La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/06/2010 | FRANCE | N°08NT01807

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 28 juin 2010, 08NT01807


Vu, I, sous le n° 08NT01807, la requête enregistrée le 16 juillet 2008, présentée pour M. Daniel X, demeurant ..., par Me Planchat, avocat au barreau de Paris ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 05-5107 du 22 mai 2008 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à la restitution de la taxe sur la valeur ajoutée qu'il a versée au titre de la période allant du 1er janvier 2002 au 31 décembre 2004 ;

2°) de lui accorder la restitution demandée ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 3 000 euros sur

le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrat...

Vu, I, sous le n° 08NT01807, la requête enregistrée le 16 juillet 2008, présentée pour M. Daniel X, demeurant ..., par Me Planchat, avocat au barreau de Paris ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 05-5107 du 22 mai 2008 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à la restitution de la taxe sur la valeur ajoutée qu'il a versée au titre de la période allant du 1er janvier 2002 au 31 décembre 2004 ;

2°) de lui accorder la restitution demandée ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu, II, sous le n° 09NT01178, la requête enregistrée le 15 mai 2009, présentée pour M. Daniel X, demeurant ..., par Me Planchat, avocat au barreau de Paris ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 08-3179 du 12 mars 2009 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à la restitution de la taxe sur la valeur ajoutée qu'il a versée au titre de la période allant du 1er janvier 1996 au 31 décembre 2004 ;

2°) de lui accorder la restitution demandée ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la sixième directive n° 77/388/CEE du Conseil du 17 mai 1977 ;

Vu la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé ;

Vu les décrets du 25 mars 2007 n°s 2007-435 et 2007-437 relatifs aux actes et conditions d'exercice de l'ostéopathie, et à la formation des ostéopathes et à l'agrément des établissements de formation ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 mai 2010 :

- le rapport de Mlle Wunderlich, premier conseiller,

- les conclusions de M. Hervouet, rapporteur public,

- et les observations de Me Planchat, avocat de M. X ;

Après avoir pris connaissance des notes en délibéré, enregistrées les 3 et 18 mai 2010 et 8 juin 2010, respectivement présentées pour M. X et par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat ;

Considérant que les deux requêtes susvisées concernent le même contribuable et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Considérant que M. X, titulaire d'un diplôme de masseur kinésithérapeute, a indiqué, dans les déclarations qu'il a remises à l'administration fiscale, avoir accompli des actes passibles de la taxe sur la valeur ajoutée qu'il a qualifiés d'ostéopathie ; qu'après avoir spontanément acquitté les droits correspondants, M. X a déposé, les 11 décembre 2004 et 11 septembre 2007, des réclamations tendant à en obtenir la restitution, pour un montant total de 158 710,14 euros, qui ont été rejetées par l'administration ;

Considérant que M. X, qui ne soutient pas que les actes en litige étaient au nombre de ceux que les masseurs kinésithérapeutes sont régulièrement habilités à dispenser, invoque le principe communautaire de neutralité fiscale pour soutenir que, dès lors qu'il a suivi une formation lui ayant permis d'acquérir une compétence en ostéopathie au moins équivalente à celle acquise dans cette discipline par les médecins, il était en droit de bénéficier, au même titre que ces derniers, de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée à raison des actes qu'il a dispensés ;

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 13, A, paragraphe 1 de la sixième directive du Conseil du 17 mai 1977 en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires : Sans préjudice d'autres dispositions communautaires, les Etats membres exonèrent, dans les conditions qu'ils fixent en vue d'assurer l'application correcte et simple des exonérations prévues ci-dessous et de prévenir toute fraude, évasion et abus éventuels : / (...) c) les prestations de soins à la personne effectuées dans le cadre de l'exercice des professions médicales et paramédicales telles qu'elles sont définies par l'Etat membre concerné (...) ; qu'en vertu du 1° du 4 de l'article 261 du code général des impôts, dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de l'article 8 de la loi n° 2007-1824 du 25 décembre 2007, sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée : Les soins dispensés aux personnes par les membres des professions médicales et paramédicales réglementées (...) ; qu'en limitant l'exonération qu'elles prévoient aux soins dispensés par les membres des professions médicales et paramédicales soumises à réglementation, ces dispositions ne méconnaissent pas l'objectif poursuivi par l'article 13, A, paragraphe 1, sous c) de la sixième directive précité, qui est de garantir que l'exonération s'applique uniquement aux prestations de soins à la personne fournies par des prestataires possédant les qualifications professionnelles requises ; qu'en effet, la directive renvoie à la réglementation interne des Etats membres la définition de la notion de professions paramédicales, des qualifications requises pour exercer ces professions et des activités spécifiques de soins à la personne qui relèvent de telles professions ; que toutefois, ainsi qu'il résulte de l'arrêt rendu le 27 avril 2006 par la Cour de justice des Communautés européennes dans les affaires C-443/04 et C-444/04, l'exclusion d'une profession ou d'une activité spécifique de soins à la personne de la définition des professions paramédicales retenue par la réglementation nationale aux fins de l'exonération de la taxe sur la valeur ajoutée prévue à l'article 13, A, paragraphe 1, sous c) de la sixième directive serait contraire au principe de neutralité fiscale inhérent au système commun de taxe sur la valeur ajoutée s'il pouvait être démontré que les personnes exerçant cette profession ou activité disposent, pour la fourniture de telles prestations de soins, de qualifications professionnelles aptes à assurer à ces prestations un niveau de qualité équivalent à celles fournies par des personnes bénéficiant, en vertu de la réglementation nationale, de l'exonération ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. Il en est de même lorsqu'une imposition a été établie d'après les bases indiquées dans la déclaration souscrite par un contribuable ou d'après le contenu d'un acte présenté par lui à la formalité de l'enregistrement ; qu'il résulte de ces dispositions qu'un contribuable ne peut obtenir la restitution de droits de taxe sur la valeur ajoutée qu'il a déclarés et spontanément acquittés conformément à ses déclarations qu'à la condition d'en établir le mal fondé ;

Considérant, en premier lieu, que pour établir que les actes d'ostéopathie qu'il a accomplis au cours de la période d'imposition en litige pouvaient être regardés comme de qualité équivalente à ceux dispensés par des médecins bénéficiant, en vertu de la réglementation en vigueur, de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée, M. X se prévaut de l'enseignement de 1 980 heures réparties sur six ans qu'il a suivi à l'école d'ostéopathie de Genève, du diplôme d'ostéopathie qui lui a été décerné le 1er juin 2000 par l'association française d'ostéopathie, et, surtout, de ce qu'il a été autorisé, à l'issue de la procédure instituée par le décret susvisé n° 2007-435 du 25 mars 2007 au profit des praticiens en exercice à la date de sa publication justifiant de certaines conditions de formation ou attestant d'une expérience professionnelle dans le domaine de l'ostéopathie d'au moins cinq années consécutives et continues au cours des huit dernières années, à user du titre d'ostéopathe par décision du préfet de la région Pays de la Loire en date du 27 février 2008 ;

Considérant, toutefois, qu'il ressort des dispositions de l'article 3 du décret susmentionné du 25 mars 2007 interdisant ou limitant l'accomplissement de certains actes par un praticien justifiant du titre d'ostéopathe que la reconnaissance de ses qualifications professionnelles au regard de sa formation et de son expérience dont le redevable est en droit de faire état ne l'autorise pas à dispenser l'ensemble des prestations d'ostéopathie dispensées par un médecin ; que, par suite, et dès lors qu'il n'établit pas ni même n'allègue qu'au cours de la période en litige il se serait abstenu d'accomplir des actes d'ostéopathie interdits aux praticiens qui n'ont pas la qualité de médecin, M. X n'est pas fondé à soutenir que l'exclusion de son activité du bénéfice de l'exonération prévue au 1° du 4 de l'article 261 précité du code général des impôts aurait méconnu le principe de neutralité fiscale ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation ; qu'en vertu des stipulations de l'article premier du premier protocole additionnel à cette convention : Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens ;

Considérant qu'une distinction entre des personnes placées dans une situation analogue est discriminatoire, au sens des stipulations précitées de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, si elle n'est pas assortie de justifications objectives et raisonnables, c'est-à-dire si elle ne poursuit pas un objectif d'utilité publique, ou si elle n'est pas fondée sur des critères rationnels en rapport avec les buts des dispositions établissant cette distinction ;

Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 261 du code général des impôts qu'un ostéopathe ayant été assujetti à des compléments de taxe sur la valeur ajoutée est fondé à soutenir qu'il doit en être déchargé dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'il aurait accompli des actes qui n'étaient pas d'une qualité équivalente à ceux dispensés par des médecins ; qu'à l'inverse, il résulte des dispositions précitées du second alinéa de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales, combinées avec celles de l'article 261 du code général des impôts, qu'un ostéopathe ayant déclaré et spontanément acquitté des droits de taxe sur la valeur ajoutée n'est fondé à soutenir que ces droits doivent lui être restitués qu'à la condition d'apporter la preuve du caractère équivalent de la qualité des actes dispensés ; que M. X soutient que la différence de traitement ainsi instituée par les dispositions de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales entre les ostéopathes ayant spontanément déclaré être redevables de la taxe sur la valeur ajoutée et ceux ne l'ayant pas fait, serait discriminatoire ;

Considérant que les dispositions du second alinéa de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales ont pour objet d'assurer la sincérité et l'exactitude des déclarations des contribuables ; que la différence de situation existant entre les contribuables ayant spontanément déclaré être redevables de la taxe sur la valeur ajoutée et ceux ne l'ayant pas fait, justifie, eu égard à cet objet, la différence de traitement susmentionnée ; qu'il suit de là que M. X n'est pas fondé à soutenir que les dispositions du second alinéa de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales, fondant le refus qui lui a été opposé de lui restituer les droits de taxe sur la valeur ajoutée qu'il a déclarés et spontanément acquittés au titre de la période courant du 1er janvier 1996 au 31 décembre 2004, seraient incompatibles avec les stipulations précitées de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par le ministre, que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nantes a rejeté ses demandes ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. X demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les requêtes de M. X sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Daniel X et au ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat.

''

''

''

''

N°s 08NT01807,... 2

1


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 08NT01807
Date de la décision : 28/06/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. LEMAI
Rapporteur ?: Mme Anne-Catherine WUNDERLICH
Rapporteur public ?: M. HERVOUET
Avocat(s) : PLANCHAT ; PLANCHAT ; PLANCHAT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2010-06-28;08nt01807 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award