Vu la requête, enregistrée le 27 août 2009, présentée pour M. François X et Mme Marie-Noëlle Y, demeurant ..., par Me Blandel-Bejermi, avocat au barreau de Saint-Nazaire ; M. X et Mme Y demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement nos 06-2459 et 06-2459 en date du 7 juillet 2009 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande tendant à la condamnation de l'Etat à leur verser la somme de 5 500 euros, outre la somme de 100 euros par jour jusqu'au règlement définitif, ainsi que la somme de 79 807,32 euros avec intérêts au taux légal à compter du 13 février 2006 et capitalisation des intérêts, en réparation des préjudices personnel et professionnel résultant de l'intervention de la force publique au cours de leur expulsion de leur domicile, 5, avenue de Bonne Source à Guérande, le 24 octobre 2005, en exécution d'une décision de justice ;
2°) de condamner l'Etat à leur verser lesdites sommes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Blandel-Bejermi de la somme de 2 000 euros au titre de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, moyennant la renonciation de leur avocat à percevoir la contribution versée par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la construction et de l'habitation ;
Vu la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991, modifiée, portant réforme des procédures civiles d'exécution ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 novembre 2010 :
- le rapport de Mme Michel, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Villain, rapporteur public ;
- et les observations de Me Blandel-Bejermi, avocat de M. X et de Mme Y ;
Considérant que, par un jugement en date du 7 juillet 2009, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande de M. X et de Mme Y tendant à la condamnation de l'Etat à leur verser la somme de 5 500 euros, outre la somme de 100 euros par jour jusqu'au règlement définitif, ainsi que la somme de 79 807,32 euros avec intérêts au taux légal à compter du 13 février 2006 et capitalisation des intérêts, en réparation des préjudices personnel et professionnel résultant de l'intervention de la force publique au cours de leur expulsion de leur domicile, 5, avenue de Bonne Source à Guérande, le 24 octobre 2005, en exécution d'une décision de justice ; que M. X et Mme Y relèvent appel de ce jugement et demandent à la cour de condamner l'Etat à leur verser lesdites sommes ;
Considérant qu'aux termes de l'article 16 de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 : L'Etat est tenu de prêter son concours à l'exécution des jugements et des autres titres exécutoires. Le refus de l'Etat de prêter son concours ouvre droit à réparation ;
Considérant que, par un jugement du 19 septembre 2001, le tribunal d'instance de Saint-Nazaire a constaté, du fait de loyers impayés, la résiliation par l'effet de la clause résolutoire du contrat de bail conclu entre M. X et M. Z, propriétaire du logement que le requérant occupait 5, avenue de la Bonne Source à Guérande avec Mme Y, sa compagne, et leurs deux enfants mineurs, et a autorisé la mise en oeuvre d'une procédure d'expulsion ; que requis par l'huissier de justice après un délai de plus de 3 ans consenti par le propriétaire et l'échec d'une tentative d'expulsion, le sous-préfet de Saint-Nazaire a autorisé le 22 septembre 2005 le concours de la force publique pour l'exécution de cette décision de justice ; qu'il a été procédé à cette expulsion le 24 septembre 2005 avec le concours de la force publique ;
Considérant que toute décision de justice ayant force exécutoire peut donner lieu à une exécution forcée, la force publique devant, si elle est requise, prêter main-forte à cette exécution ; que si, dans des circonstances exceptionnelles tenant à la sauvegarde de l'ordre public, et notamment afin d'éviter toute situation contraire à la dignité humaine, l'autorité administrative peut, sans porter atteinte au principe de la séparation des pouvoirs, ne pas prêter son concours à l'exécution d'une décision juridictionnelle, elle n'est pas, en dehors de cette hypothèse, légalement autorisée à prendre en compte des considérations d'ordre humanitaire ou social, lesquelles, en application des dispositions des articles L. 613-1 et L. 613-2 du code de la construction et de l'habitation, relèvent de l'appréciation de l'autorité judiciaire lorsqu'elle décide d'autoriser l'expulsion ; que ne sauraient donc utilement être invoquées ni la méconnaissance du droit au logement, ni celle des stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant que la circonstance que Me Guilleminot, l'huissier instrumentaire, a été en charge de la gestion de l'immeuble occupé par les requérants est sans incidence sur la régularité du concours de l'Etat ;
Considérant que l'autorité publique ne procédant pas à l'expulsion pour son propre compte mais se bornant à assister l'huissier chargé d'exécuter le jugement du 19 septembre 2001, les requérants ne peuvent utilement faire valoir que leurs biens ont été entreposés sans leur accord dans des boxes, à leurs frais ;
Considérant que si, à la date à laquelle le concours de la force publique a été accordé, la famille comptait deux enfants âgés de 9 ans et demi et 7 ans, et si aucune solution de relogement durable n'avait été trouvée, l'expulsion n'est intervenue que quatre ans après que le jugement a été rendu ; qu'il résulte de l'instruction que, bien que les services sociaux, en lien avec les services de l'Etat et des collectivités territoriales, aient invité depuis plusieurs années les intéressés à rechercher une solution de relogement adaptée à leur situation financière, M. X et sa compagne n'ont déposé une demande de logement social que le 10 octobre 2005, soit quelques jours seulement avant l'intervention de l'expulsion et plusieurs mois après l'échec d'une tentative d'expulsion à laquelle a procédé l'huissier de justice le 16 mars 2005 ; que, compte tenu de l'ensemble de ces circonstances, en accordant le concours de la force publique pour procéder à l'expulsion de M. X et de Mme Y, le sous-préfet de Saint-Nazaire n'a pas commis de faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat ;
Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que, dans l'exécution matérielle de la décision d'expulsion, les gendarmes auraient agi dans des conditions inacceptables et traumatisantes pour les requérants et leurs enfants, alors pourtant qu'il résulte du rapport de gendarmerie dressé à l'issue de l'opération d'expulsion que M. X et sa compagne ont adopté lors de celle-ci une attitude insultante et diffamatoire envers l'officier ministériel ; que les gendarmes n'ont, ainsi, pas commis de faute lourde de nature à engager la responsabilité de l'Etat ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X et Mme Y ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal Administratif de Nantes a rejeté leur demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement, par application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, à l'avocat de M. X et Mme Y de la somme demandée au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. X et de Mme Y est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. François X, à Mme Marie-Noëlle Y et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.
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N° 09NT02117
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