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01/12/2011 | FRANCE | N°10NT01958

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 01 décembre 2011, 10NT01958


Vu la requête, enregistrée le 31 août 2010, présentée pour M. Jean X, demeurant ..., par la Selarl Samson-Iosca, société d'avocats au barreau de Paris ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 08-03671 en date du 3 août 2010 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions de retrait de points consécutives aux infractions commises les 10 mai 2003, 29 mars 2006, 13 mars 2007, 16 mars 2007, 10 août 2007, 3 octobre 2007, 15 décembre 2007 et 23 août 2008, ensemble de la décision du 29 septembre 2008 con

statant l'invalidité du permis de conduire de l'intéressé et lui ordonnan...

Vu la requête, enregistrée le 31 août 2010, présentée pour M. Jean X, demeurant ..., par la Selarl Samson-Iosca, société d'avocats au barreau de Paris ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 08-03671 en date du 3 août 2010 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions de retrait de points consécutives aux infractions commises les 10 mai 2003, 29 mars 2006, 13 mars 2007, 16 mars 2007, 10 août 2007, 3 octobre 2007, 15 décembre 2007 et 23 août 2008, ensemble de la décision du 29 septembre 2008 constatant l'invalidité du permis de conduire de l'intéressé et lui ordonnant la restitution de celui-ci au préfet du département de son lieu de résidence ;

2°) d'annuler lesdites décisions ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la route ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 novembre 2011 :

- le rapport de M. Christien, président-assesseur ;

- et les conclusions de Mme Specht, rapporteur public ;

Sur les conclusions de M. X tendant à ce que soit écarté des débats le relevé d'information intégral produit par le ministre :

Considérant, d'une part, que si le ministre de l'intérieur ne figure pas au nombre des autorités et personnes énumérées à l'article L. 225-4 du code de la route qui sont autorisées à accéder directement aux informations enregistrées au fichier national du permis de conduire, il ressort des termes mêmes de l'article L. 225-1 dudit code que lesdites informations, qui sont reprises par le relevé d'information intégral, sont enregistrées sous son autorité et sous son contrôle ; que l'exercice de cette mission implique nécessairement que le ministre puisse légalement accéder à ces informations ; que, d'autre part, ni les dispositions des articles L. 225-4 et L. 225-5 du code de la route invoquées par le requérant, ni aucune autre disposition, ne font obstacle à ce que le ministre de l'intérieur communique le relevé d'information intégral au juge, soit de sa propre initiative, soit à la demande de celui-ci, afin d'établir la réalité des infractions ; que, par suite, M. X n'est pas fondé à soutenir que le relevé d'information intégral produit par l'administration constitue une communication illicite des informations nominatives le concernant et doit être écarté des débats ;

Sur les conclusions à fin d'annulation des décisions de retrait de points consécutives aux infractions commises les 10 mai 2003, 16 mars 2007 et 23 août 2008 :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 223-3 du code de la route : (...) Lorsqu'il est fait application de la procédure de l'amende forfaitaire ou de la procédure de la composition pénale, l'auteur de l'infraction est informé que le paiement de l'amende ou l'exécution de la composition pénale entraîne le retrait du nombre de points correspondant à l'infraction reprochée, dont la qualification est dûment portée à sa connaissance ; il est également informé de l'existence d'un traitement automatisé de ces points et de la possibilité pour lui d'exercer le droit d'accès. Le retrait de points est porté à la connaissance de l'intéressé par lettre simple quand il est effectif ; que l'article R. 223-3 du même code précise que : I - Lors de la constatation d'une infraction, l'auteur de celle-ci est informé qu'il encourt un retrait de points si la réalité de l'infraction est établie dans les conditions définies à l'article L. 223-1. II - Il est informé également de l'existence d'un traitement automatisé des retraits et reconstitutions de points et de la possibilité pour lui d'accéder aux informations le concernant. Ces mentions figurent sur le document qui lui est remis ou adressé par le service verbalisateur. (...) ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions que l'administration ne peut légalement prendre une décision retirant des points affectés à un permis de conduire à la suite d'une infraction dont la réalité a été établie, que si l'auteur de l'infraction s'est vu préalablement délivrer par elle un document contenant les informations prévues aux articles L. 223-3 et R. 223-3 précités du code de la route, lesquelles constituent une garantie essentielle permettant à l'intéressé de contester la réalité de l'infraction et d'en mesurer les conséquences sur la validité de son permis ;

Considérant que le ministre de l'intérieur a retiré trois points et deux fois un point du capital des points affectés au permis de conduire de M. X à la suite des infractions commises par celui-ci les 10 mai 2003, 16 mars 2007 et 23 août 2008 et constatées avec interception du véhicule ; qu'en l'absence de production du procès-verbal établi à l'occasion de chacune des infractions en cause ou de la souche de la quittance de paiement de l'amende, le ministre de l'intérieur ne peut être regardé comme ayant satisfait à son obligation d'information préalable ; que, dès lors, les décisions retirant trois points et deux fois un point du capital du permis de conduire de M. X consécutives aux infractions constatées les 10 mai 2003, 16 mars 2007 et 23 août 2008 sont intervenues au terme d'une procédure irrégulière et sont, de ce fait, entachées d'illégalité ; que, par suite, ces trois décisions doivent être annulées, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens invoqués à leur encontre ;

Sur les conclusions à fin d'annulation des autres décisions de retrait de points :

Considérant, qu'aux termes de l'article 1er de la loi susvisée du 11 juillet 1979 : Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : - restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ; - infligent une sanction (...) ; qu'aux termes de l'article 3 de la même loi : La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ; qu'aux termes du troisième alinéa de l'article L. 223-3 du code de la route : Le retrait de points est porté à la connaissance de l'intéressé par lettre simple quand il est effectif ;

Considérant, qu'aux termes de l'article L. 223-1 du code de la route : Le permis de conduire est affecté d'un nombre de points. Celui-ci est réduit de plein droit si le titulaire du permis a commis une infraction pour laquelle cette réduction est prévue. / (...) / La réalité d'une infraction entraînant retrait de points est établie par le paiement d'une amende forfaitaire ou l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée, l'exécution d'une composition pénale ou par une condamnation définitive ; qu'aux termes de l'article L. 223-2 du même code : I. - Pour les délits, le retrait de points est égal à la moitié du nombre maximal de points. II. - Pour les contraventions, le retrait de points est, au plus, égal à la moitié du nombre maximal de points (...) ;

Considérant qu'il résulte des articles 529, 529-1, 529-2 et du premier alinéa de l'article 530 du code de procédure pénale que, pour les infractions des quatre premières classes dont la liste est fixée par décret en Conseil d'Etat, le contrevenant peut, dans les quarante-cinq jours de la constatation de l'infraction ou de l'envoi de l'avis de contravention, soit acquitter une amende forfaitaire et éteindre ainsi l'action publique, soit présenter une requête en exonération ; que s'il s'abstient tant de payer l'amende forfaitaire que de présenter une requête, l'amende forfaitaire est majorée de plein droit et recouvrée au profit du Trésor public en vertu d'un titre rendu exécutoire par le ministère public, lequel est exécuté suivant les règles prévues pour l'exécution des jugements de police ; qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 530 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : Dans les trente jours de l'envoi de l'avis invitant le contrevenant à payer l'amende forfaitaire majorée, l'intéressé peut former auprès du ministère public une réclamation motivée qui a pour effet d'annuler le titre exécutoire en ce qui concerne l'amende contestée. Cette réclamation reste recevable tant que la peine n'est pas prescrite, s'il ne résulte pas d'un acte d'exécution ou de tout autre moyen de preuve que l'intéressé a eu connaissance de l'amende forfaitaire majorée. S'il s'agit d'une contravention au code de la route, la réclamation n'est toutefois plus recevable à l'issue d'un délai de trois mois lorsque l'avis d'amende forfaitaire majorée est envoyé par lettre recommandée à l'adresse figurant sur le certificat d'immatriculation du véhicule, sauf si le contrevenant justifie qu'il a, avant l'expiration de ce délai, déclaré son changement d'adresse au service d'immatriculation des véhicules ;

Considérant que l'article L. 225-1 du code de la route fixe la liste des informations qui, sous l'autorité et le contrôle du ministre de l'intérieur, sont enregistrées au sein du système national des permis de conduire ; que sont notamment mentionnés au 5° de cet article les procès-verbaux des infractions entraînant retrait de points et ayant donné lieu au paiement d'une amende forfaitaire en vertu de l'article 529 du code de procédure pénale ou à l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée prévu à l'article 529-2 du code de procédure pénale ; qu'en vertu de l'arrêté du 29 juin 1992 fixant les supports techniques de la communication par le ministère public au ministère de l'intérieur des informations prévues à l'article L. 30 (4°, 5°, 6° et 7°) du code de la route, les informations mentionnées au 6° de l'article L. 30, devenu le 5° de l'article L. 225-1 du code de la route, sont communiquées par l'officier du ministère public par support ou liaison informatique ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ces dispositions que le mode d'enregistrement et de contrôle des informations relatives aux infractions au code de la route conduit à considérer que la réalité de l'infraction est établie dans les conditions prévues à l'article L. 223-1 du code de la route dès lors qu'est inscrite, dans le système national des permis de conduire, la mention du paiement de l'amende forfaitaire ou de l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée, sauf si l'intéressé justifie avoir présenté une requête en exonération dans les quarante-cinq jours de la constatation de l'infraction ou de l'envoi de l'avis de contravention ou formé, dans le délai prévu à l'article 530 du code de procédure pénale, une réclamation ayant entraîné l'annulation du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée ;

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte du relevé d'information intégral, dont les mentions sont extraites du système national du permis de conduire, que M. X a réglé les amendes forfaitaires dont il a été redevable à la suite des infractions commises par lui les 29 mars 2006, 10 août 2007, 3 octobre 2007 et 15 décembre 2007 et qu'un titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée devenu définitif a été émis à raison de l'infraction du 13 mars 2007 ; que le requérant, qui se borne à soutenir qu'il ne s'est pas acquitté de ces amendes forfaitaires et invoque l'absence au dossier du titre exécutoire émis à son encontre, sans apporter aucun élément de nature à mettre en doute l'exactitude des mentions du relevé d'information intégral ni même alléguer qu'il aurait présenté une requête en exonération, ne conteste pas utilement la réalité desdites infractions qui doit dès lors être regardée comme établie ;

Considérant, en second lieu, qu'il résulte des dispositions précitées de l'article L. 223-1 du code de la route que, lorsqu'il procède au retrait de points prévu par l'article R. 223-3 précité du code de la route, le ministre de l'intérieur se trouve en situation de compétence liée ; que, dès lors, M. X ne peut utilement invoquer à l'encontre de la décision 48 SI contestée le moyen tiré de son absence de motivation ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision du 29 septembre 2008 constatant la perte de validité du permis de conduire de M. X :

Considérant que les décisions portant retrait de trois points et deux fois un point intervenues à la suite des infractions constatées les 10 mai 2003, 16 mars 2007 et 23 août 2008 étant entachées d'illégalité ainsi qu'il a été dit ci-dessus, le capital affectant le permis de conduire de M. X n'était pas nul lorsque le ministre de l'intérieur, par sa décision contestée du 29 septembre 2008, a informé l'intéressé de la perte de validité de son titre de conduite et lui a enjoint de le restituer au préfet de son département de résidence ; qu'il y a donc lieu d'annuler cette décision ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions de retrait de points consécutives aux infractions commises les 10 mai 2003, 16 mars 2007 et 23 août 2008, ensemble de la décision du 29 septembre 2008 constatant l'invalidité de son permis de conduire et lui ordonnant la restitution de celui-ci au préfet du département de son lieu de résidence ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement susvisé du tribunal administratif d'Orléans est annulé en tant qu'il a rejeté la demande de M. X tendant à l'annulation des décisions de retrait de points consécutives aux infractions commises les 10 mai 2003, 16 mars 2007 et 23 août 2008, ensemble de la décision du ministre de l'intérieur du 29 septembre 2008 constatant l'invalidité de son permis de conduire et lui ordonnant la restitution de celui-ci au préfet du département de son lieu de résidence.

Article 2 : Les décisions de retrait de points consécutives aux infractions commises les 10 mai 2003, 16 mars 2007 et 23 août 2008, ensemble la décision du ministre de l'intérieur du 29 septembre 2008 constatant l'invalidité du permis de conduire de M. X et lui ordonnant la restitution de celui-ci au préfet du département de son lieu de résidence sont annulées.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Jean X et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

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N° 10NT01958


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 10NT01958
Date de la décision : 01/12/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MASSIAS
Rapporteur ?: M. Robert CHRISTIEN
Rapporteur public ?: Mme SPECHT
Avocat(s) : SAMSON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2011-12-01;10nt01958 ?
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