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21/10/2010 | FRANCE | N°10NT00587

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 21 octobre 2010, 10NT00587


Vu la requête, enregistrée le 22 mars 2010, présentée pour Mme Arzu X épouse Y, demeurant ..., par Me Renard, avocat au barreau de Nantes ; Mme Y demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 09-3756 en date du 17 septembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 juillet 2008 du préfet de la Loire-Atlantique portant rejet de sa demande de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ;

2°) d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet d

e la Loire-Atlantique de lui délivrer un titre de séjour portant la mention vie privée...

Vu la requête, enregistrée le 22 mars 2010, présentée pour Mme Arzu X épouse Y, demeurant ..., par Me Renard, avocat au barreau de Nantes ; Mme Y demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 09-3756 en date du 17 septembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 juillet 2008 du préfet de la Loire-Atlantique portant rejet de sa demande de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ;

2°) d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique de lui délivrer un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale ou, à défaut, de réexaminer sa situation aux fins notamment de délivrance d'un titre de séjour, et ce dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, le tout sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 74 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle, moyennant la renonciation de celui-ci à percevoir la contribution versée par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le pacte international relatif aux droits civils et politiques, ouvert à la signature à New York le 19 décembre 1966 ;

Vu la convention internationale du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, modifiée, relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 septembre 2010 :

- le rapport de M. Christien, président assesseur ;

- les conclusions de Mme Specht, rapporteur public ;

- et les observations de Me Allard, substituant Me Renard, avocat de Mme X épouse Y ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté préfectoral du 27 mai 2009 :

Considérant, en premier lieu, que l'arrêté du préfet de la Loire-Atlantique du 27 mai 2009, en tant qu'il refuse de délivrer un titre de séjour à Mme Y, de nationalité azérie, comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et comporte en particulier, contrairement à ce que soutient la requérante, des éléments suffisants de sa biographie ; qu'il est dès lors régulièrement motivé au regard des exigences posées par la loi susvisée du 11 juillet 1979 ; qu'en vertu du I. de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de la loi n° 2007-1631 du 20 novembre 2007, l'obligation de quitter le territoire français dont le préfet a assorti le refus de séjour litigieux n'avait pas à faire l'objet d'une motivation ; que si Mme Y soutient que cette dispense de motivation est, en violation de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales comme de l'article 26 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, constitutive d'une discrimination illégale, elle ne précise pas quel droit ou liberté reconnus dans la même convention ni quel droit énuméré par ce Pacte seraient concernés ; qu'elle n'est, par suite, pas fondée à soutenir que les dispositions susmentionnées de l'article L. 511-1 sont incompatibles avec les stipulations desdits articles ; qu'enfin, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté en tant qu'il porte fixation du pays de renvoi manque en fait ;

Considérant, en deuxième lieu, que, contrairement aux affirmations de la requérante, il ressort des pièces du dossier que le préfet a procédé à un examen de sa situation personnelle, notamment au regard des stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que l'erreur matérielle commise sur le prénom de la requérante est sans incidence sur la légalité de l'arrêté contesté ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant que Mme Y, entrée irrégulièrement en France en juin 2008, fait valoir qu'elle vit sur le territoire national avec son époux et son enfant, né en février 2007, qu'elle s'est intégrée dans la société française, notamment en développant un réseau dense de relations amicales et en participant aux activités et aux formations proposées par le centre d'accueil des demandeurs d'asile ; que, toutefois il ressort des pièces du dossier que son époux est également en situation irrégulière et fait l'objet d'un refus de séjour, assorti d'une obligation de quitter le territoire français ; qu'il n'est pas établi que sa vie familiale ne pourrait pas se poursuivre, avec son époux, dans son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à l'âge de 20 ans ; que, par suite, compte tenu des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions de séjour de l'intéressée en France, l'arrêté litigieux du 27 mai 2009 n'a pas porté au droit de la requérante au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'ainsi, le préfet de la Loire-Atlantique n'a méconnu ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il n'a pas davantage commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision de refus de séjour sur la situation personnelle de l'intéressée ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

Considérant que la circonstance que l'enfant de Mme Y soit scolarisé en France ne suffit pas à établir que son intérêt supérieur n'a pas été pris en compte dans la décision du préfet de la Loire-Atlantique ; que l'époux de Mme Y, de même nationalité, étant par ailleurs en situation irrégulière et faisant également l'objet d'un arrêté portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire, rien ne s'oppose à ce que les deux parents et leur fils mineur reconstituent leur cellule familiale dans un autre pays ; que, par suite, le moyen tiré de la violation de l'article 3-1 de la convention des droits de l'enfant susvisée doit être écarté ;

Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'étranger qui est obligé de quitter le territoire français (...) est éloigné : 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ; que ledit article 3 stipule que : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ;

Considérant que Mme Y dont la demande de reconnaissance du statut de réfugié auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a été rejetée par une décision en date du 16 octobre 2008, confirmée par la décision de la Cour nationale du droit d'asile le 10 avril 2009, soutient qu'elle serait exposée à des risques de traitements inhumains et dégradants en cas de retour dans son pays d'origine, en raison des activités politiques de son mari qui lui ont valu, avec son enfant, d'être brutalisée à son domicile par les forces de police locales lorsque son époux était incarcéré ; que, toutefois, les témoignages produits par la requérante ne sont pas de nature à établir que sa vie ou celle de son fils sont menacées ou qu'ils encourent personnellement les risques visés par l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans leur pays d'origine ; que par suite, en prenant la décision fixant le pays de destination, le préfet de la Loire-Atlantique, dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il se serait estimé lié par les appréciations portées par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile et ne se serait pas livré à un examen particulier de la situation de Mme Y, n'a méconnu ni les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant ; que le préfet n'a pas davantage commis d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la décision sur la situation personnelle de Mme Y ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme Y n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de Mme Y, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Loire-Atlantique de lui délivrer un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale ou de procéder à un nouvel examen de sa situation à cette fin dans le délai d'un mois sous astreinte de 100 euros par jour de retard doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme Y, bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, demande de verser à son avocat au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme X épouse Y est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Arzu X épouse Y et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire. Une copie sera transmise au préfet de la Loire-Atlantique.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 10NT00587
Date de la décision : 21/10/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MASSIAS
Rapporteur ?: M. Robert CHRISTIEN
Rapporteur public ?: Mme SPECHT
Avocat(s) : RENARD ; RENARD ; RENARD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2010-10-21;10nt00587 ?
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