 en date du 25 mai 2010 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté le surplus de leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2002, 2003 et 2004 ainsi que des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge

demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titr...

Vu la requête, enregistrée le 27 juillet 2010, présentée pour M. et Mme Gazi X, demeurant ..., par Me Delgoulet, avocat au barreau de Paris ; M. et Mme X demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0603857 en date du 25 mai 2010 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté le surplus de leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2002, 2003 et 2004 ainsi que des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 novembre 2011 :

- le rapport de Mme Coiffet, premier conseiller ;

- les conclusions de Mme Specht, rapporteur public ;

- et les observations de Me Martin, substituant Me Delgoulet, avocat de M. et Mme X ;

Considérant qu'à l'issue de la vérification de la comptabilité de la SARL X, qui avait pour activité principale la construction et l'entretien de courts de tennis et de sols sportifs, l'administration a, par proposition de rectification du 4 novembre 2005, notifié aux époux X des redressements procédant notamment de la taxation entre leurs mains dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers de recettes dissimulées de la société que le vérificateur a regardées comme constituant, sur le fondement du 1° et du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, des revenus distribués à M. X, associé à 50 % et gérant, au titre de la période vérifiée, de la société X ; que M et Mme X interjettent appel du jugement en date du 25 mai 2010 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté le surplus de leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2002, 2003 et 2004 ;

Sur l'étendue du litige :

Considérant que, par décision du 6 décembre 2010, postérieure à l'introduction de la requête, le directeur des services fiscaux de Loir-et-Cher a prononcé le dégrèvement, en droits et pénalités, à concurrence des sommes respectives de 8 240 euros et de 1 905 euros, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. et Mme X ont été assujettis au titre des années 2003 et 2004 ; que les conclusions de la requête de M. et Mme X sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;

Sur les conclusions à fin de décharge :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

Considérant qu'aux termes de l'article 109 du code général des impôts : 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices (...) ; qu'aux termes de l'article 110 du même code : Pour l'application du 1° du 1 de l'article 109 les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés. Toutefois, ces bénéfices sont augmentés de ceux qui sont légalement exonérés dudit impôt (...) ;

Considérant que M. et Mme X n'ont pas répondu à la notification qui leur a été faite de l'intention de l'administration d'intégrer le bénéfice reconstitué de la société X aux bases de l'impôt sur le revenu et des contributions sociales dont ils étaient redevables au titre des années 2002, 2003 et 2004 ; qu'il leur appartient, en conséquence, d'apporter la preuve tant de l'absence d'appréhension par M. X des sommes réputées distribuées par la société X que de l'absence de réalité ou du montant exact de la distribution ;

Considérant que M. et Mme X, qui ne contestent pas le caractère irrégulier et lacunaire de la comptabilité de la SARL X, ni la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires de la société, font cependant valoir que le vérificateur, qui n'a pas pris en compte pour l'évaluation du bénéfice de la société un nombre important de dépenses, non enregistrées dans la comptabilité, réglées par chèques ou en espèces, a sous-évalué les charges d'exploitation de l'entreprise au cours de la période vérifiée ; que, toutefois, il résulte de l'instruction que le vérificateur a retenu les charges de personnel justifiées par la société ; qu'à ce titre, c'est à bon droit qu'il a, après avoir relevé le caractère fictif de l'emploi de deux salariées recrutées par la SARL X pour assurer la propreté du siège social, la tenue des pièces avant envoi au comptable et la mise à jour des agendas professionnels, alors que l'entreprise ne disposait pas de locaux, de structure administrative ou de secrétariat affectés à son activité, refusé d'admettre en déduction des résultats de la société les salaires qu'elle avait versés aux intéressées au titre des années 2002 et 2003 pour les montants globaux respectifs de 1 287,29 euros et de 1 000 euros ; que s'ils l'allèguent, les requérants n'établissent pas que la société a procédé à des règlements de taxe sur la valeur ajoutée dont il n'aurait pas été tenu compte ; que ne peuvent également être admis au titre des charges de personnel des salaires versés à un employé aux mois d'octobre 2003 et de novembre 2003 dont il est constant qu'il n'a travaillé dans l'entreprise que jusqu'au 10 septembre 2003 ; que le versement, la même année, d'honoraires à Me Gomondie d'un montant de 1 524 euros pour lequel aucune déclaration d'honoraires ou de vacation n'a été établie n'est pas davantage justifié ; que les dépenses afférentes aux contrats de leasing conclus par la société X avec la société BNP Paribas ont déjà été admises par l'administration en première instance ; qu'enfin le ministre a accepté de prendre en compte les règlements effectués au titre de l'année 2003 au profit de la société Feu Vert pour un montant de 581,53 euros, de la SARL MVD pour un montant de 1 000 euros, de la SARL EBM pour un montant de 1 201,98 euros, de l'URSSAF pour un montant de 3 381 euros, des Assedic pour un montant de 850 euros et de la caisse du Bâtiment pour un montant de 2 574,71 euros et au titre de l'année 2004, de la société Feu Vert pour un montant de 999,17 euros et de la société GAN pour un montant de 1 107,87 euros ; que, dans ces conditions, les requérants, qui ne justifient pas de l'existence d'autres charges déductibles, ne sont pas fondés à soutenir que les charges d'exploitation de la société X ont été sous-évaluées ;

Considérant que, contrairement à ce que soutiennent M. et Mme X, le principe d'indépendance des procédures de redressement menées à l'encontre d'une société de capitaux, d'une part, et de ses associés, d'autre part, ne s'oppose pas à ce que l'administration tire les conséquences, pour la détermination des revenus des associés, de la réintégration à laquelle elle est en droit de procéder aux résultats imposables de la société des recettes que celle-ci n'a pas déclarées ;

Considérant que les recettes non déclarées réintégrées aux résultats d'une entreprise sont présumées avoir été facturées toutes taxes comprises ; qu'il résulte de l'instruction que pour déterminer le montant du bénéfice dissimulé par la SARL X qu'elle a regardé comme appréhendé par M. X, l'administration a procédé à la réintégration aux résultats des exercices 2003 à 2005 de la société de la somme correspondant au montant hors taxe des recettes omises et reconstituées auxquelles elle a ajouté la somme correspondant au montant de la taxe sur la valeur ajoutée due sur lesdites recettes calculées hors taxe ; que cette décomposition n'a pas eu pour effet de remettre en cause le caractère de revenu distribué de la totalité des recettes ; que, par suite, M. et Mme X ne sont pas fondés à soutenir que la société X n'ayant produit aucun bilan, ni déterminé aucun bénéfice et n'ayant déclaré aucun résultat, l'administration ne pouvait déterminer si un profit de taxe sur la valeur ajoutée avait été comptabilisé par la société ; que, dès lors, c'est à bon droit que l'administration a inclus, dans la base d'imposition de M. et Mme X, sur le fondement des dispositions du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts ainsi qu'il résulte des termes de la proposition de rectification adressée aux contribuables, la somme correspondant au montant de la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux recettes omises par la société ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X, qui détenait 50 % du capital de la SARL X et en était le gérant, disposait de la signature sur les comptes bancaires de la société et a pu, à ce titre, y opérer de nombreux prélèvements représentant plus de 90 % du chiffre d'affaires encaissé par la société ; que, par ailleurs, il n'apparaît pas et il n'est pas allégué que les autres associés ont participé à la direction effective de l'entreprise ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration a considéré que M. X, qui disposait librement des fonds sociaux, était le seul maître de l'affaire et a, ainsi, appréhendé les bénéfices de la SARL X à la clôture des exercices 2002, 2003 et 2004, les sommes mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts étant présumées distribuées à la date de clôture de l'exercice au terme duquel leur existence a été constatée ; que, toutefois, les requérants soutiennent que de nombreux chèques émis par la société X et signés par son gérant n'ont pas été encaissés par ce dernier et qu'ainsi il ne peut être regardé comme ayant eu la disposition des règlements dont s'agit ; qu'ils produisent à l'appui de leurs allégations des copies de chèques accompagnées pour certaines de documents bancaires établissant que ces chèques ont d'une part, été débités du compte de SARL X et d'autre part, encaissés par d'autres personnes que M. X ; qu'ainsi, les sommes de 900 euros et 1 500 euros versés à M. Gok Y par chèques des 5 avril 2003 et 8 mai 2003, de 880 euros versés aux Urssaf par chèque du 14 avril 2003, de 1 408 euros versés à M. Dalig Z par chèque du 2 mai 2003, de 4 500 euros et de 1 000 euros versés à M. Ozdémir A par chèques du 26 août 2003 et du 27 septembre 2003, de 1 000 euros versés à Mme Meneke B par chèque du 23 septembre 2003, de 1 500 euros versés à M. C par chèque du 27 septembre 2003, de 1 200 euros versés à M. E par chèque du 4 octobre 2003, de 1 600 euros, quatre fois 1 000 euros et 1 200 euros versés à M. Sert D par chèques des 10 novembre 2003, 27 octobre 2003, 16 juin 2003 et 12 septembre 2003, de 3 000 euros versés à Mme Fadime B par chèque du 21 novembre 2003, de 1 539 euros versés à la Caisse des congés payés par chèque du 22 février 2004, de 800 euros versés à Mme Meneke B par chèque du 23 mars 2004, de 1 875 euros versés au centre des impôts de Blois sud par chèque du 2 juillet 2004, de 1 290 euros versés aux Urssaf par chèque du 4 juillet 2004, de 1 221 euros et de 1 143 euros versés à la société PRO BTP par chèques des 4 juillet 2004 et 11 octobre 2004, de 2 224 euros versés aux Urssaf par chèque du 11 octobre 2004, de 1 088 euros et de 1 651 euros versés au Trésor public par chèques des 11 octobre 2004 et 20 octobre 2004, qui n'ont pas été admises en charges par l'administration, ne peuvent être regardées comme un bénéfice distribué à M. X et doivent, par suite, être exclues des bases d'imposition de M. et Mme X soit les sommes globales de 23 748 euros au titre de l'année 2003 et de 12 831 euros au titre de l'année 2004 ;

En ce qui concerne l'application de la doctrine administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. Sont également opposables à l'administration, dans les mêmes conditions, les instructions ou circulaires publiées relatives au recouvrement de l'impôt et aux pénalités fiscales ;

Considérant que M. et Mme X ne sont pas fondés à invoquer d'une part, les dispositions de la documentation administrative référencée A J-1121 n°s 15, 16 et 17, du 1er novembre 1995 relatives aux effets de la présomption légale de distribution édictée au 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts et qui, se bornant à analyser une décision de jurisprudence, ne comportent pas d'interprétation de la loi fiscale au sens de l'article L. 80 A précité du livre des procédures fiscales et, d'autre part, les dispositions de la documentation de base 13 L-1326 n°s 42 et 43 du 1er juillet 2002 qui n'ajoutent pas à la loi ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la demande de substitution de base légale présentée par le ministre, que M. et Mme X sont seulement fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté la totalité du surplus de leur demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu de faire droit dans les circonstances de l'espèce aux conclusions susmentionnées ;

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer, à concurrence des sommes respectives de 8 240 euros (huit mille deux cent quarante euros) et de 1 905 euros (mille neuf cent cinq euros), sur les conclusions de la requête de M. et Mme X tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2003 et 2004.

Article 2 : Les bases d'imposition à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales de M. et Mme X sont réduites au titre de l'année 2003 de 23 748 euros et au titre de l'année 2004 de 12 831 euros.

Article 3 : M. et Mme X sont déchargés des droits et pénalités correspondant à la réduction des bases d'imposition définie à l'article 2 ci-dessus.

Article 4 : Le jugement susvisé du tribunal administratif d'Orléans du 25 mai 2010 est réformé en ce qu'il est contraire au présent arrêt.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme X est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Gazi X et au ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 10NT01659
Date de la décision : 15/12/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme MASSIAS
Rapporteur ?: Mme Valérie COIFFET
Rapporteur public ?: Mme SPECHT
Avocat(s) : DELGOULET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2011-12-15;10nt01659 ?
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